Edito : Joy-stick et peine-à-jouir

Posté par redaction, le 30 juin 2016

Manque-t-on de scénarios à ce points là? Les suites pleuvent - rien que cette semaine Camping 3, Conjuring 2, Ninja Turles 2 - tout comme les reboots, remakes et autres spin-off. La recette est souvent la même pour des recettes plutôt assurées (quoique). Après les jouets, Légos et autres Transformers (en attendant Barbie?), la grande tendance, après de multiples échecs, est le jeu vidéo. Angry Birds et Warcraft ont récolté respectivement 334 et 414 millions de $ dans le monde. A l'inverse, Dofus et Ratchet & Clanck se sont bien plantés.

Hollywood va donc répéter l'expérience et annonce de nombreux projets. Le dernier en date est Tetris (best-seller incontestable avec près de 500 millions d'unités vendues). Un film à partir de briques colorées qui s'emboîtent... Le pitch fait déjà rêvé. Plus angoissant, il s'agira d'une trilogie. Le producteur (qui avait déjà tenté la transposition du jeu au ciné avec Mortal Kombat) justifie cet ambitieux projet en expliquant que "l'histoire conçue est tellement grande..." Mazette. Ce sera un film de science fiction, tourné en partie en Chine. Le jeu n'a aucune construction narrative mais dans ce cas cela veut dire qu'il n'est pas impossible d'imaginer un Candy Crush sur grand écran. Malgré le fiasco de Pixels l'an dernier, le jeu vidéo semble la nouvelle poule aux œufs d'or. c'est surtout une stratégie de marketing pour les studios (surtout quand le jeu n'a aucun élément de fiction) et une manne financière pour les éditeurs de jeux (et d'applis) qui cherchent à survivre et installer leur marque dans cet univers très concurrentiel. La licence devient le graal pour des jeux qui sont en déclin. Qui est le produit dérivé de l'autre?

Assassin's Creed à la fin de l'année, le "cubiste" Minecraft désormais calé en mai 2019, tous deux en prises de vues réelles, Fruit Ninja... le grand écran se sert de ces jeux pour développer des sagas, franchises, univers déclinables. Il est loin le temps où les studios créaient par eux-même ses propres mythes (Star Wars, Indiana Jones, ...). Adaptations de livres (Twilight, Hunger Games, Harry Potter), de séries TV (Mission:Impossible, Equalizer), de comics, de dessins animés légendaires, l'originalité se raréfie. Désormais la logique est industrielle et le jeu-vidéo cherche des synergies avec le cinéma. On veut passer du joy-stick ou de l'écran de smartphone au grand écran, de l'interactivité à la passivité, du divertissement frénétique à la frustration la plus complète. L'addiction à un jeu, pour l'instant, n'a jamais conduit à une jouissance cinéphilique.

C'est aussi pour ça que beaucoup de projets ont avortés, comme le film sur les Sims. Mais de l'autre côté on va relancer le préhistorique Tomb Raider, avec Alica Vikander. Cependant, tant que ce genre de films ne sera là que pour "vendre" un jeu à un large public ou attirer dans les salles des "gamers", ce type de projets aura peu d'intérêt. On restera attentifs à la manière dont Ubisoft a contrôlé l'adaptation d'Assassin's Creed, en engageant notamment deux stars et en bataillant sur un scénario qui a connu maintes versions. Mais les deux industries n'ont, à notre avis, pas encore trouvé la bonne martingale.

Cependant, nous n'en sommes qu'au début. Avec la réalité virtuelle, des salles des cinéma qui sont équipées en 3D voire en 4D et des fauteuils dynamiques, on peut imaginer qu'un jeu vidéo au cinéma offre une expérience très différente, plus sensorielle et que l'histoire soit une occasion de prolonger le jeu ou d'assurer les transitions entre deux "épisodes". Après tout, parfois, certains jeux offrent des ambiances spectaculaires dignes de blockbusters. Bon, pour Tetris, malgré tout, on s'interroge quand même. A moins qu'il ne s'agisse d'un match intergalactique avec un Rubik's Cube.