Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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L'Esquive


France / 2004

07.01.04
 



KIFFER ET PÉCHO





« Mais elle, elle l’allume, elle le chauffe, mais elle le kiffe pas. Si elle le kifferait, elle lui ferait pas subir tout ça. Il lui passe tout, c’est un truc de ouf… »

Authenticité, tel demeure désormais le mot d’ordre dés lors qu’il s’agit d’accorder la moindre parcelle de visibilité à la banlieue et à ses habitants des nouvelles générations françaises. La zone décrétée sinistrée par la partie gestionnaire ministérielle dépassée par les événements, a été laissée en liberté surveillée aux médias pressés et peu scrupuleux lorsqu’il s’agit de plancher sur l’audience. Le sensationnel aura tôt fait de chasser le naturel, au point où le fait divers finit par représenter un quotidien pas spécialement rose au demeurant. Du coup Abdel Kechiche a planté sa caméra au cœur d’une cité, entouré d’un tout jeune casting débutant, avec pour objectif de rétablir un certain respect de la réalité. Loin de Ma 6-T va crack-er, de Rai, à la teneur revendicative, mixant délinquance communautaire et insubordination civile, il s’agit ici, d’une façon plus médiatrice, voire fédératrice, de travailler sur l’inconscient de chacun pour en exorciser les clichés néfastes accumulés. Entendez par chacun, d’une part les autistes trop coupés de ce qui se trame dans la rue de n’importe quelle ville française de moindre importance pour se forger une opinion objective sur l’évolution culturelle de leur pays et de l’autre les habitants des fameux quartiers défavorisés en attente d’une réparation propre à réhabiliter leur image. Du coup la trame de L’Esquive ne débordera pas du cadre pour contenter tout le monde et ne trahir personne. Raisonnable, le réalisateur peut se vanter de sonner juste en contraignant littéralement son film à l’éthique du documentaire. L’éducation n’est pas idéalisée, cours de théâtre qui permet de se la jouer espoir Star Academy ou de tâter du plan drague ; pas plus que la routine extra scolaire n’est assombrie, père en prison, glandage généralisé commun à l’âge ingrat, petites combines et méchantes interpellations des forces de l’ordre sans conséquences majeures. L’essentiel est ailleurs, l’amour universel, le vrai, celui qui fait grandir. L’ambition du scénario en sera du coup relativement modeste, dépouillée de coups de théâtres marquants puisqu’elle ne dépassera pas le simple marivaudage adolescent, entre Rohmer en verlan et Le Miel et les Abeilles télévisuel. Certes pour leur fraîcheur et leur spontanéité, on préférera aux crétins d’AB Productions les jeunes banlieusards en verve. Peu évident de juger de la performance des interprètes novices confinés dans un ordinaire dont la véracité frôle l’autobiographique (Doillon avait mis la barre plus haut avec Le petit criminel), les ados n’ont plus qu’à improviser, à grand renfort de réparties assassines, dans un contexte familier tandis que la caméra se fait oublier comme dans tout bon reportage.
Captif de ses sujets, Abdel Kechiche distrait par ses bonnes intentions ne voit plus le temps passer, les bavardages se déroulent, interminables, inépuisables. Le film frôle les deux heures dédiées au banal. Il aurait fallu couper, monter, rendre l’ensemble plus enlevé. Mais pas question d’interrompre l’observation par peur de trahir l’instant. On est ici dans un cinéma vérité dépouillé de tout artifice (images brutes et sans fard) qui tente de donner le change à une télé qui s’est dite réalité pour mieux la détourner et qui a perdu sa mission initiale de témoignage, de relais de proximité. De là à savoir ce que gagne le septième art français par la grâce de cet acharnement rationaliste si prisé au temps où la vague était encore nouvelle. Artistiquement pas grand-chose. Le choix se réduit. A droite la France noyée dans le formol des Choristes, à gauche le pris sur le vif minimaliste du moment tourné en DV. Le talent sourit aux ambitieux et l’alternative sera une fois de plus américaine. La contemplation ethnologique à l’application étriquée de Kechiche ne gravera de sûr (même avec les César?) pas le même souvenir que ceux laissés par d’autres prismes tout aussi révélateurs, tournés également vers la jeunesse ignorée, mais d’une manière oh combien plus pertinents dans son affirmation cinématographique. Gus Van Sant, Larry Clark ou Gregg Araki avec sa dernière œuvre transgressive Mysterious Skin sont définitivement loin devant…
 
petsss

 
 
 
 

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