Eli Wallach (1915-2014) : le Roi de Brooklyn est mort

Posté par vincy, le 25 juin 2014

eli wallach

Eli Wallach, né à Brooklyn le 7 décembre 1915, est mort mardi 24 juin, à l'âge de 98 ans, selon une information du New York Times. Wallach est devenu célèbre pour avoir incarné Tuco dans le western spaghetti de Sergio Leone, Le Bon, la Brute et le Truand (il était le truand).

Wallach fait partie de la génération d'acteurs à avoir appliqué la fameuse "méthode" de l'Actor's Studio, dont il fut l'un des pionniers, en contact direct avec Lee Strasberg. Il fait ses débuts au théâtre, à la sortie de la seconde guerre mondiale, gagnant même un Tony Award du meilleur acteur pour une pièce de Tennessee Williams, La rose tatouée, en 1961.

L'un des sept mercenaires

Cinq ans plus tard, il fait ses premiers pas au cinéma chez Elia Kazan (Baby Doll). Premier rôle, tête d'affiche et sans doute sa performance la plus mémorable en propriétaire de champs de coton essayant de séduire la fille convoitée par son concurrent. Il tourne alors avec quelques un des plus grands noms du cinéma : Don Siegel (The Lineup, 1958), Henry Hathaway (Les sept voleurs, 1960), John Huston (Les désaxés, 1961), Martin Ritt (Aventures de jeunesse, 1962). En 1962, il fait partie de l'aventure de La Conquête de l'Ouest d'Henry Hathaway, John Ford et George Marshall. Sans oublier Les sept mercenaires, où il était un mexicain assez retors, pour ne pas dire vicieux, dans le film de John Sturges (1960). Maintenant que Wallach est mort, il ne reste plus que Robert Vaughn (81 ans) en vie parmi tout le groupe.

S'il reste cantonné aux seconds-rôles, il ne cesse de tourner  : western, aventures, parfois quelques comédies, fresque historique (Genghis Khan). On le voit ainsi dans Lord Jim (Richard Brooks, 1965), Opération Opium (Terence Young, 1966), Comment voler un million de dollars (William Wyler, 1966) mais aussi avec Belmondo et David Niven dans Le cerveau (Gérard Oury, 1969).

Pourtant après les années 60, les personnages deviennent moins marquants, trop souvent choisi pour être le shérif, le détective, le général... Il est enfermé dans son image. Les films sont moins intéressants. Il y a quelques exceptions : Independence de John Huston (1976), Les grands fonds de Peter Yates (1977), La théorie des dominos de Stanley Kramer (1977).

oscars 2011 eli wallachUn final flamboyant

C'est vers la fin des années 80 qu'Hollywood se souvient de cet acteur culte des années 60. Martin Ritt lui donne un rôle de médecin dans Cinglée, face à Barbra Streisand. Jack Nicholson (The Two Jakes), Francis Ford Coppola (Le Parrain III, en accro aux bonbons), Irwin Winkler (La Loi de la nuit), Edward Norton (Au nom d'Anna, où il est pour la deuxième foi un rabbin) ressuscitent cet immense acteur, cette gueule d'un cinéma d'antan. En 2010, on l'aperçoit dans l'excellent The Ghost Writer de Roman Polanski et dans le raté Wall Street : L'argent ne dort jamais d'Oliver Stone.

Mais c'est en 2003 qu'Eli Wallach marquera les esprits. Il n'est pas crédité au générique de Mystic River. Mais le symbole est là: le bon, Clint Eastwood, dirige, enfin, le truand.

80 films au compteur. Souvent des rôles de salauds, de méchants, de vilains, avant qu'on ne lui propose des personnages plus empathiques. Une carrière théâtrale très dense et triomphale jusqu'aux années 60 (de George Bernard Shaw à Ionesco, dont il était un grand admirateur, en passant par Jean Anouilh). Une présence continuelle sur le petit écran. Il alternera des choix cinématographiques parfois médiocres avec des pièces de théâtre comme Le journal d'Anne Frank, qu'il joue avec sa femme Anne Jackson et leurs deux filles, et des téléfilms ou séries populaires (comme Urgences ou Nurse Jackie). Il avait raconté son parcours dans une autobiographie, Le bon, la brute et moi, publiée en 2005.

