Cabourg 2020 : Guillaume Brac couronné, Robert Guédiguian sacré

Posté par kristofy, le 3 juillet 2020

Le 34e Festival du Film de Cabourg est le premier festival de cinéma en France a voir pu s'organiser avec le récent déconfinement. Il y a donc eu des projections dans les salles pour le public,t en présence de certaines équipes, des jurys, et aussi un tapis-rouge en bord de mer avec de nombreuses stars pour la cérémonie de remise des prix. Cette année reste spéciale avec une édition de Cabourg réduite à 3 jours (au lieu de 5  habituellement) du 29 juin au 1er juillet, mais avec un concentré de films en avant-première.

Le palmarès :

- Grand Prix du Jury : A l’abordage de Guillaume Brac

Guillaume Brac a révélé au cinéma deux interprètes de théâtre ,Vincent Macaigne et Laure Calamy (depuis devenus des noms de plusieurs gros films) avec son moyen-métrage Un monde sans femme sorti en 2012. Son court-métrage précédent, Le Naufragé , avec Vincent Macaigne (déjà), était d'ailleurs à Cabourg en 2010. Ce nouveau film A l’abordage, déjà présenté à Berlin, flirte en apparence avec le cinéma d'Éric Rohmer. mais il se révèle progressivement plein d'audace autant en traits d'humour qu'en petites observations de la société. C'est un grand film romantique (joué par  des jeunes du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris), déjà l'un des meilleur film français de l'année ...

- Mention Spéciale du Jury : Balloon de Pema Tseden (sortie le 18 novembre 2020)

Les films de Pema Tseden sont à chaque des invitations à la poésie et au voyages dans diverses régions du Tibet, et on a la chance que certains sortent en salles en France : Tharlo en 2018 et Jinpa en 2020 après être sélectionnés aux festivals de Venise et de Vesoul (en remportant d'ailleurs 2 Cyclo d'or), ce dernier Balloon va suivre la même trajectoire (Venise, puis Vesoul) avec une sortie à venir prévue au 18 novembre 2020. Balloon est son film peut-être le plus 'accessible' avec en particulier une histoire d'amour contrariée (et aussi derrière le sujet de l'accès à des moyens de contraception) : cette mention spéciale du Festival Romantique de Cabourg est logique.

- Meilleur court-métrage : La Grande nuit de Sharon Hakim
- Prix du Jury court-métrage : Aline de Simon Guélat
- Mention Spéciale du Jury Court-Métrage : Shakira de Noémie Merlant
- Meilleure actrice court-métrage ex-aequo : Catalina Danca dans Shakira et Tamara Saade dans La Grande nuit
- Meilleur acteur court-métrage ex-aequo : Paulin Jaccoud et Schemci Lauth dans Aline

La spécificité du Festival de Cabourg est aussi de décerner des prix, le romantique Swann d'Or, qui viennent saluer les talents des films français de l'année entre chaque été. L'un de ces films est d'ailleurs de nouveau distribué en salles depuis leur réouverture : De Gaulle avec Lambert Wilson

- Swann d’Or du meilleur film : Gloria Mundi de Robert Guédiguian
- Swann d’Or de la meilleure réalisation : Nicolas Bedos pour La Belle Époque
- Prix Gonzague Saint-Bris du scénario adapté d'une oeuvre littéraire : Seules les bêtes par Dominik Moll et Gilles Marchand (d’après le roman de Colin Niel)
- Swann d’Or de la meilleure actrice : Chiara Mastroianni dans Chambre 212 de Christophe Honoré
- Swann d’Or du meilleur acteur : Lambert Wilson dans De Gaulle de Gabriel Le Bomin
- Swann d’Or de la révélation féminine : Luàna Bajrami dans Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma
- Swann d’Or de la révélation masculine : Benjamin Voisin dans Un vrai bonhomme de Benjamin Parent
- Swann d’Or du meilleur premier film : Tu mérites un amour de Hafsia Herzi

Par ailleurs les Prix Premiers Rendez-Vous qui récompensent les débuts à l’écran d’une actrice et d’un acteur dans un premier grand rôle ont été donné à Zahia Dehar dans Une Fille facile de Rebecca Zlotowski et à Alexandre Wetter dans Miss de Ruben Alves

