Cinéma et mode : ô mondes cruels !

Posté par wyzman, le 14 juin 2015

Projeté en avant-première lors de la quatrième édition du Champs-Elysées Film Festival, le documentaire Dior et moi de Frédéric Tcheng a soulevé une question : la mode est-il un monde particulièrement cruel ? Et si oui, pourquoi le cinéma le représente mieux que tout art ?

Les films (documentaires ou de fiction) traitant de la mode sont légion ces temps-ci. De Saint Laurent à Yves Saint Laurent en passant par Mademoiselle C. ou encore L'Amour fou et The September Issue, il est devenu tout à fait normal qu'un réalisateur mette en scène ou explore la vie des grands noms de la mode. Mais la particularité de Dior et moi, et ce qui est sans conteste son meilleur argument de vente, c'est qu'il s'agit cette fois de la maison Dior et de son fondateur, Christian Dior, dont l'aura hante encore les ateliers.

Et contrairement aux autres films mentionnés plus haut, Dior et moi ne fait pas l'éloge d'une personnalité, mais rend hommage à toute une maison, à toute une famille, à toute une équipe. Si dans le film, celle-ci est secouée par le départ de John Galliano et l'arrivée du quasi inconnu Raf Simmons, le documentaire traite comme il se doit les problèmes de communication qui peuvent assombrir un espace de travail, loin de la marque mondiale connue du grand public. Des petites colères du créateur aux anecdotes des couturières, rien ne nous est épargné. Et voilà pourquoi la fin en a choqué plus d'un. Pendant près d'une heure et demi, on assiste, des étoiles dans les yeux, à la mise en place du premier défilé de Raf Simmons. Mais le moment venu, c'est ce dernier et uniquement ce dernier qui est félicité par les créateurs (tels que Donatella Versace et Marc Jacobs) et les people (type Marion Cotillard et Anna Wintour).

Du coup, on se dit que comme au cinéma - et dans bien d'autres domaines -, le manque de reconnaissance de celles qu'on appelle aujourd'hui encore "les petites mains" n'a rien d'étonnant. Au cinéma, il convient de connaître le nom du réalisateur et des acteurs, mais au fond qui se souvient du nom de la maquilleuse du Diable s'habille en Prada ou de la costumière de Coco avant Chanel ? Peu d'entre nous. Avec simplicité et sobriété, Frédéric Tcheng a mis cette aberration en image dans Dior et moi, sans jamais juger ceux qu'ils filment. Son documentaire tend à montrer le monde de la mode tel qu'il est : parfois un peu superficiel, parfois trop rationnel, mais souvent fait de faux-semblants. Et Sophie Dulac, la présidente du Champs-Elysées Film Festival d'ajouter avec pragmatisme : "La mode c'est un peu comme le cinéma : parfois les gens vous félicitent mais n'en pensent pas le moindre mot."

Alors en attendant qu'un film montre avec brio ce qui se trame réellement sur un plateau de tournage et une fois la promo assurée, sachez que le magnifique Dior et moi sort le 8 juillet prochain dans nos salles !

The September Issue : le « diable » enfin en dvd

Posté par MpM, le 22 janvier 2010

septemberissue_dvd.jpgLorsqu'il a suivi l'équipe de Vogue dans l'idée de réaliser The september issue, R.J. Cutler a réuni 120 heures de rushes finalement réduits à moins d'une heure trente de film. Comme souvent, la sortie dvd permet d'exploiter cette matière en proposant en bonus 64 minutes de séquences inédites, parmi lesquelles plusieurs scènes entre Anna Wintour, presque détendue, et de grands couturiers français comme Karl Lagerfeld ou John Galliano, mais aussi des moments d’intimité et de propos à bâtons rompus.

A l'image du film, ces différentes scènes ne manquent pas d'humour. Saisies sur le vif, et indépendantes les unes des autres, elles apportent un éclairage multiple et complémentaire aux "personnages" d'Anna Wintour, de Grace Coddington ou André Leon Talley. Le ton y est en effet souvent plus léger et anecdotique que dans le documentaire (Anna Wintour conseillant un nom ("Babe") pour le nouveau sac de la maison Dior, plaisantant sur un chapeau ou une paire de chaussures et Grace Coddington partageant ses inspirations esthétiques (des photos de Boubat, Horst ou Lattès et bien sûr des chats sous toutes leurs formes !) ), permettant au spectateur de les découvrir sous un jour moins formaté et plus intimiste.

En complément, R.J. Cutler revient dans une interview d’un quart d’heure sur la manière dont est né le film. On apprend par exemple qu’il ne connaissait rien au milieu de la mode avant le tournage et que c’est en rencontrant Anna Wintour (dont il savait très peu de choses) qu’il a eu envie de parler de son travail à Vogue. Dès le départ, il a imposé une condition :  garder un contrôle total sur ses images ainsi que le final cut sur le montage. Et curieusement, la personne la plus difficile à convaincre de jouer le jeu et d’accepter sa caméra n’a pas été Anna Wintour mais Grace Coddington…

Au final, pas de grosses révélations mais un contenu classique et efficace qui accompagne intelligemment le film sans donner l’impression de lui voler la vedette.

En DVD depuis le 20 janvier 2010