Le secret de sa longévité

Il n'a jamais eu de vocations particulières à devenir comédien. Mais il aimait jouer. Complexé par sa taille (1m70), mari fidèle (il venait de fêter ses 66 ans de mariage avec Anne Jackson!), homme discret, partenaire des plus grands (Brando, McQueen, Monroe, Pacino, Brynner, Fonda, Hepburn, Gable...)  il a été l'un des comédiens les plus respectés et reconnus de sa génération : Nommé Roi de Brooklyn au Welcome Back to Brooklyn Festival en 1998, Oscar d'honneur en 2011, British Award du meilleur espoir en 1957 , un Emmy Award en 1967...

Il aura tourné durant plus de 60 ans. Lors d'une avant-première hollywoodienne, pour un film où il avait comme partenaire Kate Winslet (The Holiday), son épouse ne voyait toujours pas ce ces jeunes et belles femmes lui trouvaient.

Un mélange de charisme, de dérision, d'humilité sans doute. L'Académie des Oscars, en lui décernant une statuette honorifique, soulignait son aspect caméléon, sa capacité à incarner des personnages radicalement différents sans effort, tout en marquant chacune de ses interprétations d'une empreinte marquante.

C'est plutôt dans sa dualité qu'il faut trouver le secret de son jeu. Juif ayant grandit dans un quartier italien (au point de jouer essentiellement des latins au cinéma), époux qui ne jouait jamais les maris de sa femme quand ils étaient partenaires sur les planches, il incarnait au théâtre des petits hommes, "irrités" et "incompris", tandis qu'au cinéma, il appréciait les rôles de "bad guy", pour leur complexité. Truand à vie, mais pas trop.

Bilan 2010 – Polanski en tête des films exportés

Posté par vincy, le 24 janvier 2011

Malgré de très belles performances, le cinéma français (qui inclue les coproductions internationales entrées totales dans ce bilan) qui représentent 15% des ) est en recul sur les marchés internationaux. On pourrait se réjouir, malgré tout, que les films "made in France" aient attiré 57,2 millions d'entrées dans le monde (67, 2 millions l'an dernier) et rapporté plus de 330 millions d'euros (20 millions d'euros en moins par rapport à 2009). Cela signifie que près de 130 millions de spectateurs ont vu un film français cette année. Pas si mal, mais encore une fois, la baisse (-17,9% pour les entrées, -6% pour les recettes) est inquiétante. D'autant qu'il y avait quelques poids lourds (Polanski, Besson), des films cités dans différents palmarès locaux, des adaptations de best-sellers internationaux...

Seul rayon de lumière : les films en langue française représentent pour la première fois en dix ans plus de la moitié des entrées (soit 55,2%).

Des marchés dynamiques et des contre-performances

Les films français ont particulièrement été séduisant en Italie (+142%), aux USA pour les films en français (+36%) - même si dans ces deux pays on est loin des niveaux d'antan - en Russie (+42%), en Espagne (+30%), au Royaume Uni (+79%), aux Pays-Bas (+51%) et au Japon (+25%). Gros bémol en Allemagne (-30%) et en Chine (-43%). Aux USA, la chute des films français, toutes langues confondues, est de 45%, ce qui est imputé à l'énorme succès de Taken en 2009.

Géographiquement, l'Europe occidentale reste la locomotive de l'exportation des films français avec 38,9% des entrées, devant l'Amérique du Nord (27,5%), l'Asie (15%), l'Europe Centrale et Orientale (8,1%), l'Amérique Latine (6,3%), l'Océanie (2,2%) et l'Afrique (2%). Côté pays, les USA demeure toujours le marché leader avec 13,07 millions d'entrées, devant l'Italie, l'Espagne, l'Allemagne, le Japon, la Russie, le Royaume Uni, la Chine et la Belgique.

