Nos coups de coeur de l’année: L’adieu émouvant de Miyazaki avec Le vent se lève…

Posté par geoffroy, le 24 décembre 2014

le vent se leve kaze tanichu the wind rises

En ce qui me concerne, mon année cinématographique 2014 ne fut pas complète puisqu’elle s’est accidentellement terminée le 6 septembre dernier. Depuis cette date, je n’ai vu aucun film. C’est pourquoi, et au-delà de la seule honnêteté intellectuelle qu’une telle situation impose, mon choix s’est porté uniquement sur les huit premiers mois de l’année.

Dans ces temps moroses où les déclinologues de tout poil ont le vent en poupe et la tribune facile, un film, héroïque à plus d’un titre, a réussi à tracer des sillons d’espérances par-delà le chaos du monde. Le vent se lève, dernier cadeau cinématographique en forme de profession de foi d’Hayao Miyazaki, est un conte moderne lucide, poétique, sombre, réaliste, romantique, rempli d’ouvertures et de ligne de fuite aussi mélodramatiques qu’autobiographiques. Ce film,  testamentaire – il s’agit, hélas, du dernier long-métrage du maître nippon –, ouvre le champ des possibles pour laisser à porter de main – ou de rêve –, l’espoir d’une conclusion « heureuse ».

Avec ce onzième film en forme de synthèse conclusive, Miyazaki laisse derrière lui une œuvre dense, cohérente, à la beauté visuelle saisissante capable de développer un univers riche où s’imbriquent le ciel et la terre, le sacré et le profane, la nature et la culture, la jeunesse et la sagesse, la générosité comme la cruauté des hommes. Le tout porté par un imaginaire d’une incroyable inventivité à chaque fois recevable d’un point de vue narratif. Le vent qui souffle sur les films du papa de Porco Rosso est synonyme de liberté, faisant de la vie une promesse sans cesse réinventée, assimilable, porteuse de sens.

D’où l’unité d’une filmographie intemporelle aussi récréative que réflexive qui a su partager avec tout un chacun le vers de Paul Valéry prononcé dans ce film : « Le vent se lève, il faut tenter de vivre ». Cette exigence de l’instant, si dure à consacrer dans le temps, n’aura pas été un feu de paille mais une compagne fidèle face au long cheminement personnel du réalisateur.

Un tel choix dépasse donc le simple cas d’une oeuvre, fut-elle remarquable, et salue plus globalement la vision d’un grand cinéaste ayant été capable de mettre ses propres rêves au service de son art.

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Toute l'actualité autour du Vent se lève

Le Vent se lève, meilleur film d’animation japonais de l’année

Posté par vincy, le 17 mars 2014

kaze tachinu

La Japan Academy Prize a choisi Le vent se lève d'Hayao Miyazaki comme meilleur film d'animation de l'année. Il était face à un autre film du studio Ghibli, Le conte de la Princesse Kaguya de Isao Takahata, mais aussi Albator de Shinji Aramaki, Puella Magi Madoka Magica the Movie: Rebellion de Akiyuki Shinbo et Lupin the Third vs. Detective Conan: The Movie de Hajime Kamegaki. Le Vent se lève a également remporté le prix de la meilleure musique pour Joe Hisaishi (qui était nominé pour trois films différents). C'est la huitième fois qu'Hisaishi est récompensé en 37 éditions du prix.

Miyazaki avait été le premier réalisateur de film d'animation a remporté le prestigieux Japan Academy Prize avec Princesse Mononoke alors qu'à l'époque on ne distinguait pas films en prises de vues réelles et films d'animation. Il réédita l'exploit en 2002 avec Le voyage de Chihiro. Le prix pour le meilleur film d'animation fut créé en 2007. Miyazaki l'a reçu une fois, pour Ponyo en 2009.

Prétendant japonais à l'Oscar du meilleur film en langue étrangère (et finalement pas nominé), The Great Passage (Fune wo amu), 12 fois nominé, a reçu le prix du meilleur film et le prix du meilleur réalisateur pour Yuya Ishii, ainsi que ceux du meilleur acteur (Tyujei Matsuda) et du meilleur scénario. Il a laissé peu de prix à son concurrent direct, Tel père, tel fils, de Hirokazu Kore-eda, qui récolte les deux prix du meilleur second-rôle (Lily Franky côté masculin et Maki Yoko côté féminin). Maki Yoko a réalisé le doublé puisqu'elle a gagné également le prix de la meilleure actrice pour son rôle dans le film de Tatsushi Omori, The Ravine of Goodbye.

Enfin, le prix du meilleur film étranger est revenu aux Misérables, énorme succès dans l'Archipel, qui rivalisait avec le film indien 3 Idiots, et les hollywoodiens Capitaine Phillips, Django Unchained et Gravity.

