Edito: la guerre des écrans

Posté par vincy, le 15 décembre 2016

Manchester by the Sea, de loin l'un des meilleurs films américains de ces derniers mois est distribué aux Etats-Unis par Roadside Attractions et Amazon Studios. Amazon Studios a aussi dans son escarcelle six films cannois - The Neon Demon, Cafe Society, Le client, Paterson, Gimme Danger, Mademoiselle. Autant dire qu'il pèse désormais dans le paysage cinématographique américain et même pour les prochains Oscars. Une révolution ? En tout cas un bouleversement. Et ce n'est pas prêt de s'arrêter. Le groupe de Jeff Bezos a lancé cette semaine son service de streaming, Amazon Prime Video, dans plus de 200 pays, y compris la France, le Canada et la Belgique. Outre les séries du studio, comme Mozart in the Jungle et Transparent, les séries de Woody Allen et David O'Russell à venir, les abonnés auront aussi accès à des films en téléchargement.

Après Netflix, c'est donc un nouveau concurrent qui se lance pour des groupes comme Canal + décidément à l'étroit dans son pré-carré européen quand ses concurrents américains visent la planète. Le cinéma à domicile devient une pépite aux œufs d'or que les groupes se disputent à coup de créations originales stimulantes et d'exclusivités. La vidéo à la demande cartonne en France. Sur les 9 premiers mois de l'année, le marché à atteint les 230M€, soit une hausse de21,5% par rapport à la même période l'année précédente. La diversité de l'offre est en grande partie l'une des raisons de ce succès. MyTF1VOD, Orange, Netflix, CanalPlay et France TV Pluzz VàD sont devenues des "nouvelles chaînes" aussi classiques que les autres.

A Hollywood, les studios demandent évidemment un changement de la chronologie des médias. Et oui, le débat est international. Les studios considérant que l'essentiel de leurs recettes en salles sont générées dans les trois premiers week-ends, réclament une sortie en VàD quasiment un mois après la sortie en salle. C'est un faux problème. Les cinéastes ne veulent pas abandonner la projection au cinéma. L'enjeu est en fait ailleurs: le nombre de sorties, pléthorique, la durée de vie d'un film dans les salles, de plus en plus courte, une exploitation et une distribution art et essai toujours plus vulnérables. Il faut laisser le temps à certains films de s'installer et ne pas tout miser sur les premières séances du mercredi. Il faut permettre aux cinémas de garder des films et de gérer leurs projections en fonction de leur clientèle. Il faut arrêter d'inonder le marché en le concentrant sur quelques sorties.

C'est d'autant plus urgent qu'il est nécessaire de fidéliser les spectateurs. Si la fréquentation est bonne en France, notamment grâce aux cartes d'abonnements, si un tarif spécial a été créé pour les enfants (en rognant sur les marges des distributeurs au passage), rien n'est gagné. Tout le monde a pu constater l'inflation du prix du billet de cinéma pour quelqu'un qui ne bénéficie d'aucune réduction et qui y va aux heures pleines. Il est moins cher de s'abonner un mois à Netflix ou Amazon pour un mois que d'aller voir un film au cinéma le dimanche soir. Bien évidemment, rien ne remplace l'expérience d'une salle, la communion avec le public.

Cependant, avec des écrans toujours plus grands, des rétroprojecteurs HD, le "home cinéma" est un sérieux rival. Et il ne faudrait pas que la salle de ciné devienne un opéra, avec ses places coûteuses, réservé à un certain type de production spectaculaire. La taille de l'écran n'est pas ce qui compte: un film à petit budget qui produit de l'émotion a toute sa place dans une salle obscure. Au même titre qu'un space-opera intergalactique.

Crise de croissance pour Netflix

Posté par vincy, le 15 août 2016

Netflix voit son flux de nouveaux abonnés se tarir. Avec 83,18 millions d'utilisateurs le leader de la vidéo en ligne n'a gagné que 1,68 million d'utilisateurs en un trimestre après en avoir conquis 6,74 millions au premier trimestre. Pas sûr que l'objectif de 90 millions soit dépassé cette année.

