Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24



Dans L'attente, sélectionné en compétition au dernier festival de Venise, le cinéaste Piero Messina met en scène une mère en deuil incapable d'avouer la mort de son fils à sa petite amie venue de France. Entre les deux femmes, magistralement incarnées par Juliette Binoche et Lou de Laâge, se tisse peu à peu une relation complice basée sur cette attente de l'homme aimé. Un film à la mise en scène élégante qui envoûte le spectateur par sa délicatesse.
EN : Comment avez-vous travaillé avec elles pour que toutes les émotions passent non pas par les dialogues, mais par leurs interactions, leurs gestes et leurs regards ?

PM : Dans ce film, les choses importantes ne se trouvent pas dans les mots mais dans les pauses. Même si cela peut paraître paradoxal nous l’avons atteint avant tout par un long travail d’écriture. Les dialogues sont la surface visible, il y a ensuite le sous-texte, et c’est de là que tout est né.
Avec les actrices ensuite, nous avons cherché à révéler ce que nous avions masqué dans l’écriture. Nous avons fait beaucoup de prises, et chaque fois on trouvait quelque chose de différent et de toujours plus beau. C’est chaque fois la même chose, quand tu cherches quelque chose sous le lit tu en trouves toujours une plus intéressante. L’important pour moi avec les acteurs est de chercher. Chercher ce qu’au début j’ai caché.

EN : Pouvez-vous nous parler de vos choix de mise en scène ?

PM : C’est une demande très complexe qui nécessiterait une réponse plus longue. Alors pour simplifier, je répondrais, pas comme réalisateur mais comme spectateur. Les films qui m’intéressent sont ceux que, lorsque je sors du cinéma, je n’arrive pas à raconter, parce que leur sens profond est lié indissolublement à la dimension audiovisuelle du film. En résumé, si tu peux raconter une chose parfaitement pour moi cela ne vaut pas la peine d’en faire un film. Peut-être que c’est la première chose qui me guide en tant que cinéaste.

EN : Comment obtenez-vous cette image très travaillée, avec notamment de très beaux clairs-obscurs ? PM : L’image est moins travaillée que ce que l’on pense. Cadrer de cette façon est pour moi une chose instinctive. Je ne vois pas une autre façon de le faire. Ou si parfois je le vois je m’ennuie.

EN : Quelles références picturales aviez-vous en tête en travaillant sur l'esthétique du film ?

PM : Je n’avais pas de références picturales précises, c’est certainement mon amour pour Piero della Francesca ou pour Antonello de Messine, pour la douceur des paysages de Millet mais aussi pour le baroque dans lequel je suis né, pour les choses fragiles, pour celles qui restent immobiles en équilibre ou pour les statues qui ne me semblent pas lourdes. Au delà de ce que sont mes références, la vérité est que chaque chose qui m’émerveille, chaque moment magique, au final entre dans ce que je fais. Et quand je suis chanceux je ne m’en aperçois même pas.


   MpM

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