Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



Ailleurs
Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary
Effacer l'historique
Ema
Enorme
La daronne
Lux Æterna
Peninsula
Petit pays
Rocks
Tenet
Un pays qui se tient sage



J'ai perdu mon corps
Les misérables
The Irishman
Marriage Story
Les filles du Docteur March
L'extraordinaire voyage de Marona
1917
Jojo Rabbit
L'odyssée de Choum
La dernière vie de Simon
Notre-Dame du Nil
Uncut Gems
Un divan à Tunis
Le cas Richard Jewell
Dark Waters
La communion



Les deux papes
Les siffleurs
Les enfants du temps
Je ne rêve que de vous
La Llorana
Scandale
Bad Boys For Life
Cuban Network
La Voie de la justice
Les traducteurs
Revenir
Un jour si blanc
Birds of Prey et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn
La fille au bracelet
Jinpa, un conte tibétain
L'appel de la forêt
Lettre à Franco
Wet Season
Judy
Lara Jenkins
En avant
De Gaulle






 (c) Ecran Noir 96 - 24


  



Donnez votre avis...


Nombre de votes : 29

 
Quantum of Solace (James Bond 22)


/ 2008

31.10.2008
 



(PRESQUE) LONESOME COWBOY





"- Bond, cessez de tuer tout individu utile à l’enquête. "

"Deux fois plus d’action que dans Casino Royale !" annonçaient les producteurs. Chose promise, chose due. Le ton est donné dès la scène d’ouverture. Hyperactif, ce 22ème épisode des aventures du célèbre agent secret britannique prend à peine le temps de respirer entre deux scènes d’action. A ce niveau là, il peut même (presque) prétendre à l’exhaustivité car 007 s’agite corps et âme dans les quatre coins du monde et dans tous les éléments : il ne manque qu’une scène sous-marine pour compléter le catalogue (bateau, avion, auto, moto,...).

Quantum of Solace, littéralement “la quantité de réconfort”. Celle dont Bond a besoin pour dépasser la trahison et la mort de Vesper, la femme qu’il aimait. Quantum comme le nom de l’organisation criminelle découverte dans Casino Royale. Suite directe du précédent opus, donc, mais changement (presque) radical de priorités. Ici, l’heure est moins à l’introversion qu’aux bagarres et aux cascades parfois invraisemblables (la scène du parachute qui s’ouvre au dernier moment). Beaucoup d’épate aux détriments de la profondeur psychologique qui faisait tout le charme de Casino Royale. Car au milieu de cette avalanche de démonstrations de force, la suggestion dont veut jouer Forster ne suffit pas pour exprimer les motivations intimes et les sentiments troubles des personnages. Le réalisateur fait appel aux parallélismes pour donner du sens aux activités de son héros. Parallélisme entre Bond et sa girl, tous deux minés par la perte d’un être cher, parallélisme entre deux scènes qui s’entrecoupent pour se faire écho. Utilisé plusieurs fois, le procédé confine quasiment au systématisme mais nous réserve une scène inoubliable se déroulant dans les décors de l’opéra Tosca du Festival de Bregenz, avec cet œil bleu géant singulier et hypnotique.

M, comme révélateur psy de 007
De la même manière indirecte, Forster mise sur les décors pour extérioriser l’état d’esprit de 007. Des bâtiments ultramodernes et froids à la chaleur ocre du désert, tous ces décors déclinés comme des compositions esthétiques à la parfaite homogénéité de couleurs servent d’indicateurs psychologiques. Hélas, cela ne peut fonctionner que si le spectateur fait lui-même l’effort permanent de rattacher cette aventure à la précédente, chose que le scénario, trop soucieux de maintenir son rythme effréné, peine à accomplir.

C’est à Judi Dench, formidable M, qu’incombe la mission délicate d’expliciter les tourments et les ambiguïtés de Bond. Telle une infirmière, elle injecte régulièrement les piqûres de rappel. C’est également à elle que revient le soin de rappeler que l’humour fait partie des ingrédients incontournables de la franchise. Impératif (presque) oublié par cet opus… Sa relation freudienne (M comme mère) avec double zéro se révèle d’ailleurs la plus étoffée et la plus intéressante du film.

Un Bond (presque) frigide
Lui, Bond, est toujours aussi noir et complexe que dans Casino Royale. Daniel Craig ne déçoit pas, il incarne un agent au charisme agressif, à la fois brute et classe, glacial et viril.
Obsessionnel, rageur et insomniaque, il tue compulsivement et au hasard jusqu’à ce qu’il trouve sa véritable cible, tel un cowboy vengeur qui a décidé de suivre sa route (presque) seul. Tourmenté par le souvenir de la seule femme qu’il ait jamais aimé, il en oublie même de séduire et la James Bond girl sera d’ailleurs la seule de toute l’histoire de la franchise à ne pas partager son lit. Une quasi chasteté qui jure d’ailleurs étrangement avec le pré-générique sensuel et freudien qui fait rimer, comme à l’accoutumée, armes phalliques et femmes-objets.

L’effort du film pour faire corps avec son époque constitue l’un de ses points forts. Ironiquement, celui-ci se montre aussi actuel pour le spectateur qu’il s’avère anachronique dans l’histoire des James Bond puisque la chronologie des évènements veut que Casino Royale et Quantum of Solace racontent les débuts de l’agent 007. Dans Quantum of Solace, on conclut les transactions en euros car “le dollar n’est plus ce qu’il était”. L’eau détrône le pétrole (malgré un clin d'oeil sublime à Goldfinger) en tant que ressource naturelle qui fait l’objet des convoitises les plus cyniques. Ce contexte environnemental particulièrement contemporain est doublé d’un autre fait d’actualité : la montée en puissance des gauches en Amérique du sud.

L'épisode le plus court, le plus intense et le plus dense de la série
Outre son exceptionnelle capacité à évincer la plus petite pointe d’ennui, cet épisode compte également comme atout d’avoir mis de côté toute tentation de manichéisme. Les codes et les camps se brouillent, on n’assiste plus au combat ordinaire des gentils contre les méchants. Bond, qui fait lui-même plus figure de tueur incontrôlable que de héros, s’avère être le (presque) seul à œuvrer pour le bien. Sombre, le film n’hésite pas à mettre l’accent sur le rôle qu’ont joués les Etats-Unis dans l’avènement des dictatures militaires en Amérique du sud. Cette tentative de réalisme n’est pourtant pas un complet succès. On pourra en effet regretter le cruel manque de charisme du grand méchant.
A force de vouloir jouer la subtilité, Almaric en perd toute consistance. On l’aurait volontiers imaginé plus reptilien… En comparaison, le général Medrano (Joaquin Cosio), l’autre méchant du film, en l’occurrence sans nuance aucune, impressionne davantage. Finalement, c’est sur les seules épaules de Daniel Craig et de Judi Dench que repose (presque) intégralement le film car la très belle Olga Kurylenko – qui affiche une troublante ressemblance avec Sophie Marceau – est handicapée par un rôle de James Bond girl trop effacé.
Bond 22 est achevé, vive Bond 23 ! Le mystère de l’organisation Quantum qui fait office de nouveau SPECTRE n’étant pas résolu à la fin, on peut légitimement s’attendre à en apprendre davantage dans une (presque) suite.
 
Karine

 
 
 
 

haut