Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24


  

Production : Kaleidoscope Films
Distribution : Gemini Films
Réalisation : Milton Moses Ginsberg
Scénario : Milton Moses Ginsberg
Montage : Lawrence Tanenbaum
Photo : Jack Yager
Format : Noir & Blanc / 35mm / 1.33 / Mono
Décors : Milton Moses Ginsberg
Son : Thomas M. Daniel
Musique : Francis Xavier, Jefferson Airplane
Durée : 111 mn
 

Darlene Cotton : Sue
Julie Garfiel : Julie
Megan McCormick : Joy
Viveca Lindfors : Monica
Sally Kirkland : Joann
Rip Torn : Joe
 

Site officiel
 
 
Coming Apart


USA / 1969

14.07.04
 

Peu apprécié par la critique en 1969, Coming Apart fut à l’époque classé X. Ainsi marginalisé, le film ne trouva pas son public. Il faudra attendre une programmation au MoMa (Muséum d’Art Moderne de New York), en 1998, pour qu’il soit reconnu comme une œuvre majeure de l’avant-garde américaine. Edité en DVD aux Etats-Unis voilà quatre ans, sa sortie grand écran ce 14 juillet prochain est une toute première en France.





Inspirations personnelles
Milton Moses Ginsberg avait 26 ans lorsqu’il mit en scène Coming Apart ; son unique long métrage, à ce jour. Passionnée de littérature, c’est aux travers du cinéma européen que le langage du réalisateur a puisé son inspiration : Resnais, Antonioni avec L’avventura,… Puis, outre Atlantique, « une autre révélation », se souvient le cinéaste : le réalisateur Jim McBride et son Journal de David Holzman (1967). « J’ai été très impressionné par cette idée de faire figurer la caméra dans le film, cela a été source d’inspiration pour ‘Coming Apart ‘ ». Sachez aussi que l’idée du plan unique est venue de Warhol. A cette époque, Ginsberg le croisait fréquemment chez Max’s Kansas City, un bar devenu célèbre. Le cinéaste s’est également beaucoup inspiré de son expérience de monteur ; notamment sa collaboration avec les frères Mayles (documentaristes, réalisateurs de Gimme Shelter sur la tournée des Rolling Stones). Une expérience très porteuse en matière de jeux sur les textures visuelles et renvoie au cinéma-vérité. Autre source de nouveauté : certains films pornographiques de l’époque comportant une vraie démarche cinématographique. « C’était une autre manière de faire du cinéma, une autre confrontation avec la réalité », explique le réalisateur. De quoi cerner toute l’étymologie du film d’un point de vue artistique.
Pour ce qui est de la matière même, c’est dans son propre vécu que Milton Moses Ginsberg a puisé son scénario, en réaction à une mauvaise expérience amoureuse. Confidences du réalisateur : « le sujet est en fin de compte très autobiographique. J’ai mis du temps à l’admettre mais aujourd’hui, avec le recul, cela me frappe. Quelques années auparavant, j’avais vécu une histoire difficile avec une femme. Nous nous sommes vus pendant trois ans, mais comme je ne parvenais pas à m’engager pleinement, elle a finit par épouser quelqu’un d’autre. Cela m’a rendu fou, surtout qu’elle et son mari vivaient dans le même quartier que moi, et fréquentaient les même endroits. Une fois, je me souviens avoir regardé par la fenêtre de mon appartement et les avoir vus, en bas, dans Madison Avenue, rire tous les deux, elle le doigt pointé vers mon étage. J’étais tellement hors de moi que j’ai déménagé pour m’installer dans le même immeuble qu’eux ! C’est devenu ‘Coming Apart’ ».

