L’Utopia de Toulouse change de propriétaires (et de nom)

Posté par vincy, le 1 juin 2016

Le mythique Utopia de Toulouse change d'exploitant et de nom puisque ses fondateurs vont en céder l'exploitation à deux membres de l'équipe. Les deux cofondateurs d'Utopia -Anne-Marie Faucon et Michel Malacarnet - lâchent donc leur affaire, acquise il y a 23 ans.

Le directeur du cinéma, Jérémy Breta, et Annie Mahot, ne licencieront personne une fois le transfert effectué. Utopia conserve son établissement des environs de Toulouse, à Tournefeuille.

Une fois la cession effectuée, l'Utopia Toulouse (3 salles, 441 fauteuil, 270 000 spectateurs en année haute, Trophée de la salle art-et-essai du Film Français en 2001) se nommera l'American Cosmograph, "retrouvant le nom d'un modernisme désuet qu'avait l'une des premières salles de cinéma de la Ville Rose, en 1917" comme l'indique La dépêche du midi. Classée art et essai, le complexe devrait subir un lifting. Le 15 juin prochain sera donc le jour du basculement.

Une enclume toujours présente au-dessus du cinéma

L'Utopia était menacé par une inflation des loyers (lire notre article du 19 janvier 2016). Le propriétaire des murs, l’Association centrale immobilière Saint-Jérôme, réclamait un loyer mensuel trois fois supérieur à celui actuellement en cours, ce qui mettait en péril le modèle économique de l'exploitant. A l'époque, Anne-Marie Faucon expliquait: "Nous avons une grosse équipe, lourde à gérer, et nous sommes confrontés à la nécessité de nous mettre aux normes handicapés dans des locaux qui sont déjà inadaptés. Des travaux que l'on estime entre 400 000 et 500 000 euros". Une des hypothèses alors était de créer un complexe ailleurs et d'abandonner ce site historique. L'augmentation du loyer devait intervenir il y a trois mois, elle est toujours en suspension.

Dans Côté Toulouse, Jérémy Bata rassure les fidèles spectateurs: "L’esprit de la programmation sera absolument le même. Nous continuerons à avoir nos propres abonnements, les tarifs ne changeront pas, on proposera toujours trois salles et il n’y aura toujours pas de publicité, pas de recettes annexes ni de pop-corn ! Des changements vont venir petit à petit, mais sur notre fan-zine et sur le site internet."

Pour les habitués, cela ne changera pas grand chose puisque les cartes de fidélité et le magazine d'Utopia seront toujours disponibles à l'American Cosmograph.

Le cinéma Utopia de Toulouse menacé

Posté par vincy, le 19 janvier 2016

Ce n'est ni la première fois, ni la dernière hélas, que nous annonçons la menace d'une fermeture de salle de cinéma art-et-essai. Mais celle-ci est emblématique. L'Utopia, un réseau de salles indépendantes art-et-essai, voit ses fondations vaciller à force de devoir s'adapter à son époque (normes de sécurité, d'accessibilité, loyers en hausse dans les centre-ville, concurrence des multiplexes...).

43 ans que ce réseau existe avec 7 millions de spectateurs cumulés. Avignon, base historique, Toulouse, Montpellier, Paris (l'ancien Quartier latin), Saint-Ouen, Bordeaux...

Mais voilà, celui de Toulouse est menacé, 22 ans après son ouverture. C'était l'un des cinémas les plus rentables de France, localisé dans une superbe salle appartenant à la paroisse Saint-Jérôme. Car, selon La Dépêche du midi, la paroisse souhaiterait augmenter le loyer. Comme pour le Star à Cannes. On passe d'une somme correcte pour un équipement culturel en centre-ville à une somme astronomique que seule un groupe international de vente de fringues, ou une marque de cosmétique, ou même un opérateur de téléphonie mobile peut se payer: 150 000 euros! Trois fois le loyer actuel.

Mais pire que ça, la paroisse déjà pas très charitable, demande au cinéma de respecter des critères moraux dans sa programmation. On imagine que des films comme La vie d'Adèle ou Bang Gang ou Carol ne sont pas forcément du goût des propriétaires...

Un déménagement comme solution idéale?

