Cannes 2018 : une 57e sélection européenne et prometteuse pour la Semaine de la critique

Posté par MpM, le 16 avril 2018

Les deux comités de sélection de la Semaine de la Critique, sous la houlette du délégué général Charles Tesson, ont retenu cette année 13 courts métrages (sur 1500 visionnés) et 11 premiers et deuxièmes longs métrages (sur 1100) qui composeront le programme de cette 57e édition. Une édition qui s'annonce particulièrement tournée vers l'Europe, avec 10 longs métrages et 10 courts produits ou co-produits par un pays européen, dont la Grèce, la Finlande, le Portugal, l'Islande, la Pologne, la Suisse ou encore la Hongrie.

En compétition, on retrouve 5 premiers films, dont le très attendu documentaire animé Chris the Swiss dont nous vous parlions à l'occasion du dernier Cartoon Movie. La réalisatrice Anja Kofmel y explore les circonstances (obscures) dans lesquelles son cousin journaliste est mort pendant la guerre en Yougoslavie. On est également curieux de découvrir le premier film de Gabriel Abrantes (co-réalisé avec Daniel Schmidt), que l'on avait remarqué avec ses courts métrages, et notamment le programme sorti en salles sous le titre Pan pleure pas. En compétition, deux autres réalisateurs sont particulièrement attendus : Benedikt Erlingsson, dont on avait tant aimé Of horses and men, et Agnieszka Smoczynska, qui avait impressionné avec The lure.

Côté séances spéciales, on retrouve le premier film de Paul Dano en ouverture et le deuxième d'Alex Lutz en clôture, mais aussi le deuxième long métrage de Guillaume Senez (Keeper) et une séance de courts métrages qui réunit des auteurs déjà très remarqués puisqu'on y retrouve Bertrand Mandico (quelques semaines seulement après son premier long Les garçons sauvages), Yorgos Zois (Casus Belli, Interruption) et Boris Labbé dont le précédent film Orogenesis figurait dans nos dix courts métrages français ayant marqué l'année.

En compétition courts métrages, on peut noter la présence de la réalisatrice grecque Jacqueline Lentzou (sélectionnée à Berlin en 2017 avec Hiwa, dont nous vous parlions ici), de Mikko Myllylahti, scénariste d'Olli Mäki, récompensé à Cannes en 2016, ou encore de l'actrice Anaïs Demoustier, à l'affiche de Pauline asservie de Charline Bourgeois-Tacquet.

Compétition longs métrages
Chris the Swiss d'Anja Kofmel
Diamantino de Gabriel Abrantes & Daniel Schmidt
Egy Nap (Un jour) de Zsófia Szilágyi
Fuga (Fugue) de Agnieszka Smoczynska
Woman at War de Benedikt Erlingsson
Sauvage de Camille Vidal-Naquet
Sir de Rohena Gera

Compétition courts métrages
Amor, Avenidas Novas de Duarte Coimbra
Hector Malot - The Last Day Of The Year de Jacqueline Lentzou
Exemplary citizen de Kim Cheol-Hwi
Pauline asservie de Charline Bourgeois-Tacquet
La Persistente de Camille Lugan
Rapaz de Felipe Gálvez
Schächer de Flurin Giger
Tiikeri de Mikko Myllylahti
Un jour de mariage de Elias Belkeddar
Ya normalniy de Michael Borodin

Film d’Ouverture
Wildlife de Paul Dano

Séances spéciales longs métrages
Nos Batailles de Guillaume Senez
Shéhérazade de Jean-Bernard Marlin

Séance spéciale courts métrages
La Chute de Boris Labbé
Third Kind de Yorgos Zois
Ultra Pulpe de Bertrand Mandico

Film de Clôture
Guy de Alex Lutz

2017 dans le rétro : 10 courts métrages français qui ont marqué l’année

Posté par MpM, le 24 décembre 2017

Après avoir fait un tour d’horizon des films plébiscités en festival, il est temps de se mouiller en proposant une liste forcément subjective des autres courts métrages qu’il fallait absolument voir cette année. Pour commencer, voici donc les dix (autres) films français qui ont marqué 2017 !

After school knife fight de Caroline Poggi et Jonathan Vinel


Chronique adolescente stylisée et élégante, After school knife fight est un film au romantisme fou qui explore ce moment bref où notre monde intime est sur le point de basculer. Pour la bande d'amis au centre du récit, c'est déjà la fin d'une époque, dont chacun a conscience à sa façon. Caroline Poggi et Jonathan Vinel captent à la fois l'exaltation radicale de la jeunesse, et la nostalgie anticipée de ce qui n'est pas encore passé.

