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pret à porter altman Mode et cinéma
un couple fashion victim!

par Serge WINTOUR

Mode et cinéma sont deux univers aux caractéristiques prochesÊ: glamour, artifices, parures, quête esthétique,... Deux mondes d’images et d’artifices cherchant à représenter un large éventail d’émotions. Tout au long de leurs évolutions respectives, une relation particulière s’est nouée entre ces deux mondes, une relation explorée différemment selon les sensibilités des créateurs.

Le costume de cinéma ou comment l’habit fait le moine...
Des péplums aux grandes fresques historiques, des westerns aux films d’anticipation, le costume est au coeur de la construction du film. Au-delà des contingences de lieu et d’époque, le costume est essentiel quel que soit l’oeuvre. Le vêtement a pour fonction de contribuer à la définition d’une identité. C’est un des outils cinématographiques qui permet de traduire les états d’âmes des personnages.
La façon de se vêtir est une façon d’être : en adhésion ou en rejet des normes sociales. On s’habille non seulement pour avoir une apparence en adéquation à sa personnalité mais aussi par rapport aux autres. L’allure et ses codes sociaux contribuent à la définition d’un personnage. Dans le film 8 femmes, par exemple, François Ozon joue, en forçant les traits sur cette relation. Catherine Deneuve, en femme mûre, Isabelle Huppert en fille austère, Virginie Ledoyen en jeune fille légère, Fanny Ardant en femme fatale,... Dans les films d’anticipation ou les westerns, le registre des représentations est plus immédiat : des looks futuristes employant des matières techniques pour les film de S.F. ou costumes de cow-boys et d’indiens pour les westerns.



Dans certaines Ïuvres, une attention particulière est portée à la cohérence visuelle et à l’esthétique des réalisateurs. Les costumes créés par Yohji Yamamoto pour le film de Takeshi Kitano Dolls entraient, par exemple, complètement dans l’univers du cinéaste Japonais. C’était aussi une façon pour Yohji Yamamoto de renouer avec ses racines japonaises. La vision minimale et rigoriste de Yamamoto s’est adaptée de façon extraordinaire aux héros vagabonds de Dolls.
La froideur et le chic d’une Marlène Dietrich venaient de son goût unique pour choisir la bonne silhouette au bon moment. L’élégance romantique d’Audrey Hepburn venait de sa proximité avec le couturier Hubert de Givenchy. Ces figures emblématiques du 7e art étaient aussi des symboles d’une féminité intemporelle. Les relations entre les deux milieux peuvent résulter de la collaboration d’un cinéaste et d’un créateur de modeÊ: Jean-Paul Gaultier a, par exemple, collaboré avec Pedro Almodovar de façon régulière (la robe de Victoria Abril dans Kika ou la robe de Gael Garcia Bernal travesti dans La mauvaise éducation) ou avec Luc Besson sur le projet Le Cinquième Elément... L’univers de Pedro Almodovar ne serait pas aussi fort s’il n’avait pas fait ces choix de costumes. Avec ses personnages underground et excentriques, il fallait de l’extravagance.

lauren bacall Parures et artifices : jeux des apparences.
Le monde impitoyable de la mode peut être dépeint par les cinéastes. Falbalas, réalisé en 1945 par Jacques Becker, montre les tourments d’un jeune et brillant couturier. Cinquante ans plus tard, Robert Altman signe une satire du milieu avec Prêt-à-Porter;. Malgré les faiblesses du film, les coulisses de ces métiers fascinent. Ce sont les coulisses de la création. Pourtant, entre les deux films, les "couturiers" sont devenus des "créateurs" et les défilés ont quittés les salons feutrés et intimistes des ateliers pour devenir de grands shows.
Les univers cinématographiques peuvent aussi inspirer la modeÊ: les héroïnes Hitchcockiennes ont servi de modèles à la collection Alexander McQueen de l’hiver dernier, les films noir et blanc des années 30 plantent des atmosphères chics et raffinées, alors que les comédies musicales des années 60 évoquent les rêves poétiques, utopiques et psychédéliques.
Les actrices sont les héroïnes des sociétés modernes. Leurs vies sont vécues par des millions d’admirateurs à travers le monde. Un principe d’identification profond de toutes les sociétés à des héros réels ou imaginaires. Les stars sont des mythes, elles doivent en assumer le statut. L’admiration peut se tourner en haine en cas de grande controverse. La naissance de la star est conditionnée à son adéquation avec la société. Et celle-ci doit donc incarner le "style" de son époque. Brigitte Bardot n’est pas devenue, dans les années 60, une icône pour ses prestations cinématographiques mais B.B. incarnait une nouvelle façon d’être pour les femmes. Elle collait parfaitement à son époque. Après avoir acquis des droits politiques, la femme devenait plus indépendante. Elle était libre de pouvoir séduire à sa guise et d’être séduisante avec des vêtements simples et pratiques... Aussi, on peut dire que ce sont plus les raisons de porter une robe légère que la robe portée par B.B. en tant que telle qui explique la mode de la robe à carreaux Vichy.
Les comédies musicales West Side Story, Les Demoiselles de Rochefort évoquaient une société en changement. Le cinéma, comme la mode, est un miroir du monde. Il accompagne les grands phénomènes sociaux, éclaire sur les rapports humains et s’en alimente aussi. C’est un domaine d’émotions qui dépeint des façons de vivre. Le punk est né d’une révolte de la jeunesse des années 70. C’est un phénomène culturel global qui s’exprimera, aussi bien par un style vestimentaire que par un nouveau genre musical et une nouvelle esthétique visuelle. Si les grandes productions Hollywoodiennes contribuent à la reproduction des modèles sociaux du monde occidental libéral, certaines Ïuvres viennent témoigner de ce monde de façon plus intimiste comme Elephant de Gus van Saint ou Ken Park de Larry Clark. Ces Ïuvres ont une approche plus sociale, quasi sociologique, avec des esthétiques réalistes post-modernes.

