Le cinéma s’invite dans la Nuit des idées

Posté par vincy, le 26 janvier 2017

Pour la 2e Nuit des Idées, qui se déroule ce soir en France et dans 40 pays , le cinéma s'invite dans cet événement festif et philosophique. De Tokyo (pour l'ouverture) à Los Angeles (pour la clôture), les débats auront pour thème "Un monde commun". Initiée par l’Institut Français, ce sont plus de 70 événements qui auront lieu.

Unifrance et MK2 proposeront ainsi une Nuit des Nouvelles Images pour débattre du futur du cinéma. À 18h, au mk2 Bibliothèque (Paris), on y discutera de l’émergence de nouvelles images et de nouveaux modes de diffusion, à l’heure où mk2 ouvre une nouvelle salle consacrée à la Réalité virtuelle et où UniFrance organise la 7e édition de son festival en ligne MyFrenchFilmFestival. Cette soirée se déroulera en présence des cinéastes Rebecca Zlotowski et Clément Cogitore, du DG de mk2 Agency Elisha Karmitz et du commissaire de l'exposition à la Cinémathèque française Laurent Mannoni. Le public sera invité à intéragir avec les intervenants sur Twitter avec le hashtag #NDNI. l'éntre est libre et le débat sera retransmis sur Facebook Live.

Au Forum des Images, l'écrivain et scénariste Jean-Claude Carrière, le photographe Vasantha Yogananthan, l'ethnoscénologue Amiane Béranger et la conteuse et danseuse Nathalie Le Boucher évoqueront  "Ramayana et Mahabharata : a persistance des mythes au coeur de la culture indienne", deux grands textes indiens sacrés. La soirée est accompagnée de la projection Gita Govinda du réalisateur expérimental Amit Dutta, transposition cinématographique du poème hindou (2014), présentée à Cinéma du réel en 2015.

A Nantes, au Lieu unique, dans le cadre de la programmation Doc a LU - focus  sur le cinéma allemand, sera projeté le film de Philip Scheffner, Révision (2012), qui rouvre une sordide affaire de l'été 1992 où deux roumains ont été retrouvés morts à la frontière germano-polonaise. A travers ses films, le documentariste "met en œuvre une pensée politique qui opère une redistribution entre ce qui est manifeste et ce qui ne l’est pas".

La cinémathèque de Grenoble et le cinéma Le Dietrich à Poitiers participeront aussi à cette Nuit pas comme les autres.

A l'étranger, l’Institut National Audiovisuel polonais (NINA) à Varsovie projettera la projection du dernier film (en exclusivité en Pologne) d'Andrzej Wajda Les fleurs bleues (sortie en France le 22 février), le Cinéma Andorra à Helsinki diffusera le documentaire Human de Yann Arthus-Bertrand, en plus d'un débat en sa présenceet à Pinamar en Argentine, le vieil hôtel d'Ostende programmera des fictions et documentaires en continu en plus d'une séance de cinéma sur la plage.

Poitiers Film Festival 2016 : retour sur la compétition internationale

Posté par MpM, le 8 décembre 2016

whatever the weather

La 39e édition du Poitiers film festival s’est traditionnellement achevée par la proclamation du palmarès. Mais comme toujours en festival, la liste des quelques films récompensés ne suffit pas à rendre hommage au très bon niveau de la compétition. Retour sur douze autres courts métrages sélectionnés qui ont attiré notre attention (par ordre alphabétique).

Ayaldama de Dias Kulmakov (Kazakhstan)
On reconnaît d’emblée les qualités cinématographiques des films venus des ex-pays soviétiques, comme le Kazakhstan ou l’Ukraine : des plans larges savamment composés, des éclairages intérieurs de toute beauté, une mise en scène ample et épurée. Même s’il y a comme ici quelques maladresses et autres affectations (notamment des ralentis appuyés sur les personnages et la tentation d’aller vers une imagerie de carte postale), le film parvient à créer une ambiance plutôt riche et envoûtante.

