Cannes 2015 : La légende de la Palme d’Or, 60 ans, un docu et des témoignages prestigieux

Posté par kristofy, le 17 mai 2015

Cette année c’est le 68e Festival de Cannes, mais ce n'est que le 60e anniversaire de la Palme d’Or. Le plus prestigieux des trophées du cinéma est à la fois un objet de fantasme et symbolise un film considéré comme un chef-d’œuvre. La Palme d’Or et son histoire (surtout récente) est l’objet d’un documentaire qui vient donc d’être découvert dans son berceau, le Festival de Cannes, en séance spéciale. L’objet a changé de design et de présentation. Depuis quelques années, il est en or 18 carats élaboré par le joaillier Chopard, à la fois partenaire du festival et mécène de ce documentaire. On y voit quelques séquences à propos de la fabrication (jusqu'à l’extraction de l’or en Colombie).

La légende de la Palme d’Or réalisé par Alexis Veller est d’ailleurs en lice cette année à la fois pour le prix de la Caméra d’Or (c’est un premier film) et pour le prix l’œil d’Or du documentaire. A la projection, il y avait donc le jury emmenés par Sabine Azéma (avec aussi Delphine Gleize, Yann Gonzelez…) et celui de Rithy Panh (avec aussi Nicolas Philibert, Irène Jacob…). Dans la salle étaient aussi présents d’autres invités comme le producteur Harvey Weinstein et le chanteur Robbie Williams.

Ce documentaire invite une poignée de réalisateurs à faire part de leurs souvenirs à propos de leur Palme d’Or à eux. Témoignages, en vrac.

Wim Wenders, Palme d’Or 1984 pour Paris-Texas, évoque un fardeau qui l'aurait empêché de tourner durant 3 ans. En 1989 quand il était à son tour président du jury, il a remis ce trophée à un tout jeune cinéaste inconnu de 26 ans : Steven Soderbergh pour Sexe, Mensonge et Vidéo.
Steven Soderbergh révèle l'anecdote savoureuse à propos du destin : cette année là Wenders était président à la place de Francis Ford Coppola initialement prévu, et son film était d’abord à Un Certain Regard avant d’être placé en compétition officielle à la place d’un film de Dennis Hopper...
Emir Kusturica est lui l’un des rares cinéastes à avoir gagné deux Palme d’Or (en 1985 avec Papa est en voyage d’affaire, puis en 1995 pour Underground). Absent lors de la clôture pour sa première Palme, le prix avait été pris sur scène par son producteur que beaucoup ont confondu avec lui. C’est Kusturica devenu à son tour président qui fera des frères Luc et Jean-Pierre Dardenne les récipiendaires d’une deuxième Palme d’Or (en 2005 pour L’enfant, après celle en 1999 pour Rosetta).
Ils nous apprennent que c’est la direction du Festival de Cannes qui, le dernier jour après les délibérations du jury, les prévient par téléphone que leur présence est souhaitée pour la cérémonie de clôture, sans préciser pour quel prix.
Nanni Moretti confie qu’il aurait bien aimé avoir un autre prix après sa Palme d’Or en 2001 pour La chambre du fils, mais en 2006 pour Le Caiman il a attendu vainement un coup de téléphone qui n’est jamais arrivé. Le cinéaste italien avait d’ailleurs pris soin de garder sa palme avec lui dans l’avion. Mais en arrivant chez lui, il s’est aperçu qu’il avait en fait oublié le sac dans l’aéroport (qu'il a vite retrouvé).
En général la plupart des cinéastes interrogés confie avoir rangé ce trophée à l’abri, dans un placard de leur bureau. Sauf Apitchatpong Weerasethakul qui lui en fait don à la cinémathèque de Thaïlande. Ainsi en 1994 Quentin Tarantino avait été prévenu de ne pas repartir de Cannes. Une rumeur évoquait Trois couleurs : Rouge de Kieslowski, alors il pensait avoir un prix du scénario ou celui de la mise en scène ou alors un prix d’interprétation pour John Travolta ou un prix spécial au fur et à mesure de l’énonciation des différents prix. Puis est venue l’annonce de la Palme d’Or : le jury de Clint Eastwood et Catherine Deneuve avait choisi Pulp Fiction ! Il entrait ainsi dans le panthéon des meilleurs cinéastes du monde.
Seule femme à avoir gagné ce prix, Jane Campion (en 1993 pour La leçon de piano) évoque un souvenir plus douloureux : à l’époque du festival elle était enceinte, mais son bébé est décédé quelques jours après sa naissance. Elle a mis du temps à reconsidérer cette récompense.
Martin Scorsese se rappelle de sa Palme d’Or (en 1976 pour Taxi Driver) et considère sa récompense comme la plus précieuse, celle qui symbolise un encouragement à devenir plus audacieux dans ses films suivants.