scarlett johansson louis vuitton La starisation des images contemporaines.
Warhol était loin de soupçonner à quel point ses jeux sur les icônes du monde moderne allaient devenir le fer de lance de tous les stratèges du marketing. Quel outil de promotion international peut incarner le mieux la beauté, le rêve et le glamour ? La réponse est simple : une star de cinéma. Certaines actrices sont ainsi devenues les égéries de certaines marques de prestige.
Incarnation d’un modèle de beauté, le cas de Catherine Deneuve est unique. Elle a été l’une des premières actrices à prêter son visage à des maisons de mode : Chanel pour la promotion du parfum "N°5" aux Etats-Unis, Yves Saint Laurent, L’Oréal,... ou le maquilleur américain branché MAC cette saison. Catherine Deneuve demeure, à toutes les époques, le symbole d’une féminité raffinée. Jouant de son statut, sa présence à un défilé est une caution pour les créateurs et elle leur reste fidèle. Les maisons Jean-Paul Gaultier, Prada ou Louis Vuitton composent, généralement, sa garde-robe. Une vraie exception dans cet univers du marketing de luxe focalisé sur les starlettes en vogue. La publicité s’abat sur la moindre nouvelle chaire fraîche : Charlize Théron pour Dior, Scarlettt Johannson pour Louis Vuitton (après Calvin Klein) et autres Kirsten Dunst ont déjà acquis le statut d’icônes alors qu’elles ont moins de 10 ans de carrièresÉ Est-ce la pub qui les rend célèbres ou la célébrité qui attire les publicitaires? Phénomène émergent, on peut aussi axer sa stratégie sur une femme mûre et célèbre (certainement pour parler à la nouvelle ménagère de moins de 50 ans qui est moins passive et dupe qu’auparavant) : Kim Basinger pour Miu Miu ou Sharon Stone pour Dior (simultanément à la sortie de Basic instinct 2 ou comment profiter mutuellement d'un même intérêt pour une star) sont les premiers signes de cette tendance.
Ce contexte conduit parfois à confondre notoriété et talent, beauté et charme, féminité et romantisme. La course aux stars est telle qu’une icône "in" peut se retrouver sur plusieurs pages d’un même magazineÊ: une publicité pour des accessoires ou de la joaillerie, une affiche de film ou une annonce d’une sortie DVD. Si on ajoute un peu de rédactionnel et certains commentaires sur les silhouettes sur les "red carpets"; de la planète, ces jeunes filles sont, rapidement, au cÏur de tous les commentaires du petit milieu de la mode et de toutes les fashionistas... La bible de la mode, le VOGUE américain, a fortement contribué à ce phénomène. Depuis quelques années, en effet, les stars Hollywoodiennes ont supplanté les mannequins en couverture du magazine. Suivi par tous ses concurrents, les mondes du people et de la mode se sont rapprochés.
Et les hommes ne sont pas exclus de ce jeu : TAG HEUER rendant hommage à la montre de Steve McQueen ou le tailleur Italien Emergildo Zegna prenant l’oscarisé Adrian Brody dans ses publicités. Les célébrités doivent venir légitimer la compétition acharnée des marques de luxe pour maintenir leur prestige et leur côté glamour. Le rêve est à ce prix. Et ça paye bien que ce soit les visages L'oréal (Andy MacDowell, Gong Li, Jennifer Lopez), les affiches H&M (Johnny Depp, Claudia Schiffer) ou les événements La Redoute (Adjani, Béart, la fille Mastroianni, la soeur Seigner).

Ces relations entre les deux milieux sont avant tous des relations entre des créatifs aux sensibilités proches. La cinéaste Sofia Coppola, par exemple, est la muse de Marc Jacobs et la jeune Scarlett Johanson, vedette de son film Lost in translation, est devenue l’égérie de Louis Vuitton dont le designer n’est autre que Marc Jacobs... Au-delà des flashs et des projecteurs, l’essentiel est lorsqu’une démarche artistique croise un univers créatif fort. C’est le dialogue entre créateurs qui permet certains résultats spectaculaires comme entre Almodovar et Jean-Paul Gaultier ou entre Yohji Yamamoto et Takeshi Kitano. Ce sont ces parti-pris qui marquent l’histoire esthétique du cinéma.

Serge Wintour

 

(c) Ecran Noir 2006