Entre la tierra de Sofía Quirós Ubeda (Argentine)
Du pur cinéma de sensations qui nous embarque avec l’héroïne, une femme solitaire vivant en harmonie avec la nature. Lorsque surgit une jeune fille (fantôme ? double ? réminiscence du passé ?), quelque chose se joue qui la transformera à jamais. On est happé par la beauté des plans et l’épure de la narration au service d’une réflexion métaphysique sur l’existence.

Fais le mort de William Laboury (France)
Un sujet générationnel, filmé de manière quasi documentaire et construit comme un thriller, qui mêle habilement harcèlement, pouvoir des réseaux sociaux et réflexion technologique. Sa force d’évocation et l’intelligence de son dénouement lui ont valu le Prix canal + lors du dernier festival de Clermont Ferrand. A noter que le réalisateur William Laboury avait un autre film en compétition à Clermont, Hotaru, récompensé par le prix spécial du jury. Indéniablement un nom à retenir.

Hausarrest de Matthias Sahli (Suisse)
Une dystopie absurde et trash dans laquelle un homme assigné à résidence subit, impuissant, le comportement de plus en plus autoritaire de son bracelet électronique. L’utilisation de larges plans fixes accentuent l’importance du hors champ qui permet d’aller assez loin à la fois dans l’horreur et l’humour noir.

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Poitiers Film Festival 2016 : retour sur le palmarès

Posté par MpM, le 8 décembre 2016

anna

Pour sa 39e édition, le Poitiers Film Festival proposait un programme riche et varié mêlant avant-premières, focus sur le cinéma danois, rencontre avec la comédienne Lola Créton, leçon de cinéma de la réalisatrice d’animation Florence Miailhe ou encore masterclass "musique et cinéma" avec Dominique Cabrera et Béatrice Thiriet. Mais c’est bien entendu la compétition internationale de courts métrages réalisés par des étudiants en cinéma qui constituait une fois encore le cœur de la manifestation.

Cette année, la sélection se composait de 49 films (sur 1452 inscrits), issus de 36 écoles et représentant 24 pays. Au risque de se répéter, ce qui frappe d’emblée à Poitiers, c’est la qualité générale des œuvres proposées. Fictions ou documentaires, live ou animées, gros budgets ou productions fauchées, toutes avaient leur place dans une compétition de fait assez homogène et plutôt réjouissante qui proposait à la fois sujets forts, matière à discussion et beaux moments de cinéma. De quoi composer un palmarès équilibré qui fait à la fois la part belle à la narration et aux propositions formelles.

Le jury international (composé de Natalia Chernysheva, Claire Diao, Olivier Gorce, Julien Lilti et Marie Madinier) a ainsi assez logiquement accordé son grand prix à Anna de Or Sinai, qui avait déjà reçu le Grand Prix de la Cinéfondation lors du dernier festival de Cannes. Le film dresse le portrait touchant d’Anna, une femme d’une quarantaine d’années qui se met en quête, le temps d’une soirée, d’un homme qui pourrait partager sa solitude. Jamais mièvre ni cruelle, la jeune réalisatrice filme son héroïne avec une bienveillance lumineuse qui lui redonne peu à peu confiance. En une nuit, sans éclats ni rebondissements spectaculaires, Anna passe d’une mélancolie amère à une forme d’autodérision et d’humour qui tirent le récit vers une légèreté joyeuse et presque décalée.

Prix spécial du jury, Valentina de Maximilian Feldmann reçoit également le prix Amnesty International et le prix du public. Une unanimité qui s’explique plus par son sujet que par ses réelles qualités cinématographiques. Il s’agit en effet d’un documentaire en noir et blanc sur le quotidien d’une famille tzigane de Macédoine, raconté à sa manière par une petite fille de dix ans. A la fois ultra-stylisé et souvent maladroit, le film tient le spectateur à distance par un esthétisme inutile et des choix de mise en scène dénués de subtilité (gros plans fixes sur les visages des différents membres de la famille, plan en plongée sur la famille au milieu des ruines qui lui servent de logement…) qui cherchent plus à déclencher l’émotion qu’à faire le récit précis du destin des personnages.

