Bouzkachi, le chant des steppes: un conte éclaté

Posté par geoffroy, le 23 février 2009

bouzkachiL'histoire: Ali et Oulougbey sont amoureux de la jeune Mohabat. Ne sachant lequel choisir, elle décide d'épouser le vainqueur du concours de Bouzkachi qui aura lieu à Boukhara. Les deux prétendants vont donc traverser montagnes et steppes pour s'affronter lors d'un combat équestre, plein de cris et de poussière. Tout au long du film, un poète et un peintre brodent, à leur manière, le fil conducteur de ce conte mystique des steppes de l'Asie Centrale.

Notre avis: Bouzkachi, le chant des steppes est un premier film étonnant. L’histoire, narrée dans la tradition orale du conte héroïque, survole avec allégresse les steppes d’Asie Centrale au côté de deux champions de Bouzkachi amoureux de la même femme, Mohabat. Promise à celui qui sortira vainqueur du tournoi de Bouzkachi où 300 cavaliers venus de différentes tribus se disputent la carcasse d’un jeune bélier, nous suivons tout à tour les deux prétendants cheminer vers Boukhara, ville où, non loin de là, se déroule le tournoi. Si le récit du réalisateur Jacques Debs est cohérent dans son cheminement, sa finalité descriptive et son esprit onirique, il s’alourdit inutilement par la juxtaposition de principes narratifs nombreux – mots, parole, dessins, musique – et parfois mal imbriqués.

Cette dispersion narrative s’explique, en partie, par le ton mi-documentaire, mi-fictionnel du film, comme si le cinéaste avait voulu nous emmener au-delà du réel, vers une contrée insaisissable garante des traditions ancestrales. Jacques Debs ne lésine pas sur les symboles et l’onirisme du grand poète farsi, Hâfez, répond ainsi aux dessins du peintre lituano-polonais, Stasys pour que la figuration s’élève dans un temps où passé, présent et futur s’imbriquent. Malgré l’effort du cinéaste, l’histoire de cette passion sous fond de jeu antique perpétué depuis des générations, n’arrive pour ainsi dire jamais à humaniser totalement les êtres dans leur destin de héros en communion avec la nature. Comme désincarnés, ils errent à la recherche de l’amour et s’enlisent dans une quête sans fin. Le film, lui, enchaîne dans un faux rythme un peu lassant, les passages documentaires parfois saisissants et les parties fictionnelles pas toujours utiles au propos du cinéaste.

Que reste t-il, alors ? Une langue belle et poétique, des traditions valorisées, des paysages somptueux, des visages singuliers et le tournoi de Bouzkachi à la mise en scène inspirée. Etonnant car dépaysant, Bouzkachi, le chant des steppes aurait sans doute gagné à moins de dispersion pour faire ressortir cette communion entre le terrestre et le céleste.