Cabourg 2020 : Guillaume Brac couronné, Robert Guédiguian sacré

Posté par kristofy, le 3 juillet 2020

Le 34e Festival du Film de Cabourg est le premier festival de cinéma en France a voir pu s'organiser avec le récent déconfinement. Il y a donc eu des projections dans les salles pour le public,t en présence de certaines équipes, des jurys, et aussi un tapis-rouge en bord de mer avec de nombreuses stars pour la cérémonie de remise des prix. Cette année reste spéciale avec une édition de Cabourg réduite à 3 jours (au lieu de 5  habituellement) du 29 juin au 1er juillet, mais avec un concentré de films en avant-première.

Le palmarès :

- Grand Prix du Jury : A l’abordage de Guillaume Brac

Guillaume Brac a révélé au cinéma deux interprètes de théâtre ,Vincent Macaigne et Laure Calamy (depuis devenus des noms de plusieurs gros films) avec son moyen-métrage Un monde sans femme sorti en 2012. Son court-métrage précédent, Le Naufragé , avec Vincent Macaigne (déjà), était d'ailleurs à Cabourg en 2010. Ce nouveau film A l’abordage, déjà présenté à Berlin, flirte en apparence avec le cinéma d'Éric Rohmer. mais il se révèle progressivement plein d'audace autant en traits d'humour qu'en petites observations de la société. C'est un grand film romantique (joué par  des jeunes du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris), déjà l'un des meilleur film français de l'année ...

- Mention Spéciale du Jury : Balloon de Pema Tseden (sortie le 18 novembre 2020)

Les films de Pema Tseden sont à chaque des invitations à la poésie et au voyages dans diverses régions du Tibet, et on a la chance que certains sortent en salles en France : Tharlo en 2018 et Jinpa en 2020 après être sélectionnés aux festivals de Venise et de Vesoul (en remportant d'ailleurs 2 Cyclo d'or), ce dernier Balloon va suivre la même trajectoire (Venise, puis Vesoul) avec une sortie à venir prévue au 18 novembre 2020. Balloon est son film peut-être le plus 'accessible' avec en particulier une histoire d'amour contrariée (et aussi derrière le sujet de l'accès à des moyens de contraception) : cette mention spéciale du Festival Romantique de Cabourg est logique.

- Meilleur court-métrage : La Grande nuit de Sharon Hakim
- Prix du Jury court-métrage : Aline de Simon Guélat
- Mention Spéciale du Jury Court-Métrage : Shakira de Noémie Merlant
- Meilleure actrice court-métrage ex-aequo : Catalina Danca dans Shakira et Tamara Saade dans La Grande nuit
- Meilleur acteur court-métrage ex-aequo : Paulin Jaccoud et Schemci Lauth dans Aline

La spécificité du Festival de Cabourg est aussi de décerner des prix, le romantique Swann d'Or, qui viennent saluer les talents des films français de l'année entre chaque été. L'un de ces films est d'ailleurs de nouveau distribué en salles depuis leur réouverture : De Gaulle avec Lambert Wilson

- Swann d’Or du meilleur film : Gloria Mundi de Robert Guédiguian
- Swann d’Or de la meilleure réalisation : Nicolas Bedos pour La Belle Époque
- Prix Gonzague Saint-Bris du scénario adapté d'une oeuvre littéraire : Seules les bêtes par Dominik Moll et Gilles Marchand (d’après le roman de Colin Niel)
- Swann d’Or de la meilleure actrice : Chiara Mastroianni dans Chambre 212 de Christophe Honoré
- Swann d’Or du meilleur acteur : Lambert Wilson dans De Gaulle de Gabriel Le Bomin
- Swann d’Or de la révélation féminine : Luàna Bajrami dans Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma
- Swann d’Or de la révélation masculine : Benjamin Voisin dans Un vrai bonhomme de Benjamin Parent
- Swann d’Or du meilleur premier film : Tu mérites un amour de Hafsia Herzi

Par ailleurs les Prix Premiers Rendez-Vous qui récompensent les débuts à l’écran d’une actrice et d’un acteur dans un premier grand rôle ont été donné à Zahia Dehar dans Une Fille facile de Rebecca Zlotowski et à Alexandre Wetter dans Miss de Ruben Alves