Polanski, Besson, Perrin affichent de bons chiffres partout dans le monde

3 leaders incontestables ont dominé les entrées en salles à l'international. The Ghost-Writer (6,57 millions d'entrées dans 27 pays), Luc Besson (6,56 millions d'entrées pour From Paris With Love et 3,19 millions d'entrées pour Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec) et le documentaire Océans (6,52 millions d'entrées dans seulement 14 territoires).

Loin derrière, on peut souligner les succès de certains films très différents : Le concert (1,8 million), Solomon Kane (1,7 million), Le Petit Nicolas (1,2 million et un total sur deux ans de 2 millions), le documentaire Bébés (1,1 million), Arthur et la vengeance de Malthazard, Un prophète (qui a fait autant en France que dans le monde avec 1,1 million de spectateurs internationaux sur deux ans), L'immortel, Le Hérisson, L'Arnacoeur (750 000 entrées dans le monde), Micmacs à tire-larigot, Des hommes et des Dieux (600 000 entrées dans le monde).

Elle s'appelait Sarah bat un record aux Pays-Bas

On remarque aussi la belle continuité du Ruban Blanc (917 000 entrées, soit 1,46 million de spectateurs en dehors de la France depuis sa Palme d'or). Et surtout la belle performance d'Elle s'appelait Sarah avec 487 000 entrées sur 3 territoires, dont 425 000 fans rien qu'aux Pays-Bas, soit un record historique puisque le film a battu le premier Astérix et Amélie Poulain. Au pays des tulipes, Tatiana de Rosnay, auteure du livre homonyme, est l'écrivain étrangère la plus vendue en librairie.

On peut aussi se féliciter des 420 000 entrées pour Gainsbourg (vie héroïque), des 282 000 entrées pour Copie conforme et du bon débit de la carrière internationale de Potiche avec déjà 320 000 entrées dans 6 pays.

Créer un star-système pérenne et persévérer dans la diversification de l'offre

Le cinéma français est le cinéma européen qui s'exporte le mieux, devant le cinéma espagnol, si l'on excepte le cinéma britannique, souvent aidé par les studios américains. Mais pour conserver sa place, il doit persévérer dans cet équilibre entre productions internationales en langue anglaise et films d'auteurs destinés aux grands festivals. Il est intéressant de voir que la littérature est devenue un vecteur de succès : un best-seller (L'élégance du Hérisson, Elle s'appelait Sarah, Le petit Nicolas) transforme souvent l'essai au cinéma.

Alors qu'Unifrance, l'organisme chargé de la promotion du cinéma français dans le monde, va changer de Président, les enjeux et défis ne manquent pas dans un monde cinéphile en mutation : le cinéma français doit moins dépendre des gros marchés occidentaux et continuer d'offrir un panel varié alliant du thriller à l'animation en passant par la comédie romantique, tout en continuant à miser sur ses vedettes internationales ou son patrimoine universel.

Les scénarios de Toy Story 3 et du Discours d’un Roi privés de nomination par la guilde des auteurs

Posté par vincy, le 4 janvier 2011

Après des musiques privées d'Oscars, des scénarios privés de récompenses par leurs pairs. La puissante Writers Guid of America n'a retenu que 76 films éligibles pour son prix, sept de moins qu'en 2009, et presque moitié moins qu'en 2008.

Cette année, de sérieux compétiteurs ont été évincés, parmi lesquels quelques favoris pour les Oscars : Le discours d'un roi, Toy Story 3, Winter's Bone, The Ghost-Writer, Biutiful, Another Year ou encore Blue Valentine.

Une seule raison : un changement de règles en 2008. Les scénaristes de ces scripts, parmi les meilleurs de l'année, ne sont pas membres de la Guilde. Cette incitation à vouloir adhérer à la Guilde est légitime, mais, a contrario, en éliminant les meilleurs scénarios, le palmarès annuel du syndicat devient plus que contestable.

