Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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La fille au bracelet


France / 2020

12.02.2020
 



PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FROID





Les films de justice sont rarement réussis en France même s’il y a quelques œuvres qui se distinguent, comme Présumé coupable, Commis d’office, L’enquête ou le récent Une intime conviction. La fille au bracelet de Stéphane Demoustier n’a pas à rougir de la comparaison avec ces films, qui tentent, chacun à leur manière de se distinguer des films du même genre produits à Hollywood, et des innombrables téléfilms avides de prétoires et de plaidoiries.

Le réalisateur parvient à diriger ses acteurs (Mélissa Guers est une belle révélation, Chiara Mastroiannni transcende ses scènes) et la tension qu’il veut imposer au spectateur. Il ose surtout un formalisme théâtral, où, finalement, la rhétorique judiciaire, mélange de textes de lois gravés dans le marbre et d’interprétations philosophiques et humanistes, sert de dialogues dans un huis-clos presque étouffant. Ici, ce sont les mots qui produisent l’action.

La fille au bracelet est un décryptage clinique d’un système judiciaire surpuissant dans une affaire très intime. Le doute est double : du côté des juges et du côté du spectateur. Car, avec cette histoire, le film nous renvoie nos contestés vices contemporains (les préjugés, le besoin de créer des monstres) et les apparentes vertus de notre société (la justice d’une part, notre capacité à réfléchir d’autre part).

C’est d’ailleurs grâce à ces doutes que le film gagne en sensibilité dans un contexte glaçant. L’indifférence et la vulnérabilité de la fille font échos aux certitudes des avocats et à l’attitude des parents, brisés, stupéfaits. L’incompréhension des uns et des autres, l’impassibilité de la présumée coupable construisent alors une conviction chez chacun d’entre eux et chez chacun de nous. Le film est en cela une sorte de fiction interactive, où le spectateur est partie prenante.

Si Stéphane Demoustier réussit à tenir le spectateur en suspens avec une mise en scène aussi sobre que rigide, pour ne pas dire austère, il parvient plus difficilement à donner un sens à ce sujet, qui flirte avec le besoin d’autorité. Trop de respect, trop de pudeur, trop de froideur. S’il est juste sur le portrait de cette jeune fille désillusionnée, il n’a pas le courage d’en dévoiler tous ses secrets. Le trouble et même l’inquiétude qu’il soulève provoquent une forme de malaise dont on saisit mal la motivation.

Peut-être est-ce fait à dessein. Qu’il a voulu montrer un état des lieux d’une jeunesse désemparée, paumée, et de la menace que cela fait planer sur une société désagrégée et un Etat de droit un peu aveuglé. S’il filme magnifiquement les zones d’ombre, il a plus de difficulté à amener la noirceur de son constat et de son thème, tous deux pessimistes. On reste malgré tout un peu désappointé par cette vision un peu clichée d’une génération accro aux réseaux sociaux et au porno, et à cette morale un peu puritaine. Comme si, pour contourner son personnage insaisissable, le cinéaste avait eu besoin de l’enfermer dans un stéréotype un peu trop facilement condamné d’avance. Comme s'il était tenu lui-même par un bracelet alors qu'il ne cherche qu'à s'en émanciper...
 
vincy

 
 
 
 

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