Cannes 70 : All the love you Cannes, Troma sur la croisette

Posté par cannes70, le 13 mars 2017

70 ans, 70 textes, 70 instantanés comme autant de fragments épars, sans chronologie mais pas au hasard, pour fêter les noces de platine des cinéphiles du monde entier avec le Festival de Cannes. En partenariat avec le site Critique-Film, nous lançons le compte à rebours : pendant les 70 jours précédant la 70e édition, nous nous replongeons quotidiennement dans ses 69 premières années.

Aujourd'hui, J-66.


Les documentaires ayant pour sujet le Festival de Cannes ne sont pas légion – quelques-uns ont été tournés pour la télévision, mais se concentrent généralement sur le glamour et les stars d’Hollywood en passage éclair sur la Côte d'Azur. Présentes sur la Croisette tous les ans depuis 1971, les équipes de Troma Entertainment, menées par le charismatique Lloyd Kaufman, ont fêté leur trentième séjour à Cannes en tournant un film, sobrement intitulé All the love you Cannes !, qui dévoile une facette moins glamour et finalement peu connue du Festival : celle d’un business acharné, où les boites de production indépendantes se battent littéralement pour vendre leurs films et rembourser le moindre centime engagé…

Pour ceux qui ne connaîtraient pas Troma Entertainment, il s'agit d'une société de production américaine, créée au début des années 1970 par Lloyd Kaufman, et spécialisée dans les films d'exploitation de série Z tendance horreur trash, souvent mâtinés de comédie, et tirant, surtout depuis les années 90, vers le nanar volontaire. Produits avec des budgets dérisoires, les films Troma sont appréciés d'une large communauté de fans dans le monde entier ; la connivence avec le public est totale, l'humour vole bien souvent au ras des pâquerettes, mais le tout est mis en boite avec une telle bonne humeur et un tel esprit frondeur que l'on ne peut que rendre les armes et s'avérer conquis.

Les thèmes récurrents des productions Troma sont le sexe, le gore et la violence, dans un maelstrom de délire politiquement incorrect au-dessus duquel flotte, depuis des années, l'ombre de la menace atomique. La plus populaire des productions Troma, qui allait donner le « La » au reste de leur productions durant les trente années suivantes, est Toxic, également connu sous son titre original The toxic avenger (Michael Herz et Lloyd Kaufman, 1984). Le personnage principal de Toxic, un gringalet devenu un super-héros mutant, difforme et monstrueux, sous l'effet de l'exposition à un baril de déchets toxiques, est d'ailleurs devenu la « mascotte » de Troma à travers le monde.

Tourné lors de l’édition 2001 du Festival de Cannes, le film All the love you Cannes ! (écrit et réalisé par Gabriel Friedman, Lloyd Kaufman et Sean McGrath) était, à l’origine, un projet de documentaire sur la façon dont les équipes de Troma Entertainment assurent la promotion, la vente et l’achat de longs-métrages sur le Marché du Film, salon professionnel qui se tient en parallèle du Festival de Cannes ; l’ambition du métrage était également de signer une espèce de « guide » vidéo à destination des apprentis-cinéastes, afin de prouver au public que l’on peut tout à fait vivre le Festival en low-cost, et qu'un réalisateur en herbe peut réussir à se frayer un chemin parmi les pros en se ramenant sur la Croisette avec sa bite, son couteau, et sa bobine sous le bras.

Durant sa première moitié, All the love you Cannes s’avère un document complet et plutôt informatif, réussissant le tour de force de demeurer relativement « sérieux » dans sa façon d’aborder le travail, bien réel, accompli sur place par les équipes de Troma (même si les blagues potaches ne sont jamais loin avec ces grands enfants turbulents).

Les équipes de bénévoles s’expriment avec franchise, notamment les « Tromettes », qui évoquent leurs difficultés à parader en petite tenue dans les rues de Cannes, bondées de badauds pendant le Festival : il faut remettre les passants à leur place, subir les mains ou doigts des libidineux de passage ; l’une d’entre elles, Jen Amato, se voit tel un « morceau de viande » dans le regard des autres – un quotidien qui cache tout de même un certain malaise derrière l’esprit festif. Les joyeux drilles de Troma sont de toute façon assez mal vus des festivaliers en général ; dans leurs bureaux installés au Carlton, la proximité immédiate des bureaux des exécutifs de Warner (et de leur petit chien) leur vaudra par exemple quelques plaintes et autres désagréments.

