Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Visite ou mémoires et confessions


/ 1982

06.04.2016
 



L’ETRANGE AFFAIRE OLIVEIRA





"Le cinéma est ma passion et j’ai toujours tout sacrifié à la possibilité de faire mes films. "

Quel bonheur de découvrir, 34 ans après son tournage, ce film secret de Manoel de Oliveira, qui est à la fois une œuvre testament (le cinéaste avait exigé qu’il ne soit dévoilé qu’après sa mort, dont il n’imaginait sûrement pas qu’elle ne surviendrait qu’en 2015), un éclairage saisissant sur son travail et une projection prémonitoire des orientations qu’il allait prendre. En effet, lorsqu’il réalise Visite ou mémoires et confessions, Manoel de Oliveira ne le sait pas, mais presque toute sa carrière se trouve encore devant lui, et il tournera plus de 40 films entre 1982 et 2012.

Maniant l’ironie comme l’art de l’introspection la plus sincère, le cinéaste parle de sa vie, de sa famille, de son cinéma et de sa vision du monde. En parallèle, il filme sa maison, vaste demeure familiale qu’il doit vendre pour payer des dettes au moment du tournage, et autour de laquelle se tisse une fiction minimaliste écrite par l’écrivaine Agustina Bessa-Luis avec laquelle il collaborera sur huit de ses films, dont Val Abraham, Le Couvent ou encore Le miroir magique. Dans cette partie fictionnelle, un homme et une femme que l’on ne voit jamais rendent visite à des amis absents, et en profitent pour visiter leur maison. On découvre pèle-mêle des photos, des coquillages, une reproduction de la Joconde, des livres... En alternance, Manoel de Oliveira lui-même se livre face caméra, avec une gourmandise non dissimulée, et parfois une certaine nostalgie.

S’il n’y a aucune révélation fracassante dans ces "confessions" très sages, on se réjouit d’y découvrir un Manoel de Oliveira espiègle et quasi visionnaire qui ne cesse d’évoquer les thèmes et les films qui constitueront son œuvre future. On a la sensation prégnante d’une plaisanterie que nous aurait fait le cinéaste, comme s’il avait reconstitué les années 80 pour prétendre nous parler à 30 ans de distance et se donner des faux airs de prophète. Et pourtant, nul doute possible, c’est bien en 82 qu’il tenait des propos aussi sagaces sur lui-même. Visite ou mémoires et confessions devient ainsi bien malgré lui (et c’est là toute l’ironie de la chose) le film joyeux d’un fantôme du passé, nous parlant à la fois depuis un présent révolu et un au-delà mystérieux. Tel Hari Seldon, personnage mythique du cycle Fondation d’Isaac Asimov, qui réapparaît régulièrement pour guider ses descendants, il revient à travers les âges pour porter un regard rétrospectif, ou au contraire prémonitoire, sur sa vie et sa carrière.

C’est peut-être cette confusion apparente dans la temporalité qui rend si attachant cet autoportrait rafraîchissant et sensible, comme l’ultime pied de nez que cet éternel novateur avait concocté en secret à ses fidèles et admirateurs. Que l’on ait aimé, ou pas, le travail de Manoel de Oliveira, il faut voir ces "Mémoires et confessions" qui livrent, plus que nul autre film, l’essence de celui qui fut le plus inventif et audacieux doyen du cinéma.
 
MpM

 
 
 
 

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