C’est Emir Kusturica qui aura la phrase qui résume le pouvoir de la Palme d’Or : « ce n’est pas comme les Oscars, la Palme d’Or c’est un jugement esthétique ».

Et enfin, une devinette : quel acteur américain est au générique de trois films qui ont gagnés la Palme d’Or ?

Berlin 2015 : retour mitigé pour Wim Wenders

Posté par MpM, le 11 février 2015

L'un des événements de cette 65e édition du Festival de Berlin est l'hommage rendu à l'enfant du pays, le cinéaste Wim Wenders, qui s'apprête à recevoir samedi, au moment de la proclamation du palmarès, un Ours d'or récompensant l'ensemble de sa carrière débutée il y a 45 ans.  Par ailleurs, le réalisateur palmé en 1984 pour Paris, Texas revient à la fiction pour la première fois depuis 2008 avec son nouveau long métrage Every thing will be fine.

Le film, présenté hors compétition, a été tourné en 3D et réunit James Franco, Charlotte Gainsbourg, Rachel McAdams et Marie-Josée Croze dans une histoire assez classique de culpabilité, de travail de deuil et de rédemption.

"Pour moi, le sujet principal de ce film est la guérison, la façon dont on pardonne aux autres et dont on se pardonne à soi-même" a expliqué le réalisateur lors de la conférence de presse. "Il n'y a pas assez de films qui parlent de la guérison (...) La plupart parlent de la blessure."

Il est vrai qu'on peut reconnaître au film une certaine sobriété dans l'exposition des situations les plus mélodramatiques. Cette retenue dans la mise en scène est hélas contrebalancée par  la musique, lyrique et omniprésente, qui semble souligner la moindre petite émotion. Le rythme, lui, peine à s'installer, entre une première partie plus dense et plus profonde et des "sauts dans le temps" qui donnent l'impression d'une dilution de l'intrigue.

Les questions posées (Qu'est-ce que la responsabilité ? Combien de temps dure la culpabilité ? Comment faire son travail de deuil ? etc.) trouvent des réponses évasives et relativement convenues, là où on attendait de l'introspection et de la subtilité. Les atermoiements des personnages peinent alors à nous toucher, voire à nous intéresser, malgré la (trop) forte charge émotionnelle qu'ils véhiculent.

Même l’utilisation de la 3D laisse perplexe. Wenders est un des réalisateurs qui semblait avoir donné ses lettres de noblesse au genre avec son très beau Pina, où le corps des danseurs, perçu en trois dimensions, occupait tout l'écran. Ici, on oublie assez rapidement le procédé, qui n'apporte pas grand chose au récit, si ce n'est quelques effets de changement de focale, et une très belle scène d'ouverture où la caméra parvient à capter les minuscules particules de poussière qui flottent dans l'air.

Après le magnifique Sel de la terre, documentaire sur Sebastião Salgado, les attentes étaient élevées, et la déception est forcément proportionnelle. Il est tout de même curieux que Wenders, qui réalisa une oeuvre de fiction aussi dense que captivante, peine désormais à s'y confronter, alors même qu'il confine au génie dans le documentaire.  Bien sûr, l'expérimentation est à présent au cœur de son travail, ce qui peut être une piste pour expliquer le soin extrême apporté à la réalisation, au détriment du scénario et du récit, mais il n'en demeure pas moins frustrant de voir littéralement gaspillées des propositions de cinéma qui, utilisées à bon escient, seraient plus ambitieuses et excitantes que la majorité de la production contemporaine.