Vesoul 2020 : Mariam au palmarès, Wet Season et Jinpa dans les salles

Posté par kristofy, le 19 février 2020

Le 26ème Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul, qui s'est tenu du 11 au 18 février, a pu compter sur ses fidèles et nouveaux spectateurs pour une nouvelle fois faire salles pleines (32200 spectateurs au total) pour plus de 80 films en provenance de 24 pays ! C'est plein succès pour la rétrospective sur le cinéma du Tibet avec en particulier l'ensemble des films des réalisateurs Pema Tseden et ceux de Sonthar Gyal (malheureusement absents à cause des difficultés à voyager depuis la Chine depuis le coronavirus), l'hommage à l'actrice Ronit Elkabetz, et la thématique "Liberté, Egalité, Créativité".

Wet Season de Anthony Chen et Jinpa de Pema Tseden sont à voir en salles dès ce mercredi 19 février :

Pema Tseden est le chef de file du cinéma du Tibet, il impose la langue Tibétaine dans ses films et même dans ses génériques. C'est le seul a avoir remporté deux fois un Cyclo d'or à Vesoul pour Tharlo et Jinpa. Ses films sont souvent découverts au Festival de Venise (Tharlo, Jinpa, et le suivant Balloon centré sur un couple déjà marié et une autre romance contrariée devrait connaître encore plus de succès). En attendant le dernier né, Balloon, et peut-être The sacred arrow d'avant (un tournoi de tir à l'arc où le meilleur archer d'un village est amoureux de la soeur du champion du village rival...), Jinpa sort aujourd'hui dans les salles françaises. On y découvre le chauffeur d'un camion sur une route déserte qui prend en stop un homme mystérieux qui dans un prochain village à l'intention de retrouver quelqu'un pour le tuer et se venger... Le cinéaste poursuit son expérimentation de très longs plans fixes. Rappelons que la production de Jinpa a été soutenue par Wong Kar-wai. Tendu et fascinant, le film est aussi beau qu'exigeant. C'est bien l'étrangeté du cinéma de Tsden qui lui donne une poésie alors qu'a priori nous sommes plongés dans un western absurde et radical...

De son côté, Anthony Chen avait été découvert au Festival de Cannes où son premier film Ilo Ilo de Singapour. Il avait remporté la Caméra d'or. Le voici plusieurs années plus tard qui accouche de son second film Wet Season (à lire ici) : une femme professeur dans un collège qui ne parvient pas à tomber enceinte doit faire face à un éloignement de son mari et à un élève qui s'imagine la séduire...

La compétition du FICA de Vesoul :

Les films en compétition montraient certes une parité homme/femme réalisatrice mais surtout la moitié d'entre eux étaient des premiers films : c'est justement ces nouveaux talents qui ont été récompensés par les différents jurys ! Mis à part le vétéran Prasanna Vithanage du Sri Lanka avec Children of the Sun (d'ailleurs curieusement oublié du palmarès), la plupart des films étaient des premières œuvres. Malgré la jeunesse de ces cinéastes, ces films ont, pour la plupart, raconter des histoires complexes de famille, centrées plutôt sur une génération bien plus âgée avec, comme personnage central, des mères (Hava, Maryam, Ayesha, Mariam) ou des grands-parents (Just like that, A Bedsore).

Un film cependant se distingue, avec un sujet plus moderne, l'escalade du harcèlement d'un écolier après la divulgation d'une vidéo accusatrice John Denver Trending. Il a d'ailleurs séduit le jury de la Critique et surtout le Prix du Public. Le jury des lycéens a préféré primer le film qui a eu le plus d'impact avec une réflexion sur la violence du terrorisme Saturday Afternoon, récompensé aussi par le jury NETPAC. Chacun des 9 films en compétition semblaient traversés par une même problématique : des gens qui se heurtent à des traditions du passé qu'il est de plus en plus difficile voir impossible à supporter (en particulier pour les femmes ou pour des personnes isolées).

Cyclo d'or pour Sharipa Urazbayeva, réalisatrice de Mariam

Le grand jury était présidé par Jay Jeon (directeur du Festival International du Film de Busan), avec Yuliya Kim (directrice du Festival International du Film d’Almaty, et productrice), Joji Alonso (productrice) et Ariel Schweitzer (critique) a créée la surprise pour la plus haute récompense le Cyclo d'or pour le film Mariam de la réalisatrice Sharipa Urazbayeva du Kazakhstan, en saluant ce "portrait poignant d’une femme en lutte pour la survie de sa famille dans une société traditionnelle".