Il y a sans doute plusieurs raisons: la concurrence (Amazon, Apple, Hulu, bientôt Disney), les tarifs, les J.O., etc... Mais n'enterrons pas Netflix trop vite. Ce n'est peut-être qu'une petite crise de croissance. Le groupe continue de s'étendre à l'international et à investir dans les contenus. Cela reste la chaîne de House of Cards, Sense8, Stranger Things et Orange is the New Black. Bon, on vous l'accorde, c'est aussi la chaîne qui a produit et diffusé la série Marseille, avec Gérard Depardieu, qui était pire qu'un Navarro.

couverture netflix

En rouge, les pays couverts par Netflix

Un Empire trop américain

Cependant, Netflix a conscience qu'elle a deux problèmes structurels : le premier est la concurrence des autres plateformes qui va inciter les "consommateurs" à choisir le bon abonnement plutôt que de les cumuler. Surtout, même si Netflix est désormais présent quasiment partout dans le monde, il n'offre essentiellement que des programmes en anglais et produits aux Etats-Unis dans un secteur où le local reste une valeur sûre et différenciante. C'est d'ailleurs la stratégie de Canal +, M6, TF1 et même Arte. Or, d'une part, Netflix a confirmé qu'il n'ajouterait que progressivement et parcimonieusement des programmes locaux avec sous-titres ou doublés. Sans doublage ou sous-titre, difficile de conquérir des publics allemands, français, italiens ou japonais. D'autre part, Netflix a peu de projets de séries locales.

Une proie idéale

D'autant qu'Amazon a annoncé le lancement de sa plateforme SVàD  en France, Italie et Espagne d'ici la fin de l'année. Amazon Prime Instant Video, avec des séries comme Mozart in the Jungle et Transparent, mais aussi des longs-métrages (cinq d'entre eux étaient au Festival de Cannes) est un rival sérieux...

De quoi affaiblir à moyen terme Netflix et en faire une proie (d'environ 37 milliards de dollars) pour des groupes comme Apple ou Amazon, qui peuvent l'absorber sans s'endetter.

Même avec l'éventualité d'un rachat boursier, Netflix a quand même besoin de rester "le plus beau" sur le marché. 4 nominations aux Oscars, 4 Emmy Awards (et 49 nominations, dont 20 cette année), 2 Golden Globes (et 19 nominations) permettent déjà de placer le diffuseur parmi les grands du secteur.

Annonces événementielles

Alors les projets sont annoncés à la pelle depuis quelques semaines. Parmi eux, un partenariat avec 20th Century Fox Télévision Distribution pour la diffusion en exclusivité en SVOD de la série à succès signée FX , American Crime Story dont la première saison The People v. O.J Simpson sera diffusée en 2017 sur Netflix dans le monde entier: John Travolta, Cuba Gooding Jr., Sarah Paulson, David Schwimmer, Nathan Lane et Bruce Greenwood sont dans cette saga  qui retrace le procès d'O.J. Simpson. La deuxième saison d'American Crime Story sera axée sur l'ouragan Katrina.

Netflix s’apprête aussi à diffuser dans 188 pays un nouveau volet de la série culte produite par CBS, Star Trek. Chaque épisode sera uniquement accessible aux membres de Netflix dans tous les pays titulaires d’une licence, dans les 24 heures suivant sa première diffusion aux États-Unis sur CBS.

Les 727 épisodes de la série - dont Star Trek: The Original Series, Star Trek: The Next Generation, Star Trek: Deep Space Nine, Star Trek: Voyager et Star Trek: Enterprise - seront aussi disponibles sur Netflix, dans le monde entier d’ici la fin 2016. Le tournage de la toute nouvelle série débutera en septembre pour une diffusion prévue en janvier 2017.

Netflix a également recruté le cinéaste sud-coréen Bong Joon-Ho (Snowpiercer, le transperceneige) pour un film qui sera diffusé l'an prochain sur la plateforme. Okja, qui suite une jeune fille prête à tout pour empêcher l'enlèvement de son meilleur ami, un animal rare et mastodonte nommé Okja, par une multinationale hyperpuissante, Tilda Swinton, Jake Gyllenhaal, Paul Dano, Giancarlo Esposito, Lily Collins sont au générique.

Et n'oublions pas que Netflix a aussi en prévision un revival de Gilmore Girls, des nouvelles séries Marvel (Luke Cage, Iron Fist, The Defenders), une vingtaine de programmes jeunesse en développement ou production (dont Inspecteur Gagdet et Spy Kids), etc.

Enfin, depuis le 12 août, Netflix diffuse The Get Down, drame musical réalisé par Baz Luhrmann (Moulin Rouge, Gatsby le magnifique), sur fond de hip-hop naissant et de disco à bout de souffle , avec Jimmy Smits (NYPD Blue) et Giancarlo Esposito (Breaking Bad).

