Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Domino


USA / 2005

23.11.05
 








LA MORT EN "PRIME"

"Pourquoi une pauvre petite chose comme toi voudrait-elle devenir un chasseur de prime?
- J'ai envie de m'éclater..."


Vingt ans. Vingt ans et autant de kilomètres de filtres oranges ; c’est ce qu’il aura fallu à Tony Scott pour se découvrir enfin cinéaste. L’as de la gaudriole filmique, du sunset troublé par l’échappement des moteurs d’avions ou des voitures de course, du montage à la « vas-y comme je te pousse » et du clip à rallonge découvre finalement que tout ceci peut-être aussi un langage. Sans blague ? « Domino », c’est tout ce qu’on a pu détester chez Tony Scott, mais poussé à l’extrême. Et de cette façon ce chaos, attaché pour une fois à un récit au destin chaotique, trouve très logiquement l’équilibre entre le fond et la forme qui détermine un auteur. Voilà déjà quelques temps qu’il s’en permettait l’esquisse, au détour d’un « Ennemi d’état » ou d’un « Man on fire », tout en y freinant visiblement l’audace pour se contenter du vulgaire, craignant sans doute et à raison qu’Hollywood ne soit pas prête. C’est donc au pays du camembert que le frère d’un des cinéastes les plus rentables des studios ricains vient chercher et trouver la liberté de transformer son mauvais goût en potentialité artistique. Bien lui en a fait. Samuel Hadida n’est pas un philanthrope mais pour le moins un producteur avisé et fidèle. Il n’est dès lors pas de hasard pour que « Domino » comporte maintes similitudes avec la première collaboration des deux hommes sur « True Romane ». En filmant, en 1993, le premier scénario de Quentin Tarantino, Scott semble en avoir visiblement assimilé les codes somme toute accessibles à un minimum de talent : dialogues en contrepoint, situations décalées à l’absurde, casting de gueules sur le retour (et, en premier lieu, celui, éternel, de Mickey Rourke) et récit éclaté : à ceci prêt qu’il en défonce et en franchit les portes ouvertes jusqu’à l’épuisement comme le fit autrefois Oliver Stone avec « Tueurs nés », autre scénario du papa de « Jackie Brown » dont on relèvera, là aussi, les indiscutables points communs avec « Domino ». Mais Tony Scott poursuit là où Tarantino s’interrompt, au-delà de l’anecdotique, pour défier le pire et parfois le transformer en meilleur.
Ce passage à la maturité du filmeur de « Top Gun » risque de mettre à mal le spectateur occasionnel comme le défendeur d’un « cinéma pur » : les frères Scott sont « nés » et ont grandi dans l’iconographie publicitaire des années 70 et leur cinéma, bien au contraire, ne s’en est jamais défendu. Mais si Ridley a su rapidement, notamment à travers ses sujets, le plier au cahier des charges hollywoodien, à contrario Tony pliait jusqu’alors ses sujets – par ailleurs sans grand intérêt - à sa forme. Ici, c’est à un néo-langage que nous sommes confrontés, noyant l’ensemble des médias visuels dans un flux unique, dévastateur pour l’œil et l’esprit.
Structurellement, « Domino » est un récit à la « Citizen Kane », un puzzle en formation, à la différence que c’est Rosebud qui parle et se souvient. Domino est une femme en quête éternelle d’elle-même et ses réminiscences, au cours de son interrogatoire, sont des flashes plus que de réels souvenirs. D’où la liberté tout à fait justifiée de Scott d’en faire des masses, illustrant à sa façon peut-être l’adage qui veut que l’on revoie en accéléré le film de sa vie à l’heure de la faucheuse.
D’une violence graphique et de situation sans détour, il demeure néanmoins un point obscur sur lequel il n’est pas interdit de s’interroger : la vraie Domino Harvey, dont l’œuvre ici est plus ou moins un biopic, était lesbienne et sous l’emprise de drogues dures. A nul instant le film n’illustre ces aspects sinon importants, tout au moins intéressants quant à appréhender un personnage surgit du réel. Est-ce à dire, comme le fit un jour Jack Nicholson, que « A Hollywood, quand on coupe un sein, on montre. Et quand on montre un sein, on coupe » ?…
 
Arnaud

 
 
 
 

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