Venise 2019 : Gloria Mundi, de Robert Guédiguian, avec sa troupe

Posté par kristofy, le 5 septembre 2019

Avec un discours marqué à gauche, constatant que les nobles idéaux se plient de plus en plus à une fatalité économique, Robert Guédiguian est devenu un réalisateur emblématique d'un certain cinéma français La plupart de ses films ont pour décor Marseille, ce qui permet d'en faire une œuvre presque ethnographique et même "éthologique" : la cité phocéenne devenant peut-être de plus en plus excluante. Pour son 21e film, il est toujours entouré de sa fidèle troupe d’amis - acteurs. Une fidélité qui nous rend attachant et familier les histoires pourtant bien différentes (Guédiguian navigue de l'historique au romanesque, de la comédie sociale au polar). Le temps des films porteurs d’espoir semble terminé chez lui. Il a d’ailleurs déjà fait le bilan avec son précédent La Villa où le capitalisme et l’individualisme, valeurs régnantes du présent, gagnent sur l’idéal de fraternité et de solidarité du passé. Robert Guédiguian continue cette réflexion avec Gloria Mundi.

Le pitch: Daniel sort de prison où il était incarcéré depuis de longues années et retourne à Marseille. Sylvie, son ex-femme, l’a prévenu qu’il était grand-père : leur fille Mathilda vient de donner naissance à une petite Gloria. Le temps a passé, chacun a fait ou refait sa vie… En venant à la rencontre du bébé, Daniel découvre une famille recomposée qui lutte par tous les moyens pour rester debout. Quand un coup du sort fait voler en éclat ce fragile équilibre, Daniel, qui n’a plus rien à perdre, va tout tenter pour les aider.

Le film s’ouvre avec la naissance d’un bébé, comme une nouvelle venue au monde à découvrir. Si l’espoir va quitter ses personnages, il en reste encore un peu chez Robert Guédiguian. Ce nouveau film évoque une jeune génération qui renonce à tout ce que celle d’avant voulait éviter. Le constat est difficile mais terriblement contemporain. Jean-Pierre Darroussin est chauffeur de bus de la ville (au service de la communauté) et son épouse Ariane Ascaride est femme de ménage surtout la nuit (exploitée par le grand capital). Le couple représente en apparence les idéalistes habituels du cinéma de Guédiguian : pourtant, ils ont baissé les bras, il faut laisser faire et laisser dire sans s’engager ni protester, jusqu'à refuser de faire grève. Chez leurs enfants, on voit deux couples antagonistes : Anaïs  Demoustier et Robinson Stévenin sont des travailleurs précaires en difficulté financière (chauffeur Uber avec un crédit et trop d’heures à faire, vendeuse à l’essai dans une boutique) ; Lola Naymark et Grégoire Leprince-Ringuet sont gérant d’un magasin qui s’enrichit de la misère des gens (rachat d’objets d’occasion à bas prix pour les revendre beaucoup plus chers). Les catastrophes vont s’enchainer pour le couple Demoustier-Stévenin (comme dans le dernier Ken Loach, Sorry We Missed You) au point de se perdre dans leurs galères.

Avec Gloria Mundi, Robert Guédiguian se fait encore et toujours observateur des travers de notre société. Ici, la violence du monde du travail (précarité, pénibilité…) induit une certaine violence des rapports humains (agression, prostitution…). La titre du film plus complet dans son générique est ‘sic transit gloria mundi’, soit ‘ainsi passe la gloire du monde’ en latin pour prévenir de se garder de tout orgueil ou vanité. Le film résonne comme une fable sombre avec une tendance à la disparition des valeurs solidarité-égalité-fraternité. Le cinéaste tend un miroir de notre présent... Et en conférence de presse, la troupe semble aussi désespérée...

Robert Guédiguian : On vit une époque de grande régression. Il s’agit non pas de condamner ces personnages mais de condamner la société qui les produit. Je n’oppose pas tant que ça les jeunes aux plus anciens. Il faut décrire le monde comme il est, et comme il pourrait être. Je pense que les choses peuvent changer.

Jean-Pierre Darroussin : On est la génération qui était jeune dans les années 70, avec un désir de changer le monde comme pour celle d’aujourd’hui. Nous, ça nous paraissait possible que les choses puissent changer.

Gérard Meylan : C’est un constat d’échec, la société a fait faillite. Dans une famille chacun tire la couverture à soi.

darroussin meylan

Ariane Ascaride : On interprète des personnages qui ne croient plus en la politique. Aujourd’hui beaucoup de gens se disent que droite ou gauche c’est pareil. La classe populaire ou ouvrière n’est plus dans la vie mais dans la survie, car il faut tenir et la vie est difficile. On revient à des attitudes primaires, à ‘moi d’abord’.

Grégoire Leprince-Ringuet : Le film encourage la jeune génération à comprendre qu’on est ensemble, et pas tout seul.

Le film sera sur les écrans français le 27 novembre.

Venise 2019 : une promesse de renouveau ?

