Les professionnels s’insurgent contre la censure

Posté par vincy, le 4 février 2016

Suite à une nouvelle décision judiciaire concernant le visa d'exploitation d'un film (Antichrist hier, Bang Gang et Ken Park à leur tour menacés), le Syndicat de la Critique de cinéma , l'ARP (Société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs) et la SRF (Société des réalisateurs de films) ont décidé de réagir. Cela fait plusieurs mois que l'association Promouvoir, proche des milieux catholiques intégristes, gagnent les batailles judiciaires et imposent par voie de justice une règlementation beaucoup plus stricte sur les films, sous des prétextes moralistes. Les trois signataires interpellent la ministre de la Culture et de la Communication, qui, selon eux, ne peut pas attendre les résultats de la mission sur la modernisation du système de visa.

Le Syndicat français de la Critique de cinéma : "Après Baise-moi, Ken Park, Nymphomaniac, Saw 3D chapitre final, Love et La vie d'Adèle, Antichrist de Lars von Trier vient de voir, le 2 février dernier, son visa d'exploitation annulé par décision de la cour administrative d'appel sur une nouvelle requête de l'association Promouvoir, proche du milieu catholique intégriste. Bang Gang, une histoire d'amour moderne d'Eva Husson (photo) est à son tour menacé. Le Syndicat Français de la Critique de Cinéma en appelle à la ministre de la Culture, Madame Fleur Pellerin, et lui apporte tout son soutien dans l'objectif d'une modification des articles de loi qui contribuent à cet état de fait. Il faut que que cessent ce désaveu perpétuel des avis de la commission de classification et ces attaques répétées contre la création et les œuvres de cinéma."

Les cinéastes de l'ARP et de la SRF : "Nous sommes chaque fois atterrés de constater qu’un André Bonnet/Patrice André, représentant de « Promouvoir », association trouble, liberticide et extrémiste, peut décider seul de ce qu’on peut ou de ce qu’on ne peut pas voir en France.
Nous rappelons qu’il existe une Commission de classification, composée d’experts représentant les professionnels du cinéma, les familles, les enfants, la jeunesse, la justice, la santé et même l’intérieur. Cette Commission exerce déjà son rôle essentiel de garantir la protection des spectateurs. Il n’est plus tolérable qu’un seul homme puisse se servir de défauts existant dans nos textes au mépris de la légitimité et du travail de cette commission.

Antichrist hier encore, après La vie d’Adèle, Love, Nymphomaniac… et peut-être demain Bang gang (Une histoire d’amour moderne)… Il est ahurissant que tant de films, largement salués dans les plus grands festivals et qui n’ont heurté la sensibilité de personne, sinon les promoteurs d’un nouvel obscurantisme, puissent être interdits au public.
C’est notre vision du monde, et plus particulièrement de la France, qui est heurtée aujourd’hui, alors que la liberté de création est violemment bafouée.
Nous demandons donc à la Ministre Fleur Pellerin de prendre d’urgence les mesures issues des travaux confiés à Jean-François Mary sur la modernisation du système de visa. Elles permettront de rendre à la Commission de classification tout son sens et tout son poids.
Ce nouveau pas en arrière confirme encore une fois que l’urgence est bien réelle.
"

Saw 3D Chapitre final désormais interdit aux moins de 18 ans

Posté par vincy, le 1 juin 2015

Décision rare: le Conseil d'Etat a annulé aujourd'hui le visa d'exploitation du film d'horreur Saw 3D Chapitre final. Il y a 5 ans, le ministère de la Culture et de la Communication avait accordé ce visa, en n'interdisant le film qu'aux moins de 16 ans. le film avait attiré plus de 560 000 spectateurs en France.

Mais pour l'Association Promouvoir, le film aurait du être interdit à l'ensemble des mineurs. L'organisme a donc demandé l'annulation. Et après des années de procédure, le Conseil d'Etat a validé sa demande, considérant que Saw 3D Chapitre final comportait "de nombreuses scènes de très grande violence", soit "un grand nombre de scènes filmées avec un grand réalisme, montrant des actes répétés de torture et de barbarie et représentant de manière particulièrement complaisante les souffrances atroces, tant physiques de psychologiques, des victimes prises dans des pièges".

L'avis du Conseil d'Etat ajoute perfidement que "le ministère de la Culture a commis une erreur d'appréciation en interdisant la diffusion du film en cause aux seuls mineurs de moins de 16 ans".