Netflix s’empare du Petit Prince

Posté par vincy, le 18 mars 2016

Le Petit Prince devait sortir aujourd'hui aux Etats-Unis, distribué par la Paramount. Comme on le sait depuis quelques jours, le studio américain a décidé soudainement de ne plus le diffuser en salles. Finalement, comme Mark Osborne l'avait promis sur son compte twitter, le film d'animation a trouvé un nouveau distributeur...

Selon The Hollywood Reporter, Le Petit Prince ne connaîtra pas une sortie en salles. C'est Netflix qui a acquis les droits de distribution du film. Les Américains pourront voir l'adaptation du roman d'Antoine de Saint-Exupéry en streaming, chez eux.

Présenté hors-compétition à Cannes l'an dernier, César du meilleur film d'animation en février, Le Petit Prince a rapporté 80 millions de $ de recettes dans le monde, avec de très gros scores en Chine, en Italie, au Brésil et au Mexique. Il vient de sortir au Canada mais n'a toujours pas de date de sortie prévue au Royaume Uni et en Australie, dont la distribution doit être assurée par The Weinstein Company.

Xavier Dolan s’insurge, Netflix s’excuse, le Web s’enflamme

Posté par wyzman, le 6 janvier 2016

Le web ne parle que de ça depuis deux jours : le réalisateur canadien Xavier Dolan s'est légèrement fâché contre Netflix UK. La raison ? Son dernier film, Mommy, était diffusé sur le site de streaming au mauvais format (1:85 au lieu de 1:1). Certains parmi vous seraient tentés de dire que ce n'est pas bien grave, mais qui a vu Mommy sait que ce "petit" changement est inacceptable, injustifiable, impardonnable. Alerté par certains abonnés du service de streaming, le réalisateur de Tom à la ferme n'a pas hésité un seul instant avant d'écrire une lettre qui a été rendue publique sur Twitter. Pour les non-anglophones, une traduction est disponible sur Le Huffington Post.

"Qui vous a donné le droit d'ainsi réévaluer mes choix, et par quelle abstraite compétence en avez-vous examiner l'impact sur mon film et le public ? (…) Vous n'avez pas réalisé ce film. Vous ne l'avez pas écrit. Vous ne l'avez pas produit. (…) Vous pouvez recadrer et distordre comme bon vous semble vos propres productions, mais ne touchez pas à mon film" écrit le jeune homme de 26 ans. Et bien évidemment, à ce moment-là, impossible de ne pas le soutenir. Tout comme il est impossible de ne pas être déçu par Netflix qui, jusqu'ici, s'était toujours montré comme le site sur lequel les œuvres sont traitées avec le respect qu'elles méritent. Alors que s'est-il passé ? A quel moment décide-t-on de gâcher le Prix du Jury du festival de Cannes 2014 ? Quel est le malin assez bête pour penser que personne ne verrait la différence ?

La réponse est simple : personne. Comme l'explique Xavier Dolan par la suite sur Twitter "Netflix UK a réglé le problème. Cela n'a jamais été leur intention de streamer Mommy dans le mauvais format, juste une erreur technique" avant d'ajouter "Netflix UK s'excuse d'avoir mal interprété la situation". Voilà qui est dit, le malentendu est réglé, les angles ont été arrondis. Tout le monde peut circuler, il n'y a définitivement plus rien à voir. Malheureusement, le garçon que l'on adore depuis J'ai tué ma mère a beau tweeter vite, le web est plus rapide que son ombre. Médias traditionnels ou pure players se sont faits plaisir ! Télérama parle de "coup de gueule", Libération laisse entendre que "Netflix maltraite un film de Xavier Dolan", GQ assure que ce dernier a "fait plier Netflix" quand Vanity Fair évoque un "massacre". Et dans le reste du globe, même son de cloche ! Pour Indie Wire, "Xavier Dolan se déchaîne sur Netflix" quand Screen International affirme que le Canadien "a écrasé Netflix UK".