Posté par kristofy, le 27 août 2019

Le 76e Festival de Venise est prêt à lever le rideau le 28 août, et ce jusqu'à la remise du Lion d'or le 7 septembre à l'un des 21 films en compétition.

Le jury de la compétition internationale sera présidé par la réalisatrice argentine Lucrecia Martel: un choix à saluer puisque Venise a rarement choisi une femme à la tête de son jury: Annette Bening, Catherine Deneuve, Gong Li, Jane Campion, Sabine Azéma sont les exceptions. Martel est donc la deuxième réalisatrice à occuper le poste, et la première personnalité sud-américaine.

Le jury est désormais dévoilé : Piers Handling (critique et historien, Canada), Mary Harron (réalisatrice, Canada), Stacy Martin (actrice franco-britannique), Rodrigo Prieto (directeur de la photographie, Mexique), Shinya Tsukamoto (réalisateur, Japon), et Paolo Virzi (réalisateur, Italie). Certains de ces talents connaissent déjà Venise: Paolo Virzi avait gagné un Lion d'argent en 1997 pour Ovosodo, Shinya Tsukamoto était déjà juré en 1997 et avait présenté en compétition Killing en 2018, Rodrigo Prieto était le directeur de la photo de Ang Lee pour Le Secret de Brokeback Mountain Lion d'or en 2005, Stacy Martin jouait avec Natalie Portman dans Vox Lux en compétition en 2018, et Lucrecia Martel avait présenté Zama hors-compétition en 2017. Un jury d'experts plus que glamour. Alors que la compétition cherche de plus en plus à conquérir les productions internationales à gros castings ou même les films hollywoodiens oscarisables.

Pour la compétition internationale 21 films ont été sélectionnés : seulement deux films sont réalisés par des femmes (Babyteeth de Shannon Murphy - Australie; The Perfect Canditate de Haifaa Al-Mansour - Arabie saoudite). Il y a aussi un film d'animation (No.7 Cherry Lane de Yonfan - Hong Kong) et un documentaire (La mafia non è più quella di una volta de Franco Maresco - Italie). La compétition sera rythmée par La Vérité de Hirokazu Kore-eda (avec Catherine Deneuve, Juliette Binoche, Ludivine Sagnier, Ethan Hawke) en ouverture de festival ce 28 août, et par les nouveaux films de James Gray,  Pablo Larrain, Atom Egoyan, Roman Polanski, Steven Soderbergh, Noah Baumbach, Lou Ye, Ciro Guerra, Roy Andersson... En compétition on y verra plusieurs représentants de la France : les actrices de La Vérité de Hirokazu Kore-eda, J'accuse de Roman Polanski (avec Jean Dujardin et Louis Garrel), Gloria Mundide Robert Guédiguian (avec sa fidèle troupe), et Wasp Network de Olivier Assayas (et un casting hispanique).

Il est encore trop tôt pour évoquer d'éventuels favoris mais on peut déjà supposer que le Prix Marcello-Mastroianni du meilleur espoir pourrait aller à l'actrice Eliza Scanlen pour sa métamorphose dans Babyteeth (on va ensuite la découvrir dans Les Filles du docteur March de Greta Gerwig).

L'année dernière, Venise avait suscité de nouveaux débats à propos de la présence de films sélectionnés produits par la plateforme Netflix et prévus sans sortie en salles de cinéma. Comble ou ironie, le Lion d'or avait été remis à Roma de Alfonso Cuaron (qui décrochera ensuite quelques Oscars). Cette fois encore ,Venise va servir de vitrine promotionnelle à Netflix (au moment où ce géant du streaming va devoir faire face à de la concurrence avec l'ouverture de la plateforme Disney+) avec, hors-compétition, The King de David Michôd (Timothée Chalamet, Joel Edgerton, Robert Pattinson, Lily-Rose Depp...) et deux films en compétition: The Laundromat de Steven Soderbergh (avec Meryl Streep et Gary Oldman) et Marriage Story de Noah Baumbach (avec Adam Driver et Scarlett Johansson). Si Netflix se retrouve au palmarès, nul ne doute de plusieurs grincements de dents.

Ce n'est pas forcément en compétition qu'on cherchera de nouveaux talents. Les surprises proviennent surtout de la section d'Orizzonti et de la sélection parallèle Venice Days. Après une grande édition cannoise, Venise ne peut pas vraiment décevoir (comprendre: il lui faut un maximum de films allant aux Oscars). Même si le festival se soucie de moins en moins du cinéma émergeant et des exploitants. Cependant, en allant d'un film issu d'un univers de super-héros à la science-fiction, en mariant l'humour absurde nordique au drame historique français, en cherchant des cinéastes réputés qui sortent de leur confort, le Festival fait son job et distingue des auteurs au milieu d'une production pléthorique.

