Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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In the cut


USA / 2003

17.12.03
 



MEG À BITES





"- Tous les flics sont homophobes. - Vous êtes féministe ?"

Jane Campion nous avait conduit dans la chaleur du Maroc, la Nouvelle-Zélande humide ou encore l’Angleterre coincée. Nous abordons finalement un New York moite, peu glamour, entre déchets, tags, ordures et prostituées. Les bas fonds avec ses trottoirs abîmés et ses grillages laids. Car cette visite de l’Amérique par Campion s’accompagne d’un plongeon dans le subconscient pas forcément reluisant d’une Américaine vivant mal ses fantasmes sexuels dans un monde politiquement correct. Pour preuve, elle écrit en argot et enseigne l’anglais, schizophrénie habile d’une quadra prête à braver tous les dangers, à transgresser tous les tabous pour comprendre à quel point elle fut leurrée par une vision de l’amour en forme de conte de fée.
Jusque-là, nous suivons Campion dans cette odyssée intérieure. Elle a toujours confronté des femmes fortes et fragiles à leur destin, les envoyant au K.O. par goût du désir. Hunter , Kidman, Winslet avaient été en quête de leur identité et à la recherche de l’âme s¦ur, toujours un étranger, l’être opposé. Ici il est incarné par le rustre Ruffalo, en détective new yorkais grossier mais grand pro du cunnilingus. Cela aide pour conquérir (et faire succomber) la belle. Cette descente aux enfers aurait dû nous donner le vertige. Pas faute d’avoir appelé Scorsese (Taxi Driver, After Hours) et Hitchock à la rescousse en référence (Sueurs froides notamment). Mais Campion n’insuffle aucun mystère, aucun soufre, aucune atmosphère. Son scénario se perd entre le suspens, vague prétexte pas assez soutenu pour nous angoisser, et le parcours psycho de la dame, trop appuyé pour ne pas nous lasser. De mots bizarres en symboles, de clichés cinématographiques en rebondissements attendus, la cinéaste ne sait pas par quel bout prendre son film. Tout y passe dans cet érotisme toc, du fétichisme au voyeurisme. Le comble est sans doute de nous refroidir avec des scènes censées être torrides. Nul brûlot.
Certes, Meg Ryan se dénude. So what ? Cet argument marketing n’a rien à voir avec l’intérêt d’un film ou d’une performance de comédien. Ryan nous épate d’ailleurs davantage en rendant crédible son personnage. De fait, nous oublions la rigolote pour nous concentrer sur cette femme désemparée par son flirt avec le diable. Longue dépression dans un labyrinthe entre chien et loup où l’innocence n’existe jamais.
Pourtant Campion perd le fil (de Ryan). Tendu nerveusement, son film s’étire et nous ennuie. Elle offre à son actrice, comme d’habitude, un rôle à contre-emploi. Désinhibée et déshabillée (spectacle assez quelconque), la star donne tout ce qu’elle a pour nous maintenir éveillé lorsque le scénario cherche sa voie, entre cauchemar et fantasme, entre polar et poésie. En regardant trop le cinéma patrimonial, le film de Campion nous empêche d’être surpris : le personnage de Jennifer Jason Leigh est maudit et nous le savons dès le début, par exemple. Il y a trois coupables, idéal, mais il faut regarder ailleurs pour connaître la vérité : classique. Comme on dit dans le film : "Il y a plein de choses à jeter à la poubelle. Et en même temps il faut avoir une bonne mémoire." De ce sang qui coule, de ce sexe qui saoule, de cette star souillée, que restera-t-il ? Une histoire à couper au couteau ? Une histoire de fente ("cut" en anglais) ? Cette errance érotique aurait mérité un rythme plus frénétique et un montage plus serré. Un final cut plus inspiré.
 
Vincy

 
 
 
 

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