Berlin 2015: 23 films dans la sélection officielle

Posté par vincy, le 19 janvier 2015

berlin 201519 films sont en compétition pour la 65e Berlinale (5-15 février) et quatre autres sont hors-compétition: la sélection officielle est bouclée avec 21 avant-premières mondiales et des films venus de 29 pays (en comptant les coproductions). géographiquement, le Festival de Berlin fait la part belle à l'Asie et  l'Europe. Notons les films attendus de Wim Wenders, Werner Herzog, Pablo Larrain, Terrence Malick, le dernier Benoît Jacquot et le nouveau Jafar Panahi.

45 Years Andrew Haigh

Aferim! Radu Jude

Als wir träumten (As We Were Dreaming) Andreas Dresen

Body Malgorzata Szumowska

Cha và con và (Big Father, Small Father and Other Stories) Phan Dang Di

Cinderella - hors compétition - Kenneth Branagh

Eisenstein in Guanajuato Peter Greenaway

El botón de nácar (The Pearl Button) - documentaire - Patricio Guzmán

El Club (The Club) Pablo Larraín

Elser (13 Minutes) - Hors compétition - Oliver Hirschbiegel

Every Thing Will Be Fine - Hors compétition - Wim Wenders

Ixcanul (Ixcanul Volcano) - premier film - Jayro Bustamante

Journal d'une femme de chambre (Diary of a Chambermaid) Benoit Jacquot

Knight of Cups Terrence Malick

Mr. Holmes - hors compétition - Bill Condon

Nobody Wants the Night - film d'ouverture - Isabel Coixet

Pod electricheskimi oblakami (Under Electric Clouds) Alexey German

Queen of the Desert Werner Herzog

Taxi Jafar Panahi

Ten no chasuke (Chasuke's Journey) Sabu

Vergine giurata (Sworn Virgin) - premier film - Laura Bispuri

Victoria Sebastian Schipper

Yi bu zhi yao (Gone with the Bullets) Jiang Wen

Wim Wenders, hommage et Ours d’or d’honneur à la Berlinale 2015

Posté par vincy, le 21 août 2014

wim wendersLa Mostra de Venise n'a pas encore commencé que le prochain Festival de Berlin lance déjà son offensive. Le 12 février 2015, Wim Wenders recevra un Ours d'or d'honneur pour l'ensemble de sa carrière. La 65ème Berlinale projettera à cette occasion Les Ailes du désir.

"Nous honorons l'un des plus remarquables auteurs contemporains. Sous toutes ses facettes, son travail en tant que réalisateur, photographe et écrivain a forgé notre mémoire du cinéma et inspire toujours les réalisateurs" a expliqué Dieter Kosslick, directeur du Festival. Une rétrospective de dix films sera programmée. Il est l'un des réalisateurs allemands les plus récompensés de l'histoire du cinéma. A Cannes, il a reçu le Prix de la critique internationale (Au fil du temps), la Palme d'or (Paris, Texas), le prix de la mise en scène (Les Ailes du désir), le Grand prix du jury (Si loin, si proche!),  et le prix spécial du jury Un certain regard cette année (Le sel de la Terre). Lion d'or à Venise (L'Etat des choses), deux fois cité aux Oscars (dans la catégorie meilleur documentaire), trois fois nominé au César du meilleur film étranger, prix du jury à Berlin (The Million Dollar Hotel), Wenders a expérimenté tous les genres, croisant ses influences (photographie, cinéma américain, documentaire, théâtre) et les styles (western, science fiction, polar, mélo).

Son dernier film, Le sel de la terre, un biopic documentaire, sort le 15 octobre dans les salles françaises.

Cannes 2014 : un palmarès bien vu pour Un Certain regard

Posté par vincy, le 23 mai 2014

white god cannes 2014Présidé par Pablo Trapero, le Jury d'Un Certain regard du 67e Festival de Cannes n'a pas récompensé de mise en scène ou une actrice en particulier. Mais le palmarès de cette section ne comporte aucun faux pas. Le Jury se dit "honoré et ravi d’avoir pu visionner pendant 10 jours tant d’excellents films témoignant de la diversité et de la vitalité de la cinématographie mondiale d’aujourd’hui" et se dit "impressionné par la force et l’originalité des œuvres présentées".