Durant le festival, Venise décernera également deux Lion d'or d'honneur pour leur carrière à l'actrice Julie Andrews ainsi qu'au réalisateur Pedro Almodovar (qui y avait gagné un prix de meilleur scénario en 1988 pour Femmes au bord de la crise de nerfs). Le prix 'Glory to the Filmmaker' cette année sera remis à Costa-Gavras à l'occasion de la présentation hors-compétition de Adults in the Room.

Cannes 2019: Claire Burger, marraine de Visions sociales

Posté par vincy, le 26 mars 2019

Cette semaine, la réalisatrice Claire Burger sort son premier film en solitaire, cinq ans après Party Girl, coréalisé avec Marie Amachoukeli et Samuel Theis, Caméra d'or au Festival de Cannes. C'est ça l'amour arrive au cinéma auréolé de quatre prix aux Arcs (dont meilleur film) et un prix à Venise (Meilleur film aux Venice Days).

Elle reviendra à Cannes cette année en tant que marraine de la sélection Visions sociales, dont ce sera la 17e édition. Elle y présenetra ses deux films.

Cette année, la sélection, qui se déroule à Mandelieu-La Napoule, proposera une rencontre avec Robert Guédiguian et un focus sur le cinéma méditerranéen comportant 16 films.

Sofia de Meryem Benm’Barek
Ceux qui travaillent d’Antoine Russbach
Sibel de Ça?la Zencirci et Guillaume Giovanetti
Fiore gemello de Laura Luchetti
Le jour où j'ai perdu mon ombre de Soudade Kaadan
Chjami è rispondi d’Axel Salvatori-Sinz
Amal de Mohamed Siam
Le silence des autres d’Almudena Carracedo et Rober Bahar
Tel Aviv on Fire de Sameh Zoabi
Hawaii de Jesús del Cerro
Before Father Gets Back de Mari Gulbani
Makhdoumin, chacun sa bonne de Maher Abi Samra
The Reports on Sarah and Saleem de Muayad Alayan
Her Job de Nikos Labôt
Benzine de Sarra Abidi
Wardi de Mats Grorud

Cannes 2018: Le jury de la compétition au complet

Posté par vincy, le 18 avril 2018

Autour de la présidente australienne Cate Blanchett, quatre femmes et quatre hommes. Le jury du 71e Festival de Cannes (8-19 mai) a été dévoilé cette nuit. Il a 7 nationalités et vient des 5 continents. Composé de personnalités engagées, il couvre surtout un large spectre du cinéma.

Chang Chen (acteur, Chine). Vu dans Une belle journée d’été d’Edward Yang, Tigre et Dragon d’Ang Lee en 2000, Happy Together, 2046 etThe Grandmaster de Wong Kar-wai, Three Times et The Assassin de Hou Hsiao-hsien et Les Trois Royaumes de John Woo.

Ava DuVernay (Scénariste, réalisatrice, productrice, Etats-Unis). Nommée aux Oscars et aux Golden Globes, récompensée aux BAFTA et aux EMMY, Ava DuVernay a réalisé Selma, Un raccourci dans le temps et Middle of Nowhere, prix de la meilleure réalisation à Sundance.

Robert Guédiguian (Réalisateur, scénariste, producteur, France). Il a réalisé, entre autres, Marius et Jeannette, qui a ouvert Un certain regard et a été récompensé du Prix Louis-Delluc en 1997, Le Promeneur du Champ de Mars, Le Voyage en Arménie , L’Armée du Crime, Les Neiges du Kilimandjaro et le récent La Villa, en compétition à Venise.

Khadja Nin (Auteure, compositrice, interprète, Burundi). Musicienne, elle a sorti plusieurs albums comme « Sambolera Mayi Son » et « Ya… » (« De vous à moi »), qui rend hommage à Mandela et comporte la chanson « Mama » dont Jeanne Moreau a signé le clip en 1998.

Léa Seydoux (Actrice, France). Depuis, La Belle Personne de Christophe Honoré en 2008, on l'a vue dans des films aussi différents que Mission Impossible IV et 007 Spectre côté Hollywood, et côté cannois, La Vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche, Grand Central de Rebecca Zlotowski, Saint Laurent de Bertrand Bonello, The Lobster de Yórgos Lánthimos et Juste la fin du monde de Xavier Dolan.

Kristen Stewart (Actrice, Etats-Unis). Outre la tétralogie Twilight, elle a navigué entre grosses productions et films d'auteurs avec Blanche Neige et le Chasseur, Un jour dans la vie de Billy Lynn d’Ang Lee, Sur la route de Walter Salles, Sils Maria et Personal Shopper d'Olivier Assayas, et Café Society de Woody Allen.