L'Utopia va se défendre avec un avocat, mais l'exemple récent de La Pagode à Paris incite à la prudence. Le réseau a cherché à acheter une ancienne salle de la ville rose, en vain. Mais quel intérêt de fragiliser un réseau qui soutient des films parfois difficiles et qui parvient à séduire 500000 spectateurs (si on inclut celui de Tournefeuille dans la banlieue ouest de la métropole)?

Dans La dépêche du midi, Anne-Marie Faucon, cofondatrice du réseau, explique sa vision des choses et semble se résigner: "Nous avons une grosse équipe, lourde à gérer, et nous sommes confrontés à la nécessité de nous mettre aux normes handicapés dans des locaux qui sont déjà inadaptés. Des travaux que l'on estime entre 400 000 et 500 000 euros". Aussi créer un nouveau lieu plus confortable et aux normes pourrait libérer le réseau de cette tutelle chrétienne encombrante: "On se demande si ce ne serait pas mieux ainsi, confirme-t-elle. Si on gardait le même système d'exploitation, on perdrait une soixantaine de places avec les nouvelles normes, ça fait beaucoup, même si nous nous en tirons bien en termes de spectateurs. Il faudrait en outre condamner l'entrée de gauche pour un ascenseur. Est-ce qu'il ne faut pas dans ces conditions envisager un nouvel outil ?" s'interroge-t-elle.

Si la voie de l'indépendance est celle qui sera choisie, il faudra se décider avant la fin de l'année 2016.

L'Utopia Toulouse comporte trois salles (avec une jauge de 441 places) et a reçu le Trophée de la salle art-et-essai du Film Français en 2001.

Humour potache, critique de la société, sexe et rock’n roll : 10 séries britanniques à (re)voir après Broadchurch

Posté par kristofy, le 4 mars 2014

broadchurchLa série anglaise Broadchurch qui vient d'être diffusée sur France 2 a rencontré un très bon succès d’audience, et un remake américain (mais aussi français) se prépare, en attendant la saison 2.

Depuis quelques années les séries ont le vent en poupe : des scénarios plus originaux, une réalisation soignée, et des spectateurs impatients de voir l’épisode suivant. Une petite révolution a eu lieu aux Etats-Unis avec Netflix et la série House of cards avec Kevin Spacey dont tous les épisodes étaient disponibles en même temps.

Or, le saviez-vous ?,  House of cards est en fait le remake d’une série anglaise. Mais The Office avec Steve Carell et Shameless avec William H. Macy sont aussi les remakes d’une série anglaise. Et à venir, les remakes de séries anglaises Utopia et donc de Broadchurch…

Quand la plupart des séries américaines se déclinent en plusieurs saisons d’une vingtaine d’épisodes, le meilleur des séries britanniques est en fait plus proche de la forme du feuilleton télé avec un nombre réduit d’environ 6 ou 8 épisodes.  Une structure souple qui a l’avantage de pouvoir attirer des noms célèbres du cinéma à la télévision : Olivia Colman et Jodie Whittaker dans Broadchurch, Ben Whishaw et Romola Garai dans The Hour, Chloë Sevigny dans Hit & Miss... Il s’agit d’un format qui commence à séduire de plus en plus, repris d’ailleurs aux USA récemment par True Detective avec les acteurs Matthew McConaughey et Woody Harrelson en 6 épisodes.

Si Broadchurch se base sur une intrigue criminelle où il faut trouver le coupable (comme beaucoup d'autres séries à la télé à 20h50), voici 10 autres séries britanniques indispensables à (re)découvrir, soit un cocktail de suspense et d’impertinence:

State of play : 2003, 6 épisodes d’environ 56 minutes.
state of playUn feuilleton politico-médiatique où deux meurtres vont conduire à des révélations faites par des journalistes à propos de membres du gouvernement et de l’industrie du pétrole. Avec les acteurs David Morrissey, Kelly Macdonald, Bill Nighy, James McAvoy (qui sera ensuite star de cinéma)… C’est la première fois qu’une série aborde la corruption et l’influence des lobbys chez les hommes politiques qui sont au même moment au pouvoir (avec dans le rétroviseur le rôle de l’Angleterre dans la guerre en Irak). L’intrigue principale a fait l’objet d’un remake américain au cinéma (avec Ben Affleck, Russell Crowe, Rachel McAdams...). La série créée par Paul Abbott est réalisée par David Yates (qui ensuite allait diriger les 4 derniers films de Harry Potter).

