Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24



Il est sans aucun doute l'un des cinéastes les plus singuliers du cinéma américain, entre audaces stylistiques et statut marginal. Cela ne l'empêche pas de réaliser des films percutants et caustiques, critiquant une Amérique aussi hypocrite que décadente, avec un ton décalé et une écriture reconnaissable entre milles. Todd Solondz, tout juste 57 ans, a été primé à Deauville, où nous l'avons rencontré, avec un prix spécial du jury amplement mérité pour Le Teckel.
EcranNoir : Ce nouveau film Le Teckel est au festival du cinéma Américain de Deauville comme certains autres de vos films et en particulier Bienvenue dans l’âge ingrat il y a  déjà 20 ans : ça vous fait quel effet ?




Todd Solondz : C’est toujours agréable de se retrouver à Deauville, on y est très bien accueilli. Je suis ravi d’avoir pu continuer à faire des films. En France je sais qu’il y a une organisation (ndr : le CNC) qui aide les cinéastes comme moi à faire des films. Mais aux Etats-Unis je dépend du business, du box-office pour trouver un financement, c’est plus complexe…

EN: Durant ces 20 dernières années qu’est ce qui a changé pour vous pour avoir son projet de film produit et distribué ?
TS : Ce qui a changé dans le métier c’est l’abandon de la pellicule pour filmer directement en digital. Le plus grand changement est bien entendu la place prépondérante d’internet. Trouver des financements pour des cinéastes comme moi est plus difficile parce que les spectateurs - et les jeunes en particulier - ne vont plus dans les salles de cinéma, ou en tout cas pas pour aller voir le genre de films que je fait.

EN : Dans Le Teckel il y a deux segments plutôt ironiques à propos de la jeunesse d’aujourd’hui et son rapport avec le cinéma (impossible de citer un film aimé sauf un blockbuster de super-héros) et avec l’art moderne (des animaux empaillés et robotisés)…
TS : Je suppose que qu’on peut me considérer comme quelqu’un de nostalgique. Le film évoque la fonction de l’art de plusieurs manières, et la fin du film en particulier est à propos d’une transformation de la nature de l’art ou comment l’art peut amener une nouvelle forme de vie au delà de la mortalité.

EN : Dans Le Teckel certains personnages ont le même nom que d’autres personnages joués par d’autres acteurs dans vos autres films, pourquoi ce choix ?
TS : Le personnage de Dawn Wienner est arrivé dans Bienvenue dans l’âge ingrat et je l’ai tué dans Palindrome. Depuis j’ai voulu avoir l’opportunité de lui donner une trajectoire de vie différente, avec plus d’espoir et plus de romantisme. Cette fois il est incarné par l’actrice Gerta Gerwig. Trouver des nouveaux acteurs pour ces rôles leur apporte une nouvelle dimension, une nouvelle couleur. C’est un des plaisirs d’être cinéaste : vous pouvez créer d’autres vies. Cette idée trouve d’ailleurs son climax avec le personnage de Ellen Burstyn, qui est entourée de projections des différentes vies possibles qu’elle aurait pu avoir.

EN:Le personnage du prof de cinéma répète souvent ‘What if…then what ?’ à ses interlocuteurs, à votre tour. Et si vous pouviez changer quelque chose à l’un de vos films, alors quoi ?
TS : Je ne peux rien changer, et je dois l’accepter. Je n’y pense pas. Ce n’est pas logique pour moi parce qu’il n’y a pas de possibilité de modification, quand le film est fini et monté c’est terminé.

EN : Si vous aviez un gros budget avec plein de millions de dollars (sourire) pour faire un film, alors quoi ?
TS : Tout ce que j’ai besoin est le budget nécessaire pour mon scénario. Je ne commence pas par imaginer faire un film de 50 millions de dollars ou une autre somme extravagante. Je commence par travailler sur quelle histoire je veux raconter, et après on regarde pour trouver le budget.

EN : Et si Le Teckel recevait un prix du jury, quelle serait votre réaction ?
TS : Je pense que je ne pourrais pas être à la cérémonie de clôture parce que je dois rentrer avant. Quand on gagne une récompense dans un certain sens on revient vers l’enfance. C’est toujours amusant de gagner quelque chose mais en tant qu’adulte, on sait que ce genre de prix pour des films très différents en compétition ça n’a pas vraiment de sens. Quand on fait un film, on n’a aucune idée de savoir quel intérêt il pourra provoquer. C’est très agréable d’avoir un public pour son film, et une belle surprise de se rendre compte qu’il y a un public dans d’autres pays qui aime votre film.


   kristofy