Denis Villeneuve (Réalisateur, scénariste, Canada). L'an dernier il a réalisé Blade Runner 2049. Avant cela il a signé une des œuvres les plus riches du cinéma nord-américain contemporain avec Un 32 août sur Terre, Next Floor Polytechnique, Sicario, Incendies et Premier contact.

Andrey Zvyagintsev (Réalisateur, scénariste, Russie). L'un des fidèles de la Croisette. Depuis Le Retour, Lion d’or au Festival de Venise, il y a présenté Le Bannissement, Elena, Leviathan et l'an dernier Faute d’amour, prix du Jury à Cannes et nommé comme meilleur film étranger aux Golden Globes et aux Oscars.

Enfin en DVD : La villa de Robert Guédiguian

Posté par MpM, le 10 avril 2018

Sorti le 29 novembre 2017, La villa est le 20e long métrage de Robert Guédiguian, un conte familial doux amer, en forme de bilan intime, qui réunit une fois encore les acteurs fétiches du réalisateur : Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan, mais aussi Jacques Boudet, Anaïs Demoustier, Robinson Stévenin et Yann Trégouët. Auprès de leur père gravement malade, qui ne les reconnait plus, deux frères et une sœur, entourés de leurs proches, se retrouvent et se redécouvrent. C'est l'occasion d'un bilan, celui des utopies et des idéaux qui les ont portés. Chez Robert Guédiguian, on ne se dispute pas pour l'héritage (culturel comme sonnant et trébuchant) : on se bat, ensemble, pour l'empêcher de disparaître.

Malgré quelques facilités de scénario, et des acteurs parfois un peu faux, on est bouleversé par cette famille si ancrée dans la réalité du monde et de son époque, dont elle raconte en filigrane l'histoire. Peut-être que c'était mieux avant, suggère Robert Guédiguian, preuves à l'appui, et pourtant il reste de belles choses à accomplir aujourd'hui. L'un des plus jolis moments du film est celui du flash-back au temps de l'insouciance, sur fond de Bob Dylan. On y retrouve Ascaride, Darroussin et Meylan jeunes et joyeux, tout droit sortis d'un autre film du réalisateur : Ki lo sa ?, datant de 1985. Bien sûr, on est ému du parallèle, de ce petit paradis perdu (celui de la jeunesse, celui du cinéma, celui de l’insouciance) et par la pensée de ce temps qui a passé si inexorablement.

Mais Robert Guédiguian est fidèle à lui-même, et c'est vers l'avant que ses personnages finiront par regarder, à travers la situation si actuelle et si brûlante des réfugiés échoués sur nos plages. Lorsque la petite bande trouve trois enfants abandonnés à eux-mêmes (deux frères et une sœur, l'histoire se répète), le film prend un tour de fable quasi allégorique qui pourrait être facile, mais apparaît en réalité comme nécessaire.

Tout comme le film, à (re)voir dès maintenant en DVD et BRD (édités par Diaphana), agrémenté de plusieurs bonus : un reportage sur le tournage (avec des témoignages de Robert Guédiguian et de ses acteurs) et des scènes perdues (notamment un bel échange théâtral en pleine mer) ainsi qu'un making-of de 23 minutes (Impressions de tournage) et le film Ki lo sa ? dans une édition spéciale FNAC.

3 raisons d’aller voir La Villa de Robert Guédiguian

Posté par kristofy, le 29 novembre 2017

Un vieil homme fatigué est victime d’un grave malaise. Tellement inquiétant que ses derniers jours vont arriver. Alors ses proches vont se retrouver autour de lui au seuil de la mort, et surtout entre eux pour un constat nostalgique de leurs vies… « Tous ces hommes et toutes ces femmes ont un sentiment commun. Ils sont à un moment de leur vie où ils ont une conscience aiguë du temps qui passe, du monde qui change... Ils savent que leur monde disparaîtra avec eux... Ils savent aussi que le monde continuera sans eux... Sera-t-il meilleur, pire ? Grâce à eux, à cause d’eux ?... »

La Villa est le 20ème film réalisé par Robert Guédiguian, et une nouvelle fois, le décor est une calanque près de Marseille, où ses comédiens fétiches Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan et Jacques Boudet sont rassemblés et entourés de la génération suivante d’acteurs de la troupe comme Anaïs Demoustier, Robinson Stévenin ou Yann Trégouët. Les frères et la sœur, les parents, les amis, les amants, les voisins se retrouvent donc presque dans un huis-clos en bord de mer. C’est le moment de se faire des reproches, de confronter des convictions, peut-être de prendre un nouveau départ… Bref il faut faire le bilan.

