Retour sur Vesoul 2012 : rencontre avec Kore-Eda Hirokazu

Posté par kristofy, le 29 février 2012

La 18ème édition de Festival International des Cinémas d’Asie (FICA) de Vesoul, qui s'est tenue du 14 au 21 février derniers, proposait l’intégrale des films du cinéaste japonais Kore-Eda, en sa présence, dont la première française de son dernier long métrage, I wish. Lors de la cérémonie d’ouverture, Kore-Eda Hirokazu (son nom complet) a d'ailleurs reçu un Cyclo d'or d'honneur pour l'ensemble de son oeuvre.

Cet hommage, qui coïncide avec le 50e anniversaire du réalisateur, a permis aux festivaliers de (re)découvrir les 14 films de Kore-Eda (documentaires et fictions réunis pour la première fois), dont la moitié étaient jusque-là inédits en France. L'occasion de revenir avec lui sur une carrière déjà bien remplie.

Ecran Noir : Le festival de Vesoul a souhaité montrer pour la première fois en France une intégrale de vos films. Quand vous regardez en arrière et voyez tout ce que vous avez accompli, que ressentez-vous  ?

Kore-Eda Hirokazu : Je suis intimidé, j’ai honte, j’ai aussi beaucoup de nostalgie. Je trouve que c’est important de revoir ce que l’on a fait dans le passé, ça me permet de reconsidérer ce que je pensais à l’époque et aussi certaines erreurs, c’est important pour avancer. J’ai un peu honte parce que c’est un peu la même impression que lorsqu'on regarde une vielle photo de l’époque étudiant avec un motif de tshirt ringard et une coupe de cheveux démodée. Mais je suis très intimidé que certains de mes anciens films soient découverts ici.

EN : Dans Nobody knows et dans Still Walking, il y a l’absence d’une mère, dans I wish un petit garçon souhaite revivre avec ses deux parents de nouveaux réunis… Est-ce qu'une famille unie serait un noyau du bonheur ?

KEH : Non, je ne pense pas. Dans Nobody knows, il n’y a plus de mère mais ça ne veut pas dire pour autant que c’est une tragédie. La fille aînée va prendre peu à peu un rôle de mère et le grand-frère celui du père. Évidemment ils sont privés d’une enfance ordinaire propre aux enfants. S'il y a un manquement, chacun va essayer de remplir ce manque. Dans I wish, pour la famille qui habite à Kagoshima, il n’y a pas de père, mais c’est le grand-père qui remplace en quelque sorte le père. Si je pensais que le bonheur est une famille avec tous ses membres réunis, alors j’aurais fait une fin différente pour I wish !

EN : Dans vos films avec des enfants, et en particulier le nouveau I wish, est-ce que lors du tournage vous espérez obtenir précisément ce qui est écrit dans le scénario ou est-ce que vous laisser de la place à une grande part d’improvisation ?

KEH : En fait, je ne demande pas aux enfants de jouer comme ce qu’il y a de marqué dans le scénario. Je parle beaucoup avec les enfants avant l’écriture, c’est avec la personnalité de chaque enfant que je vais créer certaines situations de l’histoire. Avant tout, ce sont les enfants qui sont au centre. Il y a d’abord ma petite histoire, puis la rencontre avec les enfants qui joueront dans le film, et ce sont finalement eux qui ont une certaine influence sur plusieurs séquences de  l’histoire finale. Dans certaines scènes, les enfants parlent librement, mais pour la plupart des scènes je leur explique oralement des choses ou je leur chuchote des indications. Parfois, je leur demande de répéter les dialogues, parfois je leur demande de dire de nouveau devant la caméra ce qu’ils m’ont déjà raconté. Diriger des enfants est une chose toujours différente.

