Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes.



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Hellboy II : Les légions d'or maudites


USA / 2008

29.10.2008
 



LE BESTIAIRE DU TORO





«- Votre existence devait rester inconnue de tous !
- Eh bien maintenant c’est trop tard.
»

Encensé par la critique, plébiscité par le public, Guillermo Del Toro fait aujourd’hui parti avec Peter Jackson et Sam Raimi de la caste très réduite des réalisateurs "geeks" ayant dépassé leurs propres fascinations pour les films de genre en construisant à leur tour des représentations grandeur nature de mondes merveilleux et tangibles visuellement. Dans l’attente d’un futur diptyque sur Bilbo le Hobbit supervisés conjointement par Jackson et Del Toro, le garçon de l’enfer assure, pour notre plus grand plaisir, un come-back retentissant.

dans un univers proche de Lovecraft
A sa sortie en 2004, l’adaptation du comics de Mike Mignola, Hellboy, avait surpris par son aspect aussi drôle et léger (vannes d’Hellboy en pagaille, le B.P.R.D - FBI des mutants- généreusement bordélique) que ténébreux et pessimiste (rarement les méchants ne furent aussi convaincants que le duo Raspoutine / Kroenen œuvrant comme des damnés pour rouvrir les portes de l’enfer).
Del Toro, tel l’alchimiste et sa pierre philosophale, créa une iconologie à la symbolique démente capable de nous plonger instantanément au plus profond des rêves d’enfants et des peurs d’adultes. Outre la représentation ambivalente d’un personnage de cartoon dans un univers proche de Lovecraft, nous n’avions pas vu un réal s’éclater comme ça depuis euh… au hasard Blade 2 et désormais Hellboy 2 ! S’il remettra sans doute le couvert pour un troisième volet (Guillermo s’il te plait laisse les cornes d’Hellboy repousser !!!), la virtuosité de ce deuxième opus dans sa démesure visuelle s’accompagne d’un traitement grand public façon « Harry Potter », enjeux et bestiaire compris. Certains déploreront ce choix artistique, même si la déférence de Del Toro au genre fantastique et l’amour pour son monstre ne se sont en rien amoindris.
En effet, le réalisateur ne trompe personne et annonce la couleur dès l’introduction en forme de flash back. L’évolution de son garnement préféré sera au centre d’un conte fantastique où l’interaction de deux mondes que tout oppose viendra renforcer l’appartenance de notre monstre héros à l’un des deux.

au croisement d’Alice au pays des merveilles et du Magicien d’Oz.
Cette valeur psychologique n’est pas anodine et motive un scénario parfois un peu linéaire dans son déroulement. Car si le principal est là, à savoir le plaisir de voir ce grand gamin aux pouvoirs infernaux piquer des crises de nerfs, se battre au choix contre des trolls, des robots d’or ou un elfe maléfique et s’engueuler avec son supérieur hiérarchique ou sa gonzesse, Hellboy franchira un cap pour passer définitivement à l’âge adulte. De plus, la découverte de son existence par les TV du monde entier ne sera pas sans effet sur la double qualité de monstre et d’humain qui le caractérise. A la suite d’une scène explosive contre un dieu forestier, dernier représentant de son espèce, Del Toro pose les jalons d’une réflexion autour d’un Hellboy en quête de réponses. Un peu comme Raimi avec Spiderman ou Nolan avec Batman, le cinéaste ibérique approfondi son héros rouge pour se demander quelle est sa vraie place dans ce monde. Sa relation amoureuse avec Liz, ses origines et la découverte d’un monde souterrain fascinant à plus d’une créature, sont autant de pistes qui fabriquent un imaginaire complexe, réaliste et d’une sagacité bluffante pour ce type de production. Certes, l’humour prédomine et nombres de situations sont un prétexte à rire. Ce décalage permet au magicien Del Toro de construire une mise en scène qui magnifie à chaque instant un univers baroque au croisement d’Alice au pays des merveilles et du Magicien d’Oz.
Sa capacité à embrasser un lieu en un seul mouvement de caméra ou à créer un espace d’intimité dans des séquences d’action est si virtuose que l’on se prend à imaginer la manière dont cet homme conçoit la vie : un œil pour percevoir les fabuleuses chimères du monde et l’autre pour les organiser de manière cohérente ! D’ailleurs le réalisateur jongle si facilement avec les paramétrages cinématographiques -découpage des unités de lieu et de temps, rythme du montage, progression narrative- que son film se déploie sans le moindre temps mort et ce deux heures durant.

Le cauchemar comme allégorie
Cette marque de qualité s’ajoute à sa marque de fabrique où, le temps d’une séquence (le fantôme dans L’échine du diable, l’ogre dans Le labyrinthe de Pan), il parvient à transcender les représentations cauchemardesques de l’homme pour en faire des allégories sur le vivant. Et nul doute que l’on se souviendra longtemps ici de la séquence avec la Mort, merveilleuse, glaçante. Par cette seule scène, il replace les enjeux d’un personnage au destin apocalyptique par le biais d’un serment d’amour. Véritable coup de génie parmi tant d’autres dans l’œuvre du maître ibérique qui réussit en un film (celui-ci ou ses précédents) ce que d’autres échouent en une filmographie entière : construire un cinéma de l’imaginaire avec le cœur d’un enfant et la vision d’un adulte.
 
denis, geoffroy

 
 
 
 

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