Le temps qui passe : comme toujours chez Robert Guédiguian, le film est imprégné de nostalgie. Le capitalisme et l’individualisme, valeurs régnantes du présent, gagnent sur l’idéal de fraternité et de solidarité du passé. Les personnages s’en souviennent, et ils essaient de sauver les meubles et les apparences. Il se dégage un certain sentiment d’impuissance, mais faut-il s’en résigner ? Un court flashback sur l’insouciance de la jeunesse des personnages est en fait un extrait du film Ki lo sa ? tourné ensemble il y a déjà une trentaine d’année. Une petite audace narrative qui met en miroir deux époques et deux intentions de cinéma.

L’utopie : il y a toujours cet idéal du "vivre-ensemble", et de s’ouvrir aux autres. C’était mieux avant, mais on peut essayer que ça ne devienne pas trop pire demain. La Villa est avant tout un mélodrame familial, délicat et humble, mais le film s’ouvre aussi à l’actualité du monde avec la crise des migrants. La noirceur n'est jamais loin de la lumière provençale. Il y aurait quelques réfugiés arrivés dans les environs dont des enfants, alors que faire ? C'est le prétexte au débat, aux enjeux, aux questionnements. Entre la mort et l'art, l'amour et la vie, le film est une tragédie intime et délicate. Guédiguian veut encore croire au pouvoir des fleurs. Plutôt que d'acheter une couronne mortuaire pour ses rêves.

Le fil d’Ariane : ce n’est pas seulement le titre d’un autre film de Guédiguian, sa muse Ariane Ascaride est le moteur principal de cette histoire : elle revient pour quelques jours se reconnecter à ses racines et un douloureux secret. Dans le film c’est une actrice de théâtre renommée et son charisme sur scène avait fait forte impression. Robinson Stévenin, jeune pêcheur à la vie simple, se passionne lui aussi pour le théâtre et malgré la différence d'âge, il s’imagine lui déclarer sa flamme… Une romance ("macronienne") inattendue serait possible, et c’est d’ailleurs un souffle d’air frais dans ce film lourd de mélancolie.

Chiara Mastroianni, Robert Guédiguian et Serge Toubiana dans les jurys de Venise 2016

Posté par vincy, le 25 juillet 2016

Sam Mendes, président du jury du 73e Festival de Venise, sait désormais avec qui il devra composer pour choisir le palmarès dans la compétition officielle. La Mostra a choisi un jury très éclectique: l’artiste et musicienne américaine Laurie Anderson, l’actrice britannique Gemma Arterton, l’écrivain et scénariste italien Giancarlo De Cataldo (Romanzo criminale, Suburra), l’actrice allemande Nina Hoss (Ours d'argent à Berlin en 2007), l’actrice française Chiara Mastroianni, l’écrivain et documentariste américain Joshua Oppenheimer (The Look of Silence), le cinéaste vénézuélien Lorenzo Vigas (Lion d'or l'an dernier) et l’actrice et chanteuse chinoise Zhao Wei.

Le Festival s'ouvrira le 31 août avec La La Land de Damien Chazelle, avec Ryan Gosling et Emma Stone.

Pour la section Orizzonti, le français Robert Guédiguian a été désigné président et il sera entouré de l'actrice égyptienne Nelly Karim, du critique de cinéma et historien américain Jim Hoberman, de l'actrice italienne Valentina Lodovini, de l'actrice et réalisatrice sud-coréenne Moon So-ri, du critique espagnol José Maria Chema Prado et du réalisateur indien Chaitanya Tmhane.

Pour le prix Luigi de Laurentiis du meilleur premier film, l'acteur italien Kim Rossi Stuart sera entouré de la productrice espagnole Rosa Bosch, du réalisateur et acteur américain Brady Corbet, de l'actrice espagnole Pilar Lopez de Ayala et du critique de cinéma et ancien directeur de la Cinémathèque française Serge Toubiana.

Cannes 2016 – Télex du marché: Scorsese, Paradis, Demoustier, Cassel, et un célèbre chat

Posté par vincy, le 18 mai 2016

- Le vieux projet de Martin Scorsese, The Irishman, pourrait renaître puisque STX Entertainment a racheté les droits internationaux à Paramount, qui conserve la distribution américaine éventuelle du film. Cette adaptation du livre de Charles Brandt (inédit en France) tourne autour du gangster Frank Sheeran, dit l'Irlandais, et notamment son rôle dans la disparitionn de Jimmy Hoffa (qui avait fait l'objet d'un film avec Jack Nicholson). Scénarisé par Steve Zaillian, le projet est censé être réservé à Robert De Niro, 20 ans après Casino. Le tournage pourrait commencer en janvier prochain.

