Berlin 2010 : Central do Brasil, premier Ours latino-américain

Posté par vincy, le 15 février 2010

En 1998, Berlin ne découvre pas le cinéma latino-américain, mais le prime pour la première fois de son histoire. Walter Salles émeut le jury, et le public, avec Central do Brasil. Il remportera aussi le prix d'interprétation féminine, le prix du jury eucuménique, avant de cartonner dans différents palmarès internationaux. Ce sera aussi le début d'une histoire d'amour entre le cinéma de ce continent et la Berlinale puiqu'en 2008 avec Tropa de Elite (Brésil) et en 2009 avec Fausta (Pérou) recevront la prestigieuse récompense, à chaque fois en surprenant les journalistes.

Pour le documentariste Walter Salles, cela va le propulser immédiatement dans la grande planète du cinéma d'auteur "à festival". Venise le sélectionnera trois ans plus tard avec Avril désespéré et Cannes attendra 2004 pour lui apporter une reconnaissance justifiée, avec Carnets de Voyage. A l'origine, le film retraçant les années de jeunesse du Che devait être l'un des événements du Festival de Berlin. Mais Cannes, comme ce sera de plus en plus souvent le cas dans les années 2000, fait un forcing auprès des producteurs et se le "réserve".

Comme souvent, Berlin ne parvient pas à "fidéliser" ses primés, ce qui l'oblige aussi à aller chercher de nouveaux talents, constamment. Quand Central do Brasil arrive dans la capitale allemande, il est face à des mastodontes : Quentin Tarantino, Gus Van Sant, Pupi Avati, Alain Resnais, les Frères Coen, Jim Sheridan, Neil Jordan, Stanley Kwan, qui signent tous l'un de leur meilleur film cette année-là.

Le jury de Ben Kingley récompense alors un réalisateur en devenir, mais déjà très talentueux. Mais personne n'a pu succomber l'histoire d'une femme d'âge mûr, assez cynique et pas très aimable, confrontée à un garçon de neuf ans cherchant son père dans un Brésil très pauvre et très religieux. Ce voyage au bout de soi-même et l'apprivoisement de l'Autre bouleversent les plus insensibles. Ce sera d'ailleurs l'un des rares Ours couronnant un film qui joue sur le registre du mélo social dans l'histoire d'un palmarès davantage politique. Mais quelques années après la chute du Mur, le Festival s'ouvrait au monde, et allait se transformer avec la construction d'un complexe à Potsdamer Platz qui allait devenir le coeur battant de la manifestation.

Berlin : un festival artistiquement terne, économiquement heureux

Posté par vincy, le 16 février 2009

ours d'or berlinaleLa 59e Berlinale s'est achevée sur une note d'espoir. Célébrant la chute du mur, fêtant une nouvelle cinéaste, le festival de Berlin veut croire que demain sera meilleur. L'an prochain, le 60e anniversaire  battera son plein. De quoi vite effacer une édition en demi-teinte.

La bonne nouvelle vient du public. Il a répondu présent et n'a jamais été aussi nombreux. 383 films (1 238 projections) ont été présentés à 20 000 professionnels et journalistes venus de 136 pays. Mais surtout 270 000 billets ont été vendus au public : un record historique pour le festival, battu dès le mercredi. berlinale 2009

Le marché, quant à lui, n'a pas trop souffert de la crise. On s'attendait à pire. Même si le problème du crédit et du financement était l'obsession de tous, les inquiétudes des uns et la tentative de repli des autres n'a pas trop atteint les négociations. De nombreux films ont été vendus sur plusieurs territoires, même si les distributeurs russes et brésiliens ont fait baisser fortement les prix pour cause de dévaluation monétaire. Les génériques prestigieux (réalisateurs, stars) ont souvent été une valeur refuge (voir actualité du 9 février 2009). Il y avait peu de productions à risques présentées dans les catalogues.

