David Lynch, Lion d'or et Palme d'or, n'a pas tourné de long métrage depuis 2006. Une longue absence. Heureusement il nous a offert une suite à Twin peaks pour la télé. Et on peut voir ses photos fétéchistes dans l'exposition de Louboutin au Palais de la Porte dorée. Il vient aussi de terminer un court métrage. Elephant Man ressort cette semaine en salles.



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LA MEILLEURE FAÇON DE PARTIR...





Réalisateur, scénariste et producteur, Claude Miller est décédé mercredi 4 avril au soir à l'âge de 70 ans. 7 fois nommé au César du meilleur réalisateur (sans jamais l'obtenir), trois fois dans la catégorie du meilleur scénariste (avec le prix pour Garde à vue), et quatre fois cité dans la catégorie du meilleur film (La meilleure façon de marcher, Garde à vue, L'effrontée, Un secret), Miller était parfois méprisé par une partie des critiques et de la profession qui voyait en lui un cinéaste populaire et non pas un auteur héritier de la Nouvelle Vague. Une ironie si l'on connaît son parcours : il a débuté avec Marcel Carné avant d'être l'assistant réalisateur de Michel Deville (Martin Soldat), Jean-Luc Godard (Week-end), Jacques Demy (Les demoiselles de Rochefort) et surtout le directeur de production de François Truffaut (La Sirène du Mississipi, L'enfant sauvage, Domicile conjugal, Les deux anglaises et le continent, La nuit américaine, L'histoire d'Adèle H.

Deux fois sélectionné à Cannes (avec le prix du jury pour La classe de neige en 1998), prix de la Critique internationale à Berlin (La chambre des magiciennes), grand prix des Amériques à Montréal (Un secret) et enfin prix Louis Delluc en 1985 (L'effrontée), Miller a pourtant l'un des plus beaux palmarès de sa génération.

Dans L'Effrontée (1985), le regard boudeur de Charlotte Gainsbourg, gamine en mal d'identité, tombe par hasard sur l'image, à la télé, de Clara, treize ans, comme elle mais pianiste prodige, belle et blonde à pleurer. Eblouie, aveuglée, Charlotte va rompre les amarres, fuir le quotidien vers les rivages enchantés, la Beauté, le Bonheur. Le hurlement de la petite Lulu, sa seule amie, met fin au voyage : c'est l'appel au secours d'une désespérée. Charlotte ouvre les yeux ; elle allait se tromper d'histoire d'amour.

L'Oeil, c'est le sobriquet d'un "privé" minable lancé aux trousses d'une criminelle, belle à en mourir dans ses bras. Ce Petit Poucet de cauchemar sème sur le chemin de sa Mortelle randonnée (1983) les cadavres des amants qu'elle a étreints en fredonnant "La Paloma". Hanté par l'image jaunie d'une classe de fillettes parmi lesquelles - mais laquelle ? - la sienne, perdue depuis vingt ans, l'Oeil, ébloui par sa proie, croit voir dans la criminelle sa petite Marie enfin retrouvée. Il la prend sous sa protection et, malgré lui, la précipite vers la mort. Lui aussi s'est trompé d'histoire d'amour...

Dans sa chambre, Philippe essaie la perruque et la robe qu'il portera lors du spectacle préparé par les enfants de la colo : La Meilleure façon de marcher (1975). Un autre moniteur, Marc, jette un oeil dans la chambre et en rapporte la conviction, aussi définitive qu'erronée, que le travesti d'un soir est un homosexuel de toujours et qu'il doit le punir.

L'oeil condamne, d'un seul coup. Ainsi Chantal Martinaud révèle-t-elle à l'inspecteur Gallien qu'elle a surpris son époux Jérôme en train de caresser une fillette. L'évidence de la pédophilie est telle que le policier, à son tour désabusé, y "voit" la preuve que Martinaud a assassiné deux gamines : Garde à vue (1981).

"L'oeil, c'est un objet extraordinaire, à la fois très beau et très... Oeil nous amène tout de suite à oeil crevé", a dit un jour Claude Miller. L'oeil crevé, c'est cet oeil très... qui s'éblouit, se trompe, abuse et condamne. Ca peut-être aussi le cinéma : Janine a vu trop de films pour accepter la réalité et devient, espérant en sortir (La Petite voleuse, 1988). Mais, revenue du pays des songes, mûrie, meurtrie, Janine part vers l'avenir un enfant dans le ventre et, en bandoulière, un appareil photo. Ce troisième oeil lui a enseigné que seuls sont maîtres de leur destin ceux qui, les yeux grands ouverts, créent et comprennent le monde. Ainsi va Claude Miller dont les films, donnant à voir, donnent à comprendre.

Charlotte for ever

De La meilleure façon de marcher, son premier film en 1976 à Thérèse Desqueyroux, avec Audrey Tautou, tout juste achevé (le film pourrait être à Cannes et sortira le 21 novembre), il aura tourné 17 films, dont quelques grands succès en salles comme Garde à vue, L'effrontée, La petite voleuse, L'Accompagnatrice ou Un secret. Certains de ses films ont également été de cuisants échecs, souffrant de sorties trop discrètes. Surtout, Miller, depuis La classe de neige, avait des difficultés à trouver des financements pour ses films. L'impossibilité de concrétiser son grand projet, Nana, l'a contraint à trouver des sujets plus modestes. Cela a d'ailleurs coïncidé avec sa découverte des caméras numériques, lui ouvrant de nouvelles perspectives et finalement une nouvelle façon de filmer, plus libre, plus rapide.

Le cinéma de Claude Miller était un cinéma d'émotions. Les visages des acteurs importaient plus que le décor. Les plus grands comédiens, qui lui furent très fidèles - certains ont tourné plusieurs films avec lui - sont passés devant sa caméra: Michel Serrault, Romy Schneider, Lino Ventura, Patrick Dewaere, Isabelle Adjani, Miou-Miou, Gérard Depardieu, Marina Hands, Sandrine Kiberlain, Jean-Claude Brialy, Nicole Garcia, Bernard Giraudeau, Jean-Pierre Marielle, Richard Bohringer. Il fut aussi un grand directeur de jeunes acteurs en herbe : Charlotte Gainsbourg lui doit son premier César, Romane Bohringer l'un de ses meilleurs films et on devrait aussi citer Ludivine Sagnier, Vincent Rottiers, ...

Les âmes grises

Il aimait les histoires ambigües, troubles, où la carapace morale se faisait taillader par des vérités blessantes ou la cruauté de l'humanité. L'ambivalence des comportements, des situations est ainsi admirablement incarné à l'image par Michel Serrault dans Garde à Vue (coupable ou pas d'un crime affreux) et Mortelle randonnée (à la fois flic et ange gardien de sa cible). Il plongeait dans l'intime, révélant les zones d'ombres, souvent dans des films où la lumière, artificielle ou naturelle, était omniprésente. Ces petites histoires ultra-sensibles composaient au final une oeuvre sur la lâcheté et la complicité, dans un ensemble empreint de tristesse. Le sombre l'attirait. Les zones obscures le tourmentaient. Miller faisait un cinéma anti-mélo, où la complexité prévalait sur les bons sentiments. L'adolescence et l'enfance l'intéressaient sans doute pour cela : coupable ou non, personne n'est innocent à ses yeux.

chris, vincy


 
 
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