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Vesoul 2012 : retour sur le palmarès qui couronne August drizzle

Posté par redaction, le 22 février 2012

Après une semaine de compétition, de rencontres et de découvertes en tous genres, la 18e édition du festival des cinémas d'Asie de Vesoul (FICA) s'est achevée mardi soir avec l'annonce du palmarès et la projection en avant-première du nouveau film de Wang Quan'An, Apart together. Le jury international présidé par Atiq Rahimi, et réunissant Ermerk Chinarbaev, Nestor O. Jardin et Latika Padgaonkar, a choisi de remettre le Cyclo d'or 2012 au Sri-lankais Aruna Jayawardana pour August drizzle, également couronné du prix NETPAC.

Le film se déroule dans la campagne sri-lankaise où le soleil assèche toute chose. On y suit la vie d'une femme dans son activité d'entrepreneur de pompes funèbres, reprise après la mort de son père. Rejetée par la communauté de son village du fait de cette profession habituellement masculine, l'héroïne tente de mener à bien le projet de construction d'un crématorium, utile pour le village mais qui risque de ruiner son concurrent. Sous un aspect physique peu charmeur, la jeune femme rêve malgré tout d'amour, de mariage, d'enfants... même si le destin en a décidé autrement.

August drizzle se caractérise par des images pas du tout racoleuses, et au contraire belles dans leur capacité à nous montrer la dure réalité quotidienne de cette communauté. Et puis il y a cette femme dont on s'écarte, qui abandonne un à un ses rêves de bonheur personnel, mais si forte dans la poursuite de son projet, et qui a su émouvoir et séduire public et jurés.

Le Grand prix du jury international va lui à Dance town de Jeon Kyu-hwan (Corée), qui surprend par son observation du genre d’accueil que peut offrir la Corée du Sud à une réfugiée de Corée du Nord. La jeune femme est observée et guidée de manière assez pressante quand elle n’est pas surveillée de manière oppressante. Le réalisateur Jeon Kyu-hwan propose un film à l’aspect moins cinématographique que son précédent (Animal Town, déjà présenté à Vesoul, qui avait fait une très favorable impression), comme si l’esthétique de l’image était diminuée par la dureté de son contenu. On y voit surtout une grande ville qui n’intègre pas vraiment une personne étrangère, ni même ses habitants quand ils sont très âgés ou handicapés. Ces solitudes qui se croisent parfois ne semblent jamais entrevoir la perspective d'une amélioration de leur sort. A noter que le film a également convaincu le jury INALCO, qui lui décerne son prix coup de cœur.

Le jury international a également choisi de distinguer Le temps dure longtemps de ?zcan Alper et Nino de Loy Arcenas. Si le premier tranchait incontestablement sur le reste de la compétition, par ses qualités cinématographiques et la force de son propos (les génocides kurdes et arméniens), on peut en revanche être plus surpris par le succès du second (qui a également reçu le coup de coeur Guimet), mélo familial formaté à l'esthétique de série télévisée.

Final Whistle de Niki Karimi (photo de droite) récolte quant à lui trois prix mérités (Prix Emile Guimet, Prix INALCO et Prix du jury lycéen). Le film débute avec une réalité qui nous est familière (l'actrice/réalisatrice Niki Karimi qui travaille sur un film) comme pour nous faire croire à la réalité du scénario : une femme est prête à vendre un de ses organes dans l’espoir de réunir assez d’argent pour éviter que sa mère ne soit condamnée à mort.

Dans le film on se déplace beaucoup d’un endroit à un autre et souvent en voiture, la caméra est toujours en mouvement pour suivre les personnages et en même temps pour placer le spectateur en position de témoin. Bien qu’il s’agisse d’une fiction on est alors happé par une impression de réel, et on va découvrir progressivement le drame qui a eu lieu. L'occasion de partager avec le spectateur plusieurs questions sur la justice ou les droits des femmes en Iran.

Return ticket de Teng Yung-Shing (mention spéciale NETPAC), sur des ouvrières chinoises qui aspirent à retourner dans leur ville natale pour le Nouvel An,  et Khalifah de Nurman Hakim (prix du public), qui aborde la question de l'intégrisme religieux en Indonésie, se partagent les autres récompenses de la compétition long métrage tandis que Les origines de la pomme de Catherine Peix (prix du public) et Parvaz, l'envol de Reza d' Ali Badri (prix du jury jeunes) sont distingués dans la compétition documentaire.