Dans l'histoire des palmarès du FICA de Vesoul, seul un film du Kazakhstan avait reçu le Cyclo d'or. C'était en 2009 avec Un cadeau pour Staline de Roustem Abdrachev (il y avait eu en 2012 l'organisation d'un Regard sur le cinéma du Kazakh avec une vingtaine de films rares et la venue du réalisateur Ermek Chinarbev). C'est aussi rare que la récompense soit décernée à une réalisatrice, qui signe ici son premier film.

Ce Cyclo d'or pour Mariam est d'autant plus beau qu'il s'agit à priori de la production la plus fragile : l'actrice principale est non-professionnelle et joue en quelque sorte son propre rôle avec ses vrais enfants à l'image, le tournage a duré seulement 5 jours. Une femme se retrouve seule avec ses quatre enfants dans un village isolé avec des conditions de vie rudes, sans électricité ni eau courante : son mari ayant disparu, on lui a retiré le bétail qui était son gagne-pain, plus aucune ressource. Elle ne peut  prétendre à aucun versement d'allocation tant que le corps de son mari n'est pas retrouvé pour le certifier décédé. La seule solution a un prix et elle est illégale : avec certaines complicités, on peut reconnaître le corps d'un autre homme à la morgue pour débloquer le versement d'une allocation...

Mariam avait été repéré au Festival de Busan et sélectionné aussi à celui de Locarno. Il a maintenant triomphé à Vesoul :

Le Palmarès du FICA de Vesoul 2020 :

Cyclo d'Or : MARIAM de Sharipa Urazbayeva (Kazakhstan)

Grand prix du jury international : JUST LIKE THAT de Kislay (Inde)
Prix du jury international ex-aequo : JOHN DENVER TRENDING d’Arden Rod B. Condez (Philippines) & A BEDSORE de Shim Hye-jung (Corée) Prix NETPAC (Network for the promotion of asian cinema): SATURDAY AFTERNOON de Mostofa Sarwar Farooki (Bangladesh)

Prix de la critique : JOHN DENVER TRENDING d’Arden Rod B. Condez (Philippines)

Prix INALCO : A BEDSORE de Shim Hye-jung (Corée)
Coup de cœur INALCO : JUST LIKE THAT de Kislay (Inde)

Prix du public : JOHN DENVER TRENDING d’Arden Rod B. Condez (Philippines)

Prix du jury lycéen : SATURDAY AFTERNOON de Mostofa Sarwar Farooki (Bangladesh)

Prix du public du film documentaire : WE MUST CLOWN de Dima Al-Joundi (Liban)
Prix du jury jeune : A PUNK DAYDREAM de Jimmy Hendrickx & Kristian Van der Heyden (Belgique)
Prix des exploitants : A DARK DARK MAN d’Adilkhan Yerzhanov (Kazakhstan)

Vesoul 2020 : Regard sur le cinéma tibétain et hommage à Ronit Elkabetz

Posté par kristofy, le 11 février 2020

La ville de Vesoul, en Haute-Saône, devient comme chaque année le temps d'une large semaine une capitale asiatique : du 11 au 18 février le 26e Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul vous ouvre ses portes avec 84 films en provenance de 24 pays, dont 40 films inédits accompagnés d'autant d'invités. Comme toujours, on y met en lumière des cinématographies parfois raresn du continent asiatique au sens géographique, du proche à l'extrême orient : Afghanistan, Bangladesh, Chine, Corée, Inde, Indonésie, Iran, Japon, Kazakhstan, Liban, Myanmar, Philippines, Sri Lanka...

Cette année le FICA de Vesoul va mettre particulièrement à l'honneur le Tibet, avec pour la première fois une rétrospective sur ce cinéma: l'ensemble des films du réalisateur Pema Tseden (qui est d'ailleurs le seul a avoir gagné deux fois le Cyclo d'Or à Vesoul) et ceux de Sonthar Gyal, en plus de découvertes.