- Vanessa Paradis, membre du jury, a plusieurs projets en cours. Elle a accepté d'être à l'affiche du prochain film de Yann Gonzalez. Et elle sera aux côtés de JoeyStarr et Isabelle Carré dans L'angle mort, drame fantastique de Pierre Trividic et Patrick Mario-Bernard, où il s'agit d'un homme invisible (ou visible, c'est selon ses caprices).

- Anaïs Demoustier a aussi plusieurs projets sur le feu puisqu'elle sera à l'affiche du prochain film de Robert Guédiguian, La villa, réinterprétation de La cerisaie version Marseille, avec les fidèles Darroussin, Meylan, Ascaride et Robinson Stévenin. Juste avant ce tournage en novembre, elle sera aussi dans le premier long de Yann Le Quellec, Cornelius le meunier hurlant, aux côtés de Gustave Kervern et Denis Lavant.

- Vincent Cassel, en compétition avec le film de Xavier Dolan, Juste la fin du monde, partagera le générique avec Romain Duris et Sandrine Kiberlain, dans le prochain drame d'Erick Zonka (La vie rêvée des anges), Fleuve noir. Cassel incarnera un flic sans illusions qui commence à enquêter sur la mort d'un enfant quand son fils, délinquant, revient dans sa vie.

- Enfin, Joann Sfar, qui a déjà confirmé il y a quelques jours qu'il allait réalisé un film d'animation adapté de sa BD Petit Vampire, a annoncé qu'il écrivait et réaliserait une nouvelle adaptation du Chat du Rabbin (César du meilleur film d'animation en 2012). Mais cette fois-ci le film sera tourné en prises de vues réelles. Le film sera, comme sa version animée, écrit et réalisé par Joann Sfar.

7 films pour ne pas oublier le Génocide arménien

Posté par redaction, le 24 avril 2015

ararat atom egoyan

Le génocide arménien a été commis entre avril 1915 et juillet 1916. On estime que les deux tiers des Arméniens sont morts suite à des déportations, famines et massacres, soit un million deux cent mille qui vivaient en Anatolie et en Arménie occidentale. Si l'on célèbre le Centenaire ce 24 avril, sa reconnaissance politique est encore en débat et fait l'objet de controverses. La Turquie nie encore aujourd'hui l'appellation de génocide, n'y voyant qu'une guerre civile. Ce mois-ci, le génocide a été reconnu par les parlements de vingt-trois pays.

Les Arméniens ont aujourd'hui un pays (dont le territoire a été largement amputé : le Mont Ararat, la fameuse montagne de l'Arche de Noé, et symbole de l'Histoire arménienne, est aujourd'hui en Turquie). La diaspora s'est installée dans de nombreux pays comme la France et aux Etats-Unis. Parmi les personnalités d'origine arménienne les plus célèbres: Sergei Parajanov (un musée est consacré au réalisateur à Erevan, en Arménie), Henri Verneuil, Charles Aznavour, Cher, Rouben Mamoulian, Robert Guédiguian, Eric Bogosian, Elia Kazan, Atom Egoyan, Francis Veber, Albert Hughes et Allen Hughes, Gregory Peck, Michel Legrand...

Pas étonnant que les films revenant de près ou de loin sur ce Génocide soient signés de ces descendants arméniens. Nous en avons retenus 7.

Auction of Souls (1919)
Le film d'Oscar Apfel est l'adaptation du livre d'Arshaluys Mardiganian, Ravished Armenia: The Story of Aurora Mardiganian, the Christian Girl, Who Survived the Great Massacre, où elle raconte le tout récent Génocide arménien. L'auteure y interprète d'ailleurs le rôle principal.
Le film est aujourd'hui introuvable. Il ne reste qu'une copie de vingt quatre minutes, qui a été restaurée en 2009.

america america elia kazanAmerica, America (1963)
Elia Kazan réalise le premier grand film sur le sujet, d'après son roman homonyme autobiographique. On y suit Stavros, Grec cappadocien et chrétien, qui vit en Anatolie à la fin du XIXe siècle dans des conditions misérables. Il subit l'oppression des Turcs musulmans, qui gouvernent l'Empire ottoman. Quand son village est ciblé par les Turcs, Stavros décide d'émigrer vers l'Amérique et entame le long et dangereux périple jusqu'à Constantinople dans l'espoir d'embarquer sur un bateau à destination de New York.
Le film a reçu la Coquille d'or au Festival de San Sebastian et les trois nominations les plus prestigieuses aux Oscars (film, réalisateur, scénario). de tous ses films, Kazan disait qu'America, America était son favori, et son plus personnel. Il avait voulu tourner à Istanbul (ex-Constantinople) mais a du filmer en Grèce.