De fait, d'Hongrie, de Suède, de France, d'Allemagne ou d'Australie, comédiens amateurs ou véritable aborigène, fiction politique ou exercice de style séduisant autour du couple, les films récompensés sont un condensé d'un cinéma mondial non formaté, tout en étant divertissant et intéressant.

PRIX UN CERTAIN REGARD : White God de Kornél Mundruczó (qui avait reçu le prix de la Critique internationale pour Delta en en 2008 alors qu'il était en compétition).

PRIX DU JURY : Force majeure (Turist) de Ruben Östlund.

PRIX SPECIAL DU CERTAIN REGARD : Le sel de la terre de Wim Wenders et Juliano Ribeiro Salgado.

PRIX D’ENSEMBLE : Party Girl de Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Theis (un premier film).

PRIX DU MEILLEUR ACTEUR : David Gulpilil pour Le pays de Charlie (Charlie's Country) de Rolf de Heer

Cannes 2014 : Capra, Wenders, Oshima, Hitchcock, Truffaut, Kieslowski parmi les chefs d’oeuvres de Cannes Classics

Posté par MpM, le 30 avril 2014

cannes 2014Voilà déjà dix ans que le Festival de Cannes a créé la section Cannes Classics qui met à l'honneur le travail de valorisation du patrimoine effectué à travers le monde par les sociétés de production, les ayants droit, les cinémathèques ou les archives nationales.

Films anciens et chefs-d’œuvre de l’histoire du cinéma sont ainsi présentés dans des copies restaurées, en présence de ceux qui les ont restaurés et, quand ils sont encore vivants, de ceux qui les ont réalisés ou interprétés. Une manière pour le Festival "d’enchanter le rapport du public d’aujourd’hui avec la mémoire du cinéma" en accompagnant toutes les nouvelles exploitations des grandes œuvres du passé.

Pour cette 67e édition, 22 longs métrages et deux documentaires ont été sélectionnés. Ils seront projetés selon le désir de leurs ayants droit en format DCP 2K ou 4K. Comme le souligne le Festival "pour la première fois, qu’on le déplore ou qu’on le célèbre, aucune copie 35mm ne sera projetée à Cannes Classic". La fin d'une époque ?

Après la blonde Kim Novak, c'est Sophia Loren qui sera l'invitée d'honneur de la sélection. Pour l'occasion, deux films seront montrés en sa présence : La voce umana d'Edoardo Ponti qui marque son retour au cinéma et Mariage à l'italienne de Vittorio De Sica dont on fête le 50e anniversaire. L'actrice a par ailleurs accepté de présenter une "masterclass".

Deux autres anniversaires seront particulièrement célébrés : celui du western italien, né en 1964, avec la projection de Pour une poignée de dollars de Sergio Leone et celui de la Palme d'or 1984, l'envoûtant Paris, Texas de Wim Wenders.

Le reste de la sélection est éclectique et savoureux, permettant de naviguer un peu au hasard dans le meilleur du patrimoine cinématographique ou au contraire de découvrir des œuvres méconnues : Regards sur une révolution : comment Yukong déplaça les montagnes de Marceline Loridan et Joris Ivens, Contes cruels de la jeunesse de Nagisa Oshima, Les croix de bois de Raymond Bernard, Overlord de Stuart Cooper, La peur de Roberto Rossellini, Le hasard de Krzysztof Kieslowski, Le dernier métro de François Truffaut (à l’occasion des trente ans de la disparition de François Truffaut), Dragon Inn de King Hu, Le jour se lève de Marcel Carné, La couleur de la grenade de Sergei Parajanov, Leolo de Jean-Claude Lauzon, La vie de château de Jean-Paul Rappeneau, La taverne de la Jamaïque d'Alfred Hitchcock, Les violons du bal de Michel Drach, Les montagnes bleues d'Eldar Shengelaia, Horizons perdus de Frank Capra, La chienne de Jean Renoir, Tokyo Olympiades de Kon Ichikawa.