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Poitiers Film Festival: un palmarès aux saveurs asiatiques

Posté par cynthia, le 7 décembre 2015

Bien que le froid ait percé nos os, la soirée du palmarès nous a bien remis d'aplomb pour la semaine. En effet, c'est dans une ambiance bon enfant que la journaliste et chroniqueuse de "La Bande originale" sur France Inter Leïla Kaddour-Boudadi a présenté la remise des prix samedi soir dans l'auditorium de Poitiers. Drôle et lumineuse, la jeune journaliste devrait postuler pour présenter la prochaine cérémonie des César... on ne s'y endormirait pas pour une fois.

Les deux prix principaux ont couronné un film sud-coréen et un autre thaïlandais.

Palmarès

Grand prix du jury accompagné de 3000 euros offerts par la ville de Poitiers:
Janus de Sung Hwan Kim (Corée du sud) un court-métrage qui donne légèrement la nausée mais tout de même très original. L'histoire d'un couple en détresse après avoir renversé un enfant sur une route enneigée.
Prix spécial du jury accompagné de 1500 euros offerts par la Région Poitou-Charentes:
That Day of the Month de Jirassaya Wongustin (Thailande), notre petit coup de cœur de cette édition, l'histoire touchantes de deux amies et du jour de leurs règles.
Prix de la mise en scène accompagné de 1500 euros offerts par la Région Poitou-Charentes:
The Satanic Thicket-ONE de Willy Hans (Allemagne), un trip sous fond de satanisme à glacer le sang.
Prix du scénario accompagné de 1000 euros offerts par l'Université de Poitiers:
Ten Buildings Away (Israël) Un court-métrage dans l'ère du temps sur une famille de migrants.

Prix du Public accompagné de 1500 euros offerts par le Département de la Vienne:
Deux Amis de Natalia Chernysheva (France), une animation qui raconte l'histoire de deux amis, une chenille et un têtard qui grandissent dans deux environnements différents.

Prix Découverte de la Critique Française, prix attribué par le Jury du Syndicat Français de la Critique de Cinéma à l'issue d'un débat ouvert en public
Let's Burn Something on My Way Out! de Dennis Stormer et Jan D. Günther (Allemagne), un court-métrage qui raconte une histoire d'amour exceptionnelle, mais encrée dans la routine, d'un jeune couple.
Prix Amnesty International accompagné de 500 euros offerts par Amnesty International France:
The Living of the Pigeons de Baha' AbuShanab (Palestine), un aperçu troublant et surréaliste des allées et venues quotidiennes pendant «l'heure de pointe», aux premières heures du matin entre Bethléem et Jérusalem.
Prix Sakura accompagné de 1500 euros offerts par le Fonds de dotation Sakura:
Chhaya de Debanjan Nandy (Royaume-Uni), l'histoire d'un vieil homme cloitré dans une maison de retraite avec le souvenir de sa femme bien-aimée qui le suit comme une ombre.
Esel de Rafael Haider (Autriche), un conte qui met en scène un couple de personnes âgées qui s'efforcent de maintenir leur fermer jadis prospère, avec l'aide d'un âne en fin de vie.

Prix du jury étudiant accompagné de 1500 euros offerts pas l'Université de Poitiers:
Hotaru de William Laboury (France) Un court-métrage onirique.

Poitiers Film Festival 2015 : l’Allemagne à l’honneur

Posté par MpM, le 23 août 2015

poitiers2015Pour sa 38e édition, le Poitiers Film Festival (ex "Rencontres Henri Langlois") poursuit son oeuvre de révélateur et de soutien du jeune cinéma, soucieux d'être toujours là où se construit le cinéma, où se confrontent les écritures, où les jeunes réalisateurs peuvent s’affranchir des règles et tout tenter.

