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Nicole Kidman sur Ecran Noir
The others
USA - Espagne / 2001
Sortie US le 10 août 2001
Présenté au festival de Venise 2001

Production : Dimensions Films, Cruise-Wagner, Le StudioCanal+, Las Producciones del Escorpion
Réalisation, scénario, musique : Alejandro Amenábar
image : Javier Aguirresarobe

CASTING :

Nicole Kidman (Grace) - Fionnula Flanagan (Mrs. Mills) - Christopher Eccleston (Charles) - Elaine Cassidy (Lydia)

Grace élève ses deux enfants dans un manoir un peu décrépi. Son mari n'est jamais revenu de la seconde guerre mondiale.
Ses enfants, Anne et Nicholas, ont cependant un "petit" problème. Ils doivent continuellement vivre dans le noir car ils sont allergiques à la lumière. Mortellement allergiques.
Trois personnes se présentent alors pour devenir ses domestiques: une nounou agée, un jardinier aux vieux os et une petite fille muette.
Quand un jour Grace surpend sa fille Anne en train de parler à des gens que personne ne voit...
The Others sort dans un contexte délicat. La semaine de la sortie de The Others aux Etats Unis, rien ne semblait prédestiné ce film à un succès honorable. Mais un peu de publicité people ne fait jamais de mal : Tom Cruise étant producteur exécutif du film et Nicole Kidman l'actrice principale, il fallait s'attendre à une avant-première médiatique. Les deux stars ont en effet finalisé leur divorce la même semaine.
A cela s'ajoute que la concurrence est rude : les suites font des ravages au Box Office. Kidman a déjà sorti un film au début de l'été (Moulin Rouge, 60 millions de $ de recettes aux USA). Mais il est vrai que peu de films ont flirté avec le genre de The Others, le cinéma d'horreur.
Le film sort donc modestement dans 1600 salles, deux fois moins que la norme estivale. Dimensions le vend plutôt comme un Shining ou un 6ème Sens qu'un Scream. Mais le studio espère attirer les femmes et les adultes à cette histoire psychologiquement tordue. Bref, The Others doit être un succès inattendu, un choix alternatif qui se singularise de ses concurrents. Tous les atouts y sont.
D'abord le réalisateur. Alejandro Amenábar. Cinéaste espagnol dont c'est le premier film en anglais. On l'a découvert avec des films originaux et déconstruits, un tant soit peu barges, comme Thesis, Ouvre les yeux (avec Penelope Cruz, la nouvelle copine de Cruise). Il a notamment révélé l'acteur Eduardo Noriega. Il a aussi écrit l'histoire de Vanilla Sky, le prochain film de Cameron Crowe, avec ... Tom Cruise et Penelope Cruz. Le monde est petit. Ceci dit Vanilla Sky n'est autre que le remake de Ouvre les yeux.
Mis à part tout cela, Amenábar est un des jeunes réalisateurs les plus prometteurs du nouveau cinéma espagnol, soignant ses cadres, sa lumière, son montage et racontant des histoires toujours plus horribles les unes que les autres, à propos de la solitude et de l'isolement, de la paranïa que cela entraîne. C'est un réalisateur qui met la psychologie au coeur des émotions. The Others, qui a reçu de bonnes critiques, est considéré comme un film de peur plus noire et plus profonde.
Les critiques se sont surtout emballés pour la comédienne. Kidman a récolté tous les lauriers. Après l'Australien Luhrmann, avant le danois Von Trier, elle s'est autorisé un détour dans cet univers inquiétant. Elle assoit ainsi sa dimension d'actrice en marge, mais de star de toutes les audaces. A chaque fois, elle nous épate un peu plus par la variété de ses rôles. Elle devrait être la grande gagnante de cette production. Et pourquoi pas un Prix à Venise où le film est sélectionné en Compétition Officielle. De quoi augmenter l'impact qualité de la campagne marketing.
Le film, s 'il prend place sur une île anglaise, a été tourné en Espagne, à Santander, à El Palacio de Hornillos, à l'automne 2000. Avec un budget modeste de 20 millions de $ il semble déjà rentabilisé.
FERME LES YEUX

"Je ne crois pas que Dieu ait créé le monde en 7 jours. Ou que tous ces animaux soient montés sur un seul bateau..."

Le surnaturel hante le cinéma contemporain , comme pour compenser l'absence de spirituel dans notre monde matériel. The Others poursuit cette veine et s'inscrit dans les films de fantômes.
Celui-ci est habile. Construit à partir d'un scénario solide, sur une idée astucieuse si ce n'est plus, dans le cadre d'un enfermement à huis-clos, avec des dialogues qui permettent de décoder la vérité (le dénouement) et une mécanique bien huilée où la surenchère accroit nos frayeurs.
Car le mystère s'installe dès le départ avec un hurlement cauchemardesque, un démarrage qui appelle un explication.... à la fin du film. Parsemé d'indices, le script nous envoie de l'autre côté d'un miroir. Trois personnages, trois femmes, nous inquiètent. Les trois semblent coupables, cachant un secret. Les trois paraissent folles et deviennent ennemis : la fille, la mère et la gouvernante. "La plus dure à convaincre sera la mère". De fait.
Nicole Kidman se livre à une performance éblouissante de fragilité et de détermination délirante. En incarnant cette femme au bord de la crise de nerfs à la perfection, elle prouve à travers chacun des gros plans la tension, les nuances, la folie qui la foudroient. On la croit victime, responsable et coupable, parano, traquée, piégée dans son cauchemar (son "purgatoire"); elle est tout cela. Chacune de ses certitudes s'écroule. Elle aura beau seerré son chapelet ou sa croix, s'accrocher à la Bible, rien n'y fera. La vérité est ailleurs.
Ces trois femmes jouent à se faire peur. Elles essaient de convaincre l'autre qu'elle dit vrai. Les fantômes n'existent pas ("des fables")? Il n'y a pas d'intrus dans la maison? Dans ce jugement final, où la seule justice est bien d'être hantée par sa vie et ses péchés, il n'y a pas de morale. Juste des circonstances atténuantes.
Ce château devient ainsi l'antichambre de la vie éternelle.
La force du film réside bien dans la maîtrise du sujet et son infaillible scénario. Jamais le cinéaste ne s'égare. Son suspens ne sert qu'à démontrer ce qu'on apprendra lors du final. On est plongé dans l'esprit schyzo d'une veuve qui ne s'avoue pas la vérité, qui ne savoure plus la vie.
Au fond, ce thriller psychologique est terrifiant car les personnages sont banals, sans excès apparents. La peur est froide. Il n'y a pas de sang. A peine une menace fantôme. En fait, l'horreur s'infiltre en nous lorsqu'on devine poruquoi cette femme a crié un beau matin d'après guerre.
insupportable. Et sans effets spéciaux, le film atteint son but: nous surprendre. Il suffira de revoir l'histoire, la même, en fermant les yeux.

Vincy 

 (C) Ecran Noir 2001