Vous l'aurez compris, pour générer des clics, certains sont prêts à tout, même aux plus gros raccourcis et à des hyperboles honteuses. Il est évident qu'en s'adressant à Netflix via Twitter, le réalisateur de Mommy savait précisément quel type de buzz il allait créer. Mais nous sommes tout de même en droit de regretter une chose : au moment d'évoquer les excuses du service de streaming et l'humilité de Dolan, il n'y a plus personne. Soudainement, certains sites se font beaucoup plus timides quitte à ne même pas évoquer cet aspect du malentendu. Et comme c'est souvent le cas sur Twitter, et plus généralement sur les réseaux sociaux, au moment de parler de clash, il y a du monde au balcon. Mais en cas de réconciliation, c'est pause pipi pour tout le monde. Morale : avant de publier, certains devraient vraiment penser à appuyer sur "Supprimer".

L’instant Zappette: Sense8 s’offre une saison 2

Posté par wyzman, le 8 août 2015

La (bonne) nouvelle est tombée il y a tout juste quelques minutes ! Alors que nous nous demandions récemment si la série Sense8 aurait bientôt droit à une saison 2 sur Netflix, il semble que nous ayons été entendus. En effet, sur son compte Twitter, le service de streaming a répandu l'info à l'aide d'une vidéo célébrant l'anniversaire des 8 personnages principaux de la série et accompagné de la légende "Les anniversaires ne sont que le commencement. Sense8 renait." De quoi mettre de bonne humeur des milliers de fans à travers le monde qui attendaient depuis un moment qu'une annonce soit faite. S'il semblait évident pour beaucoup d'entre nous que les discussions entre producteurs et scénaristes finiraient par aboutir sur une saison 2, l'emploi du temps des acteurs (désormais famous) était sur le point de devenir problématique.

Pour rappel, Sense8 narre les péripéties de 8 personnes réparties à travers le monde qui réalisent qu'elles sont connectées les unes aux autres. A l'instar de Heroes (dont le reboot Heroes Reborn arrive fin septembre), ces individus sont rapidement traqués par une organisation criminelle qui en a après leurs capacités. Mise en ligne début juin, la première saison de Sense8 a reçu des critiques mitigées mais cela n'a pas découragé les abonnés de Netflix qui n'ont fait que vanter les mérites de la série sur les réseaux sociaux. Si tout va bien, la saison 2 de la série créée par les Wachowski devrait être disponible en juin 2017.

Les petites ambitions cinématographiques de Netflix

Posté par vincy, le 2 octobre 2014

michelle yeoh tigre et dragon

Netflix s'est fait connaître avec les séries (House of Cards). Mais la société américaine a aussi des ambitions dans le cinéma. En annonçant à deux jours d'intervalle deux partenariats exlcusifs de production cinématographique, le "leader mondial de la TV en streaming" (50 millions d'utilisateurs selon ses propres chiffres) affiche ses velléités.

Netflix proposera ainsi le 28 août 2015 la suite de Tigre et Dragon ( Crouching Tiger Hidden Dragon 2: The Green Destiny). Le film sortira en simultané dans les salles IMAX et sur le petit écran, dans tous les pays où le service est présent. Modérons le coup d'éclat : en France, avec la règlementation sur la chronologie des médias, une sortie simultanée en SVàD et sur grand écran est impossible - il ne sera donc disponible qu'en SVàD; et aux Etats-Unis, deux grands circuits de salles (Regal et Cinemark) ont déjà refusé de sortir le film dans leurs salles Imax s'il sort en même temps en SVàD.

Le film, produit par Miramax, est réalisé par Yuen Wo-ping et seule Michelle Yeoh reprend du service dans un casting où l'on retrouve Harry Shum Jr. et Donnie Yen.

Ensuite, ce matin, Netflix a envoyé un communiqué indiquant qu'elle diffusera quatre films produits et interprétés par Adam Sandler, l'un des comédiens les plus populaires aux Etats-Unis (même si son étoile pâlit au box office ces dernières années). Ils seront destinés exclusivement aux utilisateurs de Netflix. "Quand on m'a proposé de faire quatre films, j'ai tout de suite dit oui parce que Netflix c'est trop de la balle! En avant le streaming!" a lancé Adam Sandler. En dehors de Copains pour toujours et de sa suite, Sandler a surtout connu d'importantes déconvenues au box office. Son dernier film Blended n'ayant rapporté que 46M$ et Crazy Dad à peine 37M$. Pour Sandler, c'est une manière de reconquérir son public, plus apte à s'amuser de ses frasques en vidéo le samedi soir. Pour Netflix, c'est l'assurance de proposer des comédies populaires.

Mais pas de quoi faire bondir les utilisateurs français, public ingrat qui n'a jamais vraiment été séduit par l'humour de Sandler.

