Jurassic Park
1993 - 6 513 000 entrées France (3ème du Box Office)
 

John Hammond est milliardaire ; il finance les travaux archéologiques et paléontologiques de Grant et Sattler, mais aussi la construction d'un parc d'attraction où les dinosaures seront en liberté, comme dans un safari. C'est le résultat de travaux sur l'ADN d'un moustique fossilisé. Hammond a besoin d'une caution scientifique et les emmène voir l'inimaginable. Mais un traître au sein de l'équipe va tout saboter.

Scénario : Michael Crichton, David Koepp (d'après le livre de M.Crichton)
Musique : John Williams
Image : Dean Cundey
Montage : Michael Kahn
Durée : 127 mn

casting:
Sam Neill (Allan Grant)
Laura Dern (Ellie Sattler)
Jeff Goldblum (Ian Malcom)
Richard Attenborough (John Parker Hammond)

A chaque fois, il doit son salut à George Lucas. " Indiana " l'avait sauvé de " 1941 ". ILM lui permettra de rebondir après le ratage de " Hook ". D'ailleurs, qu'on ne s'y trompe pas, " Jurassic Park " est un Best Of de Spielberg. Sam Neill, son chapeau et son sourire en coin rappellent Indiana Jones, les dinosaures sont plus cruels et méchants que le requin de " Jaws ", on y caresse des monstres de l'ère jurassique comme on caresse un vieil avion, Attenborough fait écho à Truffaut… Il y a une sorte de règle de trois : la création d'une nouvelle série, des références à des films catégories B à Z (dont " King Kong " et " The fly "), et bien entendu la mise en valeur et la maîtrise de nouvelles formes d'effets spéciaux. Spielberg va prouver qu'il reste non seulement dans la course, aux côtés des jeunes loups, mais, mieux : son savoir-faire et son expérience va le mettre une tête au dessus des autres. Il livre une fois de plus une leçon de cinéma, en deux heures et quelques, alliant le merveilleux à l'horreur, le suspens au discours écologique. Ce qu'il n'a pas réussi à équilibrer dans tous ses films post-" Color Purple ", il va en faire la parfaite synthèse avec un produit grand public, un divertissement de pur plaisir. L'ensemble sera soutenu par un marketing plus que parfait. De quoi en faire un des films les plus rentables du show-biz (63 millions de $ de budget, 915 millions de $ de recettes).
Autant Spielberg n'eut aucun souci à ne pas obtenir les stars qu'il souhaitait (William Hurt, Juliette Binoche), autant il s'inquiétait fortement de l'impact des effets visuels. Il fallait que ses dinosaures soient crédibles, réalistes, que le fantastique soit aussi réel que possible. Le film fait de nombreuses références à " Indiana Jones " ; Lucas a géré la post-production tandis que Spielberg réalisait son prochain film. Le père de " Star Wars " a donc joué avec ses nombreux outils : cascadeurs renumérisés pour ressembler aux acteurs, une jeep totalement virtuelle, des tas de variances de bestioles de toutes tailles. En voyant un exemple de T-Rex, Spielberg est convaincu que ça peut marcher et rendre obsolète les versions antérieures. Il va mélanger son travail de réalisateur (en réutilisant les recettes de " Jaws " et de la surenchère des Indy) et cette nouvelle espèce de cinéma technologique. Il est conscient de marquer l'histoire technique du 7ème Art. Il est tout aussi conscient du succès du film avant même qu'il en sorte en salles. Cette confiance peut passer pour de l'arrogance. il s'agit surtout de son propre émerveillement face à la redécouverte de son métier.
La construction du film reflète cette confiance et cette assurance du résultat. La menace plane mystérieusement dans un prologue carnassier. Puis on attend plus de 30 minutes pour voir les premiers dinosaures. Le film est lui même divisé en deux parties : l'installation de l'histoire (la réalité) et les courses-poursuites (le fantastique). Il est certain de son effet en exhibant d'abord la majesté de grands herbivores dans un paysage bucolique de jardin d'eden. Un contraste assez puissant avec la nuit, la jungle et des dinos fourbes et vengeurs. L'enfer est à deux pas.
Tout content de son talent de magicien retrouvé, Spielberg a été intransigeant avec certains éléments. Cette exigence rend le film plus intéressant que beaucoup d'autres. Cinématographiquement, les dinosaures sont réels. Surtout, ils sont une réalité scientifique, de leurs sons à leurs couleurs, de leur manière de vivre à celle de bouger. Il y a une précision paléontologique qui a inspiré de nombreux documentaires (notamment le célèbre de la BBC).
Il n'y a rien d'original dans JP. Juste un mélange réussi des bonnes applications. Le film a surtout une fraîcheur, une innocence, une modestie rare par rapport à ses créatures. En cela, on peut l'opposer à " The Lost World ", qui, hormis les deux scènes - le mobilhome pendu dans le vide et la course mortelle à travers les champs -, semble essoufflé, prétentieux et répétitif. Mais comme " The Lost World " s'accouple avec " Amistad " (les deux font la paire serait-on tenté d'écrire), " Jurassic" s'associe avec "Schindler". En fait, 93 deviendra sa plus belle année, cinématographiquement parlant. Une renaissance inespérée. Mais autant " Schindler " sera créativement un tournant, autant " Jurassic " est un remake de " Jaws ". Il aime faire peur au public, en venant chercher ses instincts les plus animaux. Il reprend le concept des trois héros (avec une femme en guise de scientifique ce coup-ci). On est à la fois fasciné et mis en danger avec une cruauté excessive perpétuelle.
Spielberg choisira d'en mettre plein la vue. Il veut prouver qu'il n'a pas perdu la main, et démode en un film Cameron et Zemeckis. Le virtuose qu'il est a tendance à se laisser lui-même séduire par ces images surréalistes. C'est un peu le piège de " JP ". Le film est narcissique. Sa technique l'emporte facilement sur le sujet fondamental du film : la nature. Mais il a la qualité de faire renaître une mythologie oubliée, terrestre, de porter un discours environnementaliste, bref de réaliser un film qui est l'anti-thèse de " Star Wars " tout en emmenant le spectateur aussi loin dans l'imaginaire. D'ailleurs, NeverNever Land n'est-ce pas plutôt cet archipel au large du Costa Rica ?
 
      Dossier réalisé par Vincy + PETSSSsss
      (C) Ecran Noir 1996-2005