Il faut ajouter deux documentaires produits cette année : Life itself de Steve James, sur le critique de cinéma américain Roger Ebert, et The go-go boys: the inside story of cannon films sur l’histoire de Cannon Films et des producteurs Menahem Golan et Yoram Globus.

Enfin, Cannes Classics s'invite à nouveau au Cinéma de la plage (dont le programme complet sera annoncé ultérieurement) en faisant l'ouverture avec Huit et demi de Federico Fellini, projeté en hommage à Marcello Mastroianni et en écho à l’affiche de cette 67e édition du Festival.

Unperfect Day pour Lou Reed (1942-2013)

Posté par vincy, le 28 octobre 2013

lou reed dans brooklyn boogie de paul auster

Il y a des week-ends comme ça. Soudainement, on apprend la mort d'un artiste. Lou Reed, 71 ans, disparaît. Pilier du Velvet Underground, inventeur d'un rock décadent, provocateur médiatique, il aura souffert d'avoir écrit des textes trop sombres pour que ses chansons deviennent aussi populaires que celles de son ami David Bowie. Il n'empêche, en 50 ans, le new yorkais, proche d'Andy Wahrol, est devenu une icône d'un rock sublime, laissant plusieurs chansons intemporelles, souvent réutilisées dans les bandes originales de film. Ainsi on entend du Lou Reed dans des films aussi différents que Men in Black III, Juno, Le scaphandre et le papillon, La science des rêves, Last Days, La famille Tenenbaum, Hedwig and the Angry Inch, Lost Highway , Trainspotting, Les Doors, Soleil de nuit... Les chansons Venus in Furs, Perfect Day, Walk on the Wild Side, Sweet Jane, Satellite of Love, I'm Sticking With You, entre autres, sont à jamais liées à des images de films en tous genres.

Lou Reed fut de temps en temps acteur. Aux côtés de Paul Simon dans One Trick Pony en 1980, chez Paul Auster dans Brooklyn Boogie en 1995 (photo) et Lulu on the Bridge en 1998, dans Prozac Nation, avec Christina Ricci et Jonathan Rhys Meyers en 2001, chez Luc Besson où il fut la voix de l'empereur Maltazard dans la franchise Arthur et les Minimoys en version anglophone. On l'aperçoit chez Wim Wenders dans son propre rôle dans Si loin, si proche! en 1993 et dans Palermo Shooting en 2008.

Mais peut-être que le plus beau personnage de Lou Reed au cinéma fut sans Lou Reed. En 1998, Todd Haynes réinterpréta les origines du glam rock, ce genre porté à son paroxysme par David Bowie, et des racines du punk, dont Reed mais aussi Brian Eno furent les démiurges. Le titre même du film - Velvet Goldmine - est une référence à sa Vénus en fourrure. Surtout, le personnage d'Ewan McGregor, Curt Wild, est un mélange assumé de Bowie, d'Iggy Pop et Lou Reed.

A 17 ans, Lou Reed avait subit un traitement par électrochocs, proposées à ses parents par un psychiatre, afin de le « guérir » de ses tendances homosexuelles. Expérience traumatisante qui l'entraîna à consommer des médicaments de façon dépendante et lui fit écrire des textes crus et choquants où la violence, la provocation, la dureté de la vie, la marginalité des homos, bi et autres trans étaient évoqués. Sébastien Lifshitz (Les Invisibles), qui avait donné le titre Wild Side à l'un de ses films en hommage à la chanson la plus célèbre du musicien, avait le projet de réaliser un documentaire sur cette partie de sa personnalité. Le cinéaste français espérait le tourner une fois que Reed se soit remis de sa greffe du foie, qui, hélas, lui fut fatale.

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Lire aussi : Berlin critique du documentaire sur le concert de Lou Reed réalisé par Julian Schnabel

… et Charlotte Gainsbourg chez Wim Wenders

Posté par vincy, le 13 août 2013

Tandis que Jeff Nichols enrôle Kirsten Dunst (lire notre actualité), la deuxième comédienne de Melancholia, Charlotte Gainsbourg, enrichit sa filmographie internationale. Après Von Ttrier, David Bailey, Alejandro Gonzalez Inarritu, Todd Haynes, Emanuele Crialese, James Ivory, l'actrice-chanteuse sera dans le prochain film de Wim Wenders. Le tournage d'Every Thing Will Be Fine débute aujourd'hui (lire aussi notre actualité). Le film sera en 3D et devrait être en salles fin 2014.