Skins : 2007-2013, 7 saisons de 8-10 épisodes d’environ 46 minutes.
skinsLa série qui a secoué la jeunesse avec au menu sexe, drogue, et adolescence rock’n roll (anorexie, racisme, homosexualité, dépression, absence des parents…). La première saison raconte une histoire qui progresse en s’intéressant à un personnage différent à chaque épisode. Dans l’équipe des scénaristes, il y avait au départ une majorité de jeunes d’à peine 20 ans supervisés par les créateurs Bryan Elsley et Jamie Brittain. Les acteurs ont presque tous été remplacés après deux saisons pour d’autres histoires. Depuis, Dev Patel, Nicholas Hoult, Hannah Murray, Kaya Scodelario sont désormais des stars.

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Les Trophées du Film Français honorent Gael Garcia Bernal et sacrent Skyfall

Posté par vincy, le 6 février 2013

Le magazine professionnel Le Film Français a décerné ses trophées annuels hier soir. Ils récompensent d'une part les plus grands succès publics du box office par catégorie, mais aussi des personnalités, à travers un vote des professionnels ou le choix d'un jury. Un Trophée du public TF1 a été remis pour la troisième année : les internautes des sites du groupe audiovisuel étaient invités à choisir leur film préféré parmi les 15 plus gros succès français du box-office.

Trophée des Trophées : Skyfall de Sam Mendes (Sony Pictures Releasing France). 7 millions d'entrées.

Trophée d’honneur : Gael García Bernal.

Trophée de la personnalité de l'année: Michel Reilhac, directeur de l'unité cinéma d'Arte France et directeur général délégué d'Arte France Cinéma pendant dix ans (voir actualité du 27 août 2012).

Trophée de l’exploitant : Patrick Troudet - Utopia Saint-Siméon à Bordeaux,

Trophée du public TF1 : Le prénom d'Alexandre de la Patellière et Matthieu Delaporte (Pathé Distribution). 3,3 millions d'entrées.

Trophée de la première œuvre : Les Kaïra de Franck Gastambide (Gaumont Distribution). 1 million d'entrées.

Trophée UniFrance Films (le film le plus vu dans le monde) : Intouchables d'Éric Toledano et Olivier Nakache (Gaumont Distribution). 30 millions d'entrées à l'international.

Trophée du film français : Sur la piste du Marsupilami d'Alain Chabat (Pathé Distribution). 5,3 millions d'entrées.

Trophées duos cinéma :
- Duo révélation: : Régis Roinsard/Alain Attal (Les Productions du Trésor) pour Populaire. 1,1 million d'entrées.
- Duo cinéma: : Noémie Lvovsky/Jean-Louis Livi (F Comme Film) et Philippe Carcassonne (Ciné@) pour Camille redouble. 875 000 entrées.

Dommages collatéraux : le cinéma israélien paye pour la politique de son gouvernement

Posté par anne-laure, le 13 juin 2010

« Parce qu'il est israélien, on lui a appliqué une punition collective. C'est l'erreur de ce réseau de cinéma » - le réalisateur Leon Prudovsky

a 5 heures de parisLe réseau de salles d’art et d’essai Utopia a décidé, vendredi 4 juin, de boycotter purement et simplement le film israélien A 5 heures de Paris, réalisé par Leon Prudovsky. Pour quel motif ?  La condamnation du raid israélien meurtrier sur le convoi maritime humanitaire à Gaza, le 31 mai dernier. Normalement prévu pour le 23 juin, le film devrait être zappé de deux salles – à Tournefeuille (près de Toulouse) et Avignon - sur les six que possède le réseau.

