Quinzaine 50 : voyage dans la première édition

Posté par redaction, le 8 mai 2018

Héritière directe de ceux qui voulaient affranchir le cinéma de ses chaînes en 1968, la Quinzaine célèbre cette année sa 50e édition. L'occasion d'une promenade à son image - en toute liberté, et forcément subjective - dans une histoire chargée de découvertes, d'audaces, d’enthousiasmes, de coups de maîtres et de films devenus incontournables.

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Les sélections des trois premières années de la Quinzaine ont dépassé à chaque fois allègrement les 50 longs-métrages. Michel Ciment, déjà présent en 1969, partage ses réserves |dans Positif numéro 107, été 1969] sur cet embouteillage dans un des rares textes de la presse cinéma à l'époque évoquant la première Quinzaine :

«Monsieur Favre Le Bret [alors président du festival] – dans le souci de renouveler sa formule, avait donné plus d'écho à la Semaine de la Critique et encouragé la Société des Réalisateurs de Films à organiser pour la première fois leur propre festival non stop (ou presque) dans un cinéma de la ville. Quelques uns des «saboteurs» de l'an dernier avaient fait amende honorable, parlaient de malentendu, tentaient de se mettre au mieux avec les notables locaux. D'autres entreprenaient cette manifestation parallèle qui avait le mérite de faire découvrir certains films peu connus ou même inconnus. Elle montrait d'une part que la SRF aidait les jeunes réalisateurs, leur fournissait une salle dont la location est coûteuse. Monsieur Favre-Lebret de son côte neutralisait d'éventuels adversaires : chacun y trouvait son compte, sous les couleurs du libéralisme. Il n'est pas sûr que cette initiative ait répondu vraiment à ses buts. Elle n'a pas manqué d'être à son tour une sélection […] alors que son originalité aurait pu être de tout montrer. Mais cette sélection n'a pas empêché la quinzaine d'encombrer un peu plus encore un programme pléthorique (plus de 400 films!). Ne gagnant ni sur le terrain de l'efficacité (comme la Semaine de la Critique qui réussit à imposer la sortie de films et trouve des échos dans la presse), ni sur celui de la doctrine (abolition du choix, présentation libre de tout produit), la Quinzaine de la SRF a certes réussi à montrer beaucoup de films gratuitement à un public nombreux, mais l'écho ne s'en est pas hélas répercuté […]».

Certes, l'écho dans la presse fut léger et certains films ont sombré dans l'oubli (ce qui arrive encore de nos jours) mais cette première édition fut néanmoins un succès, en nombres de spectateurs et dans son rôle dans l'évolution du Festival. Il y a clairement un avant et un après Quinzaine. Les films réunis par Pierre-Henri Deleau témoignent d'une vitalité de courants, de styles et de régions cinématographiques, avec des nouvelles exaltantes venues du Japon, du Brésil, de l'Italie, du Canada, de l'Est, sans oublier la France. La Cinémathèque Française a récemment proposé un fac-similé quasi intégral de la première Quinzaine. Sur les 66 longs présentés en mai 69, 57 étaient à voir ou revoir, accompagnés de seulement 4 des 42 courts-métrages vus à l'époque. Retour sur quelques unes de ces pépites.

Le hasard fait parfois bien les choses

Pour sa toute première programmation à Cannes, Pierre-Henri Deleau, premier délégué général de la quinzaine, a été la victime dans un premier temps de son manque d'expérience. Faute d'avoir signé leur formulaire de visa temporaire d'exploitation, il se retrouve dépouillé de ses deux films d'ouverture, bloqués à l'aéroport. La chance le rattrape vite, un certain Fausto Canel dont le court-métrage Hemingway est présenté à la Quinzaine, vient le voir à la demande de l'ambassadeur de Cuba. Il lui offre sur un plateau d'argent deux films de son pays.

Ce qui aurait pu être un cadeau empoisonné devient un miracle. La Première charge à la machette de Manuel Octavio Gómez est un moment de cinéma comme on voyait alors très peu, malgré les points communs sur la forme avec La Bataille de Culloden de Peter Watkins, tourné en 1964. Les deux films ont en commun d'être mis en scène comme des reportages, caméra à l'épaule, en son direct, avec interviews des protagonistes des deux bords, comme si la caméra avait été effectivement présente sur les champs de bataille pour témoigner de deux conflits bien différents, l'un datant de 1746 et situé en Angleterre, l'autre de la seconde moitié du XIXe siècle. Le procédé du reportage sur le vif facilite l'immersion et l'identification au-delà de ce qui aurait pu n'être qu'un gadget de mise en scène.