Loin d'être encore une menace pour ses concurrents français

Ce n'est pas encore avec ces deux premières annonces que Netflix va jouer les perturbateurs dans l'industrie du cinéma - tout comme il n'a pas encore révolutionné l'industrie des programmes pour la télé et internet. Pas de quoi faire peur non plus, en France, au contributeur historique du cinéma français, Canal +. Et quand bien même, Netflix France annoncerait de telles ambitions, il faudrait que la société se plie aux règles de la concurrence et interviennent sur plusieurs films locaux par an.

En s'installant au Luxembourg, comme Apple et Amazon, Netflix y gagne fiscalement et financièrement, c'est certain, et s'enlève de nombreuses contraintes juridiques, c'est évident. Mais le groupe doit contribuer au financement de la production audiovisuelle française en devant verser 2% de son chiffre d'affaires en France au Centre national du cinéma et de l'image. Et Netflix devra payer la TVA à partir du 1er janvier sur ses recettes françaises. En revanche, il ne peut solliciter aucune aide à la production.

Pour l'instant Netflix échappe à l'impôt français sur les sociétés, à l'obligation de signalétique d'âge et aux quotas (60% de contenus européens et 40% de contenus français dans son catalogue). Il ne doit pas non plus s'assurer que 12% de ses recettes proviennent de visionnage de programmes français.

La solution pour remédier à cette distorsion de concurrence ne peut venir que de la nouvelle Commission européenne, qui doit poursuivre le travail de la précédente en obligeant tout diffuseur à respecter les règles du pays auxquels sont destinés les contenus. Si un contenu est diffusé ou consommé en France, le groupe devra respecter les lois françaises.

Même la nouvelle ministre de la Culture et de la Communication, Fleur Pellerin, s'est résolue à ce principe. Jusque là, cette spécialiste du numérique avait, diplomatiquement, chercher à ne pas de fâcher avec les multinationales du Net.

"C'est une situation qui ne doit pas se régler en vilipendant les sociétés qui font ce choix, puisque c'est un choix de rationalité économique", mais en "faisant en sorte qu'on harmonise les conditions fiscales au niveau européen", avait-elle déclaré il y a un mois. Elle va désormais plus loin : "L'avantage concurrentiel qu'ils en retirent doit par conséquent être neutralisé", désignant Netflix, débarqué en France le 15 septembre, sans jamais le citer.

En deux semaines, le réseau français compterait plus de 100 000 utilisateurs en France (Canal + en revendique près de 10 millions et son service de SVàD CanalPlay environ 500 000). Le chiffre peut paraître impressionnant : mais n'oublions pas que l'offre est gratuite pour le premier mois d'abonnement. Reste à savoir combien de téléphages paieront entre 8 et 12 euros par mois pour voir les films et séries de Netflix.

Un tiers des internautes français télécharge un film ou une série illégalement

Posté par cynthia, le 8 juillet 2014

Entre les prix des places de cinéma que supportent mal des portefeuilles en crise et les spoilers sur les séries que veulent éviter les fans, le visionnage pirate de films et de séries a bondi en 2013. C'est ce que révèle une étude publiée mercredi 2 juillet par l'Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (ALPA).

Près d'un tiers des internautes (28,7%) a consulté au moins une fois par mois un site de piratage de séries ou de films en 2013 et leur nombre a atteint un niveau record depuis 2009.

Au total, en 2013, 13,2 millions d'internautes ont consulté chaque mois au moins un site dédié à la contrefaçon audiovisuelle, soit 15,8% de plus qu'en 2009, selon cette étude qui exclut YouTube et DailyMotion.

Leur nombre, qui avait un peu régressé en 2011-2012 à environ 12,4 millions d'internautes, a nettement augmenté en 2013.

Les pirates assouvissent leur soif de visionnage de plusieurs façons.
Ils utilisent :
- soit le téléchargement en P2P (entre internautes), pour 29% des pages vues,
- soit le téléchargement par DDL (depuis un serveur), pour 33%,
- soit le streaming (38%). qui nécessite un flux internet haut débit. Il ne cesse de gagner du terrain depuis 2009 où il ne représentait que 16% des pages vues.