[Extrait] Le vent se lève : la terre tremble à Tokyo

Posté par vincy, le 22 janvier 2014

le seisme de tokyo le vent se lève hayao miyazaki

C'est notre premier coup de coeur de l'année. On pourra toujours préférer Le Voyage de Chihiro, ou rester nostalgique du choc de Princesse Mononoke, l'ultime film d'Hayao Miyazaki, Le vent se lève (notre critique) est un mélodrame historique d'une ambition folle. Un film à la fois autobiograhique et épique.

Miyazaki cite ainsi Fellini et Ozu et voyage à Tokyo (lire aussi : Une ville dans le cinéma : Tokyo). La ville a subit un violent séisme en 1923, que le cinéaste reproduit, à sa façon, comme si un monstre soulevait la ville par dessous la terre. La séquence rappelle le bombardement d'Hiroshima et de Nagazaki, le tremblement de terre de Kobe, ou encore, plus récemment, la catastrophe de Fukushima. Tout le film tire des liens entre le passé du pays et le Japon d'aujourd'hui.

Lors de ce séisme, on dénombre plus de 100 000 morts et près de 40 000 disparus. Tokyo est dévastée. Dans Le vent se lève, c'est aussi le moment où le héros du film Jiro, qui vient à Tokyo pour étudier, rencontre sa future épouse Naoko.

Le séisme de Kant? a déjà été l'objet de films et même de reportages (vidéo Pathé). La Submersion du Japon, le roman de Sakyo Komatsu, a été adapté deux fois sur grand écran : par Shir? Moritani en 1973 et par Shinji Higuchi en 2006. Le documentariste Choonkong Oh a également réalisé des films sur le sujet dans les années 80. Akira Kurosawa a souvent évoqué le traumatisme qu'il a vécu avec ce tremblement de terre, expliquant que certaines scènes de ses films, comme Ran et Kagemusha, puisaient leur influence artistique dans cet événement. De même, Yasujiro Ozu restera profondément marqué : la maison de sa famille a été détruite par le choc des plaques tectoniques.

Mais avant tout, le séisme a été dommageable au cinéma japonais. Avec lui, il a emporté la plupart des cinémas de la capitale mais aussi les archives cinématographiques du pays, soit une vingtaine années de films détruits.

Hayao Miyazaki, retraité actif : « Le repos pour moi ressemble à du travail pour les autres »

Posté par vincy, le 6 septembre 2013

hayao miyazakiElle était promise depuis quelques jours : la conférence de presse d'Hayao Miyazaki s'est déroulée vendredi matin à Tokyo devant 600 journalistes. Depuis l'annonce de sa retraite par le président des Studios Ghibli, dimanche dernier à Venise, on patientait pour en savoir plus : retraite définitive? partielle? pourquoi?

Heureux en dessin, malheureux en cinéaste

Ce sera une retraite partielle : il ne veut plus faire de longs métrages, mais il a d'autres projets en tête. "Je voudrais oeuvrer au moins dix ans de plus, mais je pense que faire des longs métrages n'est plus mon travail", a expliqué Hayao Miyazaki. "Cette fois c'est vrai, je l'ai dit au producteur" comme pour anticiper les réactions à d'éventuels faux adieux. Il ajoute : "Je n'ai jamais pensé une seule fois que j'étais heureux d'être devenu réalisateur, alors que je suis très souvent heureux quand je suis un dessinateur. Si vous être capable d'obtenir parfaitement le mouvement de l'eau ou du vent en tant que directeur de l'animation, vous êtes réellement content pendant plusieurs jours. Mais si vous êtes le réalisateur, vous devez aussi décider de beaucoup d'autres choses. Et ce n'est pas bon pour mon estomac."

Il détaille cette fatigue : "Kaze Tachinu a pris 5 ans. Si je pensait au prochain film cela prendrait 6 ou 7 ans. Je vais avoir 73 ans et j'en aurais alors 80 à la fin". Film après film, les délais de production, souvent parce qu'il voulait prendre du temps pour trouver le bon sujet mais aussi parce que son perfectionnisme le poussait à refaire des scènes entières, s'étiraient. "Chaque réalisateur de film d'animation travaille différemment, mais depuis que j'ai commencé, j'éprouve le besoin d'être le dessinateur" explique-t-il. "Peu importe comment j'essaie de trouver ma force avant de démarrer une production, ce qui est vrai c'est que ma concentration diminue année après année, et je le ressens."