Après l'immense succès de l'édition 2014 (qui a attiré près de 19000 spectateurs), la manifestation proposera du 27 novembre au 4 décembre une cinquantaine de films d'école venus de tous les horizons, qui auront préalablement été sélectionnés parmi plus de 1300 candidats. C'est dire la qualité, et le niveau exigence, dont témoignent les heureux compétiteurs.

Par ailleurs, le festival met cette année l'Allemagne à l'honneur à travers les courts métrages de jeunes réalisateurs venus de Berlin, Hambourg, Cologne, Postdam et Ludwigsburg invités à Poitiers et accompagnés de grands noms du cinéma allemand. Ce focus sera accompagné d'un regard sur les films cultes de cinéastes allemands confirmés comme Wim Wenders, Fatih Akin, Andreas Dresen ou encore Christian Petzold...

Comme chaque année, Poitiers se distinguera également par sa leçon de cinéma, ses événements professionnels, ses avant-premières en présence des équipes des films et bien sûr ses fêtes et ses rencontres qui en font un grand rendez-vous du jeune cinéma mondial.

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Poitiers Film Festival
Du 27 novembre au 4 décembre 2015
Plus d'informations sur le site de la manifestation

Rencontres Henri Langlois 2013 : retour sur le palmarès

Posté par MpM, le 11 décembre 2013

Deux histoires de fratrie et deux films d'animation ont séduit le jury de cette 36e édition des Rencontres Henri Langlois, composé de la productrice Hélène Cases (Lionceau films), la déléguée générale du festival de la Rochelle Prune Engler, la comédienne Nathalie Richard (Jeune et jolie, Les amoureux), l'écrivain et scénariste Philippe Di Folco (Tournée) et le réalisateur Eduardo Williams (Pude ver un puma, Que je tombe tout le temps ?).

las lagrimasLe grand prix, Las lagrimas, raconte la virée de deux frères en forêt au cours de laquelle la tristesse qui a envahi leur famille va finir par se dissiper.

Il s'agit d'un moyen métrage réalisé au Mexique par Pablo Delgado Sánchez et qui mêle de beaux moments de complicité fraternelle et quelques passages trop émotionnellement appuyés.

To Guard a Mountain de Izer Aliu (Prix spécial du jury) suit également deux frères partis à la recherche d'une brebis égarée et qui se retrouvent seul dans la montagne sous un violent orage.

Là encore, de jolies scènes pleines de spontanéité côtoient quelques maladresses pleines de bons sentiments.

bon voyageLes deux films d'animation, Bon voyage de Fabio Friedli (Prix du scénario) et Sleeping with the fishes de Yousif Al-Khalifa (Prix de la mise en scène), racontent respectivement le voyage d'émigrants entassés dans un camion à destination de l'Europe,et une histoire d'amour atypique entre une poissonnière buharet un livreur à tête de truite arc-en-ciel.

La critique française a quant à elle récompensé un film turc en noir et blanc, Buhar de Abdurrahman Öner, tandis que le jury étudiant a offert le doublé à To Guard a Mountain de Izer Aliu de la Norwegian Filmschool.

Tout le palmarès

Grand Prix du Jury
Las Lágrimas de Pablo Delgado Sánchez

Prix spécial du Jury
To Guard a Mountain de Izer Aliu

Prix de la Mise en scène
Sleeping With The Fishes de Yousif Al-Khalifa

Prix du Scénario
Bon voyage de Fabio Friedli

Prix Découverte de la Critique française
Buhar de Abdurrahman Öner

Prix du Public
Welkom de Pablo Munoz Gomez

Prix du Jury étudiant
To Guard a Mountain de Izer Aliu

Mention spéciale du Jury étudiant
A Fable of a Blood-Drained Girl de Alejandro Iglesias Mendizabal

Prix Amnesty International France (Prix transversal sections films d'écoles)
Le projet Water Films réalisés par des israéliens et des palestiniens autour du thème de l’eau

Prix du Côté courts français
Souffle court de Johann Dulat

Prix du Jury Lycéen
La Ville est calme d'Alexandre Labarussiat

Rencontres Henri Langlois 2013 : la relève française ?