Le téléchargement en P2P pour les cinéphiles

Pour les films, les internautes préfèrent utiliser le téléchargement, pour avoir une meilleure qualité d'image. Il est clair que voir le dernier Hunger Games en flouté, ça enlève le glamour (car toutes les études le montrent : on pirate surtout les plus gros hits). Reste que, pour l'instant, le piratage de films n'a pas beaucoup d'influence sur le box office en France ni sur la vidéo à la demande. La fréquentation en salles se porte plutôt bien. Les 8 films les plus piratés dans le monde en 2013  (Le Hobbit : un voyage inattendu, Django Unchained, Fast & Furious 6, Iron Man 3, Happiness Therapy, Star Trek Into Darkness, Gangster Squad, Insaisissables) n'ont pas été vraiment desservis pour encaisser d'énormes recettes mondiales.

Par rapport aux internautes moyens, ceux qui ont recours au téléchargement de fichiers sont en majorité des hommes (58%) et un peu plus jeunes que la moyenne des internautes.

Le streaming pour les "sériephages"

En revanche, pour les séries, ils favorisent le streaming, dont les audiences fluctuent au gré des sorties. C'est sans doute l'une des raisons pour laquelle le nombre de vidéos vues en streaming a atteint entre 10 et 35 millions par mois en 2013. Double avantage : on n'attend plus des mois avant de voir la nouvelle saison d'une série et surtout on ne subit plus les mélanges anachroniques des épisodes.

Certes, les chaînes de TV font des efforts et accélèrent le temps de délai entre la diffusion dans le pays original et la France. C'est notamment le cas avec J-One, spécialisée dans les mangas, et qui diffusent les séries nippones avec seulement 24h d'écart. Idem pour Game of Thrones, dont le premier épisode de la saison 4 a été diffusée sur HBO le 6 avril et sur OCS en France le 7 avril. Mais OCS n'est ni TF1, ni M6...

Le streaming attire des pirates très différents: il s'agit majoritairement de femmes (55%), la part des jeunes est nettement plus importantes (près d'un tiers des utilisateurs ont entre 15 et 24 ans) et la part des étudiants (17%) y est deux fois plus importante que chez l'ensemble des internautes.

En 2013, 2 à 3 millions de personnes par mois ont regardé une série en streaming, et 1,4 à 1,8 million par mois ont vu un film en streaming.

L'arrêt de l'Hadopi n'a pas modifié les comportements

Toutes méthodes de "piratage" confondues, les plus de 50 ans sont des sous-utilisateurs, ne constituant que 15 à 21% des sites pirates alors qu'ils représentent 34% des internautes (et qu'ils passent plus de temps sur la Toile que les jeunes). Ce qui explique pourquoi ce public reste aussi le plus assidu en salles et le plus fidèles aux séries diffusées sur les chaînes TV.

L'étude relève que lorsque l'Hadopi avait lancé des actions de "riposte graduée" en 2011, avec des courriels d'avertissement aux internautes qui partageaient illégalement des fichiers, le nombre de mises à disposition des 10 films les plus populaires sur les réseaux P2P en 2011 avait été divisé par trois. Depuis, leur nombre reste stable, entre 1,2 et 2 millions de fichiers mis à disposition par mois en P2P. Comme quoi, la suppression de l'Hadopi n'a pas d'impact, et la lutte contre les sites P2P (aux Etats-Unis comme en Europe) semble assez vaine face à la contrefaçon .

Cette étude, réalisée par Médiamétrie en partenariat avec le Centre national du Cinéma te de l'Image animée et l'institut TMG, a mesuré l'utilisation de 281 sites dédiées au piratage audiovisuel, hors téléphones mobiles et tablettes. Cela promet si on ajoute les autres plateformes pour le calcul de l'année 2014.

« M » le Maudit, Freaks, Les 39 Marches… dans le domaine public et sur le web

Posté par vincy, le 24 août 2013

Télécharger légalement et gratuitement des grands classiques? C'est possible. Dès lors que l'oeuvre tombe dans le domaine public, il n'y a plus de restrictions pour la diffuser. Aux USA, une oeuvre tombe dans le domaine public 95 ans après la diffusion du film, sauf exceptions (dans un sens comme dans l'autre).

Ainsi le site Archive.org offre la possibilité de voir plus de 5000 long-métrages en streaming ou en téléchargement souvent de haute qualité.