Suite à cette décision, le ministère de la Culture devra réexaminer le dossier afin de délivrer un nouveau visa d’exploitation plus restrictif que le visa initial. Mais, comme le signale l'avis: "La décision du Conseil d’État n’implique cependant pas que le ministre de la culture prenne les mesures nécessaires pour retirer le film litigieux des salles." Pour un film sorti il y a 5 ans, ce genre de commentaires est ironique et montre à quel point le combat était assez vain.

L'Association Promouvoir avait déjà obtenu gain de cause en 2012 avec Antichrist de Lars von Trier. Le Conseil d'Etat avait là aussi annulé le visa d'exploitation du film, pour l'assortir d'une interdiction aux moins de 16 ans. Promouvoir avait été déçu de la décision, espérant un classement en oeuvre pornographique. Il faut dire que l'association a pour objet "la promotion des valeurs judéo-chrétiennes, dans tous les domaines de la vie sociale", de la lutte contre la pornographie à la défense de la vie et la vigilance sur la bioéthique.  Baise-moi avait subit le même sort en 2000, tout comme Ken Park.

Saw VI : la sauce ne prend plus…

Posté par kristofy, le 3 novembre 2009

saw 6L'histoire : Cette fois le film est plus orienté sur une nouvelle victime qui doit subir quatre épreuves mortelles. Il s’agit d’un manager d’une compagnie d’assurance (joué par Peter Outerbridge, le scientifique de la très recommandable série ReGenesis) dont le métier est de trouver une faille dans les contrats de ses assurés pour ne pas rembourser leurs frais médicaux (une pratique américaine déjà dénoncée par Michael Moore dans Sicko). C’est donc un profiteur de la misère humaine qui va devoir traverser un labyrinthe de pièges où pour survivre il va devoir choisir parmi d’autres victimes qui doit vivre ou mourir...  

Avant-propos : Cette fois on y est : après Saw 5 voila Saw 6, le titre de film d’horreur le plus involontairement drôle. Alors évidement on va en entendre de bien bonnes à la caisse des salles de cinéma, comme par exemple "je voudrais une Saw 6 avec beaucoup de ketchup"… en attendant Saw 7. Dur pour les zozoteurs. Si le titre est aussi peu original c’est bien que la formule est toujours la même: il y a encore un mystérieux tueur qui oblige ses victimes prisonnières à se mutiler dans l’espérance de pouvoir s’échapper (et de ne pas finir en chair à saucisse).

Le film Saw, celui de James Wan et Leigh Whannell en 2004, était un vrai petit bijou de film d’horreur avec un scénario machiavélique et une réalisation sadique. Au sortir de la salle c’est rien de dire qu’on avait l’estomac noué, le succès est mondial et très lucratif. Alors très vite une suite arrive, puis une autre chaque année. La saga des Saw promet son lot d’hémoglobine et on en sort avec l’estomac plein de pop-corn. Les producteurs encaissent 700 millions de $ dans le monde (avec mention TB pour les épisodes II et III). Malheureusement aucun des épisodes suivant n’arrive à la hauteur du premier film. Pour les suites de Saw on prend de nouveaux acteurs (pour remplacer ceux qui sont morts trucidés) avec un ou deux survivants et on recommence un autre jeu de massacre. Qu’importe si l’effrayant Jigsaw (le tueur au puzzle) est mort, il est toujours là en flash-back pour inspirer son successeur…

Notre avis : Saw 6 va sans nul doute faire plaisir à ceux qui ont déjà suivi les films précédents car on y trouve des nouvelles pièces du puzzle sur les relations qu’entretiennent les différents tueurs de la série. Avec la même continuité visuelle, le nouveau réalisateur Kevin Greutert (ancien chef-monteur de la série) s'est entouré de la plupart des techniciens habituels (image, décors, costumes).

Saw 6 provoque une réaction un peu curieuse : le spectateur n’a plus peur avec ni pour les victimes (comme dans Saw à l’origine) mais on attend juste qu’elles trépassent de la façon la plus atroce. La torture psychologique du dilemme moral (tuer pour ne pas mourir ?) a laissé place à une succession de tortures physiques brutales (il faut tuer presque tout le monde). Saw 6 souffre également d’une baisse d’inspiration pour les différentes mises à mort, les techniques les plus basiques (asphyxie, pendaison, tir à la carabine) peuvent ici décevoir en comparaison des douleurs les plus sophistiquées déjà éprouvées (Saw 3 avait même été interdit aux moins de 18 ans). Ici on joue la continuité sans le changement, mais pour les amateurs de sensations fortes la recette reste efficace.