Des projets et de la liberté

"Je vais être libre. Toutefois, tant que je pourrai prendre ma voiture pour aller au studio j'irai. Ce que je voudrai faire, je le ferai" précise-t-il. Il a de nombreux projets en tête. Le musée Ghibli doit s'agrandir et il veut s'investir davantage dans les expositions qui s'y déroulent. Le studio Ghibli qu'il a cofondé s'apprête aussi à sortir un deuxième long métrage cette année.

Son rêve c'est de pouvoir se reposer les samedis. Même s'il n'est pas sûr d'y parvenir : "Le repos pour moi ressemble à du travail pour les autres".

Miyazaki s'en va au sommet avec Kaze Tachinu (Le vent se lève), en compétition à Venise. C'est déjà le plus gros succès de l'année au Japon.

Hayao Miyazaki prend sa retraite : « Approcher la beauté à un prix. »

Posté par vincy, le 1 septembre 2013

kaze tachinu

Laconique. Koji Hoshino, président des studios Ghibli, a annoncé à Venise le départ à la retraite de Hayao Miyazaki. "M. Miyazaki a décidé que Kaze Tachinu (The Wind Rises) serait son dernier film et qu'après il prendrait sa retraite", a-t-il déclaré à la presse.

Kaze Tachinu est en compétition pour le Lion d'or. Miyazaki, Lion d'or d'honneur en 2005, Ours d'or du meilleur film à Berlin et Oscar du meilleur film d'animation (Le voyage de Chihiro), met ainsi un terme à près de trente années dans la réalisation de longs métrages d'animation (Nausicaa fêtera ses 30 ans l'an prochain).

Aucune précision. Miyazaki, absent à Venise, donnera une conférence de presse prochainement à Tokyo. Il a quand même adressé  un message publié à la Mostra. Il y écrit: "Approcher la beauté à un prix". Message d'adieu aux jeunes générations?

Métaphore sur la vie face à un avenir incertain, Kaze Tachinu est en tête du box office japonais depuis 6 semaines et, avec plus de 82 millions de $ de recettes, est en passe de devenir le champion de l'année dans son pays. Ce 11e long métrage du Maître sortira en France au début de l'année prochaîne. "C'est un film destiné à tout public et beaucoup de Japonais ont dit qu'ils avaient aimé sa nouvelle saveur. C'est le premier film de M. Miyazaki qui a comme protagoniste un personnage réel dont l'histoire l'a inspiré toute sa vie", a expliqué M. Hoshino.

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Lire aussi notre reportage sur le Musée Ghibli.

Box office : Miyazaki Empereur du Japon et Bong Joon-ho Roi en Corée du Sud

Posté par vincy, le 13 août 2013

Le dernier film d'Hayao Miyazaki continue de dominer le box office japonais. Kaze tachinu (The Wind Rises) a déjà récolté 45 millions de $ de recettes en 3 semaines. Il est en passe de devenir le film le plus vu de l'année. Miyazaki confirme ainsi son statut de roi du box office local (4 des 10 plus grosses recettes historiques sont signées du Maître). Ses récents films (Ponyo, Le château ambulant, ...) ont tous été les champions de  leur année respective. Le Voyage de Chihiro conserve même le record historique, toutes nationalités confondues, au BO japonais.

De l'autre côté de la mer du Japon, c'est un autre Maître du cinéma local qui règne. Snowpiercer, le transperceneige premier film en anglais de Bong Joon-ho, sorti le 1er août en Corée du Sud a déjà récolté 41 millions de $ (environ 6,5 millions d'entrées!) en dix jours. Déjà rentabilisé. Il a ainsi capté 44% des billets vendus lors de son premier week-end. Le film ne devrait avoir aucun mal à battre Iron Man 3 (64 M$) et Miracle in Cell N°7 (82M$), les champions actuels du BO sud-coréens. Rappelons que les précédents films de BJH ont cartonné en salles : Mother a terminé 10e de l'année 2009 (16M$) et The Host a été le film le plus populaire de l'année 2006 (65,6M$). Ce dernier film est d'ailleurs toujours le détenteur du record historique pour un film sud-coréen, en Corée du sud, avec 13 millions d'entrées.

[Hayao Miyazaki / Ghibli] Le « Maître » au coeur d’une polémique politique

Posté par vincy, le 24 juillet 2013

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La sortie de Kaze Tachinu (The Wind Rises) a été un succès au box office ce week-end au Japon. Pourtant, Hayao Miyazaki, vétéran de l'animation vénéré en son pays, a fait des vagues. Dans un entretien au journal du Studio Ghibli, le sien donc, Neppu, il a évoqué les femmes de réconfort, ces coréennes et autres femmes asiatiques (de 20 000 à 200 000 selon les estimations) qui ont été enlevées puis asservies pour devenir des prostituées destinées au militaires japonais.