Comment imaginer que des films comme Burlesque, Grown Ups, Remember Me, Salt, Fair Game, The Karate Kid, Percy Jackson, ou encore Prince of Persia soient sélectionnables ? Cela affaiblit forcément la représentativité du palmarès... qui, du coup, perd de son intérêt.

Nominations

Scnéario Original : Black Swan ; The Fighter ; Inception ; The Kids Are All Right ; Please Give

Adaptation : 127 Hours ; I Love You Phillip Morris ; The Social Network ; The Town ; True Grit

Documentaire : Enemies of the People ; Freedom Riders ; Gasland ; Inside Job ; The Two Escobars ; Who Is Harry Nilsson (And Why Is Everybody Talkin' About Him)?

2010 – Réalisateurs : David Fincher et Roman Polanski

Posté par vincy, le 30 décembre 2010


Avec deux drames aux contours classiques, mais au style brillant, l'Américain Fincher et le Franco-polonais Polanski ont assurément réalisés deux des meilleurs films de l'année. Leur maîtrise de la forme comme du fond, avec des scénarios subversifs, profonds, où la candeur et le cynisme font mauvais ménage mais sont harmonieusement mis en scène, nous ont épatés et emportés.
The Social Network est ce que Wall Street 2 aurait dû être : un film sur une époque où l'individualisme et le libéralisme détruisent toute forme de confiance, malgré l'importance de la sociabilisation. David Fincher a ainsi retrouvé un sujet aussi inspiré que The Fight Club, tout en réussissant mieux, sous la contrainte, le découpage complexe qui lui faisait défaut dans Zodiac. Observateur des failles de la société américaine, il détourne les codes du genre (procès, american way of life, réussite individuelle) pour mieux révéler la solitude des êtres.
The Ghostwriter reprend tous les fondements d'une filmographie prolifique et riche, du huis-clos à l'innocence saccagée, et propose le final le plus saisissant depuis longtemps, à la fois fluide, glacial et brutal. Roman Polanski, Ours d'argent à Berlin, jouit du spectacle qu'il assène. Avec un régal morbide, il enferme ses protagonistes dans une cage dont ils ne peuvent pas s'évader. Piège fatal, spirale infernale, la mécanique implacable est construite de main de maître, flirtant avec Hitchcock et ses propres chefs d'oeuvre (Répulsion, Cul-de-Sac, Chinatown).
Deux oeuvres froides sous leurs dehors chaleureux. Deux portraits d'un monde (économique et politique) désespérant.

Les prix Lumières révèlent leurs nominations

Posté par vincy, le 23 décembre 2010

Les prix Lumières sont l'équivalent des Golden Globes. La presse étrangère basée à Paris décerne ses prix depuis 1995. On ne connaîtra les lauréats que le 14 janvier prochain, mais les nominations ont déjà été révélées.

Des hommes et des Dieux est en tête de la liste avec 4 citations tandis que Carlos, Gainsbourg (vie héroïque), The Ghost-Writer sont à égalité avec trois nominations. Notons la présence d'un film d'animation dans la catégorie meilleur film, et la forte présence des films présentés au Festival de Cannes (toutes sélections confondues) avec 20 nominations sur 50.

Meilleur film
Carlos d’Olivier Assayas
Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois
Gainsbourg (vie héroïque) de Joann Sfar
The Ghost Writer de Roman Polanski
L’illusionniste de Sylvain Chomet.

Meilleur réalisateur
Olivier Assayas (Carlos)
Xavier Beauvois (Des hommes et des dieux)
Roman Polanski (The Ghost Writer)
Joann Sfar (Gainsbourg (vie héroïque))
Mathieu Amalric (Tournée).

Meilleur scénario
Julie Bertuccelli (L’arbre)
Olivier Lorelle et Rachid Bouchareb (Hors-la-loi)
Robert Harris et Roman Polanski (The Ghost Writer)
Michel Leclerc et Baya Kasmi (Le nom des gens)
Géraldine Nakache et Hervé Mimran (Tout ce qui brille).

