Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Le cercle (Der Kreis)


/ 2014

04.03.2015
 



MENEURS DE REVUE





Le Cercle, Teddy Award du meilleur documentaire en 2014 à Berlin, fascine plus qu'il ne déçoit. Bien sûr, à mélanger docu et fiction, on n'explore pas complètement le sujet. Au final, on aurait aimé en savoir plus sur cette préhistoire du militantisme gay. Mais l'émotion est là, bien présente, tant l'histoire d'amour centrale est touchante. Le Cercle c’est avant tout une association homosexuelle historique de Zurich en Suisse. Sa revue, créée à l’époque où l’homosexualité était une maladie, une déviance, un péché que l’on cachait dans des endroits interlopes, est née dans les années 30. Si en Suisse, elle n'est pas un crime, cela reste juste un fait toléré, et la revue est censurée (sauf en Anglais, langue que les censeurs dne comprennent pas). Elle a été la seule publication gay durant la Guerre et a même survécu au nazisme. Son tirage est multiplié par 9 durant les années 50 quand elle avait un certain monopole mondial, avant de décliner, concurrencer par l’invasion de magazines pornographiques beaucoup moins intellos et chastes publiés dans des pays qui avaient libéréré les moeurs avant 1968. Après 35 ans d’existence, la revue disparaît. Et pourtant, il y a quelques survivants, témoins de cette époque. Ils sont le coeur du récit, interprétés par des comédiens pour la retransposition dans ces années tumultueuses, en chair et en os, vieillis forcément, pour transmettre leurs souvenirs d'antan.

Le film passionne, à la manière des Invisibles de Sébastien Lifshitz, avec l’interview de deux hommes, liés à ce Cercle, qui tombèrent amoureux à cette époque. Les voir se marier à la fin, chose inespérée pour ce couple qui aura tenu 55 ans ensemble malgré les sévices de la police, les préjugés de la société, les violences homophobes, c'est presque un miracle. Une histoire vraie pourtant. Leur témoignage est riche d’enseignements, ravive des souvenirs enfouis, et rappelle à quel point le combat fut long et éprouvant. Choix contestable: le réalisateur Stefan Haupt s’oblige à illustrer l’histoire du Cercle avec une fiction dont la reconstitution de l’époque est trop académique pour nous transcender. Il y a, heureusement, le personnage de Robi, ce jeune garçon qui aime chanter avec des robes glamour que sa mère lui fabrique à la maison. Dans sa manière d'assumer son orientation sexuelle, dans sa passion fougueuse, dans sa rêverie romantique, il émeut. C'est lui qui ouvre le cercle, en chantant "leur" chanson". C'est aussi lui qui le fermera. "Etrange, je suis un être étrange". Cela en dit long sur la manière de vivre sa différence. Certains en mouraient, à côtoyer des petites frappes, voyous ou prostitués, d'autres se suicidaient. C'est toujours d'actualité.

Car peu importe que le film ne soit pas un chef d'oeuvre, peu importe qu'il soit inégal, peu importe qu'il nous frustre entre un romanesque morcelé et un portrait documentaire inachevé, il en reste le propos, même s’il manque une véritable dimension journalistique sur le sujet. La Suisse est un cas à part : l’homosexualité n’était pas un problème dans le pays, qui fut l’un des premiers à voter le mariage pour tous. Rien se sulfureux ici. Mais il y eut une période noire, une crise qui chamboula tout, avec un peu d'avance, les prémices de ce qui se passera plus tard à Londres, New York et San Francisco. Le Cercle montre avant tout comment les homosexuels se sont intégrés, émancipés, et finalement n’ont plus eu besoin de la revue communautariste. Comment l'époque a bouclé la boucle et a élargit le cercle aux yeux de tous... Si la fiction, assez toc, mais utile pour rappeler le carcan de la société post-guerre (il lui manque des enjeux dramaturgiques), la vie de ce couple et leur mémoire mettent en relief les périls traversés et les écueils évités. Et c'est bouleversant. Le documentaire atteint alors une sincérité, une authenticité dont le sommet est l’issue la plus heureuse possible : un mariage de deux vieilles personnes, qui sont entrés dans le Cercle pour tracer leur propre ligne, pas forcément droite. C’est ce que rappelle le documentaire : les combats sont parfois de longue haleine, mais il ne faut jamais désespérer. Mieux, il ne faut pas hésiter à combattre, même dans un pays aussi tolérant et tranquille que la Suisse.
 
vincy

 
 
 
 

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