James Franco et Marie-Josée Croze ainsi que Sarah Polley font partie de la distribution. Le scénario est signé du Norvégien Bjørn Olaf Johannessen (Nowhere Man). Wenders racontera l'histoire d'un écrivain dont la vie est radicalement transformée après un accident de voiture.

Gainsbourg sera la première compagne de Franco, qui avait convoité la belle Kirsten Dunst dans Spider-Man. La boucle est bouclée.

Cannes 2013 : les télex du marché (6) : James Franco & Wim Wenders, Le petit Nicolas, l’incroyable casting d’Audrey Dana, Dev Patel

Posté par vincy, le 22 mai 2013

Tabernacle! James Franco sera la star du prochain film (en 3D) de Wim Wenders, Every Thing Will Be Fine.  Le tournage commencera en août au Québec. Sarah Polley pourrait faire partie du générique.

Holidays! Le petit Nicolas, fort de son succès en salles en 2009 (5,5 millions d'entrées), aura une suite, Le petit Nicolas en vacances. Laurent Tirard sera toujours derrière la caméra et le film devrait sortir en juillet 2014.

Dana's Eleven. La comédienne Audrey Dana passe à la mise en scène. French Woman sera une comédie féminine racontant le destin croisé de 11 femmes. Et attention au casting : Vanessa Paradis, Isabelle Adjani, Laetitia Casta, Alice Taglioni, Marina Hands, Sylvie Testud, Géraldine Nakache, Julie Ferrier, Mélanie Doutey, Alice Bellaïdi (et Dana elle-même) formeront le casting. Le tournage débute mi juin à Paris.

Nombres premiers. Dev Patel, la vedette de Slumdog Millionaire, jouera dans The Man who Knew Infinity, biopic du légendaire mathématicien indien Srinivasa Ramanujan, d'après la biographie de Robert Kanigel. Le film sera scénarisé et réalisé par Matthew Brown.

Le cinéma allemand, un ami pas forcément privilégié (Das deutsche Kino, ein nicht notwendigerweise privilegierter Freund)

Posté par vincy, le 22 janvier 2013
Juliette Binoche et Yves Montand sur le Mur de Berlin © vincy thomas

Juliette Binoche et Yves Montand sur le Mur de Berlin © vincy thomas

50 ans d'amitié franco-allemande et après? Les Français ne parlent pas plus allemand. Même s'ils aiment aller faire la fête à Berlin, boire de la bière à Munich, se laisser charmer par les villes rhénanes, admirer le dynamisme d'Hambourg... On lit parfois des auteurs allemands, une élite culturelle vénère danseurs, metteurs en scène et opéras des voisins de l'Est, on écoute rarement de la pop ou du rock germanique, et il n'y a bien que les quelques centaines de milliers de téléspectateurs d'ARTE qui regardent des programmes bilingues. L'Allemagne c'est quoi finalement pour un Français? La rigide chancelière, des marques de voiture, Hugo Boss, éventuellement la coopération aéronautique, des supermarchés low-cost, des Kinders avec un cadeau à l'intérieur, les immuables Playmobil, Adidas, de la colle Uhu, de la crème Nivea, des appareils Siemens...

Et le cinéma? Il est de plus en plus "absent". En France, le cinéma allemand est vu de la même manière que le cinéma belge, italien ou scandinave. Les cinéphiles français sont plus proches des cinémas espagnols et anglais. Ça n'a pas toujours été comme ça mais c'est ainsi. Il est loin le temps où Jules et Jim, L'As des As, La Grande vadrouille valorisaient les liens renoués entre les deux pays, tout en cartonnant au box office des deux côtés du Rhin.