Une partie des films primés seront repris comme chaque année à l'auditorium du Musée des Arts Asiatiques Guimet de Paris du 18 au 20 avril 2012. Et pour la prochaine édition du FICA, il faudra attendre la semaine du 5 au 12 février 2013.

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Le palmarès complet

Cyclo d'or
August drizzle de Aruna Jayawardana (Sri Lanka)

Grand Prix du Jury International
Dance town de Jeon Kyu-hwan (Corée)

Mentions spéciales :
- Nino de Loy Arcenas (Philippines)
- Le temps dure longtemps de ?zcan Alper (Turquie)

Prix du Jury NETPAC
August drizzle de Aruna Jayawardana (Sri Lanka)

Mention spéciale NETPAC
Return ticket de Teng Yung-Shing (Taïwan/Chine)

Prix Emile Guimet
Final whistle de Niki Karimi (Iran)

Coup de cœur Guimet
Nino de Loy Arcenas (Philippines)

Prix INALCO
Final whistle de Niki Karimi (Iran)

Coup de cœur INALCO
Dance town de Jeon Kyu-hwan (Corée)

Prix du public long métrage de fiction
Khalifah de Nurman Hakim (Indonésie)

Prix du Jury Lycéens
Final whistle de Niki Karimi (Iran)

Prix du public du film documentaire
Les origines de la pomme de Catherine Peix (Kazakhstan-France).

Prix Jury Jeunes
Parvaz, l'envol de Reza d' Ali Badri (Iran-France)

Crédit photos : Michel Mollaret

Vesoul 2012 : trois questions au cinéaste taïwanais Teng Yung-shing

Posté par MpM, le 21 février 2012

En lice pour le Cyclo d'or 2012, Return ticket du cinéaste taïwanais Teng Yung-shing raconte l'existence d'ouvrières chinoises de la province d'Anhui, venues travailler à Shanghai, et impatientes de retourner dans leur village natal pour célébrer le Nouvel An. Une histoire typiquement continentale, donc, pourtant produite par le spécialiste de l'identité taïwanaise, le maître Hou Hsiao-Hsien.

Ecran Noir : Contrairement aux films taïwanais que l'on a l'habitude de voir en France, Return ticket ne traite pas directement de Taïwan et de son identité, mais d'une situation typiquement chinoise. Est-ce parce que vous trouvez que le cinéma taïwanais est trop tourné vers lui-même et son histoire ?

Teng Yung-shing : C'est naturel que les cinéastes parlent de l'endroit d'où ils viennent et où ils vivent. Mais pour moi, ce qui compte n'est pas tant l'endroit que les gens. Il se trouve que j'habite à Shanghai depuis six ans, donc l'histoire du film est celle des gens autour de moi.

EN : Quel a été le cheminement du film ?

TYS : Tous les personnages que l'on voit, ce sont des femmes un peu âgées qui habitent autour de chez moi. J'ai donc voulu faire un documentaire sur elles. Plein d'histoires ont surgi. A partir de ces expériences vécues, on a commencé à bâtir une histoire. A part les trois personnages principaux, les autres acteurs sont d'ailleurs des gens du quartier ! En tant que cinéaste, je n'avais pas envie d'utiliser ma propre vie. Pour moi, le plus important était d'aborder la question du retour, du fait de rentrer chez soi. Mais ce qui m'entourait est naturellement entré dans le film.

EN : Le film a une esthétique spéciale, avec des teintes bleutées, des images peu éclairées, et une ambiance sonore presque joyeuse...

TYS : J'ai fait ce choix esthétique avant tout pour des raisons réalistes. Ces femmes gagnent très peu d'argent donc elles n'allument qu'une seule lampe, ce qui donne ces teintes sombres. En revanche, la musique est plus légère car même si les personnages ont une vie difficile, elles sont heureuses. Je voulais éviter d'avoir une position trop misérabiliste et au contraire dédramatiser la situation.