Meilleur actrice
Juliette Binoche (Copie conforme)
Isabelle Carré (Les émotifs anonymes)
Catherine Deneuve (Potiche)
Ludivine Sagnier (Pieds nus sur les limaces)
Kristin Scott Thomas (Elle s’appelait Sarah)

Meilleur acteur
Romain Duris (L’arnacoeur et L’homme qui voulait vivre sa vie)
Eric Elmosnino (Gainsbourg (vie héroïque))
Michael Lonsdale (Des hommes et des dieux)
Édgar Ramírez (Carlos)
Lambert Wilson (Des Hommes et des dieux et La princesse de Montpensier)

Meilleur espoir féminin
Lolita Chammah (Copacabana)
Linda Doudaeva (Les mains en l’air)
Marie Féret (Nannerl, la sœur de Mozart)
Nina Rodriguez (No et moi)
Yahima Torres (Vénus noire)

Meilleur espoir masculin
Emile Berling (Le bruit des glaçons)
Nahuel Perez Biscayart (Au fond des bois)
Antonin Chalon (No et moi)
Jules Pelissier (Simon Werner a disparu)
Aymen Saïdi (Dernier étage, gauche, gauche)

Meilleur film francophone
Amer d’Hélène Cattet et Bruno Forzani
Les amours imaginaires de Xavier Dolan
Un homme qui crie de Mahamat Saleh Haroun
Illégal d’Olivier Masset-Depasse
Orly d’Angela Schanelec

The Ghost Writer rafle tout aux European Film Awards

Posté par vincy, le 4 décembre 2010

Meilleur film, meilleur réalisateur (Roman Polanski), meilleur acteur (Ewan McGregor), Meilleurs scénaristes (Robert Harris et Roman Polanski), meilleure direction artistique (Albrecht Konrad), meilleur musique (Alexandre Desplats) : The Ghost Writer a fait une razzia aux European Film Awards cette année.

Le cinéma français d'ailleurs n'a pas laissé beaucoup de place avec le prix de la meilleure actrice pour Sylvie Testud (Lourdes), le prix du meilleur montage (Carlos, le film), le prix du meilleur film d'animation (L'illusionniste).

Que reste-t-il? Deux prix pour le Lion d'or 2009, Lebanon (meilleure photo, prix FIPRESCI de la découverte), le prix Arte du meilleur documentaire pour Nostalgie de la lumière, le prix du meilleur court métrage pour Hanoi-Varsovie.

Et le choix du public qui s'est porté sur le peu populaire Mr. Nobody du belge Jaco Van Dormael (mais produit par le français Philippe Godeau) pour le titre de meilleur film européen.

_______
voir toutes les nominations

Les European Film Awards privilégient les films déjà primés

Posté par vincy, le 27 novembre 2010

Les European Film Awards sont à l'image de l'Europe : une construction qui manque de visibilité et d'unité. Pas étonnant que les films sélectionnés cette année ne soit, une fois de plus, qu'une compilation des oeuvres primées à Venise, Berlin, Cannes ou par des prix nationaux comme les Goyas. D'une part, ce la s'explique par ce que la sélection s'arrête fin août, avant le Festival de Venise de l'année en cours et avant les sorties de l'automne prédestinées aux prix nationaux. D'autre part, il faut que la plupart des films aient été vus d'un maximum de spectateurs européens : or, la distribution sort parfois un film avec des mois de décalage entre sa diffusion dans son pays et l'exportation en Europe. Pour exemple, 12 films nommés cette année ne sont pas encore sortis dans les salles françaises.

En arrivant après tout le monde, la cérémonie ne fait que confirmer la qualité, ou la reconnaissance, de films sortis depuis parfois un an. Pas de quoi créer un effet sur les ventes de DVD ou de les faire revenir en salles. Une mention pour le prestige tout au plus. Mais là encore, ça ne vaut ni un Oscar ni un César/BAFTA/Donatello/Goya... et encore moins un grand prix dans un grand festival.

