7,75 millions de $CAN pour rouvrir le cinéma eXcentris à Montréal

Posté par vincy, le 17 avril 2011

Rebondissement : le cinéma eXcentris va renaître, après deux ans de fermeture et un projet risqué de reconversion (voir actualité du 24 septembre 2009). Le cinéma art et essai Parallèle va devenir propriétaire, en partie, avec l'aide de financements publics, du complexe situé sur le Plateau de Montréal. Cerise sur le gâteau, les trois salles actuelles seront complétées par deux nouvelles salles de 50 et 70 places d'ici deux à trois ans. La ville qui fut autrefois la plus cinéphile du Canada va pouvoir retrouver un peu de son lustre face à Toronto, désormais coeur de l'industrie nord-américaine avec l'un des quatre festivals les plus prestigieux du monde.

Lors de la conférence de presse, le fondateur du Parallèle et patron du Festival du nouveau cinéma (FCMM), Claude Chamberlan, semblait ravi : « ces cinq salles de cinéma d'auteur, c'est un vieux rêve. Comme ça existe à Paris...» Simon Brault, patron de Culture Montréal, semblait rassurer : « on arrête ainsi de dégringoler, car on se marginalisait. Montréal est une vraie ville de résilience. On est capable de rebondir ».

La SODEC apportera 4 millions de $CAN sous forme de prêts, dont 2 millions immédiatement, la Fondation Daniel Langlois, qui avait créé le complexe eXcentris, donnera un million de $ pour moderniser l'équipement (sièges, régie) et la Ville de Montréal contribuera à hauteur de 2,5 millions de $ (dans un fonds qui est en fait alloué par le gouvernement du Québec). C'est bien cette dernière subvention qui a permis de boucler le financement du projet, ainsi que la baisse du prix de vente par Daniel Langlois, propriétaire des salles. Par ailleurs, le Ministère de la culture s'est en plus engagé à verser 1,25 million de $CAN sur cinq ans.

44 ans après sa création, le cinéma Parallèle, simple exploitant, devient donc copropriétaire de l'édifice, inauguré dans les années 90, soit deux étages sur les cinq (Softimage occupe une grande partie des locaux). Il ne restait plus qu'une salle en exploitation depuis la fermeture par Daniel Langlois il y a deux ans. Cela avait fortement affecté la fréquentation du quartier, très animé, avec de nombreux restaurants et bars lounge.

Les rénovations débuteront dès cet été pour une réouverture à l'automne, certainement à l'occasion du Festival du nouveau cinéma, en octobre. En attendant l'extension dans un espace jardin-amphithéâtre, dont le calendrier reste à préciser.

Detroit, ton univers impitoyable…

Posté par vincy, le 30 septembre 2009

Il y a quelques semaines, je vous évoquais le destin déclinant des villes du Michigan chères à Michael Moore, comme Detroit ou Flint, ravagées par la crise de l’automobile et une pauvreté rampante (il suffit de voir Eight Mile ou Out of Sight…). Dans le Courrier International du 17 septembre, le USA Today titrait « Quand Detroit rêve de supplanter Hollywood ».

Ancienne grande métropole nord-américaine, Detroit, à cheval entre les grands lacs et le Canada, espère séduire les producteurs pour dynamiser son économie locale, mais aussi revaloriser son image, très atteinte par 35 ans de crise.

Certes, la ville dispose de tout ce qu’il faut pour attirer d’importants tournages : chambres d’hôtels de luxe, décors variés, y compris naturels, et quelque part un environnement « neutre ». Detroit peut ressembler à n’importe quelle ville américaine, hormis celles qui ont du cachet, comme New York ou San Francisco.

Cette reconversion n’a donc rien d’une lubie. De là à dépasser Hollywood, il n’y a qu’un raccourci journalistique, qui s’apparente plus à de la provocation sensationnaliste qu'à de la réflexion rationnaliste. Avec une politique de crédits d’impôts et un niveau de vie moins cher qu’à Los Angeles, Detroit a en effet des avantages financiers indéniables pour un producteur. Cependant, Detroit a un climat très rude durant six mois de l’année. Malgré le Renaissance Center au cœur de la ville, l’urbanisme n’a rien de glamour. Et même si Los Angeles est un lieu de tournage très cher, les stars préféreront toujours bruncher et négocier leurs contrats sur une terrasse sud-californienne et se promener avec leur chien sur la plage (pour la photo dans le magazine people). On voit mal ces accros du bronzage migrer dans les pleines enneigées du Michigan.