Selon Miyazaki, le Japon n'en a pas fait assez pour réparer ce mal. Aussitôt, en plein week-end électoral (qui a donné la victoire aux conservateurs-nationalistes du Premier ministre), les réactions ont fusé. Le réalisateur a été taxé d''anti-Japonais'. Rien que ça.

C'est d'ailleurs ironique que certains Japonais s'offusquent des propos d'un artiste qui, comme l'écrivain Murakami, a toujours véhiculé des valeurs pacifistes et écologiques. C'est d'autant plus paradoxal dans ce cas que le nouveau dessin animé de Miyazaki ressuscite le héros de la seconde guerre mondiale Jiro Horikoshi, concepteur des avions de combats Mitsubishi A6M Zero.

Opposition politique

Mais le dessin animé est apparu pour certains comme une trahison à l'Histoire japonaise. Ses propos sur les femmes de réconfort n'ont pas arrangé les choses : "C'est une question de fierté pour un pays, il est nécessaire de demander pardon proprement et de payer pour les réparations." Les "ianfu", ces femmes de confort regroupées spécifiquement à des fins de prostitutions, n'ont toujours pas été dédommagées. Les politiciens Japonais et même l'Empereur se sont souvent publiquement excusés pour les crimes commis durant les guerre. Mais pour les femmes bafouées, et leurs descendants, le Japon a sous-évalué les montants. Pire l'actuel Premier ministre, Shinzo Abe, qui aime surfer sur les valeurs patriotiques et rêve que le Japon se remilitarise, avait déclaré en 2007 : "Le fait est qu'il n'y a pas de preuve qu'il y avait eu usage de contrainte." Au nom de l'honneur du pays, le révisionnisme est de mise, alors que les USA réclament que le Japon reconnaisse "formellement", en  s'excusant et en acceptant "sa responsabilité historique d'une façon claire et sans équivoque pour la contrainte employée par ses militaires afin de forcer des femmes à l'esclavage sexuel pendant la guerre."

Autant dire que les Japonais ne sont pas encore prêts à s'amender. Dans la même interview, Miyazaki évoque aussi les disputes territoriales sur certaines îles avec les voisins coréens et chinois, menaçant la paix dans la région. Il propose même que ces îlots soient gérés conjointement par les pays qui les réclament! De quoi énerver le parti au pouvoir qui en a fait un enjeu stratégique, politique et diplomatique. Mais Miyazaki se situe ailleurs : du côté de ceux qui ne veulent pas voir une guerre éclater de nouveau. A 72 ans, né en plein conflit mondial, ayant grandit dans l'après Hiroshima (et Nagazaki), le Maître continue de vouloir réconcilier les Japonais avec leur histoire et leur environnement. Et certains, d'ailleurs, l'acclament pour ses prises de position. Mais ils sont rares et beaucoup lui ordonnent de s'arrêter et de se contenter de réaliser des films...

Hier : Kaze Tachinu, son nouveau dessin animé séduit le Japon
Demain : Les projets du Studio Ghibli

[Hayao Miyazaki / Ghibli] Son nouveau dessin animé séduit le Japon

Posté par vincy, le 23 juillet 2013

kaze tachinu the wind rises miyazaki

Le nouveau film d'Hayao Miyazaki, Kaze Tachinu (The Wind Rises), est sorti ce week-end dans les salles japonaises. L'occasion pour Ecran Noir de vous offrir une série d'articles autour de ce nouveau film, du studio Ghibli et pour ce week-end, une visite du Musée Ghibli, à Tokyo.

Événement toujours très attendu, le dessin animé n'a pas déçu son distributeur, Toho. Avec 747 451 entrées durant ses deux premiers jours d'exploitation, le film a récolté 9,66 millions de $. C'est un peu moins que Ponyo, le précédent film de Miyazaki en 2008. Mais au final, le film devrait largement dépasser les 100 millions de $ de recettes, soit, de très loin, le plus gros succès au Japon cette année.

Côté critiques, globalement l'avis est favorable, même si Kaze Tachinu n'atteindrait pas le niveau d'excellence de Princesse Mononoke et du Voyage de Chihiro. Beaucoup de journalistes ont fait le lien avec un autre film du Maître, Porco Rosso (1992). Les avis les plus positifs louaient l'inspiration et l'onirisme de l'ensemble. Mélo larmoyant à l'ancienne, le drame historique a séduit les adultes... mais pas les enfants si l'on en croit les premières réactions à la sorties des salles. Les petits nippons, qui ont têté du Totoro dès la naissance (une véritable idole là bas), n'ont pas retrouvé de personnages iconiques dans ce film, dont la narration semble trop complexe pour eux.

Demain : le vétéran Myazaki au coeur d'une polémique politique.


Bande annonce de Kaze Tachinu