A 5 heures de Paris, est une comédie sentimentale classique, une histoire d’amour naissante entre un chauffeur de taxi et une professeur de piano. On ne peut pas accuser le réalisateur d’avoir fait un film politique, et quand bien même, toute forme de censure d'un film est contestable. Pourtant, Utopia estime agir pour « des raisons morales » (sic), puisque le film est en partie financé par l’Etat israélien. «Nous sommes scandalisés par l'attitude d'Israël, par sa violence et nous voulions protester contre ce qui se passe », a déclaré Anne-Marie Faucon, co-fondatrice d'Utopia. « Vu les retombées médiatiques, on se dit que nous avons eu raison de le faire. Les spectateurs expriment leur sympathie, beaucoup sont très en colère et comprennent que c'était le seul moyen de nous faire entendre. »

Une double erreur fondamentale se glisse dans cette argumentation : d'une part, le film est loin d'être produit majoritairement par les deniers publics, d'autre part l'Etat israélien a souvent investit dans des films critiquant ouvertement la guerre avec les pays voisins. « Parce qu'il est israélien, on lui a appliqué une punition collective. C'est l'erreur de ce réseau de cinéma », a déclaré  le cinéaste Leon Prudovsky (par ailleurs né à Saint-Petersbourg en Russie) sur la chaîne Public Sénat.

A quand un film japonais ou américain censuré parce que leur pays pratique la peine de mort?

Pour se donner bonne conscience sans doute, Utopia préfère d'ailleurs programmer Rachel de Simone Guitton, un documentaire sur Rachel Corrie, une pacifiste américaine écrasée par un bulldozer israélien en 2003 en tentant d'empêcher la destruction de maisons palestiniennes. La confusion ne fait qu'augmenter. Dans ce cas, pourquoi ne pas censurer les films chinois, iraniens, thaïlandais, russes ou encore japonais pour divers désaccords idéologiques (oppression, torture, peine capitale, ...) alors que ces films sont souvent financés à travers des systèmes d'aides publiques (et d'autorisations d'Etat)? Pourquoi deux poids deux mesures ? Pourquoi ne pas avoir appliqué cette sentence dès le début du blocus de Gaza à tous les films israéliens ? Pourquoi punir un cinéma qui est principalement très critique envers la politique de son gouvernement, portant généralement des messages pacifistes ou offrant des portraits d'un pays cloisonné entre ses communautés ?

Selon Bertrand Delanoë, « il est à la fois absurde, injuste et contre-productif de s'en prendre aux créateurs pour condamner l'action d'un gouvernement ». « Les artistes ne sont pas comptables du choix des dirigeants de leur paysLe cinéma est, partout dans le monde, un instrument d’affirmation de la liberté d’esprit et de la pensée critique. C'est d'autant plus vrai s'agissant du cinéma israélien, qui a toujours été une avant-garde exigeante et lucide ». « La culture demeure le meilleur vecteur de l'intelligence, du dialogue et de la paix » .

Double peine

C'est ainsi prendre les spectateurs en otage : ne pas leur proposer une vision apolitique et positive d'Israël, disposer d'une sanction à l'égard d'un gouvernement en englobant tous les citoyens, y compris un réalisateur, pire, imposer un soutien aveugle à un camp plutôt qu'à un autre. C'est le contraire de la justice, de la liberté d'expression, et de la pluralité de l'opinion.

Le boycott fait grand bruit et les réactions sont vives, de SOS Racisme à la Licra en passant par le Crif. Jeudi 10 juin, les professionnels du Septième Art ont mis la pression sur Utopia. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture a fait part de son incompréhension et de sa désapprobation. « Ma déception est d'autant plus grande que j'ai toujours eu le sentiment que le réseau Utopia était ouvert à toute la diversité du cinéma et participait, à sa façon, à ce débat démocratique » écrit-il dans une lettre adressée à Anne-Marie Faucon.

Mais le réseau de cinémas est résigné. Utopia estime d'ailleurs que son geste symbolique et limité dans le temps ne nuit pas au film puisqu'il le diffusera en juillet, à une date encore non définie. Par ailleurs, il organisera des débats avec des réalisateurs israéliens, auxquels Leon Prudovsky est invité. Pas de censure donc ? Cela reste à voir. Le symbole est quand même gênant, et créé un malaise.

Dès le 23 juin, A 5 heures de Paris sera tout de même programmé en France dans 40 à 50 salles, notamment celles des circuits UGC, Gaumont, Pathé ou MK2.

Et finalement, après une semaine de polémique et de division entre les dirigeants du réseau  des salles Utopia, ceux-ci se sont engagés à programmer le film israélien A cinq heures de Paris. Franck Salün, responsable de la distribution chez Memento Films, relativise mais ne cache pas qu'il s'agit d'« une dérive inquiétante, de considérer qu'un cinéaste doit rendre compte de la politique de son pays. »