Venise 2017 : William Friedkin et Paul Schrader en crise de Foi

Posté par kristofy, le 31 août 2017

Pour sa première journée, la 74e Mostra de Venise présente deux films qui interrogent la religion : en compétition First Reformed de Paul Schrader ou avoir vraiment la Foi en Dieu devient incompatible avec la folie des hommes ; et hors-compétition The Devil and Father Amorth de William Friedkin où nos croyances sont défiées, qu'on soit d'un côté ou de l'autre... Dans les deux films la religion est soit un boulier soit une béquille face aux faiblesses de l'Homme, mais il s'agit surtout des deux dernières oeuvres de cinéastes cultes...

First Reformed, de Paul Schrader :
Ethan Hawke est un homme d’église qui décide d’écrire un journal intime pendant un an. Il voudra détruire cette forme très personnelle de prière, peut-être parce qu’il sait que sa santé n’est plus bonne. Un jour à l’église Amanda Seyfried, enceinte, lui demande de passer à la maison pour parler avec son mari : un activiste écologiste très pessimiste à propos de l’avenir et des conséquences des changements climatiques, au point de ne pas vraiment souhaiter qu’un enfant naisse pour grandir sans espoir… Le révérend essaie de le réconforter "le courage est la solution au désespoir, la raison n’apporte pas de solution". Le film est composé jusque là uniquement de plans fixes avec deux personnages qui dialoguent ou avec seulement une voix-off. On se demande où tout cela va conduire mais il faut attendre la suite... First Reformed est le dernier film écrit et réalisé par Paul Schrader, célèbre comme scénariste (Raging BullLa dernière tentation du ChristÀ tombeau ouvert, et surtout Taxi driver) et en tant que réalisateur de films poisseux comme Hardcore où l’année dernière Dog eat dog (à Cannes). On s'attend à ce que First Reformed, surtout centré sur la religion dans sa première partie, glisse vers une forme de violence, et c’est ce qui va suivre. Plusieurs éléments vont conduire le révérend de l’église vers une réflexion extrême, la forme du film même évolue avec des plans en mouvements (dont une séquence mystique) et peu à peu c’est un plan mortel qui se met en place… Si les voies de Dieu sont impénétrables, le révérend va vouloir provoquer un choc parmi sa communauté. Pour Paul Schrader : "Une éducation catholique sous-entend que l'on peut être lavé de ses pêchés dans le sang : c'est intéressant ce concept pour un film. L'humanité est certainement un problème pour la planète, peut-être en particulier ma génération." Même si le festival de Venise ne fait que commencer, Ethan Hawke est déjà parmi les favoris à un prix d'interprétation.

The Devil and Father Amorth, de William Friedkin :
William Friedkin réalise là un documentaire sur la pratique de l’exorcisme, une quarantaine d’années après son grand succès  L'Exorciste qui était l’adaptation d’un roman inspiré d’un possible cas en 1949... Lui-même n’avait jamais assisté à ce rituel, et comme il paraît qu’environ 500000 personnes y ont recours chaque année en Italie, William Friedkin y est allé : pour filmer un exorcisme pratiqué par le prêtre Amorth sur une dame qui a fait appel à lui, pour la neuvième fois ! La femme bien que maintenue par des proches s’agite vivement avec un ‘jamais’ d’une voix gutturale quand le prêtre avec sa prière demande à Satan de quitter ce corps... La séquence est longue, trop longue et pénible, et on se demande si Friedkin a l’intention de convertir ses spectateurs avant que sa démarche ne trouve son intérêt dans la seconde moitié de son documentaire : il montre les images filmées de cet exorcisme à différents médecins (neurologue, psychiatre) pour leur demander leur avis : si une tumeur pourrait expliquer un état de délirium, si une éducation religieuse incite à croire qu’on puisse être victime d’une possession démoniaque… William Friedkin a directement interrogé la salle : "C'est tellement facile d'être sceptique. Est-ce que quelqu'un ici est certain qu'il n'y a pas de Dieu ?"
Un bien étrange documentaire dont le contenu autant que la durée (68 minutes) en ferait un élément de bonus pour une nouvelle édition vidéo de L'Exorciste...