A mi-métrage, All the love you Cannes prend subitement une tournure assez différente : vampirisée par la personnalité turbulente de Doug Sakmann, la deuxième partie du film se concentre sur les différents déboires qu’il subit (et provoque, souvent) durant son séjour mouvementé à Cannes. Homme à tout faire de Troma depuis 2000, Sakmann a pêle-mêle occupé les postes d’acteur, producteur, cascadeur, preneur de son, monteur, directeur artistique, directeur marketing, designer de costumes, décorateur, maquilleur, assistant réalisateur ou réalisateur de seconde équipe, réalisateur, scénariste, directeur photo, directeur de production ou encore responsable des effets spéciaux. Lire le reste de cet article »

BIFFF 2014 : 10 choses à savoir sur Lloyd Kaufman (Troma)

Posté par kristofy, le 16 avril 2014

lloyd kaufmann © ecran noirLa société Troma fête son 40ème anniversaire, et le producteur/réalisateur Lloyd Kaufman qui incarne l'esprit gore et potache de ces films compte bien continuer dans la même veine : des monstres vengeurs et des filles topless avec du sang et autres liquides gluants, un budget proche de zéro et une passion toujours aussi grande...

Cet anniversaire a été fêté au BIFFF avec une projection nocture du dernier film en date de Lloyd Kaufman Return to Nuke em High, vol.1, qui est une relecture moderne de Class of Nuke 'Em High et inspiré de leur film le plus réussi Poultrygeist: Night of the Chicken Dead (qui était d'ailleurs au BIFFF en 2007). Pour l'occasion le film a été précédé de plusieurs bandes-annonces des films Troma les plus cultes (dont Troméo and Juliet, Toxic Avenger, Sgt Kabukiman NYPD...) et d'un court-métrage de fan délirant Banana Motherfucker.

L'industrie du cinéma en général et beaucoup de monde en particulier détestent Troma et leur réputation de producteurs de films de série Z, stupides et dégoûtant. « Ce qui se passe dans le monde est souvent plus fou que ce qu'on a dans la tête pour nos films ». En fait Lloyd Kaufman est en réalité le plus sympathique des cinéastes. Au BIFFF, il a signé des autographes jusqu'à 5h du matin avec sa compagne. Voici 10 choses à savoir pour s'intéresser encore plus à ses films :

1. il se réfère à Quentin Tarantino et son Kill Bill vol.1 et vol.2 pour lui aussi proposer un grand film monumental qui représentera en quelque sorte la quintessence de l'esprit Troma : après Return to Nuke em High, vol.1 , il y aura Return to Nuke em High, vol.2 (qui est en montage actuellement).

affiche return to nukeem troma2. Return to Nuke em High, vol.1 a eu l'honneur d'une avant-première américaine au prestigieux MOMA (musée d'art moderne de New-York) qui chaque année sélectionne des films pour leur impact culturel (il y était donc avec Gravity, 12 years a slave, Blue Jasmine...).

3. Troma a mis beaucoup de ses films sur internet pour qu'ils soient vus gratuitement en créant une chaîne YouTube.

4. Certains films Troma ont à leur générique Samuel L. Jackson, Vincent D'Onofrio, Kevin Costner, et certains réalisateurs très connus y ont travaillé à leurs débuts comme Oliver Stone, J. J. Abrams, James Gunn Trey Parker et Matt Stone, Eli Roth...

5. Poultrygeist: Night of the Chicken Dead est aussi une adaptation du livre Fast Food Nation (également adapté par Richard Linklater). Cette version Troma dénonce les tortures infligées aux animaux aussi bien qu'aux salariés et aux paysages par l'industrie agro-alimentaire.

6. Lloyd Kaufman soutient l'association PETA (People for the Ethical Treatment of Animals) contre les mauvais traitements infligés aux animaux, il a fait une vidéo à ce sujet.

7. La saga Toxic Avenger va continuer : il y a un projet de remake hollywoodien avec un grand studio, réalisé par Steve Pink. Il y a aussi une suite Toxic Avenger 5 qui était écrite et qui devait se tourner en Ukraine. Mais avec les bouleversements politiques actuels du pays le projet est suspendu.

lloyd kaufmann au bifff © ecran noir8. Lloyd Kaufman parle très bien français, et Troma est presque chaque année présent au festival de Cannes avec des projections secrètes et gratuites organisées en dehors du Palais pour les fans qui n'ont aucune accréditation.

9. Lloyd Kaufman défend le cinéma indépendant. Il en parle dans deux documentaires qu'il a réalisé: All the love you Cannes en 2002, et cette année pour le 40ème anniversaire de Troma sera dévoilé Occupy Cannes. Il avait déjà écrit plusieurs livres sur le sujet comme Make Your Own Damn Movie!: Secrets of a Renegade Director ou All I Need To Know About FILMMAKING I Learned From THE TOXIC AVENGER: The Shocking True Story of Troma Studios !.

10. Lloyd Kaufman est féministe ! Dans ses films récents les personnages principaux sont des femmes, le cliché du jeune américain macho est souvent un abruti qui meurt de façon horrible et il valorise les lesbiennes. Il déplore également la faible proportion de femmes par rapport aux hommes qui travaillent dans le cinéma, et il n'hésite pas à critiquer ses collègues qui œuvrent dans les films d'horreur pour le peu de place qui est accordé aux femmes. "Le monde est plein de films médiocres créés par des hommes" affirme-t-il.

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Site officiel de Lloyd Kaufman