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Jeanne Moreau en 12 extraits

Posté par vincy, le 1 août 2017

Vertigineuse carrière que celle de Jeanne Moreau, disparue hier. 12 films parmi tant d'autres. Elle y allait à l'instinct, sans calcul. Parfois les films étaient fragiles et elle y mettait de sa poche. Parfois, elle ne venait que pour quelques jours ou une semaine de tournage. Jeanne Moreau était audacieuse et libre, engagée et digne, entière et franche, cinglante et séductrice, plus "putain" que "maman". Pourtant, la force de son jeu résidait dans son visage asymétrique, son sourire à l'envers, ce mystère qui s'en dégageait, ce minimalisme qu'elle recherchait et qui s'est épanoui avec le naturalisme et la liberté de la Nouvelle vague.

"La plus grande actrice du monde" selon Orson Welles. Elle ne voulait pas que le jeu apparaisse. Elle refusait que le "je" prenne toute la place. Jeanne Moreau l'affirmait: on ne pouvait pas savoir qui elle était à travers ses rôles. Elle était une femme, LA femme. Et tous les cinéastes l'ont filmée ainsi. Son visage était en lui-même un sujet. Un objet de désir sur lequel on s'attardait, parce qu'on essayait de comprendre la tristesse qui s'en dégageait, alors que, visiblement, parfois, elle était heureuse. Cet écart entre le réel et le bonheur, cette distance qui pouvait la faire paraître froide, donnait à ses rôles une dimension de femme fatale, malgré elle le plus souvent. Mais toujours, son rire éclatant, sa voix envoûtante, son regard pétillant reprenait le dessus. Et comme on le voit dans ces 12 extraits: le mystère Moreau ne s'est jamais dissipé.

Ascenseur pour l'échafaud. Louis Malle, 1958.

Moderato cantabile. Peter Brook, 1960.

Jules et Jim. François Truffaut, 1961.

La notte. Michelangelo Antonioni, 1961.

Eva. Joseph losey, 1962.

La Baie des Anges. jacques Demy, 1963.

Le journal d'une femme de chambre. Luis Bunuel, 1964.

La mariée était en noir. François Truffaut, 1968.

Les Valseuses. Bertrand Blier, 1974.

Querelle. Rainer Werner Fassbinder, 1982.

Nikita. Luc Besson, 1990.

La vieille qui marchait dans la mer. Laurent Heynemann, 1991.

Cannes 2015: Nespresso organise un « Top Chef » du 7e art

Posté par cynthia, le 27 avril 2015

Durant le Festival de Cannes, Nespresso ne sera pas seulement le fournisseur de caféine des journalistes accrédités dans le Palais. La marque préférée de George Clooney et Jean Dujardin mettra aussi à l’honneur la gastronomie et le cinéma.

Du 14 au 23 mai 2015, à Cannes, Nespresso organisera la 2ème édition des dîners «Les chefs font leur cinéma» avec Yves Camdeborde, Christophe Dufau & Florent Ladeyn. Pour la réalisation de ce concept singulier, Nespresso invite ces 3 grands chefs à devenir les réalisateurs de dîners sur le thème du cinéma. Chacun d’entre eux s’inspirera d’un film qui a marqué l’histoire du Festival de Cannes pour imaginer un scénario en 5 plats, afin d'allier nourriture et septième art et ainsi émoustiller les papilles des 60 convives attendus autour d’un décor original qui (re)plongera dans l’univers du film.

C'est ainsi que l'on pourra déguster le plat d'Yves Camdeborde (Le Comptoir du Relais Saint Germain, Paris) s'inspirer de Sous le soleil de satan de Maurice Pialat (Palme d’Or au Festival de Cannes 1987), ou encore de Christophe Dufau (Les Bacchanales, Vence – 1* Michelin) du documentaire Le Monde du silence de Jacques-Yves Cousteau et Louis Malle (Palme d’Or au Festival de Cannes 1956) et enfin du chef Florent Ladeyn (L’Auberge du Vert Mont, Boeschepe – 1* Michelin) du film Les 400 coups de François Truffaut (Prix de la mise en scène Festival de Cannes 1959).

