David Lynch, Lion d'or et Palme d'or, n'a pas tourné de long métrage depuis 2006. Une longue absence. Heureusement il nous a offert une suite à Twin peaks pour la télé. Et on peut voir ses photos fétéchistes dans l'exposition de Louboutin au Palais de la Porte dorée. Il vient aussi de terminer un court métrage. Elephant Man ressort cette semaine en salles.



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THE MASTER SHOW





Peter Weir est sans doute discret. Pourtant il ne manque ni de reconnaissance, ni de succès, ni de talent. En explorant des genres variés, de l’aventure à la comédie romantique en passant par le thriller, la comédie noire, le thriller surnaturel ou le drame d’anticipation, il a su séduire un large public, de différentes générations. Le cercle des poètes disparus a ainsi été une œuvre culte pour les jeunes cinéphiles de la fin des années 80, tandis que Witness avait marqué le public féminin craquant pour un Harrison Ford à contre-emploi. Il débute avec des courts expérimentaux, des documentaires plutôt engagés, et déjà communautaires. Dans Whatever Happened to Green Valley, il fait participer des résidents plus que précaires de Sydney pour qu’ils filment leurs propres vies. Il s’attaque aussi à la musique pop australienne – bien avant que Kylie Minogue, INXS et Midnight Oil n’apparaissent - dans Three Directions in Australien Pop Music. Là encore une histoire de groupes. Ce sera la principale obsession de son cinéma : les groupes.

Histoires de cercles

Des évadés du Goulag qui tentent l’expédition impossible, des marins qui explorent les défis des Océans, des participants à un jeu de télé-réalité, des survivants traumatisés à un crash aérien, des célibataires névrosés new yorkais, des étudiants d’une classe qui se créent leur propre club (exclusif), une famille qui s’exile pour chercher un bonheur idyllique, une communauté amish qui vit hors du présent, des correspondants étrangers pris dans les tourments d’un coup d’état, des jeunes paysans devenus soldats durant la Grande Guerre, des aborigènes connectés par un lien mystique, des étudiantes mêlées à un groupe de rock, des villageois profitant d’accidents de voiture.
Et chaque film se fait écho. Pique-Nique à Hanging Park et Three Directions in Australien Pop Music vont de pair. Le Cercle des poètes disparus n’est pas si éloigné, sauf en distance, de La dernière vague. Mosquito Coast renvoie aux Chemins de la Liberté. Master and Commander et Gallipoli sont cousins. Les voitures qui ont mangé Paris a des similitudes avec Witness.
Et Weir les distingue en nous faisant voyager : Australie rurale, Turquie, Sydney, Pennsylvanie, Amérique centrale, Nouvelle Angleterre, New York, Hollywood, le Pacifique sud, la Sibérie, le désert de Gobi et l’Himalaya.

Rien de carré

Voilà pourquoi aucun de ses films ne se ressemblent mais s’assemblent. Révélé en 1974 avec Picque-Nique à Hanging Rock, son deuxième long métrage, il sera assez régulier jusqu’en 1993, où l’échec de Fearless (Etat second) le poussera à prendre un peu de recul. En 19 ans il réalisera 10 films, alors que depuis 17 ans, il n’en a sorti que trois. Pourtant il ne manque pas de sujets (souvent des livres). Certains avortent. Il souhaite conserver son indépendance.
Mais les studios sont de moins en moins enclins à prendre des risques avec des productions amples d’auteurs singuliers. Autrefois figure de proue de la renaissance australienne, il est devenu l’un des cinéastes les plus en vue à Hollywood grâce à des films singuliers mais plus que rentables (car populaires) avant de s’engager dans des budgets conséquents, qui ont finit par faire peur aux décideurs (comprendre les actionnaires) des studios. Ainsi Master et Commandeur, pourtant plusieurs fois nommé aux Oscars, n’a pas amassé les recettes escomptées et il lui a fallut chercher des financements indépendants et alternatifs pour Les chemins de la liberté.
Peter Weir, en touchant à tous les genres et à des sujets ambitieux, ne pouvait que se décaler d’un système de plus en plus conformiste. Heureusement, les acteurs l’ont toujours suivi dans ses « délires ». Apte à diriger des inconnus (adolescents, aborigènes) dans des conditions extrêmes (des paysages glaciaux aux jungles tropiques), il a dirigé Mel Gibson, Jeff Bridges, Sigourney Weaver, Harrison Ford (à qui il a offert ses deux plus beaux rôles), Robin Williams, Gérard Depardieu, Jim Carrey, Russell Crowe, Ed Harris, tout en révélant River Phoenix, Paul Bettany, Andie MacDowell, Benicio del Toro, Lina Hunt (dans un rôle masculin), Ethan Hawke, …