L’instant court : Speechless, réalisé par Tran Anh Hung

Posté par kristofy, le 20 février 2012

Comme à Ecran Noir, on aime vous faire partager nos découvertes, alors après It's Halftime in America réalisée par David Gordon Green, avec Clint Eastwood, voici l’instant Court n° 66.

A l'occasion du 18ème Festival international des cinémas d'Asie (FICA) de Vesoul,  Ecran Noir a pu rencontrer Tran Anh Hung, invité de la section "francophonie d'Asie" avec ses 4 longs métrages L'odeur de la papaye verte, Cyclo, A la verticale de l'été et La ballade de l'impossible.

L'occasion de revenir avec lui sur son travail, et d'évoquer rapidement son expériences dans le domaine du format court. Expériences dont nous vous proposons ici un exemple à travers une publicité volontairement "orientalisante" et glamour.

Ecran Noir : Vos premiers courts-métrages, La femme mariée (à Cannes en 1989) et La pierre de l’attente, sont devenus quasiment invisibles  ?

Tran Anh Hung : Je souhaite qu’ils restent invisibles, ce sont les films les plus tristes qu’on ait pu faire. Je broyais du noir sûrement, je devais être dans une période sombre de ma vie, il n’y a pas beaucoup de plaisir à les voir.

EN : Il vous est également arrivé de réaliser des films publicitaires...

TAH : Je fais très peu de publicités, vraiment quand mon compte en banque est vide c’est à ce moment-là que j’accepte. Pour le spot Marionnaud, c’est leur agence de communication qui a eu ce genre d’idée avec un côté un peu asiatique, c’était leur envie. Je crois que l’agence a bien aimé la réalisation de cette pub mais en fait pas leur client.

Je fais très peu de publicité parce que pour moi faire une image c’est très précieux, je ne voudrais pas m’épuiser à ça. J’en ai fait une dizaine dans ma vie mais c’est minuscule, ce n'est pas grand chose.

Crédit photo : image modifiée, d’après un extrait du film Speechless.

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Vesoul 2012 : rencontre avec Tran Anh Hung

Posté par kristofy, le 19 février 2012

Le FICA de Vesoul s’attache à mieux faire découvrir le cinéma des pays francophones d’Asie, et cette année, c’est le réalisateur franco-vietnamien Tran Anh Hung (ci-contre, et ci-dessous avec le réalisateur japonais Kore-Eda)  qui est invité. Dès son premier film, Tran Anh Hung s'est fait connaître et surtout reconnaître pas seulement comme un nouveau talent à suivre mais déjà comme un cinéaste qui va compter.

L’odeur de la papaye verte reçoit le prix de la Caméra d’or au festival de Cannes en 1993 et le César de la meilleure première œuvre, et il concourt à l’Oscar du meilleur film étranger. En 1995, son second film Cyclo gagne le Lion d’or au festival de Venise, en 2000 il est de retour à Cannes avec A la verticale de l’été, et en 2010 de nouveau à Venise pour La ballade de l’impossible.

Ce sont ces quatre films que Vesoul a programmés, une initiative d’ailleurs très appréciée par le public car chaque séance affichant complète, il a fallu en organiser des supplémentaires.

EN : Dans L’odeur de la papaye verte on est plongé dans le Vietnam pourtant le film n’a pas été tourné là-bas mais en studio en France, pour quelle raison ?

TAH : Le tournage en studio, c’est une erreur que nous avons faite, mais heureusement on a réussi à restituer parfaitement le Vietnam. En fait c’était mon premier film mais aussi le premier de mon producteur ce qui fait qu’on manquait un peu d’expérience, on manquait aussi d’un manque de connaissance du Vietnam.

On avait pensé à recréer le décor, on a commencé à raser un endroit pour poser une chape de béton où construire dessus. Seulement on n’avait pas anticipé l’extrême lenteur du Vietnam, et on s’est rendu compte que si on continuait à cette vitesse là alors le tournage ne pourrait pas commencer avant la saison des pluies, ce qui serait catastrophique. Le décor je le voulais en extérieur là-bas et pas en studio pour hériter de la lumière naturelle et de la végétation, mais vraiment ça ne pouvait pas être possible.