Cannes 2016: Nos retrouvailles avec Nicolas Cage

Posté par vincy, le 20 mai 2016

Il est loin le temps où Nicolas Cage nous emballait en amoureux passionné dans Sailor & Lula (Palme d'or), enchaînant les rôles romantiques et un peu déjantés chez tonton Coppola (Peggy Sue s'est mariée), les Coen (Arizona Junior), Norman Jewison (Eclair de lune), Mike Figgis (Leaving Las Vegas). Il y a 20 ans, l'acteur égérie d'un certain cinéma américain, pas forcément propre sur lui, a fait le choix de se compromettre dans des blockbusters hollywoodiens. Sexe, drogue, belle bagnole. La tentation du fric était grande. Le flambeur Cage, pas forcément belle gueule, mais acteur attachant a donc musclé ses biceps pour des films d'action de Michael Bay, Simon West, John Woo (le bon Volte/Face), Brian De Palma (le bon Snake Eyes), Joel Schumacher, Dominic Sena, Ridley Scott... On est évidemment un peu injuste car l'acteur a quand même fait un tour de New York chez Martin Scorsese et s'est dédoublé chez Spike Jonze. Mais depuis les années 2000, les navets deviennent plus importants que les bijoux (Lord of War faisant exception en 2005). De Benjamin Gates au remake de Bad Lieutenant, de Bangkok Dangerous à World Trade Center en passant par L'Apprenti sorcier et un nombre incroyable de séries B de type Ghost Rider, on l'avait perdu.

De temps en temps, il revient avec un beau rôle (Joe, de David Gordon Green, 2013). Et le plus souvent ses films sortent directement en vidé. pas un seul hit depuis 2007. Pas un seul démarrage honnête depuis 2012. Pourtant, ce lecteur de Jules Verne et de comics assume ses choix cinématographiques -) SF, fantasy, horreur, polars...-, ces "merdes" et n'a jamais arrêté de tourner. Il a même réussi à trouver quelques beaux personnages à défendre. On le croit toujours à terre et on salue à chaque fois une forme de rédemption. "Je me demande si le tournant n'a pas été Ghost Rider, un motard vendant son âme au diable. Une merde encore, qui avait le mérite de dire quelque chose de moi, avant que je traverse, plus tard, ma propre filmographie en fantôme" expliquait-il dans une interview il y a deux ans.

Consommateur compulsif qui s'achetait yachts, châteaux et belles voitures, collectionneur dans l'âme, il a été ruiné par le fisc américain. De quoi là aussi produire un déclic. Il a cherché de nouveaux projets, des films dignes. Le voici en clôture de la Quinzaine des réalisateurs avec Dog Eat Dog de Paul Schrader. Un film noir qui le remet dans la lumière avant qu'on ne le (re)découvre dans Snowden d'Oliver Stone et quelques autres films divers (comédie, guerre, thriller). A 52 ans, Nicolas Cage se dit qu'il a encore quelques bons films à faire, entre deux "merdes".

Cannes 2016: la sélection « poids lourd » de la Quinzaine des réalisateurs

Posté par vincy, le 19 avril 2016

La sélection d'Edouard Waintrop, soit 18 longs métrages et 12 courts métrages, compense toutes les absences inattendues de la Sélection officielle. Même si Bonello n'y est toujours pas, ni Zlotowski, on note quand même de gros poids lourds avec la présence de deux documentaristes réputés - Sébastien Lifshitz, César pour Les invisibles, et Laure Poitras, Oscar pour Citizenfour. A cela s'ajoute l'un des films d'animation français les plus attendus, Ma vie de courgette. Et donc quelques noms souvent habitués des grands festivals comme Marco Bellocchio, Paul Shrader, Alejandro Jodorowski; Joachim Lafosse; Pablo Larrain, Kim Nguyen ou encore Paolo Virzi. L'Italie, quasiment absente de la sélection officielle, trouve à la Quinzaine de quoi se faire une place au soleil dans cette édition cannoise avec trois cinéastes. Tout comme l'Inde avec le retour du réalisateur d'Ugly, Anurag Kashyap, ou le Canada avec deux réalisateurs. Notons aussi que la section parallèle présentera le film posthume de Solveig Anspach, L'effet aquatique. On soulignera aussi la présence de vedettes comme Gérard Depardieu, Bérénice Bejo (dans deux films), Nicolas Cage, Valeria Bruni-Tedeschi, Gael Garcia Bernal, Sophie Nélisse ou encore Dane DeHaan.