Posté par MpM, le 7 décembre 2013

TRUCS DE GOSSESParmi les 45 films en compétition lors de la 36e édition des Rencontres Henri Langlois, sept viennent d'écoles françaises, ce qui donne un aperçu instructif de la production des jeunes étudiants de notre pays.

Première constatation, sur les 7 films, 6 sont des œuvres d'animation (au centre du cursus des écoles représentées comme La poudrière ou Supinfo Com). Les techniques les plus fréquemment utilisées sont le dessin et l'animation 3D.

Les sujets, eux, sont généralement légers, voire anecdotiques, comme prétextes à ce qui peut parfois s'apparenter à un exercice de style : la cour de Versailles représentée sous forme de gallinacés (A la française de Julien Hazebroucq, Emmanuelle Leleu, William Lorton, Morrigane Boyer et Ren Hsien Hsu), une escapade de vieilles maisons qui prennent leur indépendance (Home sweet home de Pierre Clenet, Alejandro Diaz, Romain Mazanet et Stéphane Paccolat), TROIS PETITS CHATSune histoire d'amour estivale (Soeur et frère de Marie Vieillevie)...

Le tragique est aussi au rendez-vous avec une famille de félins durement frappée par la maladie (Trois petits chats de Maïwen Leborgne, Albane Hertault, Alexia Provoost et Benoit belaunay).

Les petits chats sont mignons, les poules sont amusantes, les maisons ne manquent pas de souffle... mais pas facile, en à peine quelques minutes, de développer une histoire vraiment originale ou profonde.

Trois œuvres parviennent malgré tout à imposer leur singularité :

PIEDS VERTS- Trucs de gosse d'Emilie Noblet (la Fémis) parce qu'il s'agit d'un film réalisé en prises de vue réelles, situé dans les coulisses d'un multiplexe parisien, qui mélange film générationnel et comédie romantique décalée.

- Pieds verts d'Elsa Duhamel (La poudrière), un documentaire en teintes pastels qui raconte, en 4 minutes et avec une pudeur infinie, la nostalgie immense de Jeanine et Alain, Français d'origine algérienne, envers leur enfance en Algérie, pleine de senteurs, de couleurs et de saveurs.

- Ginette de Marine Laclotte et Benoît Allard (école des métiers du Cinéma d'animation) qui met en scène le témoignage de Ginette sur sa vie agricultrice et de femme, avec un trait naïf et une animation faussement artisanale. GINETTE

On sent, à la vue de ces œuvres, que la qualité française (technique, rigueur, écriture) est toujours au rendez-vous, même si les idées et les moyens restent plus modestes.

Et surtout, on vérifie une tendance passionnante du cinéma actuel : utiliser l'animation sous toutes ses formes non plus comme simple vecteur d'imaginaire, ou à destination d'un jeune public, mais comme support de témoignages ou de documentaires qui y gagnent en force d'évocation mais aussi en poésie et en qualité de narration. Après avoir découvert ces œuvres fragiles, on a hâte de voir ce que nous réservent ces jeunes cinéastes dans les années à venir.

Rencontres Henri Langlois 2013 : la Palestine, le Liban et Israël dans un focus commun

Posté par MpM, le 5 décembre 2013

rencontres henri langlois 2013En organisant un focus autour du cinéma de l'est du bassin méditerranéen, les organisateurs des Rencontres Henri Langlois ont pris le risque de voir politique et diplomatie s'inviter dans leur manifestation, puisque ce sont des écoles de Palestine, du Liban et d'Israël qui ont été invitées à présenter leurs travaux à Poitiers.