EN : Le film suivant Cyclo est tourné lui sur place au Vietnam, et il a gagné le Lion d’or au festival de Venise. Pourtant il y a eu des soucis de censure de la part de Vietnam, d’où vient ce décalage d’appréciation ?

TAH : En fait le Vietnam a vu le film comme quelque chose qui pouvait abîmer l’image de leur pays, voilà. Ils ont considéré que Cyclo noircit la société vietnamienne. Le film a eu de belles critiques de journalistes occidentaux, avec dedans cet aspect du banditisme, et ça n’a pas plu à la censure idéologique du Vietnam, il y a eu quelques reproches. Mais c’était le moment où les dvd piratés au Vietnam sont apparus, et le film existait normalement dans les bacs des magasins vidéo.

EN : Pour adapter en film un roman aussi dense que La ballade de l’impossible de Murakami Haruki comment se fait le choix des passages à supprimer ou à écourter ?

TAH : Ce sont des choses qui se font naturellement. Je me suis donné comme ligne directrice le développement de la psychologie du personnage Watanabe et je voulais que le spectateur soit le plus proche possible de ça. Je voulais que le spectateur puisse être dans la tête et dans le cœur de Watanabe. Tout ce qui pouvait distraire ou emmener le spectateur loin de cette ligne, je le supprimais du livre.

EN : Vous travaillez sur plusieurs projets de nouveaux films dans différentes langues, mais le prochain serait un retour en France ?

TAH : Oui, mon prochain film sera français, je ne peux pas dire grand-chose dessus encore sauf qu’il s’agit de l’adaptation d’un livre absolument magnifique. Quand je l’ai lu, c’est devenu tellement évident que je devais en faire un film, il n’y a eu aucun obstacle pour que je l’adapte. J’espère accélérer mon rythme de travail, pour ne pas espacer de trop d’années mon dernier film et le prochain. Il y aura comme un retour aux sources car ça sera aussi les retrouvailles avec mon producteur historique des trois films vietnamiens, et je pense que les choses iront plus vite.

EN : Le FICA de Vesoul a choisi de présenter vos films presque comme une forme de rétrospective, quand vous regardez en arrière, quel sentiment avez-vous ?

TAH : Ce n’est pas un secret, j’ai commencé par refuser tout d’abord. Pour moi l’œuvre est comme un corps qui n’a pas encore toutes ses jambes ni tout ses bras, j’ai trouvé que c’était un peu tôt. Quand je suis ici, je suis content de rencontrer le public de Vesoul autour de ces films, ils affichent complet, ce qui me surprend et me fait très plaisir, mais je pense que j’ai encore quelques films à donner pour que le panorama soit assez complet pour un vrai corps avec tout ses membres.

Lire l'intégralité de l'interview

Crédit photo : Michel Mollaret

Vesoul 2012 : Regard sur le cinéma kazakh avec Ermek Chinarbaev

Posté par kristofy, le 18 février 2012

Le Kazakhstan semble doublement loin, à la fois  géographiquement et cinématographiquement. Si le cinéma kazakh est méconnu faute, la plupart du temps, d’arriver jusqu’à nous, le FICA, lui, n’hésite pas aller le chercher depuis déjà plusieurs éditions.

Cette année, Vesoul propose ainsi un Regard sur le cinéma du Kazakhstan avec près d’une vingtaine de film. Le plus ancien date de 1938, il s’agit de Amangueldy de Moisei Levin qui, bien qu'il ait été initié par les soviétiques, est considéré comme le film dramatique fondateur du cinéma kazakh avant Les chants d’Abai de Pesni Abaya. Vesoul programme aussi deux films de Abdulla Karsakbaev dont On m’appelle Koja (prix spécial du jury à Cannes en 1967), deux films de Chaken Aïmanov, plusieurs films qui évoquent la guerre et d’autres qui témoignent de la vitalité de la Nouvelle Vague kazakh.

