Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Stupeur et tremblements


France / 2003

12.03.03
 



RIRES ET CHÂTIMENTS





"- Ce pragmatisme odieux est digne d'un occidental."

Au sein de ce magazine, il est convenu depuis des années qu'un film et un livre sont des moyens artistiques différents. Par conséquent, nous ne critiquons pas une adaptation en fonction de sa fidélité ou son parti pris. Le film existe en lui-même, et indépendamment du livre. Pour tous les fans de Mamzelle Nothomb, le film ne sera qu'une illustration (jouissive à certains moments) d'un livre qui, à date, est l'un des trois meilleures de l'auteur belge. Un plaisir en images et non plus avec de simples mots.
Pour tous les autres, les néophytes, les curieux, les nippophiles, ou encore les cinéphiles, Stupeur et Tremblements demeurera un film étrange, hybride, à l'image de cette belge qui se croit japonaise. On comprend ce qui a séduit Corneau dans ce projet : l'initiation étrange d'une personne solitaire, le défi de la rencontre avec l'autre, l'attirance de l'ailleurs... Mais il a clairement eu de la difficulté à traduire en images le style de Nothomb, utilisant à l'excès la voix off et finalement les mots de l'auteur.
Enchaîné au livre, ne voulant pas donné son propre ton (à de rares exceptions comme la musique de Bach, les survols de Tokyo), le cinéaste nous récite une histoire, cocasse et intriguante, en faisant confiance à son casting et ses monologues/dialogues parfois hilarants.
Les acteurs ont tous la tête de l'emploi. Et le ton juste. Il les filme à la perfection : de la beauté vénéneuse de Kaori Tsuji à l'ogre répugnant qu'est Bison Katayama. Sylvie Testud, même si elle n'a pas le regard transperçant et vertigineux de Nothomb, joue son personnage avec une légèreté qu'on ne lui connaissait pas, exceptionnelle dans l'auto-dérision. Il faut la voir se donner en spectacle pour changer une page de calendrier!
Dans ce manuel pour les nuls de tout ce qu'il ne faut pas faire dans une société japonaise, Corneau s'amuse à éplucher chacune des absurdités du système, jusqu'à son paroxysme. Il démontre mathématiquement la spirale infernale dans laquelle une occidentale se laisse broyer par cette machine. Car la petite Amélie est bien perdue : ses réflexes occidentaux lui font comprendre le non-sens de son (in)action, tandis que sa volonté d'intégration lui permet de se laisse aller dans une forme d'acceptation masochiste. Le film est hélas trop lisse, trop propre, et trop littéraire pour nous emporter avec lui dans ce voyage si particulier.
Le Corneau prend de l'intérêt dans la relation entre Amélie et Fubuki Mori. S&T décrit ce binôme avec justesse, portée autant par la fascination que par l'incompréhension. Cet amour contrarié n'est rien d'autre que la traduction du fossé entre le Japon insulaire et l'Occident ouvert. Après tout Amélie n'était amoureuse que de l'image d'un pays (une imagerie zen et harmonieuse). Le visage de Fubuki est une personnification de ce souvenir. Ce qui explique toute sa soumission et son désir de réagir comme une japonaise. Là, le film prend toute sa dimension métaphorique. Jusqu'à reprendre un extrait de Furyo (qui à lui seul justifie une version cinématographique de cette histoire, comme un lien interactif avec le 7ème art). Ce qui n'était que des mots sur du papier devient alors un morceau de film montrant toute la perversité de la relation entre les deux femmes.
Il n'y a plus de stupeur ni aucun tremblements. Juste le yin et le yan qui se réunissent pour ne former qu'un tout.
Mais il est loin le temps où Corneau se laissait davantage porter par sa caméra au détour d'un train traversant l'Inde. Ici le film dure le temps de la lecture d'un livre. Et traîne parfois en langueur. Cette assoupissement en cours de route et cette distanciation que l'on éprouve à regarder ce microcosme à travers la vitre nous empêche d'être continuellement captiver par ce fabuleux destin d'Amélie-san qui se prenait pour Dieu et qui devint dame-pipi. Même la défenestration ne suffit pas à ressentir une bouffée de liberté. D'ailleurs étouffait-on? Très fidèlement adapté, il aurait peut-être mieux valu juste s'en inspiré... Le drame n'est pas assez sérieux pour qu'on y prête attention.
 
vincy

 
 
 
 

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