Si vous n'avez pas la chance d'être sur la croisette, sachez que Nespresso organise un jeu concours (sur son site web dédié) afin de remporter un séjour pour deux (montée des marches, nuit dans un palace de la Croisette et dîner gastronomique Les Chefs font leur cinéma).

Enfin, rappelons que la Berlinale dispose, de son côté, d'une sélection cinéma et gastronomie.

Le cinéma de Patrick Modiano, prix Nobel de littérature 2014

Posté par vincy, le 9 octobre 2014

catherine deneuve patrick modianoPrix Nobel de littérature. Patrick Modiano, homme discret, écrivain de l'intime et auteur d'une trentaine d'oeuvres, est aussi un homme  de cinéma. Le dernier Prix Nobel de littérature français s'appelait J.M.G Le Clézio, lui-même grand cinéphile. C'était il y a six ans.

Modiano a été récompensé pour "l'art de la mémoire avec lequel il a évoqué les destinées humaines les plus insaisissables et dévoilé le monde de l'Occupation". Et justement l'Occupation est aussi au coeur de son oeuvre cinématographique. Car, on le dit moins, mais Modiano est aussi scénariste. On lui doit Lacombe Lucien, de Louis Malle (1974) et Bon Voyage, de Jean-Paul Rappeneau (2003). Deux films, très différents dans la forme, sur les relations entre les Français et les Allemands durant la seconde guerre mondiale. Le premier a été nominé aux British Awards et le second aux Césars, chacun dans la catégorie du meilleur scénario.

Modiano a aussi écrit le scénario d'Une jeunesse de Moshé Mizrahi, adaptation de son propre roman (1983) et coécrit celui du Fils de Gascogne de Pascal Aubier (1995). On pourrait ajouter Un Innocent épisode de la série télévisée Madame le juge (1975). A la fin des années 1970, il avait essayé, avec Michel Audiard et Philippe Labro, d'écrire, en vain, le scénario d’un film sur Jacques Mesrine.

Deux de ses romans ont été transposés sur grand écran : Le Parfum d'Yvonne de Patrice Leconte (1995), d'après Villa triste et Te Quiero de Manuel Poirier (2001), d'après Dimanches d'août.

Dans Télérama en 2003, Modiano avouait que les adaptations de ses livres n'avaient jamais été très concluantes: "Quelquefois, on accepte parce qu’on pense que le film ne se fera pas. Il vaudrait mieux dire non tout de suite…"

Enfin, l'écrivain a aussi été acteur : on l'aperçoit dans Généalogies d'un crime de Raoul Ruiz (1997), aux côtés de son amie Catherine Deneuve. Dans un petit rôle, il interprète l’ex-mari de la star. L’idée de proposer ce rôle revient à Deneuve : "Il se trouve que le rôle était court et c’était celui d’un écrivain. J’ai donc pensé à Modiano à cause de sa fragilité, de son côté décalé, de sa nature d’éternel rêveur, et j’ai aimé le sentir à mes côtés." Elle ajoute dans cet entretien au Nouvel Observateur: "Je trouve Modiano extraordinaire avec son petit foulard, ses lunettes noires, ses grands airs à la fois empruntés et protecteurs." Modiano a coécrit avec l'actrice Elle s'appelait Françoise..., le livre hommage à Françoise Dorléac paru en 1996. Son texte s'intitulait Le 21 mars, le premier jour du printemps.

Dans Les Inrocks, l'écrivain s'amusait: "C’était la première fois que je faisais l’acteur, sûrement la dernière d’ailleurs… Mais les lieux ont une telle importance pour moi… J’étais impressionné que le tournage se passe dans cet hôpital psychiatrique de Ville-Evrard, où Artaud a été interné… Je crois beaucoup à ce genre de coïncidence, qu’il ait lui-même tourné dans des films et qu’il ait été enfermé là, c’est étrange…"

Patrick Modiano a été membre du jury du Festival de Cannes en 2000.