Le grand favori est le film de Polanski, The Ghost-Writer, qui cumule 7 nominations. Du coup, la France est la puissance dominante avec 16 nominations (en 8 films produits ou coproduits). 15 pays sont représentés au total.

On note aussi la prédominance des films sélectionnés au Festival du film de Berlin.

Cette année, les 23e EFA seront remis le 4 décembre à Tallinn en Estonie. Un prix d'honneur sera remis au musicien Gabriel Yared et au comédien Bruno Ganz.

Les nominés sont :

Miel. Ours d'or à Berlin. Turquie/Allemagne.
Film. Réalisateur (Semih Kaplano?lu). Photographie. Montage. Premier film.

Des hommes et des dieux. Grand prix du jury à Cannes. France.
Film. Photographie.

The Ghost-Writer. Ours d'argent de la mise en scène à Berlin. France/Royaume Uni.
Film. Réalisateur (Roman Polanski). Acteur (Ewan McGregor). Scénario. Montage. Décor. Musique.

Lebanon. Lion d'or à Venise (2009). Israël.
Film. Réalisateur (Samuel Maoz). Scénario. Photographie.

Dans ses yeux. Oscar du meilleur film en langue étrangère. Espagne/Argentine.
Film.

Soul Kitchen. Prix spécial du jury à Venise (2009). Allemagne.
Film.

Carlos, le film. Hors compétition à Cannes. France.
Réalisateur (Olivier Assayas). Montage.

La prima cosa bella. Italie.
Réalisateur (Paolo Virzi).

Le choix de Luna. Compétition à Berlin. Bosnie Herzégovine. (voir Focus sur le cinéma roumain)
Actrice (Zrinka Cviteši?).

Die Fremde. Compétition à Berlin, Meilleure actrice allemande aux German Film Awards. Allemagne. (voir les finalistes du Prix Lux)
Actrice (Sibel Kekilli). Premier film.

Another Year. Compétition à Cannes. Royaume Uni.
Actrice (Lesley Manville). Musique.

Lourdes. Compétition à Venise (2009), meilleur film aux festivals de Varsovie et Vienne. France.
Actrice (Sylvie Testud).

Nothing Personal. Meilleur premier film et prix d'interprétation féminine à Locarno. Pays-Bas/Irlande.
Actrice (Lotte Verbeek). Premier film.

Submarino. Compétition à Berlin. Danemark.
Acteur (Jakob Cedergren).

La Nostra Vita. Prix d'interprétation masculine à Cannes. Italie.
Acteur (Elio Germano).

If I Want to Whistle, I Whistle. Grand prix du jury à Berlin. Roumanie.
Acteur (Goerge Pistereanu). Premier film.

Cellule 211. Meilleur film et meilleur acteur (et 6 autres prix) aux Goyas 2010. Espagne.
Acteur (Luis Tosar). Scénario.

Le Concert. 6 nominations aux César (dont meilleur scénario). France / Russie.
Scénario.

How I Ended this Summer. Prix de la meilleure photographie à Berlin. Russie. (voir le bilan de la compétition berlinoise)
Photographie.

Don Giovanni, Naissance d’un Opéra. Festivals de Toronto et Rome (2009) Espagne / Italie.
Décor.

The Temptation of St. Tony. Festivals de Rotterdam et Sundance. Estonie / Finlande.
Décor.

Kawasaki's Rose. Sélection Panorama à Berlin. République Tchèque.
Musique.

Le premier qui l'a dit. Sélection Panorama à Berlin. Italie.
Musique.

Planète 51. Espagne.
Film d'animation.

Le voyage extraordinaire de Samy. France / Belgique.
Film d'animation.

L'illusionniste. France.
Film d'animation.

La Doppia Ora. Prix du jeune cinéma à Venise (2009). Italie.
Premier film.

Armadillo. Semaine de la critique à Cannes. Danemark.
Documentaire.

Steam of Life. Finlande.
Documentaire.

Nostalgie de la lumière. Hors compétition à Cannes. France/Chili.
Documentaire.

