Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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Xun Zhou est peut-être moins célèbre chez nous que ses consoeurs Zhang Yiyi ou Gong Li, mais son parcours est tout aussi édifiant. Cette actrice chinoise enchaîne depuis une dizaine d'années les superproductions prestigieuses (L'empereur et l'assassin de Ken Chaige) et les films d'auteur plus underground comme Beijing bicycle de Wang Xiaoshuai ou Suzhou River de Lou Ye, pour lequel elle a obtenu le prix d'interprétation du festival de Paris en 2000. Alors qu'on va bientôt la découvrir dans Le banquet de Feng Xiaogang aux côtés de Zhang Yiyi, elle éclairait de son charme et de sa spontanéité le festival du cinéma chinois de Paris, où elle présentait deux de ses films : Perhaps, love de Peter Chan et La vie arrachée de Sheng Si Jie.
Ecrannoir : Vous avez joué dans des films de registres très différents (comédies sentimentales, drames historiques, films sociaux ou d'opinion), comment choisissez-vous vos rôles ?




Xun Zhou : Je suis quelqu'un qui ne planifie pas beaucoup. Quand je suis touchée par le script, j'accepte le rôle. En raison de mon évolution, j'apprécie des choses très différentes. Chaque film m'influence différemment. En Chine, contrairement à Hollywood, les acteurs n'ont pas de stratégie, ils suivent chacun leurs intérêts, leurs envies.

EN : Vous avez notamment tourné dans le film Beijing bicyclede Wang Xiaoshuai, un film social qui appartient à la veine réaliste du cinéma chinois. Avez-vous le projet de tourner à nouveau dans ce type de films ?
XZ : Oui, bien sûr, j'ai envie de continuer ! Ce que je trouve important, ce n'est pas l'expérience mais la compéhension que me donne le film. Chaque film me permet de comprendre des choses différentes sur la vie et sur le monde, mais aussi d'entrer en contact avec des univers que je n'aurais pas osé approcher. Par exemple, le monde de Suzhou river [NDLR : qui se passe dans un Shanghai relativement underground] m'a beaucoup plu.

EN : On observe l'émergence d'une nouvelle génération de réalisateurs qui essaye de montrer la réalité sous son jour le moins flatteur. Par exemple Zhang Lu avec Grain in ear, ou Jia Zhang Ke avec Plaisirs inconnus ou Le monde
XZ : J'ai des contacts avec cette nouvelle vague, même si je ne les connais pas forcément tous personnellement. Mais nous avons le même âge, nous avons grandi dans le même monde. Leur cinéma m'intéresse beaucoup. Par rapport à la 5e génération de cinéastes, ces réalisateurs sont plus libres. Pour eux, un film est avant tout axé sur l'histoire, et pas sur un message à faire passer.

EN : Etes-vous dans une optique de transmission ?
XZ : Oui, car les films doivent permettre aux spectateurs eux-aussi de comprendre des choses. Les films sont des vecteurs de communication entre mon monde et celui des spectateurs. Par exemple, les Français et les Chinois sont loin les uns des autres, mais ils éprouvent les mêmes sentiments. Ces sentiments sont des ponts qui permettent de communiquer entre les êtres… Je vis au jour le jour, je n'ai pas d'idée précise sur ce que je voudrais raconter, mais j'espère avoir une panoplie de rôles de plus en plus vaste, afin d'être en progrès constant. J'improvise beaucoup ma vie : si je reçois un script qui me touche, je n'hésite pas.

EN : Justement, qu'est-ce qui vous a plu dans le scénario de Perhaps, love, le film de Peter Chan pour lequel vous avez fait la tournée des festivals (Venise, Paris, Deauville) ?
XZ : J'ai été séduite par le thème de la mémoire. C'est l'histoire de trois personnes qui n'assument pas leur passé et ne le comprennent pas. Ils finissent malgré tout par se rejoindre, résoudre le problème du passé et tourner une nouvelle page. Il faut commencer une nouvelle vie, peu importe quand.

EN : Vous incarnez dans le film la même personne à deux époques de sa vie, plus un troisième personnage. Comment avez-vous travaillé pour être aussi convaincante dans ces trois rôles ?
XZ : Lorsque j'ai reçu le script, j'ai éprouvé des émotions très fortes et je les ai juste suivies… Au début, mon personnage est une jeune fille très naïve qui veut réussir son rêve. Mais elle rencontre des obstacles, alors elle devient une personne très froide.

EN : On perçoit une influence occidentale très nette dans Perhaps, love, notamment au niveau des chants, des chorégraphies, de la mise en scène… Comment expliquez-vous ce phénomène ?
XZ : Le marché chinois est encore peu important. Le cinéma chinois tente de se développer, de se créer un public. Aussi, pour rentabiliser les films, il faut se tourner vers un genre qui attire le plus de spectateurs possible. Et dans le monde entier, les gens aiment les films hollywoodiens…

EN : Et vous, quels étaient vos rapports avec le cinéma avant de devenir actrice ?
XZ : Mon père travaillait dans un cinéma donc j'ai toujours vu beaucoup de films. Ma vie, c'était les fims et ça l'est toujours… Je me souviens notamment d'Alain Delon, de Louis de Funès… et de Sissi.

EN : Voir tous ces films vous a-t-il donné envie de passer de l'autre côté de la caméra ?
XZ : Non, je n'y ai pas encore pensé… Et puis j'adore mon travail d'actrice !


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