- Palme d'Or 79
 - Zootrope studio
 - Le scénario du film
 

(C) 96-01 Ecran Noir

Apocalypse now redux
USA
Sélection officielle (hors compétition)
Projection: 11 Mai 2001
Sortie en salle : 11 mai 2001 (USA) / 4 juillet 2001 (France)

Réalisation: Andrew Jackson, Vicky Jenson Production : Zoetrope Studios
Réalisateur : Francis Ford Coppola (Trilogie Le Parrain, Conversations secrètes)
Scénario : Francis Ford Coppola, John Milius
Photo : Vittorio Storaro
Son : Richard Beggs, Mark Berger, Nathan Boxer, Walter Murch
Musique : Carmine Coppola, Francis Ford Coppola, Mickey Hart
Montage : Lisa Fruchtmann, Gerald B. Greenberg, Richard Marks et Walter Murch
Durée : 203 minutes
Marlon Brando (Colonel Walter E. Kurtz)
Martin Sheen (Capitaine Benjamin L. Willard)
Robert Duvall (Lieutenant Colonel Kilgore)
Frederic Forrest (Chef)
Sam Bottoms (Lance Johnson)
Laurence Fishburne (Mr. Clean)
Dennis Hopper (le photographe)
 
En pleine guerre du Vietnam, le capitaine Willard est chargé de retrouver le charismatique colonel Kurtz pour l'abattre.
 
 
Apocalypse Now est non seulement un grand film, Palme d'or du Festival de Cannes en 1979 c'est aussi une épopée, un tournage épique et cauchemardesque. Le 1er mars 1976, Francis Ford Coppola et son équipe débarque aux Philippines. Le tournage devient vite impossible : Coppola, en pleine crise de paranoïa et de mégalomanie, change fréquemment d'assistants, remplace l'acteur principal Harvey Keitel par Martin Sheen. En mai, un typhon d'une rare violence frappe l'île sur laquelle les plateaux de tournage sont installés. Le tournage est alors ajourné. Francis Ford Coppola n'a tourné que 8 minutes du film. Le budget prévisionnel du film est pourtant déjà largement dépassé. De nombreux membres de l'équipe contractent des maladies tropicales et un ouvrier philippin succombe. L'enfer filmé devient l'enfer tout court.
En juillet, Francis Ford Coppola reprend quand même le tournage, s'endettant auprès de United Artist pour finir le film. Marlon Brando arrive sur le tournage. Il est presque obèse et n'a pas lu une ligne du livre de Joseph Conrad. Francis Ford Coppola parvient néanmoins à le rendre crédible et en voyant un premier montage il commence à comprendre qu'il tient là un chef-d'œuvre. Mais sa galère, son " Vietnam personnel " n'est pas fini. Le 5 mars 1977, Martin Sheen fait une crise cardiaque, 10 jours après, Francis Ford Coppola fait lui une crise d'épilepsie. Déprimé, sous l'emprise des drogues, il écrit même des instructions pour que son ami George Lucas finisse le film. Bon gré, mal gré, le tournage est achevé dans la confusion la plus totale. 238 jours de tournage effectif, 250 heures de pellicule, 30 millions de dollars de budget, un montage difficile et enfin la délivrance. Le film est accueilli triomphalement sur la croisette et par le public américain. Le film rentre même dans ses frais. Palme d'or, 2 Oscars dont celui de meilleur photographie et surtout un statut de film culte mérité.

22 ans après, Francis Ford Coppola et Walter Munch son monteur ont décidé de remonter le film et d'ajouter 53 minutes supplémentaires. Une courte scène avec le colonel Kilgore, une scène où le colonel Kurtz lit à haute-voix des articles de presse, une rencontre entre l'équipage du bateau et les playmates échouées dans le Vietnam après une panne d'essence et surtout un dîner dans une plantation française avec Christian Marquand et Aurore Clément, une scène dont on voyait les préparatifs dans l'excellent documentaire, Au Cœur des Ténèbres.

 
LA LIGNE ROUGE

" J'aime l'odeur du Napalm, au matin. "

Quel plaisir de revoir des chefs-d'œuvre du septième art sur grand écran ! Après les ressorties de l'Exorciste et de 2001 L'odyssée de l'espace, c'est Apocalypse Now, l'opéra funèbre vertigineux de Francis Ford Coppola sur la Guerre du Vietnam qui a l'honneur d'une ressortie dans des conditions optimales. Une version définitive agrémentée de 53 minutes supplémentaires. 22 ans, après, Apocalypse Now n'a rien perdu de sa puissance d'évocation. " Ce n'est pas un film sur la Guerre du Vietnam, c'est le Vietman " prophétisait le cinéaste américain. Pas de parti pris réaliste donc sur le conflit en lui-même mais une méditation pessimiste sur l'âme humaine, sur la part de monstruosité et d'animalité en chaque homme. On suit, l'estomac noué, la gorge sèche, la lente descente au enfer du Capitaine Willard incarné par un Martin Sheen hallucinant. De morceaux de bravoures en scènes d'anthologie - le générique d'ouverture sur The End des Doors, l'attaque des hélicoptères avec en fond sonore La Chevauchée des Walkyries de Wagner, le spectacle des playmates en plein jungle, et bien sûr le final avec un Marlon Brando monolithique, dieu vivant au crâne luisant et à la présence monstrueuse, Apocalypse Now est l'un des films les plus incroyables de l'histoire du cinéma. Un film unique et totalement fou. L'œuvre d'un visionnaire, d'un grand directeur d'acteurs- les seconds rôles sont tous parfaits et d'un immense metteur en scène.
53 minutes de plus donc dans cette nouvelle version. Et c'est là précisément que le bât blesse. Les scènes rajoutées n'ont qu'un intérêt limité et tire en longueur une intrigue somme toute assez linéaire. Certes le passage avec les bunnies est touchant et marque une respiration sentimentale bienvenue, certes la scène entre Aurore Clément et Martin Sheen est magnifique, mais voilà, la longue scène de la plantation française, principal ajout de cette version, est totalement hors-propos, trop démonstrative alors que le film joue justement sur le mystère. L'enterrement de Clean - Laurence Fishburne dans son premier rôle au cinéma, sur la musique au synthé de Carmine Coppola, flirte même avec le ridicule.
De plus, cette longue séquence retarde la rencontre avec le Colonel Kurtz et donne au film une longueur - 3h20 quand même qui peut rebuter le spectateur. Peu utile également, la nouvelle scène avec le colonel Kurtz qui lit des articles de la presse américaine sur le conflit vietnamien. Là encore une scène trop écrite, avec trop de sens historique, peu en adéquation avec l'ambiance hallucinatoire de l'ensemble.

Mais ne boudons pas notre plaisir, Apocalyse Now au cinéma, cela reste une expérience unique. Un aller simple vers l'enfer, un putain de grand film qui hante le spectateur longtemps, bien longtemps après la projection.

Yannick-