Huit films en lice pour le Prix Louis-Delluc

Posté par vincy, le 24 novembre 2010

Huit films ont été sélectionnés par le jury du prix Louis-Delluc pour succéder à Un prophète, de Jacques Audiard. Le Beauvois apparaît comme grand favori, mais Polanski et Amalric peuvent jouer les troubles-fête. Notons que cinq films de la liste étaient sélectionnés à Cannes.

Le prix sera décerné le 17 décembre à Paris, ouvrant ainsi la saison des prix cinématographiques en France.

- Carlos d'Olivier Assayas dans sa version longue. Hors-compétition à Cannes

- Des filles en noir de Jean-Paul Civeyrac. Quinzaine des réalisateurs.

- Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois. Grand prix du jury à Cannes.

- Mystères de Lisbonne de Raoul Ruiz. Festival de Toronto.

- La princesse de Montpensier de Bertrand Tavernier. Compétition à Cannes.

- The Ghost Writer de Roman Polanski. Ours d'argent du meilleur réalisateur à Berlin.

- Tournée de Mathieu Amalric. Prix de la mise en scène à Cannes.

- White Material de Claire Denis. Compétition à Venise (en 2009).

Par ailleurs, six films ont été retenus pour le prix Louis-Delluc du premier film:

- Belle Epine de Rebecca Zlotowski.

- Domaine de Patrick Chiha.

- Gainsbourg (Vie héroïque) de Joann Sfar.

- Une exécution ordinaire de Marc Dugain.

- Un poison violent de Katell Quillévéré.

- La vie au ranch de Sophie Letourneur.

Affaire Polanski : la Suisse libère le cinéaste

Posté par vincy, le 12 juillet 2010

polanski à gstaadLe cinéaste franco-polonais Roman Polanski "ne sera pas extradé vers les Etats-Unis et les mesures de restriction de sa liberté sont levées", a annoncé aujourd'hui lors d'une conférence de presse à Berne, la ministre de la Justice helvétique, Mme Eveline Widmer-Schlumpf. Elle a expliqué que "les clarifications approfondies qui ont été menées à bien n'ont pas permis d'exclure avec toute la certitude voulue que la demande d'extradition américaine présentait un vice". Avec un tour de vis supplémentaire, elle a ajouté que "les autorités suisses ont en outre jugé que la mise en oeuvre du traité d'extradition avec les Etats-Unis devait tenir compte du "climat de confiance" qui s'était établi." Pour elle, "Roman Polanski ne se serait certainement pas rendu au Festival du film de Zurich en septembre 2009 s'il n'avait pas eu confiance dans le fait que ce voyage n'aurait pas de conséquences juridiques."

Le bracelet électronique a été enlevé au cinéaste dès midi. Il leur portait depuis son assignation à résidence en décembre 2009 dans son chalet de Gstaad, le "Milky Way". Polanski a quitté les lieux vers 14h30 selon son entourage.Sa femme, l'actrice et chanteuse Emmanuelle Seigner a par ailleurs ajouté : "C'est avec un immense plaisir que je viens d'apprendre la libération de mon mari. C'est la fin d'un cauchemar pour mes enfants et pour moi-même."

Les Etats-Unis ne peuvent pas faire appel de cette décision. Pour le Ministère de la Justice, le refus des autorités américaines de transmettre le procès-verbal d'une audition du procureur Roger Gunson, en invoquant une décision de justice qui concluait à son caractère confidentiel, a rendu impossible l'extradition du réalisateur. "Ce document devait permettre de confirmer que le juge avait bien assuré aux représentants des parties, lors d'une séance le 19 septembre 1977, que les 42 jours que Roman Polanski avait passés dans la division psychiatrique d'une prison californienne couvraient la totalité de la peine d'emprisonnement qu'il devait exécuter. Si ces faits sont avérés et que Roman Polanski a dès lors effectivement exécuté l'intégralité de sa peine, la demande d'extradition des autorités américaines et, a fortiori, la procédure d'extradition sont dénuées de fondement."

Le ministère américain de la justice n'a pas voulu faire de commentaire.