Equations sans solutions

L’année de tous les dangers, un an après le remarqué Gallipoli, l’installera définitivement parmi les réalisateurs qui comptent. Se frottant à l’Histoire (l’arrivée de Sukarno au pouvoir en Indonésie), il s’applique à prolonger un certain cinéma américain des années 70 mélangeant romanesque et contexte politique. L’Australie lui décerne l’équivalent de la médaille de l’Ordre du mérite. De là, il s’exile aux USA. Dès son premier film, Witness, il obtient une nomination à l’Oscar du meilleur réalisateur. La séquence où Kelly McGillis et Harrison Ford danse dans une grange sur un air rétro sera la première d’une longue série de scènes cultes qui ont fait sa signature. Sa mise en scène n’est jamais pesante. Au pire, certains films manquent de souffle, mais jamais de qualités. Au mieux, leur charme, leur rythme, leur sensibilité nous transportent.
Si Mosquito Coast, comme Etat second sept ans plus tard, manquent leur objectif, il se rattrape avec Le cercle des poètes disparus. Carpe diem. Le refus du conformisme, l’épanouissement individuel, le respect des autres : autant d’éléments qui traversent son cinéma, et trouvent ici une forme de quintessence. Comme dans de nombreuses de ses œuvres, l’initiation semble essentielle. Il reçoit une deuxième nomination aux Oscars, qui vient couronner un immense succès public.
Après le léger Green Card, qui permet à Depardieu d’être la star de l’année aux USA, grâce à Cyrano et ce film, il revient à un film plus noir Fearless. Contre-performance au box office, malgré de belles critiques, il est sans doute le film le plus mésestimé de son œuvre. Il faut pourtant voir Jeff Bridges qui se croit invincible jusqu’à croquer la fraise fatale…

Géométrie variable

Touché par l’échec, il revient avec The Truman Show. Un homme est l’attraction cathodique de millions de téléspectateurs, à son insu, sans le savoir. Huis-clos déroutant et classique, il va anticiper la télé réalité qui inondera les années 2000, devenant ainsi une référence dans les écoles de cinéma, les collèges et les lycées. Troisième citation aux Oscars comme meilleur réalisateur, succès international, le film est aussi étape symbolique pour son acteur principal, Jim Carrey, qui va prouver qu’il n’est pas un simple acteur comique. Weir aime utiliser les comédiens là où ne les attends pas. Par conséquent, il les crédibilise auprès des professionnels et voit ses films souvent cités parmi les œuvres principales de ses stars lors d’hommages.

Ou comment devenir classique malgré soi.

Le summum de son talent restera Master and Commander. Un coup de maître, sans jeu de mot. Les guerres Napoléoniennes, les océans mal explorés, les progrès de la science, l’inconnu de l’exotisme, l’image de Russell Boyd, le jeu subtil des comédiens, le "dramatisme" des situations : il surclasse Les révoltés du Bounty, dans le genre, et Weir réalise l’une des œuvres épiques les plus réussies de la décennie. Son box office est certes tout juste acceptable par les studios (210 millions de $ dans le monde) mais l’œuvre lui vaut une quatrième nomination aux Oscars.

Entre temps, il aura abandonné une adaptation de The Playmaker, Beloved, Shantaram et de quelques autres projets. Il tournera Les chemins de la liberté avec des vedettes, mais sans l’apport des studios et avec un budget modeste. En 65 jours il boucle en Bulgarie et au Maroc une traversée de la Sibérie arctique à l’Inde.

À l’instar de ses personnages, il va jusqu’au bout de ses limites, défiant la nature, l’Histoire, les guerres, la volonté divine, la justice la morale, l’administration. Combattatif, perfectionniste, il est, comme eux, jamais aussi bon que lorsqu’il est dans des situations qui lui sont étrangères. Il n’aime pas le confort. Ses films sont tous en quête de paix : une paix intérieur (Le cercle, Etat second, Green Card), une paix extérieure (anti-guerre, anti-conflits plus généralement). Il aime les amours interdits, transgressifs, les tabous. Bien qu’il soit discret, il déploie un cinéma plutôt spectaculaire. Son cinéma s’inscrit dans un courant à la fois populaire et auteurisant. De ceux qui feront le bonheur des rétrospectives dans les cinémathèques et les festivals.



vincy


 
 
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