Les récents ajouts feront saliver les cinéphiles : Les 39 marches et Chantage d'Alfred Hitchcock, Le Fantôme de l'opéra, version 1925 avec Lon Chaney, la Nuit des morts vivants de Romero (à cause d'une erreur juridique initiale sur le droit d'auteur); quelques Ed Wood, A Star is Born, version 1937 avec Janet Gaynor, Cyrano de Bergerac, version 1950, L'homme de la rue, de Frank Capra, Je suis une légende, avec Vincent Price, plusieurs films de Charlie Chaplin, et plus d'une trentaine de Buster Keaton, le culte Freaks de Tod Browning ou encore des Fritz Lang (une version incomplète de Metropolis, quelques films muets, et surtout M le maudit)...

A vos clics!

Netflix se prépare à envahir l’Europe

Posté par vincy, le 18 juillet 2011

Netflix s'apprête à envahir l'Europe au premier trimestre 2012, en commençant par le Royaume Uni, marché déjà très convoité (Lovefilm d'Amazon, BSKYB), et l'Espagne (pays victime d'un fort taux de piratage). Le Portugal pourrait être le troisième pays européen, puisque Netflix développe une offre lusophone pour le Brésil.

La compagnie californienne a listé les pays où l'accès à son service serait possible. Netflix a commencé son expansion internationale l'an dernier en s'ouvrant au Canada. Depuis, elle a opté pour une course de vitesse, avant que des concurrents ne s'installent durablement. Déjà, la France et l'Allemagne, deux des marchés les plus importants sont considérés comme des obstacles car d'importants opérateurs nationaux fournissent un service presque équivalent de vidéo à la demande par abonnement.

En France, il y a le modèle Vidéofutur, qui dispose d'un catalogue de 20 000 titres et possède de bons rapports avec les distributeurs ; il permet de louer à la demande comme de recevoir les DVD et Blu-Ray à domicile. Clairement, Vidéofutur anticipe l'arrivée de son concurrent américain, avec incertitude. Car la réglementation nationale ne facilite pas l'arrivée du service tel que proposé par Netflix. La chronologie des médias est très stricte dans l'hexagone. Selon l'Idate, "il est donc difficile d'envisager l'émergence d'un service de vidéo à la demande par abonnement à la Netflix qui par exemple viendrait se positionner juste après Canal+". Mais rien ne l'empêcherait d'aller conquérir l'Italie, beaucoup plus souple dans ce domaine.

Or Netflix veut devenir une marque globale dans un secteur qui pourrait peser 2 milliards de $ en 2012, selon les chiffres de Wedbugs Securities. 23 millions de foyers sont déjà abonnés à ce service de vidéo (films, émissions de TV) en streaming en Amérique du Nord.

L'opérateur de Streaming a commencé son invasion mondiale avec l'Amérique Latine, où son implantation est prévue pour la fin 2011. 43 pays qui recevront des contenus en anglais, espagnol et portugais. Il a aussi étendu son offre en proposant de recevoir les films par courrier, en échange d'une augmentation du prix de l'abonnement. Actuellement, l'abonnement est de 7,99 $ par mois pour un accès illimité à un catalogue de contenus vidéos.

Il reste l'inconnue financière. Netflix a besoin d'une capacité de trésorerie qui dépasse largement ses recettes actuelles. En misant sur l'international, la société espère attirer les investisseurs et les actionnaires pour se développer.

De nombreux experts attendent de voir comment les studios vont laisser vivre Netflix. La moindre innovation peut bousculer le marché, encore émergeant. Mais la plate-forme a commencé à acheter des séries en exclusivité, au nez et à la barde des acquéreurs traditionnels, les chaînes TV. Tous anticipent l'arrivée des TV connectées, renvoyant la VOD actuelle à la préhistoire de la convergence des médias.

Selon les études les plus récentes, ce sont les services liés à la connexion des TV à Internet (comme la Vidéo à la Demande), qui profiteront de la croissance audiovisuelle. Le marché de la vidéo devrait augmenter de 4% par an dans la prochaine décennie. Cela explique pourquoi Youtube (Google), Hulu (convoité par Google,  Yahoo et Microsoft) ou Disney cherchent à contrer Netflix.

Dans un marché vidéo en pleine dépression, Netflix mise sur le seul segment en croissance. A toute vitesse...