Hormis une réaction épidermique (et isolée) du Comité poitevin France-Palestine, qui a appelé au boycott des Rencontres, l'initiative a été extrêmement bien accueillie par les principaux intéressés, à savoir les écoles représentées et les réalisateurs invités comme Raed Andoni (Fix me), Hiam Abass (Héritage) ou encore Danielle Arbid (Dans les champs de bataille).

Pour le grand public, c'est surtout une perspective passionnante sur la manière dont l'Histoire et le contexte géopolitique influent directement sur les préoccupations des jeunes cinéastes de la région. Ainsi, comme le souligne Gassam Koteit, directeur adjoint de l’Académie libanaise des Beaux-arts (ALBA) : "les questionnements sont les mêmes des deux côtés".

L'occupation israélienne est ainsi lebanontape1aux centres des films présentés par l'ALBA : familles séparées, enfants ostracisés parce que leur père a coopéré avec l'armée israélienne, étrangers perçus comme de possibles espions israéliens...

Ce qui n'empêche pas un certain recul, voire une bonne dose d'humour. Ainsi, Lebanon: tape 1 qui raconte les étranges relations entre une journaliste française et son équipe technique libanaise. La jeune femme aligne les clichés sur le pays tandis que les deux hommes la traitent d'abord en touriste sexy, puis en ennemie potentielle. Volontairement décalé, le film caricature gentiment à la fois le regard que portent les autres nations sur le Liban, et les mécanismes de méfiance de ses habitants.

space the alleysLe ton est plus sérieux, voire tragique, dans les films des trois écoles palestiniennes Dar al-Kalima College de Bethlehem, Media Development Center de la Birzeit University et Institute of Modern media de l'Université Al Qods.

Il s'agit principalement de documentaires qui donnent la parole à des réfugiés palestiniens, à des familles qui ont été contraintes de détruire leur propre maison, ou encore à des jeunes qui s'opposent à l'occupation israélienne en pratiquant le "parkour", un sport d'acrobaties urbain. Ce dernier film, intitulé Space the alleys, et réalisé par Mohammed Al Fateh, mêle les vues spectaculaires des acrobaties aériennes des personnages à l'utopie d'un mouvement de résistance non violent susceptible d'attirer l'attention sur le sort réservé à ses pratiquants, souvent arrêtés arbitrairement, et parfois même assignés à résidence.

On est également extrêmement touché par le portrait sensible de Naser, jeune homme handicapé qui se démène pour gagner sa vie dignement. Le regard porté sur lui par le réalisateur Ma'moon Al-Herimi semble comme l'éclairer de l'intérieur, donnant à ce simple destin individuel une portée humaine universelle.

Enfin, impossible de ne pas être captivé women of refaiyapar le programme spécial "Water" proposé par le département film et télévision de l’Université de Tel Aviv. Ce projet, dont les neuf films (documentaires et fictions) seront projetés vendredi 6 décembre à Poitiers, regroupe des réalisateurs israéliens et palestiniens autour de la thématique commune de l'eau.

Il s'inscrit dans un ensemble plus vaste qui permet à des réalisateurs des deux pays de travailler sur des projets communs, au-delà de toute considération purement politique. Ce qui constitue au final la meilleure réponse à ceux qui s'accrochent à une vision volontairement manichéenne de la situation israélo-palestinienne.

Rencontres Henri Langlois 2013 : Anne-Dominique Toussaint, productrice proactive

Posté par MpM, le 4 décembre 2013

Anne Dominique ToussaintAnne-Dominique Toussaint, fondatrice des Film des Tournelles, et heureuse productrice de succès populaires comme Le coût de la vie de Philippe Le Guay, Les beaux gosses de Riad Sattouf ou Caramel de Nadine Labaki, a immédiatement répondu présente lorsque les Rencontres Henri Langlois lui ont demandé d'animer leur désormais très courue leçon de cinéma.