Les bigorneaux d'Alice Vial


Magnifique portrait de femme, entre rires et larmes, dérision et réalité sombre, Les bigorneaux est un film doux amer sur la nécessité de prendre son envol. On est désarmé par la sensibilité de la narration, qui nous cueille par surprise, et évoque avec pudeur la question de la féminité comme des liens filiaux.

Chose mentale de William Laboury


En 2016, William Laboury était en compétition à Clermont Ferrand avec Fais le mort et Hotaru, qui ont tous deux remportés un prix. Cette année, il propose une œuvre complexe et envoûtante qui transcende en même temps le motif du huis clos inquiétant, celui du glissement vers le fantastique et les codes de la comédie romantique. Coup de foudre.

Des hommes à la mer de Lorris Coulon



L’un des plus beaux films français vus cette année se déroule dans un bateau de pêche où cohabitent quelques marins venus d’horizons différents. Le hasard fait basculer ce qui ressemblait à un regard quasi documentaire sur un univers âpre et rude vers un film de piraterie qui fait l’éloge des chemins de traverse et de la liberté. C’est une contagieuse invitation au voyage et au lâcher-prise que lancent les personnages au spectateur. Non seulement Lorris Coulon propose un film singulier et envoûtant d’une grande beauté formelle, mais ce faisant il aborde à sa manière les réalités sociales, économiques et humaines d’un monde ultra-globalisé.

Diamenteurs de Chloé Mazlo

Chloé Mazlo (César du meilleur court métrage en 2015 avec Les petits cailloux) est de retour avec une oeuvre hybride captivante qui utilise un matériau intime pour raconter un conte apparemment anodin aux accents pourtant universels. Il s'agit en effet de dresser un parallèle sidérant entre le processus qui transforme un diamant brut en pierre ultra formatée, et celui qui fait de même avec les êtres humains. Avec le ton décalé qui est le sien, puisant dans ses images familiales, la réalisatrice nous livre du monde une vision singulière qui est d'autant plus sidérante qu'elle est aussi cruelle que juste.

Les enfants partent à l'aube de Manon Coubia

Une oeuvre forte et puissante, tout en retenue, qui porte un regard sensible sur la relation complexe, ténue et intime, entre une mère et son fils devenu chasseur alpin, peut-être sur le point de partir au combat. A travers cette dernière journée qu'ils passent ensemble, on devine l'inévitable douleur de la séparation à laquelle doit s'ajouter l'angoisse de la disparition.

(Fool time) job de Gilles Cuvelier

Gilles Cuvelier propose une fable clinique et désespérée sur un homme contraint d'accepter un travail terrifiant pour nourrir sa famille. Sa mise en scène ultra précise et son sens aigu de l'ellipse permettent d'avancer implacablement vers un trouble de plus en plus palpable. L'épure du récit, le choix du noir et blanc et l'actualité brûlante du contexte social du film lui confèrent une dimension quasi prophétique qui n'en est que plus glaçante.

Hédi et Sarah de Yohan Manca


À quel moment une histoire d’amour bascule-t-elle dans l’obsession malsaine ? Construit en deux volets, qui adoptent chacun le point de vue d’un des personnages, le film explore le mécanisme et les conséquences de ce qui, d'un amour déçu, se mue en harcèlement violent. Entre cet homme qui se transforme en bourreau, et cette femme qui refuse de se vivre en victime, se joue alors une tragédie vibrante, portée par deux comédiens exceptionnels, Judith Chemla et Thomas Scimeca.

Orogenesis de Boris Labbé

Orogenesis fait de nous les témoins de la genèse du monde en reproduisant à l'écran le processus supposé de la création des montagnes. On est tout simplement fasciné, incapable de détacher nos yeux de ces mouvements incessants des plaques qui s'étendent et se contractent dans une transe hallucinatoire. Le son, magnifiquement travaillé par Daniele Ghisi, apporte une résonance physique quasi intime à ce qui n'est rien moins que le dévoilement (bouleversant) de nos origines à tous.

Le visage de Salvatore Lista


C’est l’histoire d’une fascination. Celle d’un homme pour une femme rencontrée par hasard, mais aussi celle du réalisateur pour une actrice, puis peu à peu celle du spectateur pour un personnage. On ne peut s’empêcher de penser que ce film n’aurait pu exister sans Solene Rigot, qui est de tous les plans, et se livre à la caméra en un abandon sacrificiel. On est tout aussi captivé par les contours de cette fascination que par celle qui l’exerce si mystérieusement. Comme s’il fallait se dépêcher de capter cet indescriptible aura avant qu’il ne disparaisse.