Ouverture: Fai bei sogni (fais de beaux rêves) de Marco Bellocchio

Clôture: Dog eat dog de Paul Schrader

Sélection

Divines de Uda Benyamina - 1er film

L’économie du couple de Joachim Lafosse

L’effet aquatique de Solveig Anspach

Fiore de Claudio Giovannesi

La pazza gioia (Like crazy) de Paolo Virzi

Ma vie de courgette de Claude Barras - 1er film (animation)

Mean dreams de Nathan Morlando

Mercenaire de Sacha Wolff  - 1er film

Neruda de Pablo Larrain

Poesía sin fin (endless poesy) de Alejandro Jodorowsky

Raman raghav 2,0 (Psycho Raman) de Anurag Kashyap

Risk de Laura Poitras (documentaire)

Tour de France de Rachid Djaidani

Two lovers and a bear de Kim Nguyen

Les vies de Thérèse de Sébastien Lifshitz (documentaire)

Wolf and sheep de Sadat Shahrbanoo - 1er film

Nicolas Winding Refn, Paul Schrader et Nicolas Cage se rebellent contre leur film

Posté par vincy, le 21 octobre 2014

nicolas cage nicolas wending refn paul schraderDying of the Light avait tout pour attiser la curiosité. Le film devait sortir aux Etats-Unis le 5 décembre prochain. Ce n'est même plus certain.

Ecrit et réalisé par Paul Schrader (scénariste de Taxi Driver et Raging Bull), interprété par Nicolas Cage, Anton Yelchin et Irène Jacob, produit, entre autres par Nicolas Winding Refn (Drive), le polar partait sous les meilleures auspices.

Mais voilà: chacun se rebelle. Le réalisateur, le coproducteur, les acteurs. Ils se sont photographiés vêtus d'un tee-shirt noir où est inscrit la fameuse clause de non-dénigrement inclue dans leurs contrats : "Aucune publicité diffusée par l’artiste ou le bailleur, qu’elle soit de nature personnelle ou autre, ne contiendra de mentions dénigrant la société, le film, ou les services des artistes ou d’autres personnes liées au film." La photo est sur leurs murs Facebook. "Nous avons perdu la bataille" explique Schrader. "Un film que j'ai écris et réalisé m'a été retiré".

Ils signifient ainsi leur désapprobation à propos de la version qui sera montrée aux spectateurs.

En effet, sans l'accord de Schrader, les producteurs ont remonté le film. Dès le premier montage, les différents financiers ont mis leur grain de sel, en soumettant de nombreuses notes visant à modifier l'oeuvre, souhaitant un film plus en phase avec son genre (le thriller d'action). Schrader a remonté légèrement son film mais les producteurs, propriétaires des "bobines", toujours insatisfaits, ont décidé de sortir le film avec un nouveau montage, un nouveau mixage et une nouvelle bande son.

Dans Variety, les deux parties s'opposent. Todd Williams (Over Under Media) explique qu'il n'y a pas "vraiment de drame" dans l'affaire. Alors que Paul Schrader parle de "fait accompli". "Ils m'ont finalement montré leur film, après avoir commencé la post-production".

Depuis, l'affaire fait boule de neige. Ni le réalisateur, ni les acteurs ne défendront ce film. Comme le budget est modeste, le risque financier est faible.

A l'origine, Nicolas Winding Refn voulait réaliser le film, avec Harrison Ford dans le rôle principal. Divergences artistiques. Le réalisateur danois a accepté le strapontin de producteur exécutif pour aider Paul Schrader a réalisé lui-même son scénario. "J'ai toujours senti que Paul comme réalisateur de ce film était le bon choix" explique Refn. "C'est un beau scénario, et c'est le cinéaste idéal pour le faire".

The Dying of the Light raconte la traque d’un terroriste, Banir, par un agent de la CIA, Evan Lake, qui, souffrant de démence fronto-temporale, venait d'être mis à la retraite.

LionsGate, le distributeur, refuse de confirmer une date de sortie.

Venise 2013 : Paul Schrader présidera le jury de la section Orizzonti

Posté par vincy, le 10 juin 2013

the canyons lindsay lohan james deenLa 70e Mostra de Venise a choisi Paul Schrader pour présider le jury de la section Orizzonti. Scénariste de Taxi Driver d'Obsession et de Raging Bull, réalisateur d'American Gigolo et d'Affliction, Schrader présentera également son prochain film, The Canyons (photo), sélectionné hors-compétition au Festival.

Le film, portrait contemporain de Los Angeles et de la jeunesse hollywoodienne, a été écrit par le romancier Bret Easton Ellis, et met en vedette Lindsay Lohan, le cinéaste Gus Van Sant et la star du porno James Deen.

Pour Alberto Barbera, directeur du festival, "Paul Schrader a continuellement exercé son intelligence au service du cinéma et de ses besoins constants de renouvellement". La section Orizzonti, qui décerne 5 prix, présentera 20 films (au maximum) principalement réservés aux nouveaux talents ou aux films expérimentant de nouvelles esthétiques ou des narration innovantes.