Explosions artistiques
Au casting du film, dans les principaux rôles : le Texan Rip Torn, Sally Kirkland et la Suédoise Viveca Lindfors, devenue l’égérie des studios Warner Bros dès son arrivée à Hollywood en 1946. Milton Moses Ginsberg lui vouait une admiration sans limite, depuis l’enfance. Il admirait aussi Kirkland, n’osant pas l’aborder alors qu’il la croisait régulièrement dans les rues du Greenwich Village. Son scénario en poche, le cinéaste proposa naturellement d’engager ces deux comédiennes. Le talent de Rip Torn allait faire le reste.
Recul sur sa propre expérience, concentration acérée, souci de réalisme : pour Ginsberg le tournage de Coming Apart ne fut pas chose facile. Les comédiens prirent le relais. « Mon obsession était d’être fidèle à la réalité. C’était assez douloureux parce que le film touchait à des choses très personnelles, et concernait des gens que je connaissais. Ma grande chance a été de travailler avec d’excellents acteurs qui se sont vraiment impliqués. Je trouve que Rip et Sally sont vraiment géniaux, et je ne dis pas ça pour me flatter en tant que metteur en scène. Ils ont apporté leurs passions, leurs âmes aux personnages ».
Contraintes du plan unique, mise en scène dynamique, situations très variées, dialogues et silences scrupuleusement écrits, direction d’acteurs quasi-perfectionniste : Coming Apart renvoie au cinéma-vérité, avec tout ce que cela comporte en situations inopinées, captées au gré du hasard. En opposition et pour ce faire, armé d’une impressionnante volonté d’exactitude, Ginsberg a minutieusement agencé son film. Priorité aux temps de respiration pour obtenir maints effets d’improvisation. Certains prises pouvaient durer jusqu’à dix minutes. Une réplique oubliée : le cinéaste re-filmait son plan jusqu’à concordance parfaite avec le scénario ; l’effet « caméra caché » en plan unique ne permettant évidemment pas de coupes intra-séquences. Certaines d’entre-elles ont même été tournées alors que les acteurs pensaient répéter. « J’étais à l’époque très influencé par l’idée du ‘courant de conscience’ en littérature. Certes, la caméra n’autorise en apparence qu’un point de vue externe, c’est un outil très différent de l’écriture littéraire qui permet le monologue intérieur. Pourtant, on a l’impression de partager l’intimité de Joe, de connaître une certaine vérité sur lui, peut-être davantage que s’il se confiait directement à nous. C’est une autre forme d’introspection ».

Régénérations
En matière de réalisation, après Coming Apart, Milton Moses Ginsberg en est resté à quelques courts métrages très dilués dans le temps, et s’est davantage consacré à son métier de monteur pour des fictions et documentaires télévisés. « Je me suis perdu en cours de route. Ma vie après le film se mit à ressembler encore plus fortement à celle de Joe », nous confie le réalisateur. En 1973, il retenta pourtant l’expérience du long métrage avec une satire politique, The Werewolf of Washington. Un film comprimé au montage : des 90 minutes initialement prévues, il n’en conservera que 25. Parmi ses thèmes de prédilection : la politique. Un sujet développé dans "The Big Bang ", son roman noir : l’histoire d’une jeune fille proche de Marilyn Monroe peu avant sa mort et témoin des manipulations médiatiques entourant l’affaire.
Milton Moses Ginsberg vient récemment d’écrire un écho à Coming Apart. Une suite, en quelque sorte, centrée sur une héroïne féminine. Sujets et intrigues de ce film à venir : le périple psychologique d’une femme psychiatre qui, enquêtant sur le suicide d’une patiente, est amené à entreprendre son propre examen de conscience. « Je cherche une actrice européenne pour jouer le rôle, nous signale Ginsberg. « Je reste passionné par le cinéma, j’ai encore envie de faire des films qui parlent de gens ‘vrais’ et ordinaires, des gens qui ont du mal à aimer, à s’engager, et qui doivent vivre avec leurs échecs personnels. Un réalisateur avide de nouveauté. Qui ne plus est, il ne manque pas de singularité ; c’est le moins qu’on puisse dire. On est d’ores et déjà impatients de goûter à sa prochaine chronique.
 
sabrina
 
 
 
 

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