On devrait dire hélas. Dans un entretien à l'AFP, Vincent Maraval (Wild Bunch) estime que le cinéma n'échappera pas à la crise financnière, les banques se retirant du jeu au fil des mois. "Aux Etats-Unis les films indépendants ambitieux, visant un public adulte, tels que No country for old men ou There will be blood, devraient se faire plus rares. Pour nous, c'est une opportunité: ces réalisateurs viendront en Europe !"

Etrangement ce sont souvent des films à venir, parfois prévus pour Cannes ou Venise, qui ont connu les meilleures ventes. La sélection officielle n'a pas été le moteur du marché cette année. Peu de films en compétition ont séduit.

claudia llosa la testa asustada ours d'orCette Berlinale artistiquement terne gâche un peu l'ambiance. La critique a trouvé l'ensemble des films assez faible, ne s'enthousiasmant jamais pour un film ou un autre. La teta asustada, Ours d'or, premier film d'une cinéaste péruvienne, est le seul à avoir fait l'unanimité. Le palmarès fait la part belle aux films latino-américains : d'un Teddy Bear à un film mexicain aux multiples prix de l'argentin Gigante. D'un point de vue global, les cinémas germanophones et sud américains ont distancé les autrs, considérés comme médiocres.

Si la Berlinale essuie le feu des critiques qui jugent les sélections de plus en plus moyennes, notons que Berlin poursuit une double cohérence historique. D'une part l'accompagnement d'un cinéma émergeant. Après avoir sacré un cinéma chinois renaissantà la fin des années 80, la Berlinale a privilégié les nouveaux territoires comme l'Afrique du Sud, la Turquie, la Bosnie et surtout le Brésil, primé deux fois en 10 ans. Le Pérou confirme cette tendance. berlinale 2009 palmares

Enfin, la jeunesse l'a emporté sur les grands noms. Depuis l'Ours d'or remis à Walter Salles en 1998, neuf primés étaient des nouveaux talents du 7e Art. Et en fait depuis Winterbottom en 2003, tous les Ours d'or ont été réalisés par des cinéastes ayant commencé leur carrière après 1998.

En cela la Berlinale, qui a porté en triomphe Fatih Akin, Ang Lee, Walter Salles, Paul Thomas Anderson ou encore Paul Greengrass avant tous les autres, a encore vocation à briller artistiquement...

Berlin-Cannes-Venise : les trois étapes du festivalier

Posté par MpM, le 11 septembre 2008

Mostra de VeniseBerlin, Cannes et Venise sont généralement considérés comme les grands festivals de cinéma dans le monde, ceux qui permettent tout au long d’une année de prendre le pouls de la cinématographie internationale. Pour la première fois en 2008, Ecran Noir a réalisé le "Grand Chelem", et est ainsi en mesure de faire un comparatif (forcément un peu subjectif) de ce triumvirat des grandes fêtes du cinéma.

Ambiance : Indéniablement, Cannes reste la référence absolue, car nulle part ailleurs on n’a tant l’impression d’un gigantesque cirque dont il faut faire partie à tout prix. C’est aussi le seul festival que l’on connaisse où l’on ne s’arrête jamais, où un confrère pressé n’hésite pas à vous bousculer (voire vous insulter) si vous êtes un peu long à ranger vos affaires en salle de presse… A Berlin, seules les grandes stars hollywoodiennes déchaînent quelques passions (on en a eu l’exemple avec Scarlett Johannson et Natalie Portman ou encore Madonna), le reste du temps tout le monde reste très policé et tranquille. A Venise, on a même franchement l’impression que les festivaliers sont trop occupés à profiter de la ville et de la plage toute proche pour être obsédés par les films ou les célébrités…

Organisation : Berlin et Venise ont en commun d’être très ouverts au public, qui a même ses propres séances réservées. Le jeu des multiples diffusions de films empêche que cela soit un handicap pour quiconque et rares sont les journalistes à rester sur le carreau lors des projections… sans pour autant qu’il soit nécessaire de subir de longues files d’attente. A Cannes, c’est tout le contraire. Malgré une hiérarchie quasi militaire (une douzaine de niveaux d’accréditation différents), il est parfois difficile d’avoir accès aux films de la compétition. Le 4e volet d’Indiana Jones a déclenché une telle hystérie que deux heures avant la séance, certains membres de la presse attendaient déjà devant la salle, en plein cagnard. A noter qu’à Venise, il y a tout de même trois sortes d’accréditation presse, et qu’il est quasi impossible pour les deux niveaux inférieurs de voir certains films de la sélection avant les conférences de presse.