Les deux autres pays mis en avant seront Israël par le biais d'un hommage particulier à l'actrice Ronit Elkabetz, et le Japon avec notamment des films d'Akira Kurosawa et le meilleur de l'animation récente avec Les enfants du temps, Le mystères des pingouins, ou encore Millennium actress.

Une nouvelle fois le Festival sera riche de multiples sections, avec une compétition documentaires, une thématique "Liberté, Egalité, Créativité", qui sera l'occasion de voir ou revoir une vingtaine de classiques éclectiques tels Conte des chrysanthèmes tardifs de Mizoguchi Kenji (1939), Le Héros de Satyajit Ray (1966), Dunia de Jocelyne Saab (2005), Taxi Téhéran de Jafar Panahi (2015)...

Il y aura en avant-première Hotel by river de Hong Sang-so, le délicat et sensible Wet season d'Anthony Chen, ou le nouveau film de Pema Tseden, Balloon.

Enfin, la compétition internationale de 9 films (encore sans distributeur en France) sera arbitrée par le jury, présidé par Jay Jeon (directeur du Festival International du Film de Busan en Corée), lui-même entouré de Yuliya Kim (directrice du Festival International du Film d’Almaty au Kazakhstan, et productrice), Joji Alonso (productrice aux Philippines) et Ariel Schweitzer (critique, en Israël).

La compétition:

  • Hava, Maryam, Ayesha, de Sahraa Karimi (Afghanistan)
  • Saturday Afternoon, de Mostofa Sarwar Farooki (Bangladesh)
  • Changfeng Town, de Wang Jing (Chine)
  • A Bedsore, de Shim Hye-jung (Corée du sud)
  • Just Like That, de Kislay (Inde)
  • Among the Hills, de Mohammad Reza Keivanfar (Iran)
  • Mariam, de Sharipa Urazbayeva (Kazakhstan)
  • John Denver Trending, de Arden Roz Condez (Philippines)
  • Children of the Sun, de Prasanna Vithanage (Sri Lanka)

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26e Festival des Cinémas d'Asie de Vesoul

Du 11 février au 18 février 2019
Informations pratiques sur le site de la manifestation

Vesoul 2019: Pema Tseden reçoit un 2ème Cyclo d’Or avec « Jinpa »

Posté par kristofy, le 13 février 2019

Le 25ème Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul, a soufflé les bougies de cet anniversaire symbolique avec la surprise de la révélation de son palmarès : le Cyclo d'Or a été attribué au film Jinpa du réalisateur Pema Tseden. Durant l'histoire du FICA de Vesoul c'est en fait la première fois qu'un cinéaste reçoit pour la seconde fois la plus haute récompense : Pema Tseden avait déjà reçu un Cyclo d'Or en 2016 pour son film Tharlo, sorti  en salles en janvier 2018.

Pema Tseden est n réalisateur originaire du Tibet, et Tharlo tout comme Jinpa, avait été découverts lors du festival de Venise. Leur point commun est d'ailleurs l'utilisation de certains très longs plans fixes. Ici le chauffeur d'un camion sur une route déserte prend en stop un homme mystérieux qui dans un prochain village à l'intention de retrouver quelqu'un pour le tuer et se venger... La production de Jinpa a été soutenue par Wong Kar-wai. Outre le Cyclo d'Or Jinpa reçoit aussi le Prix de la Critique, et un coup de coeur du jury Inalco.

Comme chaque année les films sélectionnés en compétition représentent des premiers ou seconds films, des œuvres en première européenne pour la plupart, parfois en provenance de cinéphilies rarement distribués en salles en France.

Pour cette année 2019, on croisait Rona Azim's mother de Jamshid Mahmoudi qui était le film candidat de l'Afghanistan à l'Oscar du meilleur film étranger (Grand prix du jury et Prix Inalco), His lost name premier film de la réalisatrice japonaise Hirose Nanako (assistante depuis plusieurs années de Kore-eda Hirokazu, palme d'or à Cannes 2018), African violet de la réalisatrice iranienne Mona Zandi Haghighi dont le premier film avait été primé à Vesoul en 2007...

