Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



Ailleurs
Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary
Effacer l'historique
Ema
Enorme
La daronne
Lux Æterna
Peninsula
Petit pays
Rocks
Tenet
Un pays qui se tient sage



J'ai perdu mon corps
Les misérables
The Irishman
Marriage Story
Les filles du Docteur March
L'extraordinaire voyage de Marona
1917
Jojo Rabbit
L'odyssée de Choum
La dernière vie de Simon
Notre-Dame du Nil
Uncut Gems
Un divan à Tunis
Le cas Richard Jewell
Dark Waters
La communion



Les deux papes
Les siffleurs
Les enfants du temps
Je ne rêve que de vous
La Llorana
Scandale
Bad Boys For Life
Cuban Network
La Voie de la justice
Les traducteurs
Revenir
Un jour si blanc
Birds of Prey et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn
La fille au bracelet
Jinpa, un conte tibétain
L'appel de la forêt
Lettre à Franco
Wet Season
Judy
Lara Jenkins
En avant
De Gaulle






 (c) Ecran Noir 96 - 24


Rezo films  



Donnez votre avis...


Nombre de votes : 39

 
Triple agent


France / 2004

17.03.04
 



L'ESPION QUI VENAIT D'ON NE SAIT Où





"- Je suis tellement heureuse. Moi qui craignais que tu sois nazi. "

Après L’Anglaise et le Duc, Eric Rohmer continue de se pencher sur l’histoire. Pour son nouvel opus, il abandonne la Révolution Française pour nous plonger dans le chaos international qui règne en Europe à la veille de la seconde guerre mondiale. Triple agent est un film d’espionnage. Mais pas n’importe lequel puisque c’est un film d’espionnage par Eric Rohmer. Inutile de dire que si l’on cherche de l’action véritable et tout ce qui fait le caractère classique du film de genre, mieux vaut passer son chemin. Ici, point d’actes. Tout passe par les mots et le film entier fait l’économie des scènes d’action. Ce qui est véritablement une gageure si l’on y pense. Parvenir à tenir le spectateur en haleine avec des dialogues, au détriment de toute mise en image des évènements clefs, n’est pas chose aisée. Pourtant, Rohmer y parvient avec des discours finement travaillés, qui relèvent presque, et ce n’est pas un hasard si l’écrivain est cité dans le film, de Machiavel.
Nul doute, la patte rohmérienne est bel et bien là. Même si les manigances ne sont plus amoureuses mais politiques, on est en plein raffinement en matière de stratégie et de discours. Pas de surprise, Rohmer n’a pas vieilli et les thèmes qui lui sont chers sont toujours là : « je fais croire que… », « s’il fait ceci, c’est que… ». On est toujours dans l’analyse de l’autre et de l’événement. Et là, accrochez-vous. Si les marivaudages verbaux sont aisés à suivre, en ce qui concerne les tribulations stratégiques et politiques d’un espion non identifié, c’est une autre paire de manches. Exercice difficile mais néanmoins fascinant. Tout comme le personnage de Fiodor qui joue avec les autres, Rohmer s’amuse avec nous, quitte à nous perdre de temps à autre (l’absence d’une maîtrise parfaite du contexte de l’époque peut rendre les choses quelque peu sibyllines parfois).
Le style rohmérien se retrouve également dans la mise en scène. Comme si les mots seuls importaient, le réalisateur cultive un dénuement de tout autre artifice. La caméra du cinéaste se concentre sur les personnages et leurs paroles à défaut de tout autre élément visuel. D’une manière moins radicale, on est assez proche du procédé utilisé dans L’Anglaise et le Duc (des décors intérieurs et extérieurs peints) et, finalement, du théâtre. L’absence d’éléments réels (et de leur mise en valeur comme partie intégrante du film) permet de mettre l’accent sur ce qui est dit. Et, comme toujours chez le réalisateur, le jeu des comédiens participent de ce processus en présentant quelque chose qui touche à la déréalisation. Le sentiment d’étrangeté que nous éprouvons d’abord nous conduit à nous plonger dans le signifié en faisant une quasi abstraction du signifiant. Car encore et toujours, les phrases sont à écouter avec une vive attention chez Eric Rohmer.
Un mot enfin sur les comédiens. Outre le plaisir de retrouver un Emmanuel Salinger vraiment parfait et une Amanda Langlet-Pauline adulte, on ne peut être qu’ébloui par les deux personnages principaux. Serge Renko parvient à restituer une incroyable ambiguïté malicieuse et Katerina Didaskalou véhicule une grâce inénarrable.
 
Laurence

 
 
 
 

haut