Ce lien est aujourd'hui invisible, et financier. Le nombre de coproductions entre les deux pays a considérablement augmenté depuis le début des années 2000, donnant des Palmes d'or comme Le Pianiste, Le Ruban blanc ou le récent Amour, ou des triomphes populaires comme Astérix. Là encore, la création d'ARTE n'y est pas pour rien. La chaîne reverse une partie de son budget annuel (3,5%) pour coproduire des films européens (Lars von Trier entre autres). Des centaines de films de plusieurs dizaines de nationalités ont ainsi profité de ce financement, propulsant la chaîne dans les génériques de films sélectionnés dans les plus grands festivals de cinéma du monde.

Quelques succès cachent le fossé

Mais. Il y a 30 ans, les cinéphiles couraient voir les films de Rainer Werner Fassbinder, Volker Schlöndorff et Wim Wenders. Ils ont influencé des générations de cinéastes, à l'instar de François Ozon. Aujourd'hui, aucun cinéaste allemand n'a leur notoriété, ou même celle d'un Kaurismaki, d'un Moretti, d'un Almodovar, d'un Verhoeven, d'un Von Trier, ou encore d'un Ceylan (considérant que la Turquie est en partie européenne). Et que dire des stars allemandes? Spontanément on cite qui? Où sont les Dietrich ou les Schneider d'antan? Bien sûr, il y a des succès. Et pas des moindres : La Vie des autres (Florian Henckel von Donnersmarck, 1,4 million d'entrées), Good Bye Lenin (Wolfgang Becker, 1,2 million d'entrées), Le Parfum (Tom Tykwer, 925 000 entrées) ou La Chute (Oliver Hirschbiegel, 795 000 entrées).

Mais plus généralement, un film allemand, quand il trouve son public, ne dépasse pas les 350 000 spectateurs, que ce soit Pina de Wim Wenders, La grotte des rêves perdus de Werner Herzog, Soul Kitchen ou en 2012 Barbara (225 000 entrées). A peine dix films allemands ont bénéficié d'une couverture médiatique minimale (critiques dans la presse écrite, chroniques à la radio, campagne d'affichage...). Il faut avoir reçu des prix internationaux (Barbara) ou profité du nom du cinéaste (Into the Abyss de Werner Herzog) pour obtenir davantage (interview d'un cinéaste, portrait d'un comédien). La télévision reste à l'écart, et ne participe pas à un quelconque essor.

Une relation déséquilibrée même dans les grands festivals

En fait, la relation bilatérale entre les deux cinématographies est plus que bancale. Si le Festival de Berlin met en compétition de nombreux films Français (jusqu'à les primer : 2 Ours d'or en 20 ans, 3 prix de mise en scène, 3 prix d'interprétation, 4 Ours d'or d'honneur...), le Festival de Cannes est souvent critiqué par les professionnels allemands pour ignorer le cinéma germanique dans sa compétition. La dernière Palme d'or remonte à 1984, le dernier Grand prix du jury à 1993, le dernier prix de la mise en scène à 1987, le dernier prix d'interprétation féminine à 1986, et aucun acteur n'a jamais été récompensé... Wenders est le dernier cinéaste a avoir été retenu en compétition, en 2008. Fatih Akin, sans doute le réalisateur allemand le plus passionnant de ce début de millénaire, est le dernier à avoir été récompensé, par un prix du scénario pour De l'autre côté. On note cependant quelques pépites dans les autres sélections (Pour lui, meilleur film allemand 2011, à Un certain regard). A Venise, la tendance est la même qu'à Cannes. En France, les César n'ont donné qu'un seul prix (La vie des autres) pour trois nominations (De l'autre côté, la même année, et Good Bye Lenin!) dans le même laps de temps.

Côté box office, on constate le même déséquilibre. Intouchables attire 8,5 millions de spectateurs dans les salles allemandes. The Artist, Et si on vivait tous ensemble et le troisième Astérix se classent dans le Top 100 de 2012. Aucun film allemand ne parvient à réussir cet exploit en France.

Et que dire des succès allemands que l'on ne verra jamais en France comme Türkisch für Anfänger (12e du BO annuel), Mann tut was Mann kann ou même la version cinéma du Club des Cinq?