Cette année le jury de la compétition présidé par Atiq Rahimi (documentariste et romancier, prix Goncourt 2008) compte dans ses rangs le cinéaste kazakh Ermek Chinarbev, lui-même auréolé d’un beau palmarès : La Vengeance était au festival de Cannes en 1989, Ma vie sur le bicorne a gagné le Léopard d’or au festival de Locarno en 1993. Son film Lettres à un ange resté inédit en France est présenté cette année en première à Vesoul, ce qui a été l’occasion d’un débat avec les spectateurs à propos du cheminement de sa création.

Lettres à un ange est une histoire à tiroirs rythmée par différentes ‘lettres’ vidéo (sur la danse, l’amitié, l’argent, l’amour, la famille…) de l’héroïne. Celle-ci raconte différentes versions (aussi bien pour elles que pour les spectateurs) de ses différentes relations amoureuses avant un drame lourd de conséquences. La narration tout comme la forte impression laissée par l’actrice Aiganym Sadykova amène le spectateur à se demander si cette femme est un monstre ou pas.

Le réalisateur Ermek Chinarbev revient sur cette création si particulière : « J’ai commencé il y a quelques années à rêver d’une femme très belle qui raconterait différentes petites histoires sur elle, en plusieurs langues et dans plusieurs pays. C’était devenu nécessaire de la voir sur un écran pour qu’elle existe, mais c’est difficile de faire un film. Un jour, j’ai raconté ça à une femme qui m’a recontactée une année après pour parler de la production de ce projet, je ne sais pas pourquoi mais on a fait ce film. Pour trouver l’actrice j’ai auditionné deux fois Aiganym Sadykova sans être persuadé qu’elle était le personnage, mais à une troisième audition avec un partenaire homme, alors là ça m’est paru évident. Sur le tournage elle a d’ailleurs manipulé en quelque sorte les trois autres acteurs, et ils sont devenu tout les trois amoureux d’elle. Je pense tout le temps à cette femme du film. A la question ‘est-elle un monstre?’, on me fait à chaque fois des réponses différentes. Même John Malkovitch a voulu m’expliquer le film. Je me pose moi-même toujours cette question, d’ailleurs, j’y pense tout le temps. »

Crédit photo : Michel Mollaret

Vesoul 2012 : Dance Town, avec Oh Seong-tae, a ouvert la compétition

Posté par kristofy, le 18 février 2012

Le 18ème Festival international des cinémas d'Asie (FICA) de Vesoul, ce sont aussi des films en avant-première en compétition pour le Cyclo d’or. Cette compétition a débuté avec un réalisateur coréen encore inconnu en France mais déjà bien connu des festivaliers de Vesoul : Jeon Kyu-hwan qui avait été récompensé ici en 2010 pour Animal Town. Son dernier film était au festival de Berlin et il tourne déjà en ce moment son prochain film !

Il s’était lancé dans un trilogie explorant le thème de la ville, et c’est le troisième, Dance Town, qui a donc ouvert la compétition 2012. La particularité de ces trois films est que dans chaque histoire on retrouve dans un rôle différent l’acteur Oh Seong-tae. Ce dernier imagine d'ailleurs que Jeon Kyu-hwan voit en lui comme un alter-ego à multiples facettes... Venu spécialement à Vesoul, il s’est prêté aux questions-réponses avec les spectateurs.
Dance Town nous fait suivre l’arrivée en Corée du Sud d’une femme qui a fui la Corée du Nord. Pour éviter arrestation et exécution, pour motif de possession de produits étrangers interdits, son mari a réussi à la faire s’échapper. Elle se retrouve alors seule à Séoul sans nouvelles de son mari bloqué au Nord, elle devient une réfugiée qui doit s’adapter à une nouvelle vie…
Le réalisateur Jeon Kyu-hwan voulait moins parler de la relation entre les deux pays de Corée que de l’arrivée d’un étranger dans une grande ville. Ses trois films (Mozart Town, Animal Town, et maintenant Dance Town) s’attachent à la vie dans une grande ville avec le point de vue d’une personne qui y est étrangère. Pour ce qui est d’une personne nord-coréenne réfugiée, celle-ci est d’abord interrogée et aussi surveillée un moment pour deux raisons, d’abord la crainte d’une intrusion d’un agent espion de Corée du Nord et aussi pour le cas ou le réfugié aurait des difficulté à s’adapter à la vie sud-coréenne.

