Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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Rencontrés à Deauville en 2011, au festival du film américain, le réalisateur de Terri, Azazel Jacobs, et son acteur principal, Jacob Wysocki, partagent les origines et le tournage d'un film qui évoquent la différence. Sensible, maladroit, le héros est l'illustration d'une Amérique en surpoids, mal dans sa peau, presque étrangère à elle-même quand elle n'est pas dans les normes. Inspiré d'une série de nouvelles de Patrick Dewitt, ce 4e long métrage de Jacobs a eut des difficultés à être financé. Le scénario a été nommé aux Independant Spirit Awards et le film avait été sélectionné en compétition à Sundance en 2011.
Ecran Noir : Terri est en compétition au Festival américain de Deauville, où votre film précédent Momma's Man avait déjà été présenté ici en 2008, être sélectionné une nouvelle fois à Deauville à la rencontre du public français ça vous fait quelle impression ?





Azazel Jacobs : J’ai comme le sentiment qu’on me donne un feu vert pour avancer dans cette direction, pour continuer à faire des films de ce genre. Je veux qu’il y ait des connections entre mes films et entre des publics, pas seulement des spectateurs américains mais aussi le public de d’autres pays. Mes films sont différents les uns des autres et je veux qu’ils circulent, je veux qu’ils se confrontent à d’autres réalités, je veux les partager au monde. Le fait que le Festival de Deauville a accueilli favorablement le dernier et a sélectionné mon nouveau film Terri cela signifie vraiment quelque chose, ça compte beaucoup pour moi. Momma’s Man était un film pas forcément facile, vous ne pouvez pas espérer que les gens qui ont aimé vu votre film d’avant vont apprécier aussi votre nouveau film, mais on souhaite que ça arrive.

EN : L’histoire de Terri est plutôt atypique et loin des clichés d’Hollywood, comment convaincre des producteurs de vous suivre dans ce projet ?

AJ : En fait ce n’était pas si difficile que ça, j’ai retrouvé des gens avec qui j’ai déjà travailler avant, donc ils connaissaient déjà mon travail et savaient quelle sorte de film j’allais faire, ou en tout cas ce qu’il ne serait pas.. Je voulais faire quelque chose de différent avec Terri et aborder des thèmes dont on ne parle pas souvent au cinéma. La difficulté est toujours la même : où trouver l’argent pour réunir le budget ? Je suis très heureux d’avoir réalisé des films dont vraiment je suis fier et qui représentent le genre de cinéma que je veux faire. Il me semble que mes films sont presque un achèvement pour à la fois les producteurs, le directeur de la photo, le monteur et les autres membres de l’équipe qui se sont réunis pour le faire dans la même optique que moi, je me suis vraiment senti soutenu par eux.

EN : Pour diriger vos acteurs, vous leur donnez des indications très spécifiques avec beaucoup de répétitions ou avez-vous laissé une certaine place à l’improvisation ?

AJ : Aucune improvisation avec les dialogues écrits, mais parfois ils pouvaient jouer entre les lignes tout en respectant le texte. J’aime beaucoup le scénario tel qu’il était, et je voulais raconter cette histoire telle qu’elle était écrite. Après pour ce qui de la façon dont les personnages se regardent les uns les autres ou pour les silences entre deux répliques, j’ai fait en sorte de trouver ça sur le plateau et pas en faisant des répétitions. Je suis assez directif et plutôt que improvisation, je préfère réaction à l’énergie du moment.

EN : Comment décrire votre acteur Jacob Wysocki juste en quelques mots ?

AJ : Courageux, confiant, humble, gentil, généreux.

EN : Jacob Wysocki, est-ce que vous vous souvenez comment le réalisateur vous a présenté l’histoire de Terri ?

Jacob Wysocki : En fait c’est d’abord par le biais de mon agent que je suis allé à l’audition pour le rôle, j’ai eu le scénario entre les mains et j’ai vraiment aimé ce que je lisais. J’ai alors rencontré Azazel le réalisateur, et il m’a parlé du film qu’il voulait faire plus en détails. Il n’avait pas vraiment besoin de me convaincre car déjà je voulais y participer, son scénario était très bien écrit. On a parlé surtout du personnage et de ce que je pouvais y apporter d’unique.

EN : Quelle différence entre tourner des scènes avec d’autres jeunes débutants ou avec un acteur célèbre, nommé aux Oscars, comme John C. Reilly ?

JW : J’aime travailler avec des jeunes adolescents parce que je me revoit à cet âge de 14-16ans avec déjà cette envie de faire ce métier, en plus je voyais en eux une plus grande envie encore de le faire. J’étais très content de voir qu’en jouant dans ce film eux réalisaient que leur rêve était quelque chose de possible. Pour certaines scènes délicates, ils ne montraient de peur, si des adolescents bien plus jeunes que moi pouvaient faire telle chose alors ça me donnait encore plus confiance en moi, tout était possible. Parmi eux, j’étais le plus âgé et le plus expérimenté, j’étais presque dans un rôle de modèle qui peut donner des conseils. En même temps j’étais un peu nerveux à l’idée de jouer avec John C. Reilly, parce que il est tellement un grand acteur dans tellement de bon film ; moi c’était mon premier film. J’étais beaucoup intimidé au début, mais dès qu’on a commencé le tournage mon inquiétude s’est dissipée, on est devenu ami. L’ambiance a fait qu’on était deux acteurs à interpréter ensemble une même scène, je pouvais me sentir comme son égal en quelque sorte.

EN : Quelle scène a été la plus difficile?

JW : Pour la scène du début quand je suis nu dans la baignoire, je n’étais pas mal à l’aise. Je savais que c’était quelque chose de nécessaire à l’histoire parce que ce personnage doit apparaître aussi vulnérable qu’il puisse être. Je pense que la partie qui était la plus difficile à interpréter est celle où la nudité fait penser au sexe, c’était un moment très délicat à cause des différentes émotions à faire passer, on a pris le temps de bien la préparer. Il fallait oublier nos embarras et nos peurs par rapport à cette tension sexuelle et créer une ambiance professionnelle, ça ce n’était pas facile. En fait le tournage de cette séquence très importante et très intense a pris deux jours.

EN : Comment décrire le réalisateur Azazel Jacobs juste en quelques mots ?

JW : Inspirant, il a beaucoup de connaissances qu’il partage. Merveilleux. Compatissant. Imprévisible. Très facile à vivre, il ne vous parle pas comme un chef ou un supérieur mais plus comme un égal, c’est un réalisateur qui ne montre pas son autorité, quand il parle à quelqu’un de l’équipe c’est comme une conversation entre deux amis pour rendre de travail meilleur. Je pense qu’il est très intelligent. Certaines choses qu’il a pu me dire ont pu me faire reconsidérer qui je suis, on a beaucoup échangé et j’ai reçu beaucoup.


   Kristofy