Le 70e festival de Venise se déroulera du 28 août au 7 septembre. Bernardo Bertolucci présidera le jury de la compétition (lire notre actualité).

La pornstar James Deen et la palme d’or Gus Van Sant dans un thriller sulfureux de Schrader

Posté par matthieu, le 7 août 2012

Changement de registre pour la célèbre pornstar du site Brazzers (adeptes de youporn et autres sites X, vous savez de quoi nous parlons). James Deen, de son vrai nom Bryan Matthew Sevilla, 26 ans, est le jeune voisin qu'on aimerait tous avoir. Véritable vedette du monde pornographique, le jeune homme a joué dans plus de 1300 films et parodies (Batman, Ghostbusters, Dallas, Scream, Superman, Simpsons, ...). Il a même réalisé 11 films X. Cela fait huit ans qu'il tourne, 14 ans qu'il a perdu sa virginité et a déjà remporté six prix équivalents aux Oscars dans son genre. 1m73, moins de 70 kilos, les yeux bleus, le sourire coquin, le corps svelte (rien à voir avec les mecs testostéronisés) et l'érection facile (23 centimètres), Deen n'a pas de pudeur (il suffit d'aller voir sur son blog) et satisfait tous vos fantasmes (à croire qu'il achète tous les mots clés de Google).

Mais cette fois, trêve de phallus, car le jeune mâle va changer de registre. Après le 7e ciel (façon 7e dard), voici le 7e art. Il vient d'être engagé pour son premier vrai rôle au cinéma dans The Canyons, un thriller américain indépendant centré sur la vie de cinq adultes en quête de pouvoir, d'amour, de sexe et de succès. C'est écrit par Bret Easton Ellis (American Psycho, Les Lois de l'attraction) ; c'est d'ailleurs Ellis qui avait suggéré son nom aux décideurs. Si l'on se doute aisément de la catégorie pouvant être ciblée par son futur personnage et qui pourrait mettre en avant ses atouts et charmes physiques (en tout cas les premières images du tournage le montrent au lit ou en slip), l'acteur pourrait surprendre dans un rôle finalement moins déshabillé et plus intense que d'habitude.

Lindsay Lohan (Freaky Friday, Bobby, Machete) tient le rôle principal, aux côtés de Nolan Gerard Funk (habitué des séries B en tout genre) et Amanda Brooks. Lohan a remplacé Michelle Wade Byrd, initialement prévue, mais refusant de jouer avec l'acteur porno, qui pourtant a impressionné producteurs, réalisateur et scénariste lors de ses essais.

La surprise est qu'on retrouvera parmi les personnages centraux le réalisateur Gus Van Sant, alias le psychothérapeute Dr. Campbell. Palme d'or (Elephant), Prix de la critique à Toronto (My Own Private Idaho), Prix du 60e anniversaire de Cannes (Paranoid Park), nommé à l'Oscar du meilleur réalisateur deux fois (Good Will Hunting, Milk), Van Sant (qui achève actuellement son nouveau film, Promised Land), a joué les silhouettes dans certains de ses films : un homme au comptoir de l'hôtel dans My Own Private Idaho, un homme parlant à un autre dans Psycho, un assistant bibliothécaire dans A la rencontre de Forrester, ... Il joua même son propre rôle dans un épisode de la série Entourage. C'est la première fois que Van Sant joue réellement au cinéma, qui plus est pour un autre cinéaste.

Mais le cinéaste justement n'est pas n'importe qui. Paul Schrader est l'auteur de scénarios comme Taxi Driver, Raging Bull, Mosquito Coast, La dernière tentation du Christ, City Hall et A tombeau ouvert. Par ailleurs il a réalisé 17 films parmi lesquels American Gigolo, Mishimia - une vie en quatre chapitres, Light Sleeper, Touch, Affliction, Auto Focus et en 2008 Adam resurrected. Pas que des chefs d'oeuvres, beaucoup de films noirs, un peu théâtraux dans leur forme. Sélectionné deux fois à Berlin, deux fois à cannes, nommé comme meilleur réalisateur deux fois aux Independant Spirit Awards; il est considéré davantage comme un grand scénariste que comme un grand cinéaste.

The Canyons est un film noir qui prend place dans un Los Angeles actuel où les obsessions sexuelles et les ambitions se croisent et se mélangent. De ces liaisons dangereuses émergeront la trahison, la paranoïa, la manipulation et finalement la violence et le crime. Le film doit sortir l'an prochain. On peut suivre le tournage, qui a lieu actuellement, sur la page Facebook du film.