Le Palmarès du Fica de Vesoul 2019 :

Cyclo d'Or : JINPA de Pema Tseden (Chine)
Grand prix du jury international : RONA AZIM’S MOTHER de Jamshid Mahmoudi (Afghanistan)
Prix du jury international : SUB-ZERO WIND de Kim Yu-ri (Corée du Sud)

Prix NETPAC (Network for the promotion of asian cinema): A FAMILY TOUR de Ying Liang (Hong Kong, Taïwan, Singapour, Malaisie)
Prix de la critique : JINPA de Pema Tseden (Chine)
Prix INALCO : RONA AZIM’S MOTHER de Jamshid Mahmoudi (Afghanistan)
Coup de cœur INALCO : JINPA de Pema Tseden (Chine)
Prix du public du film de fiction ex-aequo : AFRICAN VIOLET de Mona Zandi Haghighi (Iran) et WAITING FOR SUNSET de Carlo Enciso Catu (Philippines)
Prix du jury lycéen : AFRICAN VIOLET de Mona Zandi Haghighi (Iran)
Prix du public du film documentaire : CHINE DU SUD : UNE ROUTE POUR XIAO JIANG de Jean-Michel Corillion (Chine, France)
Prix du jury jeune : OF FATHERS AND SONS de Talal Derki (Syrie)
Prix des exploitants : SIBEL de Çagla Zencirci et Guillaume Giovanetti (Turquie)

3 raisons d’aller voir Tharlo, le berger tibétain

Posté par kristofy, le 3 janvier 2018

Tharlo est un berger tibétain qui mène une existence paisible dans la montagne, éloigné des réalités du monde. A l’aune de ses quarante ans, il est convoqué par les autorités locales. Les nouvelles directives du gouvernement imposent la possession d’une carte d’identité pour tous les citoyens de la République Populaire de Chine. Pour la première fois, Tharlo descend en ville. Sa découverte du monde urbain, et sa rencontre avec une jeune coiffeuse, vont bouleverser son existence…

Tharlo est un film précieux : si officiellement c'est un film chinois, il s'agit surtout d'un cinéaste originaire du Tibet. La probabilité de découvrir une oeuvre portée par le souffle de là-bas est tellement rare qu'il faut se laisser emmener. Son réalisateur Pema Tseden a eu une préférence ici pour les plans fixes et le noir et blanc. Mais il ne faut surtout pas craindre quelque chose de trop contemplatif ou de trop aride. Au contraire ce style apporte à cette histoire une certaine universalité : c'est de toute beauté et ça renforce les scènes drôles (oui, il y a de l'humour). Tharlo est un personnage de candide venu de la campagne qui (nous) révèle malgré lui une certaine corruption de rapports de force (être fiché, avoir de l'argent...) des grandes villes. L'histoire est simple: un berger à la vie simple se rend en ville pour faire une carte d'identité qu'il n'a jamais eu et dont il n'a jamais eu besoin. Pour cela, il ira chez une photographe puis chez la coiffeuse qui l'emmènera pour la nuit au karaoké et vers des rêves d'ailleurs, surtout après être devenu riche de liasses de billets...

Tharlo est un film primé : il avait été sélectionné au Festival de Venise (section Orrizonti) à l'automne 2016 avant d'être en compétition début 2017 au Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul, et d'y être primé du Cyclo d'or. Le jury de Vesoul était alors - composé des cinéastes de Nan Triveni Achnas (Indonésie), Euthana Mukdasanit (Thaïlande), Mania Akbari (Iran), et du coréen Im Sang-soo - avait été impressionnés par "ce portrait d'une vie triviale solitaire, par ses qualités cinématographiques, son traitement délicat de la définition de l'identité à travers son personnage principal". Tharlo a reçu aussi diverses récompenses comme le grand prix au Tokyo Filmex, et diverses nominations aux Golden Horse Awards et aux Asia Pacific Screen Awards.

Tharlo est un film qui vous fera une forte impression : pour son réalisateur Pema Tseden « Tharlo est le reflet de l’actuelle génération de Tibétains. Cette histoire montre à quel point ils sont confus et désorientés. Le film a été tourné en noir et blanc comme si la rugosité des images traduisait la situation et l’ambiance de ce vaste territoire du Tibet et l’état d’esprit de Tharlo », c'est en fait son 6ème film. De lui Jia Zhangke a dit « grâce à Pema Tseden, je me sens moins seul »...

