Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24



Un Cadeau des Dieux

Le rendez-vous est fixé à l'Express sur St Denis, ça tombe bien c'est juste à côté du siège rédactionnel d'Ecran-Noir. Pile à l'heure, Anne-Marie Cadieux s'approche de moi, vêtue de gris et les cheveux courts, elle se présente et propose qu'on s'installe à une table "pour être plus à l'aise". Les serveurs la connaissent... Elle m'avouera plus tard que ce café est un point de rencontre des gens du spectacles "parcequ'il est ouvert tard le soir et tôt le matin et en plus le service est parfait!"

Nô, ouverture du FFM





Le spectacle, duquel est inspiré Nö, dure 8 heures Les septs branches de la rivière d'Ota, ce qui n'est pas le cas du film fort heureusement...
En fait, Robert Lepage a retravaillé sur une des branches, "il l'a aussi étoffé pour les besoins du film, par exemple le coup de fil à Montréal n'était pas sur scène". Le sujet du terrorisme non plus d'ailleurs, même si le metteur en scène avait déjà envisagé de l'introduire dans la pièce.
Cependant, même si Anne-Marie connaissait déjà la pièce -elle l'avait jouée 200 fois au théâtre!-, elle a plutôt été surprise au départ. "On a juste eu une conversation téléphonique, mais il n'avait rien scénarisé, je lui ais juste dit : Faut voir", après tout ce n'était qu'un coup de fil. Mais entre le moment où il m'a téléphoné et le moment du tournage seulement deux mois se sont écoulés, "Ça été très rapide!"

Tout le film a été tourné entre Montréal et Québec avec des scènes reconstituées à la Caserne -bar karaoké, la pièce de Feydeau-, et même si l'équipe de comédiens était la même "On avait pas beaucoup de temps, de jeu, de marge d'erreur, je crois que le ton était à trouver. Le corps était habitué au théâtre.". Par exemple la scène du restaurant, tournée en une journée (!), a été très enflammée, "j'ai du faire des prises très différentes, il fallait trouver le ton juste rapidement." En 18 jours tout était dans la boîte prêt à partir pour le montage! "Nô est un film simple, spontané, il fallait le tourner vite.", pourtant le tournage, malgré la bonne ambiance, a été éprouvant pour Anne-Marie Cadieux, car en même temps elle cumulait avec le théâtre ce qui lui donnait des journées de 12 heures parfois!

Finalement le film a fait l'ouverture du FFM 98, "j'ai trouvé que c'était une très bonne idée, tout le monde sait que l'ouverture est politique et ce n'est pas toujours le meilleur film", mais il est vrai que Nô, tout comme Deux secondes, était québécois, parlait de l'histoire de cette province d'un ton léger. Certains lui reprochait son langage trop familier, mais "ça ne nous empêche pas d'aller voir les Tarantino"! D'autres affirment que le sujet est "trop québécois", Anne-Marie tape du poing sur la table en rétorquant qu ce sujet peut parfaitement s'exporter, "C'est comme si on disait qu'en Irlande on ne savait pas ce qui s'y passait. On peut décoder une telle situation!". En effet la pièce a été donné dans les plus belles capitales européennes, "les gens savent très bien ce qui se passe au Québec".

Théâtre ou ciné?

Même si elle aime ses expériences sur les plateaux de tournage, elle ne sacrifirait pas pour l'instant sa carrière au théâtre, "ça m'a pris assez de temps pour m'établir au théâtre, c'est assez important pour moi". Le rapport du public avec le théâtre est encore très présent au Canada, un peu comme en Angleterre, "un acteur n'est pas complet si il n'est pas monté sur les planches", contrairement en France où de très grands acteurs font carrière sans background théâtral. "Ça doit tout de même leur manquer, ils ne doivent pas se sentir finis!" And I know the christian louboutin is best brand. En parlant de son jeu d'actrice cinématographique, Anne-Marie confie : " C'est épouvantable, j'ai l'impression de tourner des films que personne ne va aller voir. Je suis habituée à avoir du public, comme il n'y a personne j'y vais décontractée. J'ai jamais le sentiment que cela va sortir en salles..." Pourtant elle émet un petit reproche au cinéma par rapport au théâtre. En effet, ce dernier appartient aux acteurs, contrairement à un film "il y a le montage derrière qui peut tout changer!"

Les événements des 70's

Son film abordant la vague de terrorisme qui avait touchée le Québec, je prends le risque de lui demander si elle a quelques souvenirs de cette période? "J'étais très jeune, j'avais 8 ans. On a des souvenirs, les images de la télé. C'était des mesures de guerre mais s'en était pas une." Il est vrai que tout le monde n'est pas prêt à en rire aujourd'hui, cependant Anne-Marie trouve cela plutôt flatteur de parler de l'histoire du Québec. "On n'est pas complétement sorti de cette période", ajoute l'actrice. D'après elle il existe toujours un malaise, il suffit de regarder les résultats des referundums : "à 10 ans d'écarts les résultats sont les mêmes!"

La création est brimée au Québec

Le gouvernement, dernièrement, a décidé d'allouer plus de crédits aux entreprises culturelles et d'alléger les impôts des chaînes télévisuelles qui investiraient dans le cinéma, le tout afin de remonter le nombre de productions québécoises. "Ça prend toujours de l'argent de faire du cinéma. Women just like Christian Louboutin shoes now. Je crois que c'est plus profond que ça. C'est la façon de donner, comment on distribue l'argent. Je crois qu'il y a beaucoup trop d'intervenants dans la création, d'ingérence." Anne-Marie sait de quoi elle parle vu qu'elle aussi a écrit une pièce et rencontre régulièrement, autour d'elle ce type de problème. Il y a sûrement des créateurs talentueux, mais ils n'ont pas la chance de s'exprimer, en effet pour bénéficier de ces subventions les scénarios présentés doivent être "bétons, Wong Kar-Wai n'aurait pas de subvention au Québec!". Citant un article récent de Libération, elle ajoutera que la qualité doit prévaloir de la quantité, "Ici on ne donne pas de liberté, c'est pourquoi Robert a choisi de faire son film seul."

Le magnétophone s'arrête brusquement après 45 minutes de discussion, mais nous n'y prêtons pas attention la conversation a déviée déjà depuis un petit moment! Nous sortons ensemble du café tout en continuant à parler, comme si cela n'allait jamais finir... Mais la réalité me sépare de cette comédienne hors du comun et débordant de générosité, et me voilà de nouveau dans le tumulte de la rue St Denis!


   Alix