"J'ai été très flattée qu'on me choisisse", déclare-t-elle, "car les leçons de cinéma des Rencontres Henri Langlois sont très célèbres. Et surtout je suis toujours très contente qu'on me propose de parler de mon métier car c'est un métier que j'aime beaucoup, que je trouve passionnant, et qui est très méconnu, en tout cas très caricaturé. La production, en gros, c'est faire exister un film. Le rôle d'un producteur, c'est accompagner un artiste dans la réalisation d'une idée, jusqu'à un film qui est projeté à un public sur grand écran."

Presque seule en scène durant deux heures, celle qui a reçu en 2011 le prix "Veuve Cliquot" de la femme d'affaires de l'année, a ainsi donné devant une salle comble un véritable cours magistral sur les réalités de la production et notamment sur ses étapes, qui vont de la rencontre décisive avec un réalisateur et son projet à la collaboration avec le distributeur pour accompagner au mieux le film terminé, en passant par le soutien pendant l'écriture du scénario, le choix du casting, les recherches de financement, et bien sûr le tournage, le montage, la post-production...

Anne-Dominique Toussaint, passionnée Retour à Kotelnitchpar son métier, tranche avec la vision un peu poussiéreuse que l'on pourrait avoir de cette fonction. Ainsi, plutôt que d'attendre l'arrivée miraculeuse du scénario idéal sur son bureau, elle préfère prendre les devants, quitte à être à l'origine même des projets qu'elle produit. "Chaque producteur a sa propre méthode", explique-t-elle en revendiquant sa part de subjectivité. "Mais pour moi, la chose la plus importante, c'est la rencontre avec un réalisateur. Il faut avoir envie de passer deux ans avec quelqu'un."

C'est ainsi qu'elle est allée chercher Emmanuel Carrère avant même qu'il n'ait un projet en tête (ils tourneront ensemble Retour à Kotelnitch en 2003 et La moustache en 2005) mais aussi qu'elle a suggéré à Riad Sattouf d'écrire un scénario sur les adolescents, lui offrant l'opportunité dont il rêvait de passer derrière une caméra. Ce fut Les beaux gosses en 2009, suivi par Jacky au royaume des filles qui sortira le 29 janvier prochain.

Parfois, cela va encore plus loin. Lors de son premier séjour au Liban, où elle accompagnait Respiro d'Emanuele Crialese, Anne-Dominique Toussaint a croisé la route d'une jeune Libanaise qui ne pouvait pas concevoir sa vie sans faire de cinéma. "Elle m'a fait un effet très fort", se souvient-elle. "Touchée, je lui ai demandé ce qu'elle voulait raconter et elle m'a dit : "je veux parler des femmes de mon pays.""

"C'est comme en amour : il y a des hommes, peut-être que ce serait formidable de les avoir rencontrés, mais je ne les ai pas rencontrés, et ce n'est pas très grave non plus"

et maintenant on va oùLa productrice lui propose alors de lui envoyer son projet. "Elle m'avait tellement marquée que quand je suis rentrée, comme au bout de quinze jours, trois semaines, elle ne m'avait toujours rien envoyé, c'est moi qui l'ai relancée ! Je n'ai jamais refait ça de ma vie après, parce que j'en rencontre quand même beaucoup des gens qui veulent faire du cinéma, qui me proposent des choses..." La jeune Libanaise, c'était Nadine Labaki avec qui elle tournera Caramel et Et maintenant on va où. Deux très beaux succès public et critiques.

Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'Anne-Dominique Toussaint a un 6e sens pour découvrir et soutenir des talents en devenir. Peut-être parce que la production n'est pas qu'une question de gros sous, de copinage et de jeux de pouvoir. Bien sûr, il faut un certain réalisme, et l'art de garder la tête froide pour ne s'enthousiasmer que sur des projets susceptibles de rencontrer leur public. Mais il faut surtout une sensibilité artistique presque divinatoire, pour débusquer, dans l'esprit de ses interlocuteurs, les bons films en gestation.