"Le nombre de réfugiés augmente de plus en plus, et leur arrivée n’est pas toujours la bienvenue parfois à cause de quelques jalousies puisque le gouvernement les aide en leur fournissant un logement", explique Oh Seong-tae. "En majorité, les Coréens espèrent une réunification des deux pays ennemis. Le cinéaste lui ne souhaite pas que Dance Town soit vu comme un film politique, il s’agit d’abord d’un personnage d’une femme de Corée du Nord réfugiée en Corée du Sud à Séoul. Si l’histoire se passait dans une autre ville, ça aurait été un autre genre d’étranger. Son sujet, comme dans ses premiers films, est la ville racontée par des gens en souffrance."

Crédits photos : Kristofy et Michel Mollaret

Vesoul 2012 : Kore-eda, invité d’honneur, présente I wish

Posté par kristofy, le 17 février 2012

La 18e édition du Festival international des cinémas d'Asie (FICA) de Vesoul s'est ouverte en présence d'un invité très prestigieux : le réalisateur Kore-Eda Hirokazu qui a reçu un Cyclo d'or d'honneur pour l'ensemble de son oeuvre. Pour la première fois en France est programmée une rétrospective intégrale de ses films, à commencer par ses premiers documentaires inédits (Lesson from a calf, I wanted to be Japanese...) jusqu'à son dernier film I wish dont la sortie en France est programmée pour le 11 avril.

Son premier film de fiction Mabrosi a remporté le Lion d'or à Venise en 1995, After life a été récompensé à San Sebastian et Turin, Distance est en compétition à Cannes en 2001 là où Nobody knows gagnera en 2004 un prix d'interprétation masculine pour un enfant de 14 ans, suivront Still walking, Air doll... Vesoul fait découvrir ses autres films inédits en France comme Without memory, Hana, The days after. Le réalisateur japonais a été très touché de cette intention de la part de Vesoul, et à la fin des projections, il était là pour parler avec le public. Ces rencontres conviviales entre artistes invités et spectateurs sont d'ailleurs l'une des particularités du FICA de Vesoul.

I wish est une belle histoire où deux frères vivent séparés l'un de l'autre depuis la séparation de leurs parents, l'un vit chez son père et l'autre chez sa mère dans deux villes éloignées. La construction d'une nouvelle ligne de train fait naître une idée : à l'endroit où deux trains se croisent à très grande vitesse, il se dégage une energie qui pourrait faire exaucer des vœux. Et voila les enfants qui décident de partir pour un périple plein de surprises...

Voici quelques mots confiés par Kore-eda à propos de la genèse de ce nouveau film :

"Les personnages principaux ont été choisis d’après auditions, ils n’avaient quasiment pas d’expériences personnelles. Réaliser un film avec des enfants, c’est plus du plaisir que des difficultés en fait. Les deux frères dans le film sont réellement deux frères dans la vie, ce qui faisait une complicité en plus. Dans la vie, le grand frère est aussi vivace que le petit frère, alors que dans le film, le grand frère est plus un enfant intériorisé alors que l’autre est très expansif. Ces deux personnages, tels qu’ils ont été écrits, ont demandé une véritable part de jeu aux enfants.

A ces acteurs-enfants, je ne donnais pas le scénario à l’avance, j’expliquais chaque matin ce qu’on allait tourner dans la journée. Le petit proposait des choses sans qu’on ne lui montre rien, il est très joueur dans tout les sens du terme. Les acteurs-adultes ont eux bien compris mes intentions de mise en scène avec des enfants qui jouent librement et avec bonne humeur. Les adultes ont aussi participé aux conditions de cette spontanéité.