Comme si le Rhin était un fossé infranchissable dans un sens, mais pas dans l'autre. Cependant le cinéma allemand est aussi responsable de ses propres maux. La part de marché locale ne dépasse par les 25% (et sera même beaucoup plus faible en 2012) là où le cinéma français séduit 35 à 40% des spectateurs français. En 2011, un seul film allemand (Kokowääh) était classé dans les 20 films européens les plus vus en Europe. On est loin du record de 2009 (avec trois films, même si aucun d'eux n'a été réellement exporté hors pays germanophones). Même les films récompensés aux German Film Awards ne sortent pas dans les salles françaises.

Un cinéma marginalisé même dans un pays cinéphile

Pourtant il existe le cinéma allemand : cinq réalisateurs germaniques ont été nommés à l'Oscar du meilleur film en langue étrangère depuis 2000 (et deux ont gagné). Le dernier grand événement lié au cinéma allemand fut la rétrospective Fritz Lang et l'exposition Metropolis à la Cinémathèque française. On pourrait alors se demander si le cinéma allemand a intérêt à se concentrer sur le rendez-vous de la Berlinale chaque année, en se coupant des autres festivals... Le nombre de productions respectables est peut-être trop faible pour jouer toute son année en un seul rendez-vous...

Alors, où est le problème? Une nostalgie d'un cinéma autrefois glorieux et audacieux et aujourd'hui banalisé par l'invasion de cinématographies de pays comme l'Argentine, la Corée du sud ou la Roumanie? Une absence de cinéphilie experte permettant de valoriser ce cinéma en France? Un problème allemand, politique et culturel, qui ne permet pas de promouvoir son cinéma à l'extérieur de ses frontières? Ou, plus concrètement, la fragilité d'un cinéma d'auteur allemand? Un peu de tout ça sans doute. Auquel on ajoute une carence de vision européenne du 7e art de la part des institutions : le cinéma reste un domaine national quand il s'agit de création. Seuls les capitaux sont transfrontraliers. Ainsi Haneke, autrichien, est coproduit par la France et l'Allemagne, tout comme Polanski franco-polonais, qui vient tourner à Berlin, etc... La mondialisation est partout, sauf dans les sujets, dans les projets.

Des initiatives institutionnelles et professionnelles, coupées du public

Face à cette impuissance à copuler ensemble, le cinéma allemand et le cinéma français essaye d'initier des collaborations "en amont" et "en aval". L’Académie franco-allemande du cinéma a été initiée en 2000 par le chancelier allemand Schröder et le président français Jacques Chirac pour favoriser la collaboration entre ces deux pays en matière de cinéma. Sous la tutelle du Centre National de la Cinématographie et de l'Image animée (CNC) et du Beauftragter für Kultur und Medien (BKM), elle a pour objectif de contribuer à la construction de l’Europe du cinéma, en renforçant la collaboration entre la France et l’Allemagne dans quatre secteurs : la production, la distribution, la formation et le patrimoine.

Par ailleurs, le CNC et la Filmförderungsanstalt (FFA) ont mis en place un fonds dans lequel chaque pays contribue à hauteur de 1,5 millions d’euros. Ce fonds, appelé également mini-traité, permet aux producteurs d’accéder à des aides pour la coproduction franco-allemande.

Dans le cadre de cette Académie, une formation commune dans les secteurs de la production et de la distribution de films a été créée en 2001 entre La Fémis et l’école de cinéma à Ludwigsburg.

Enfin, en 2003,  Les rendez-vous franco-allemands du cinéma permettent d’harmoniser les deux systèmes de production pour faciliter les coproductions et d’encourager la distribution des films allemands en France et des films français en Allemagne. Ils ont lieu chaque année, alternativement en France et en Allemagne, sous le parrainage d'Unifrance et German Films.

Il y a aussi Les Journées du film français à Stuttgart et Le Festival du cinéma allemand à Paris. Mais il faudra bien plus pour que le pont entre les deux pays, les deux cinématographies, soit consolidé. Des films qui font le lien comme Joyeux Noël par exemple. C'est d'autant plus important que le cinéma, culture de masse par excellence, est un outil de divertissement idéal pour mieux comprendre son voisin, abattre les préjugés et apprendre à connaître la culture et la société de cet ami de 50 ans. Il faut en finir avec l'idée que l'Allemagne c'est Derrick. Comme la France est parvenue à remplacer Louis de Funès par Omar Sy.