Vesoul 2016 : 3 beaux films et un palmarès

Posté par kristofy, le 12 février 2016

tharlo

Ce 22e Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul a eu le bonheur de compter avec la présence du réalisateur coréen Im Sang-soo dans le rôle de président du jury de la compétition, il était entouré de la réalisatrice et productrice Nan Triveni Achnas (Indonésie), du réalisateur Euthana Mukdasanit (Thaïlande) et de la réalisatrice Mania Akbari (Iran). Après la projection des deux premiers films, Im Sang-soo avait d’ailleurs confié en aparté avoir déjà vu deux belles surprises. 30000 spectateurs dans les salles ont pu ainsi découvrir une compétition éclectique.

Le jury a salué la diversité des neuf films en compétition. Avec les différents jurys, on donc découvert Tharlo de Pema Tseden (Chine mais le réalisateur est tibétain, sélectionné au dernier festival de Venise), le réalisateur Cho Chang-ho venu avec Another way (Corée du Sud), le réalisateur Yerlan Nurmukhambetov avec Walnut tree (Kazakhstan), l’actrice Shahana Goswami avec la réalisatrice Rubaiyat Hossain pour Under Construction (Bangladesh, mais la cinéaste a été formée aux Etats-Unis), Back to the north de Liu Hao (Chine, réalisateur déjà récompensé d’un Cyclo d’or à Vesoul en 2011 pour Addicted to love), La nuit avec l’actrice Vildan Atasever (Turquie), Being good de la réalisatrice O Mipo (Japon), le réalisateur Lawrence Fajardo venu pour Invisible (Philippines, mais tourné au Japon), et Wednesday May 9 de Vahid Jalilvand (Iran), soit une multitude de visages d’Asie.

Un film chinois doublement couronné

C’est donc Tharlo qui a remporté le Cyclo d’or (et le prix Inalco), le jury ayant été impressionné par ce “portrait d’une vie triviale solitaire, par ses qualités cinématographiques, son traitement délicat de la définition de l'identité à travers son personnage principal”. Le film est construit avec une suite de longs plans fixes en noir et blanc : un berger à la vie simple se rend en ville pour faire une carte d’identité qu’il n’a jamais eu et dont il n’a jamais eu besoin. Pour cela, il ira chez une photographe puis chez la coiffeuse qui l’emmènera pour la nuit au karaoké et vers des rêves d’ailleurs. Il va alors vendre les moutons dont il n’était pas propriétaire et, riche de liasses de billets, il s’enfuira avec la coiffeuse qui va lui changer sa tête…

Un film japonais triplement plébiscité

L’autre film qui a été très apprécié est le japonais Being Good (Kimi wa liko) qui a reçu le prix du public, le prix de la critique et le prix du jury lycéen. il s'agit d'une gentille histoire sur l’enfance avec un instituteur débutant face à un petit garçon délaissé par son père, avec une maman violente avec sa petite fille, et une vieille dame qui se prend d’affection pour un garçon attardé mental… « Les gens qui suffoquent dans leur famille peuvent être sauvés par quelqu’un qui n’est pas de la « famille ». Et quand cela arrive, ils peuvent avoir de la compassion à nouveau pour leur « famille »» explique le cinéaste.

Le Grand prix du jury international a été décerné à Wednesday May 9.

Deux films marquants

De notre côté, on pariera sur deux films qui feront parler d'eux à l’avenir : Invisible et Under Construction.

Invisible (Imbisibol) de Lawrence Fajardo a reçu le prix Netpac (network for the promotion of asian cinema) pour “sa belle structure narrative culminant dans une tragédie finale, qui imprime le message du film avec une force extraordinaire”, le film raconte en cinq actes le quotidien de différents travailleurs philippins émigrés au Japon (les overseas workers). Un homme se fait arrêté le jour de son anniversaire, un autre se prostitue en plus de son travail de nettoyage de toilettes, une femme loue des appartements à des compatriotes, un accident dramatique sur un chantier, la douleur de recevoir des nouvelles de sa famille que par courrier après être parti depuis trop longtemps… Film choral avec différentes histoires dont les personnages vont être amenés à se croiser, Invisible évoque la question des travailleurs philippins qui ont émigrés dans d’autres contrées (au Japon dans le film, en réalité la 2ème destination choisie sont les chantiers au Moyen-Orient et les emplois de domestiques aux Etats-Unis..) dans l’espoir de subvenir aux besoins de leur famille restée au pays. Ce film Invisible (par ailleurs co-produit par Brillante Mendoza) depuis son passage au festival de Toronto fait de son réalisateur Lawrence Fajardo un nouveau talent à suivre.