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Sport (2) : le football au cinéma

Posté par vincy, le 29 juin 2008

football.jpgLe sport le plus populaire du monde, c'est-à-dire le plus joué, le plus regardé à la télévision, générant le plus d’argent, est sans conteste le football, ou soccer aux Etats-Unis. Pas étonnant, qu’il soit aussi très courtisé par le cinéma. Cette année, entre le documentaire (raté) de Kusturica sur Maradona et le (très beau) film de Walter Salles (Linha de Passe) où l’un des frères se rêve footballer dans la patrie du ballon rond, le festival de Cannes introduisait l’Euro de football. Au détour d’une scène ou au cœur du film, un match de foot défie l’imaginaires des cinéastes et nargue les chef op’ : la télévision, avec sa multitude de caméra et sa prise de vue en direct se sait imbattable en matière d’adrénaline.

Aussi le cinéma préfère en faire un prétexte pour des initiations individuelles ou des drames sociaux. De Goal (trilogie raté à la gloire d’une nouvelle star du foot) à des films sur la violence dans les stades, du récent Affaire de famille (avec Grenoble en vice-champion de France !) des comédies (l’absurde Didier, le populo Trois zéros), la fiction explorent tous les recoins de ce sport. On répertorie quelques 200 films sur le sujet, et autant de documentaires (notamment Zidane en France, Libero en Allemagne, Pelé au Brésil). Les cinémas anglais, italien et allemand n’ont pas ménagé leur inspiration autour du sujet. Grandes nations de foot, comme le Brésil, elles aiment glisser un extrait radio, télé ou même une séquence sur la pelouse.

Cependant, on prend rarement son pied avec les films « de foot ». Depuis plus de cent ans, des équipes fictives s’affrontent avec plus ou moins de bonheur. Il faut signaler qu’hormis Loach, peu de grands auteurs ont mis leur crampon. Il faut attendre les années 70 pour voir des films de haute tenue. Jean-Jacques Annaud donne son Coup de tête en 1979, avec un scénario de Francis Veber, et Patrick Dewaere en ailier vedette. Deux ans plus tard, John Huston signe A nous la victoire (avec Caine, Stallone, Von Sydow, Pelé et Carole Laure), où le football est un passe-temps de prisonnier de la seconde guerre mondiale où il faut initier un Américain à jouer au ballon… En 1984, Jean-Piere Mocky, dans sa période faste, clame A mort l’arbitre, avec là encore Carole Laure et surtout le duo Mitchell-Serrault. Véritable critique à charge du milieu, le film est sans doute celui qui révèle les plus bas instincts réveillés par le sport.

Cinq films contemporains méritent les éloges :  les britanniques My Name is Joe (équipe amateure de Glasgow) et Looking for Eric par le grand fan Ken Loach et Joue-la comme Bekham (ascension d’une jeune footballeuse  sur fond de querelles de tradition, révélant au passage Keira Knightley) ; et les asiatiques Shaolin Soccer (Stephen Chow en super-man du but, délirant) et La coupe (film bhoutanais sur l’obsession de jeunes moines bouddhistes pour voir le match France Brésil de 1998 en direct).

En l’absence d’Hollywood dans la compétition, difficile de faire mieux. Les studios américains ont commencé, cependant, à filmer le foot pour deux raisons : le sport est populaire dans le monde et notamment chez tous les immigrés latino-américains, africains et européens ; il plaît aux mères de familles américaines par son aspect non –dangereux.

On finira sur deux petites perles. Un court métrage signé Tati sur le club de foot de Bastia (Forza Bastia 78) lors d’une finale de coupe d’Europe. Et dans Le petit monde de Don Camillo (1952), le foot divise et unit les frères ennemis Peppone et Don Camillo. Mais aucun chef d’œuvre, comme pour la boxe…