Mayrig (1991)
Au crépuscule de sa vie, Henri Verneuil entreprend de filmer un diptyque sur la diaspora arménienne, dont le second volet, 588 rue Paradis se déroule en France. Mayrig est l'adaptation de son roman éponyme, avec Claudia Cardinale dans le rôle de sa mère et Omar Sharif dans celui de son père.
Le film raconte l'histoire de l'arrivée d'une famille arménienne en France en 1921, fuyant la répression des Turcs, à travers les souvenirs du jeune Azad, né en Arménie, le 11 mai 1915, au début du génocide du XXe siècle. Le récit est ponctué de flash back sur la période du génocide.

Ararat (2002)
Atom Egoyan et son épouse Arsinée Khanjian sont canadiens d'origine arménienne. Le cinéaste, après avoir été révélé par des films audacieux, souvent primés dans les grands festivals comme Cannes, réalise alors une oeuvre plus personnelle, avec un casting cosmopolite: le plus célèbre des Arméniens, Charles Aznavour, Eric Bogosian, Marie-Josée Croze, Bruce Greenwood, Simon Abkarian, Christopher Plummer, Arsinée Khanjian, Elias Koteas...
Sélectionné hors-compétition à Cannes (certains soupçonnent des pressions turques), Ararat est un récit gigogne sur le Génocide et l'exode qui a suivi en tentant de reconstituer une mémoire fragile, d'expliquer une situation complexe à travers différents points de vue.

le voyage en arménie robert guédiguianLe Voyage en Arménie (2006)
Hanté par ses origines, Robert Guédiguian aura attendu le milieu des années 2000, 25 ans après son premier film, pour revenir en Arménie. Et chose rare, son épouse Ariane Ascaride, actrice principale de ses films, est aussi au scénario pour cette oeuvre si particulière. Aux côtés d'Ascaride, on retrouve les fidèles Gérard Meylan et Jean-Pierre Darroussin, mais aussi Simon Abkarian et Jalil Lespert.
Le Voyage en Arménie est une quête des origines. C'est l'histoire d'Anna, cardiologue, doit opérer son père, malade du cœur. Celui-ci disparaît soudainement. Anna est convaincue qu'il est parti en Arménie, pays qu'il avait quitté vers les années 1950. Elle part à sa recherche.
Le film est autant une fiction, amoureuse des paysages, qu'un reportage documentaire sur le pays, tiraillé entre son histoire millénaire et sa mutation post-communiste très libérale.

Le Mas des alouettes / La masseria delle allodole (2007)
Paolo et Vittorio Taviani adaptent le roman d'Antonia Arslan, Prix Stresa (l'équivalent du Goncourt en Italie) en 2004. Paz Vega, Angela Molina, Arsinée Khanjian, Tchéky Karyo et André Dussollier sont au générique.
Les Taviani plonge le spectateur en mai 1915, à Venise où Assadour Avakian, médecin d'origine arménienne, se prépare, après vingt ans de séparation, à retrouver sa famille natale en Anatolie. Pour cet événement, son frère Aram fait agrandir et restaurer le Mas des alouettes, la vieille demeure où sont nés et ont grandi les Avakian. Mais l'Italie vient d'entrer en guerre contre l'Autriche-Hongrie et l'Empire ottoman, et en Turquie, les Jeunes-Turcs sont au pouvoir et cherchent à se débarrasser des minorités ethniques. Pour les Arméniens, la situation devient un enfer: tous les individus de sexe masculin sont voués au massacre, les Avakian n'y font pas exception. Pour les femmes et le petit Avetis, déguisé en fille, débute alors un long calvaire dans le désert et le début de leur exil.

fatih akin tahar rahim the cutThe Cut (2014)
Présenté en compétition au Festival international du film de Venise l'an dernier, ce film est la première collaboration entre un cinéaste d'origine turque, Fatih Akin, et un scénariste d'origine arménienne, Mardik Martin.
The Cut suit, pendant le génocide arménien, Nazareth Manoogian, déporté de son village natal de Mardin, en Turquie. Après les déportations, il apprend que ses filles pourraient être encore vivantes et parcourt le monde pour les retrouver. Tahar Rahim interprète le rôle principal. On retrouve également au générique Simon Abkarian et Arsinée Khanjian.
C'est aussi le premier scénario de Mardik Martin en 34 ans, depuis Raging Bull. Akin a clairement avoué qu'il s'était inspiré d'America, America.