Detroit prend davantage au Canada qu'à Hollywood

Mais surtout, les studios ont toujours choisi « à la carte » leurs lieux de tournages, en fonction de différents critères – fiscaux, humains, techniques… En fait Detroit bénéficie surtout de trois facteurs : la crise économique et la pression des actionnaires qui obligent à contrôler au plus près les budgets favorisent les villes à bas coûts. Le protectionnisme ambiant qui a délocalisé les tournages de Montréal ou Toronto (à une heure d’avion de Detroit) aux Etats-Unis. Enfin, les villes dépeuplées ne gênent pas les rares habitants; mais au delà de cette donnée, beaucoup de films ont pour cadre la chute du modèle américain, dont Detroit est le parfait symbole.

Bien sûr la roue tourne. Hier Toronto, La Nouvelle Orléans ou Vancouver. Aujourd’hui Detroit, Albuquerque ou Philadelphie. Demain, ailleurs. Sans parler de la concurrence étrangère. La Hongrie annonce la construction d’une cité du cinéma composée de huit studios. Besson prévoit un équivalent à Babelsberg ou la Cinecitta en Seine Saint-Denis. Et la Nouvelle Zélande sait accueillir des films comme Avatar.

Detroit va devoir investir pour garder son rang. Ironiquement d’anciennes usines automobiles vont se transformer en studios de production. Montréal avait opté pour cette politique ruineuse et subit actuellement un gros trou d’air. Au delà, il faut former les gens, et pas seulement les techniciens.

Car si L.A. garde son rôle de capitale mondiale de l’image c’est que les décideurs, les financiers, mais aussi les créatifs (et leurs avocats) y sont tous concentrés. Detroit pour l’instant n’est jamais qu’une « usine à rêves », apte à être délocalisée facilement.

Pour les Américains, le cinéma n’est qu’une industrie comme les autres. Et ce qui a tué Detroit, c’est l’absence de regénérescence de l’automobile, incapable de s’adapter.
Ce qui a sauvé Montréal c’est d’investir dans les images de demain, comme les jeux vidéos. Pas de tout miser sur le 7e Art.

L’eXcentris de Montréal change de vocation

Posté par vincy, le 24 septembre 2009

ex-centris.jpgC'était l'un des multiplexes les plus intéressants de la métropole québécoise. Quand L'eXcentris a ouvert, il s'agissait d'en faire un lieu de résistance (en défendant le cinéma art et essai) et d'expérience (vidéos expérimentales, cinéma interactif...). Il accueille ainsi le festival du Nouveau Cinéma, dont la 37e édition se tiendra  à partir du 8 octobre prochain.

Daniel Langlois, propriétaire du lieu, a annoncé sa métamorphose en janvier dernier : "Il est certain qu'après 10 années consacrées en bonne partie à la diffusion d'un cinéma d'auteur et différent, l'arrêt de la programmation régulière de cinéma à Ex-Centris créera probablement un vide. Par contre, comme d'autres exploitants de salles inspirés par les succès d'Ex-Centris programment de plus en plus le type de cinéma que nous avons mis en valeur depuis 1999, il existe maintenant à Montréal quelques alternatives pour voir ce type de cinéma."

"Les contraintes imposées par la distribution traditionnelle du cinéma, qui sont basées sur un nombre de séances fixes par jour et ce 7 jours sur 7, sont acceptables pour les salles à vocation spécialisée et équipées uniquement pour la projection du cinéma. Par contre, cela limite grandement un lieu versatile comme Ex-Centris qui désire programmer à sa guise un contenu varié et expérimental. "

Le 5 avril 2009, le complexe fermait ses portes dans on état d'alors. Le cinéma Parallèle, crée en 1967 et hébergé dans l'eXcentris, a été du coup relocalisé. Il s'abritera dans un édifice qui accueillera aussi l'Ecole d'imagerie numérique et l'École de danse contemporaine. Un projet qui devrait coûter 40 millions de $ CAN.

Du son et du vivant

L'eXcentris change de mission. Lieu pluridisciplinaire situé au coeur du Plateau, le lieu va s'ouvrir à la musique. Un laboratoire permettra aux artistes de mélanger les genres, les supports, transformant l'endroit en un centre expérimental des arts de la scène.

Cabaret, cinéma, spectacle vivant, arts numériques : il faudra de toute façon passer par un hall transformé en restaurant bar. Un club d'un nouveau genre finalement.

La programmation hétéroclite vise à privilégier les échanges. Le cinéma prendra moins d'importance. La salle Cassavetes accueillera même des concerts classiques et du jazz, voire du théâtre...

La fin d'une belle aventure, et surtout d'une audace individuelle.