La « Europa Film Treasures » ou la cinémathèque gratuite sur Internet…

Posté par geoffroy, le 14 février 2009

paul nadarEn juillet 2008, une nouvelle plate-forme de diffusion cinématographique a vu le jour sur la toile. Tout d’abord décliné sous la forme d’une offre de coffrets DVD, le projet s’est orienté, il y a maintenant deux ans, vers un formidable pari culturel unique en Europe. Cette évolution tout autant stratégique, qu’éditoriale – même s’il ne faut pas occulter son aspect économique – a permis la création d’un fond de référencement et de consultation en ligne dynamique aussi précieux qu’il demeure aujourd’hui indispensable. Ainsi, les Trésors des Archives Européennes deviennent la première cinémathèque interactive à proposer des joyaux oubliés ou jadis perdus du 7e art consultables gratuitement par les internautes.

Un homard dans le projecteur 

A l’origine du projet, il y a Serge Bromberg. Ce passionné de cinéma, collectionneur, restaurateur de vieux films, directeur artistique du Festival international du film d'animation d'Annecy et président-fondateur de Lobster Films, a compris l’extraordinaire potentiel d’une telle interface d’information accessible pour tous, qu’ils soient chercheurs, cinéphiles ou bien simples visiteurs d’un jour.

En proposant la (re)découverte du Patrimoine européen d’un art aussi universel, l'EFT offre une pluralité de regards sur un siècle d’images et dont le Programme Nadar, film réalisé par Paul Nadar en 1896, en est le porte étendard chronologique. Rendu possible par un effort d’investissement aussi bien public (la subvention européenne du Programme Média représente 50% du financement total ; aide substantielle du CNC) que privé (l’opérateur Orange assurant un rôle de sponsoring), le site met à disposition des films sans contrepartie financière.

Fort d’un partenariat unique avec pas moins de 28 cinémathèques venues de toute l’Europe (Russie inclus), l'EFT propose aujourd’hui un fond cinématographique regroupant 76 films diffusés en VoD au format Streaming (non téléchargeable) et en version originale. Le travail entre les différentes cinémathèques est systématiquement mis en avant. Il y a effort d'exhaustivité au travers des genres proposés . La qualité des films diffusés provient de la veille qualitative entres les cinémathèques, l’EFT et Lobster Films, qui peut conduire, le cas échéant, à effectuer un travail de restauration visuelle et sonore des films. L’harmonisation des différentes interfaces linguistiques et la cohérence éditoriale du site s'illustre à travers des fiches pratiques (origine, histoire et détails techniques des 76 films référencés). Ces paramètres révèlent une volonté non feinte de toucher un large public en faisant du Patrimoine cinématographique un vecteur de culture, de divertissement et de recherche.

Des films qui ont l'âge de la retraite

La programmation comporte 70% de films européens (quota imposé par le Programme Média) et doit proposer un sous-titrage d’au moins trois langues (le site en offre cinq avec le français, l’anglais, l’allemand, l’espagnol et l’italien). Les films, majoritairement de format court, s’échelonnent de 1896 à 1999 mais doivent avoir les autorisations des ayants droit (il faut attendre soixante dix ans pour que les œuvres tombent dans le domaine public) pour être diffusés légalement sur le site. C’est pour cette raison que la plupart des films datent d’avant 1950. la joie de vivre

Depuis le lancement du site au Festival de La Rochelle le 3 juillet dernier, l’apport reste irrégulier (dans ce domaine, l’Europa Film Treasures dépend beaucoup des cinémathèques) et doit, là aussi, se plier à un quota d’heures ou de titres/an fixé par le Programme Média. Si l’idée d’établir, à terme, un fond de plusieurs milliers de titres n’est pas envisagé, le choix des films (origine, genre ou durée) doit correspondre à un cahier des charges précis en lien avec l’idée de proposer un cinéma dit de Patrimoine. C’est tout l’enjeu du travail d’éditorialisation de Lobster Films, coordinateur du projet et véritable interlocuteur avec les cinémathèques participantes.

Dans ce cadre, la principale difficulté, comme aime à le souligner Serge Bromberg, n’est pas « tant de trouver des vieux films et de les restaurer, mais c’est de leur trouver un public ». A ce titre, L’European Film Treasures à tout pour devenir cette ouverture nouvelle et enrichissante à même de séduire un public curieux et surtout désireux de découvrir des films qui, sans l’existence de cette plate-forme, resteraient à moisir au fond d’un tiroir. Brynony Dixon, conservateur des archives du British Film Institute, considère, ni plus ni moins, que L’European Films Treasures est «en bonne position pour faire ce qui pourrait être les plus importantes archives de films en Europe ».

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Le site internet
photos : Le programme Nadar, de Paul Nadar, 1896 et La joie de vivre, de Anthony Gross et Hector Hoppin, 1934