Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Nos défaites


France / 2019

09.10.2019
 



NOS BATAILLES





Nous ne serons jamais faits du bois des victoires, mais de celui du combat.

Nos défaites est un film construit collectivement par le réalisateur Jean-Gabriel Périot et une classe de première de la ville d’Ivry-sur-Seine dans le cadre d’un atelier qui a duré toute une année scolaire. A l’origine, Jean-Gabriel Périot souhaitait permettre aux adolescents de “se confronter avec l’inconnu”. Il lui a semblé que le cinéma politique et engagé des années post-68 pouvait être un bon moyen, et c’est ainsi qu’il a eu l’idée de leur demander de s’approprier des dialogues de films puis de réagir aux propos de leurs personnages. Ce sont les élèves eux-mêmes qui ont sélectionné les extraits sur lesquels ils allaient travailler, à partir des propositions faites par le réalisateur. On retrouve notamment des séquences de La Salamandre d’Alain Tanner, Camarades de Marin Karmitz, La Chinoise de Jean-Luc Godard, ou encore La Reprise du travail aux usines Wonder de Pierre Bonneau, Liane Estiez-Willemont et Jacques Willemont et A bientôt, j’espère de Chris Marker et Mario Marret.

Cette expérience se révèle à l’écran un instantané passionnant de notre époque. On est bien sûr tenté d’y voir le portrait saisissant et attachant d’une certaine jeunesse contemporaine peu politisée et pas du tout engagée, pour laquelle les idéaux de Mai 68 font partie des livres d’Histoire, et pas tellement de leurs quotidiens. Il serait trop facile de faire de ces quelques lycéens le porte-étendard d’une génération entière, mais on est effectivement frappé de voir à quel point les concepts de “syndicat”, de “révolution” ou même de “politique” leur sont étrangers. On pourrait même être pessimiste face à ces jeunes gens qui semblent déconnectés des réalités, et pas tellement enclins à penser le monde qui les entoure.

En réalité, c’est tout le contraire qui se produit. Lorsqu’on les voit réfléchir face à la caméra, tenter de bâtir des réponses aux questions complexes qui leur sont posées (et auxquelles on vous met également au défi de répondre intelligemment en quelques secondes), tâtonner sur des définitions, s’interroger sur leurs propres désirs face au monde, on est bouleversé d’assister à l’élaboration d’une pensée en train de se construire. De la même manière, lorsqu’on les voit interpréter avec justesse et conviction des séquences de films qui sont éminemment politiques, on comprend que si les mots sont maladroits et la pensée balbutiante, les idées et la réflexion, elles, sont bien là.

On en a d’ailleurs la confirmation lors de l’extraordinaire épilogue qui montre l’évolution des protagonistes, six mois après le tournage. Après avoir été à leur tour confrontés frontalement à la manifestation concrète de certains concepts exposés dans le film, ils se sont réappropriés les notions d’engagement et de solidarité, se lançant dans le combat (le blocus de leur lycée) avec une énergie et une simplicité désarmantes. Même leurs témoignages ont gagné en assurance et en détermination, révélant leur capacité à mobiliser toutes les ressources nécessaires face à une situation qu’ils jugent injuste.

C’est là la grande force de Nos défaites : montrer la complexité des mécanismes à l'oeuvre dans l’apprentissage du politique, et la nécessité de passer par autre chose que des mots et des concepts abstraits pour offrir aux adolescents des outils solides pour penser et comprendre le monde. Finalement, c’est le spectateur qui est au bout du compte interpellé par le film : et nous, que faisons-nous pour aider les nouvelles générations à prendre conscience des combats restant à mener ? Comment les épaulons-nous dans la découverte de leurs propres idées ? Et surtout que faisons-nous, à notre échelle, pour leur montrer la voie ?
 
MpM

 
 
 
 

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