Et tant pis si la perle rare reste à l'état de scénario qu'Anne-Dominique Toussaint n'a pas le temps de lire :  "Je n'ai pas de culpabilité par rapport à ça, je ne peux pas tout lire. C'est très impliquant de lire un scénario. C'est essayer de comprendre le film, de voir le film. Après, quand on a lu, la personne attend un retour... Donc c'est une vraie énergie intellectuelle. Je fais les choses à mon rythme, donc tous les scénarios que je choisis, je suis heureuse de les faire et de les choisir. Il y a des choses, je vais passer à côté, mais forcément ! C'est comme en amour : il y a des hommes, peut-être que ce serait formidable de les avoir rencontrés, mais je ne les ai pas rencontrés, et ce n'est pas très grave non plus. Je me suis auto-conditionnée pour n'avoir aucune culpabilité par rapport à ça, ni regret. J'assume."

Une posture qui, jusque-là, lui a plutôt bien réussi.

Copyright photo d'illustration : Sébastien Laval, Rencontres Henri Langlois, Poitiers.

Rencontres Henri Langlois 2013 : voyage à l’Est du bassin méditerranéen, compétition internationale et leçon de cinéma sur la production

Posté par MpM, le 11 octobre 2013

rencontres henri langlois 2013A l'Est, que du nouveau ! Pour sa 36e édition, le festival international des écoles de cinéma explore les cinématographies du Liban, d’Israël et de Palestine, en présence notamment de Hiam Abbas (Les Citronniers, Héritage...), Raed Andoni (Fix me), Khalil Joreige (The Lebanese Rocket Society, Perfect Day) et Nadav Lapid (Le Policier).

Côté compétition, 45 films (sur les 1424 reçus) venus de 21 pays et 34 écoles ont séduit cette année les membres du comité de sélection. Qu'ils viennent d'Estonie ou du Brésil, de Norvège ou de Turquie, on leur souhaite une carrière à la hauteur de certains de leurs illustres prédécesseurs !

L'an passé, on avait ainsi été bluffé par la mise en scène au cordeau de l'envoûtant Pude ver un puma d'Eduardo Williams ou encore par le ton étonnamment libre et décalé de La Sole, entre l'eau et le sable d'Angèle Chiodo, vrai faux documentaire mêlant animation et prises de vue réelle. Or les deux cinéastes ont à nouveau fait parler d'eux en 2013, le premier avec Que je tombe tout le temps, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs, et la seconde avec son nouveau court métrage, Les chiens.

Tous ces jeunes cinéastes sont sur la voie d'auteurs aujourd'hui reconnus comme Andreas Dresen (Septième ciel), Joachim Trier (Oslo, 31 août), Na Hong-Jin (The Murderer) ou encore Pascale Ferran (Lady Chatterley), qui sont eux-aussi passés par les Rencontres Henri Langlois.

Pour compléter ce programme déjà bien rempli, la traditionnelle Leçon de cinéma sera consacrée aux rouages de la production, avec la complicité de la productrice Anne-Dominique Toussaint (Alceste à bicyclette, Le Hérisson, Les Beaux gosses, Respiro...). Plusieurs séances spéciales (dont une consacrée à la Comédie musicale), des avant-premières (dont Jacky au royaume des filles de Ryad Sattouf) et une carte blanche à La Mouette à 3 Queues (collectif d'artistes multidisciplinaires) sont également prévues, sans oublier les incontournables rencontres entre le public et les réalisateurs.

Comme tous les ans depuis 2007, Ecran Noir est fier d'être partenaire de ces Rencontres qui portent si bien leur nom, et vous en fera vivre les principaux temps forts du 29 novembre au 8 décembre.