L'idée de ce film est venue de l’installation d’une nouvelle ligne de TGV dans l’île, d’ailleurs j’aime beaucoup les trains. Mon film Nobody Knows date d'il y a 7 ans, et depuis je suis devenu moi-même père, alors le désir de refaire un film avec des enfants vient aussi de là. La première fois où je suis allé dans cette ville avec ce volcan j’avais 20 ans, et je me demandais comment font les gens pour vivre à côté de ça. C’était aussi la première fois que j’ai goûté ce gâteau qui n’a pas vraiment de goût. Tous ces souvenirs personnels se sont retrouvés dans I wish."

Crédit Photo Kore-eda à Vesoul : Michel Mollaret

Vesoul 2012 : cinq bonnes raisons de participer à la 18e édition du Festival international des cinémas d’Asie

Posté par MpM, le 13 février 2012

La 18e édition du Festival international des cinémas d'Asie (FICA) ouvrira ses portes à Vesoul mardi soir pour une semaine de partages, d'échanges et de découvertes autour du cinéma asiatique.

Depuis plusieurs années, la manifestation est devenue un rendez-vous incontournable pour les passionnés de cinéma et de culture asiatiques en général, mais aussi pour tous les spectateurs cinéphiles ou simplement curieux.

Envie d'aller vérifier par vous-meme ? Ecran Noir a listé au moins cinq bonnes raisons de ne pas louper l' événement.

L’intégrale Kore-Eda, en sa présence, avec la première française de I wish

Le réalisateur japonais (Nobody knows, Still walking, Air doll...), habitué de Cannes, recevra un Cyclo d'or d'honneur lors de la soirée d'ouverture du FICA 2012. Pour l'occasion, il viendra avec son dernier film, le magnifique I wish, présenté en première française, et bénéficiera d’une rétrospective présentant l’ensemble de son œuvre.

90 films à (re)découvrir

A Vesoul, on peut voir des films de 9h le matin à minuit. Le plus difficile est donc de choisir entre les longs métrages de fiction de la compétition internationale, les documentaires, les films proposés dans le cadre de la thématique "Les brûlures de l'histoire", la japananimation, les séances grand-public... Quelques titres au hasard, juste pour donner une idée : Les citronniers d'Eran Riklis, Tonnerres lointains de Satyajit Ray, Return ticket de Teng Yung-shing...

Regard sur le cinéma kazakh : 20 films-clef de cette cinématographie méconnue

Un petit tour d’horizon du cinéma kazakh de 1938 à nos jours, vous n’en retrouvez pas un de sitôt ! L’occasion de découvrir de véritables pépites comme le Léopard d’or 1993, Ma vie sur le bicorne d’Ermek Chinarbaev.

La section francophonie d’Asie consacrée à Tran Anh Hung, en sa présence

Le réalisateur franco-vietnamien Tran Anh Hung (L’odeur de la papaye verte, Cyclo) est au cœur de la désormais traditionnelle section "Francophonies d’Asie" et viendra en personne présenter son travail. A ne pas rater, le superbe A la verticale de l’été, et son adaptation sensible de La balade de l’impossible.

L’ambiance du festival : convivialité, échanges et rencontres avec les invités

C’est une dimension importante du FICA : sa tradition de convivialité et de bonne humeur. Ici, les grands réalisateurs côtoient les jeunes débutants, et tous se mêlent au public lors des repas pris en commun et des soirées ouvertes a tous. Apres quatre ou cinq films dans une journée, quoi de plus agréable que d’échanger avec d’autres passionnés, interroger les organisateurs sur leurs choix de sélection, ou tout simplement aller féliciter un cinéaste dont on a apprécié le travail ? Les cinéphiles du monde entier en rêvaient, Vesoul l’a fait !

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18e édition du Festival international des cinémas d'Asie de Vesoul
Du 14 au 21 février
Informations et programme sur le site de la manifestation