Ecran Noir ne pourrait pas mieux dire que Thierry Frémeau, délégué général du Festival de Cannes : "Souhaitons que ce soit pour Roman Polanski le dernier des drames qui ont jalonné son existence, et qu'après avoir retrouvé les siens, il puisse rapidement se consacrer à nouveau tout entier à son travail de cinéaste".

Son dernier film, The Ghost-Writer lui a valu un prix de la mise en scène au Festival de Berlin en février dernier. Il a attiré 6,9 millions de spectateurs dans le monde.
_______
voir aussi:
Affaire Polanski : l'émotion contre la raison
Polanski : la passion au coeur d’une guerre de lobbyistes (1) ; Polanski : la passion au coeur d’une guerre de lobbyistes (2) ;
Polanski : la passion au coeur d’une guerre de lobbyistes (3)
; Polanski : la passion au coeur d’une guerre de lobbyistes (4) ; Polanski : la passion au coeur d’une guerre de lobbyistes (5)
Roman Polanski : attrape-moi si tu peux…
Polanski arrêté par la police suisse : une (sale) affaire devenue absurde

Polanski : de Shutter Island à The Ghost-Writer

Posté par vincy, le 4 mars 2010

pompei by vincy thomasAprès le flop d'Oliver Twist en 2005 (50 millions de $ de budget, 43 millions de $ de recettes dans le monde, aucun prix), Polanski a cherché à rebondir avec un thriller, retrouvant ainsi un genre qu'il avait délaissé depuis La neuvième porte en 1999.

Il avait commencé à développer un ambitieux projet. Pompéi. Six mois de travail en 2007. Il s'agissait d'adapter le livre de Robert Harris. L'histoire d'un jeune ingénieur qui doit construire un aqueduc reliant Pompéi à la baie de Naples, avec en final, l'éruption tragique du volcan Vésuve qui détruisit la cité.

Le budget de 50 millions de $ était bouclé et déjà rentabilisé par l'acquisition des droits dans le monde entier. Le projet a avorté à cause de la grève des acteurs américains. Le tournage ne fut plus possible, les contrats avec les comédiens - Orlando Bloom et Scarlett Johansson étaient sur les rangs - furent suspendu.

La menace de grève a contraint les producteurs - les mêmes que pour The Ghost-Writer - a  a stoppé les frais avant une déroute financière, malgré les dépenses déjà engagées. Annoncé à Cannes, le film n'a jamais été au-delà du scénario, écrit par Polanski et Harris. Les droits d'acquisition s'envolèrent en fumée.

Polanski cherche alors un autre projet. Il met une option sur Shutter Island, qu'il abandonne très vite (NDLR : Wolfgang Petersen avait essayé aussi de développer une adaptation du best-seller de Dennis Lehane en le transformant un blockbuster plus "classique"). Etrangement, les deux films sortent en même temps et commencent de la même façon : une île, un bateau, le brouillard.

Pendant l'écriture du scénario de Pompéi, Robert Harris écrivait son nouveau romain, The Ghost (L'homme de l'ombre en français). Polanski trouvait ironiquement qu'une histoire de nègre, ça ne fonctionne jamais. Mais Harris lui donne un exemplaire de son ouvrage pas encore publié, par amitié. Le cinéaste franco-polonais le lit et accroche immédiatement.

Les droits sont acquis, et après l'échec de Pompéi, l'auteur du livre et le réalisateur se mettent à adapter le roman. L'action est déménagée de New York à une île américaine. Cela permet au cinéaste de ne pas avoir à tourner dans un pays où il est interdit de séjour et de tourner dans ses studios chéris de Babelsberg à Berlin et sur l'île allemande de Sylt. Il en fait un huis-clos, genre dont il est l'un des maîtres, utilisant un fond vert pour intégrer des vues extérieures lorsque les personnages sont dans la villa.

Pompéi, depuis, a été vendu en vue de devenir une série TV.

Et Polanski a obtenu un Ours d'argent pour son admirable mise en scène...