L’autre favori était Under Construction de la réalisatrice Rubaiyat Hossain, avec l’actrice Shahana Goswami. Il a justement reçu le prix du jury international (troisième récompense la plus importante derrière le Cyclo d’or) et le prix Emile Guimet (et mention spéciale de la critique) pour “un film téméraire qui brise des tabous, réalisé par une femme dans un pays ou les femmes ne sont pas réalisatrices, dans une ville en changements le portrait tout en sensibilité d’une femme qui lutte pour l’affirmation de son identité”. On y découvre une femme à un possible tournant de sa vie. Actrice de théâtre, elle pourrait être remplacée par une collègue plus jeune, tandis qu’elle hésite à reprendre en main la mise en scène d’une pièce : sa mère attachée aux traditions musulmanes désapprouve son métier pas 'respectable’, son riche mari auquel elle est marié depuis plusieurs années lui demande enfin un enfant, mais elle ne se sent pas prête ni pour être enceinte, ni pour arrêter le théâtre. En même temps son amie domestique tombe elle enceinte d’une liaison qui va l’obliger à se marier et à aller travailler dans une fabrique de vêtements là où des bâtiments s’écroulent… La réalisatrice avance des idées féministes par petites touches (prendre son indépendance face à la religion, au mariage…)

Invisible de Lawrence Fajardo tout comme Under Construction de Rubaiyat Hossain se rejoignent d'ailleurs avec une même ambition de faire s’attacher à des personnages émouvants tout en racontant des problématique de société d'un pays...

Une reprise des films primés aura lieu à l'auditorium du Musée des Arts Asiatiques Guimet de Paris le 1er avril 2016 et une autre à l'auditorium de l'INALCO en octobre 2016.

Le palmarès complet :

- Cyclo d'Or : "Tharlo" de Pema Tseden
- Grand prix du Jury International : "Wednesday, May 9" de Vahid Jalilvand
- Prix du Jury International : "Under Construction" de Rubaiyat Hossain
- Mention spéciale du Jury International : "Walnut Tree" de Yerlan Nurmukhambetov
- Prix du Jury NETPAC : "Invisible" de Lawrence Fajardo et "Wednesday, may 9" de Vahid Jalilvand
- Prix de la critique : "Being Good" d'O Mipo.
- Mentions spéciales de la critique : "Under Construction" de Rubaiyat Hossain et "Walnut Tree" de Yerlan Nurmukhambetov
- Prix Emile Guimet : "Under Construction" de Rubaiyat Hossain
- Coup de cœur du Jury Guimet : "Back to the North" de Liu Hao
- Prix INALCO : "Tharlo" de Pema Tseden
- Coup de coeur INALCO : "Being Good" O Mipo
- Prix du public du film de fiction : "Being Good" d'O Mipo
- Prix du Jury Lycéen : "Being Good" d'O Mipo
- Prix du Public du film documentaire : "De Hiroshima à Fukushima" de Marc Petitjean
- Prix du Jury Jeune : "Tashi & The Monk" d'Andrew Hinton & Johnny Burke

Venise 2015 complète sa sélection

Posté par MpM, le 7 août 2015

Venise 2015A moins d'un mois de l'ouverture du 72e Festival de Venise, qui se tiendra du 2 au 12 septembre, de nombreux titres continuent de rejoindre les films déjà connus.

Le film d'ouverture de la section Orizzonti vient ainsi d'être annoncé. Il s'agit de Un Monstruo de mil cabezas (A Monster with a Thousand Heads) du Mexicain Rodrigo Plá qui est adapté du livre éponyme de Laura Santullo sur une femme désespérée par l’inaction de son assurance et qui va être obligée d’en venir à des moyens extrêmes pour financer le traitement du cancer de son mari.

La sélection Orrizonti s'est également enrichie d'un long métrage tibétain, Tharlo de Pema Tseden qui suit un jeune berger tibétain ayant pour ambition d’être au service des gens.

Enfin, I ricordi del fiume de Gianluca et Massimiliano De Serio, un documentaire italien sur un bidonville près de Turin, sera quant à lui présenté en sélection officielle hors compétition.