Jeanne Moreau en 12 extraits

Posté par vincy, le 1 août 2017

Vertigineuse carrière que celle de Jeanne Moreau, disparue hier. 12 films parmi tant d'autres. Elle y allait à l'instinct, sans calcul. Parfois les films étaient fragiles et elle y mettait de sa poche. Parfois, elle ne venait que pour quelques jours ou une semaine de tournage. Jeanne Moreau était audacieuse et libre, engagée et digne, entière et franche, cinglante et séductrice, plus "putain" que "maman". Pourtant, la force de son jeu résidait dans son visage asymétrique, son sourire à l'envers, ce mystère qui s'en dégageait, ce minimalisme qu'elle recherchait et qui s'est épanoui avec le naturalisme et la liberté de la Nouvelle vague.

"La plus grande actrice du monde" selon Orson Welles. Elle ne voulait pas que le jeu apparaisse. Elle refusait que le "je" prenne toute la place. Jeanne Moreau l'affirmait: on ne pouvait pas savoir qui elle était à travers ses rôles. Elle était une femme, LA femme. Et tous les cinéastes l'ont filmée ainsi. Son visage était en lui-même un sujet. Un objet de désir sur lequel on s'attardait, parce qu'on essayait de comprendre la tristesse qui s'en dégageait, alors que, visiblement, parfois, elle était heureuse. Cet écart entre le réel et le bonheur, cette distance qui pouvait la faire paraître froide, donnait à ses rôles une dimension de femme fatale, malgré elle le plus souvent. Mais toujours, son rire éclatant, sa voix envoûtante, son regard pétillant reprenait le dessus. Et comme on le voit dans ces 12 extraits: le mystère Moreau ne s'est jamais dissipé.

Ascenseur pour l'échafaud. Louis Malle, 1958.

Moderato cantabile. Peter Brook, 1960.

Jules et Jim. François Truffaut, 1961.

La notte. Michelangelo Antonioni, 1961.

Eva. Joseph losey, 1962.

La Baie des Anges. jacques Demy, 1963.

Le journal d'une femme de chambre. Luis Bunuel, 1964.

La mariée était en noir. François Truffaut, 1968.

Les Valseuses. Bertrand Blier, 1974.

Querelle. Rainer Werner Fassbinder, 1982.

Nikita. Luc Besson, 1990.

La vieille qui marchait dans la mer. Laurent Heynemann, 1991.

Edito: Pourquoi lui?

Posté par redaction, le 26 janvier 2017

Patrick Dewaere aurait eu 70 ans aujourd'hui. Pourquoi lui? Parce qu'il a été l'un des acteurs français les plus marquants du cinéma post-Nouvelle Vague. 35 ans après son suicide, le comédien des Valseuses, de F... comme Fairbanks, du Juge Fayard dit le Shérif, de Coup de tête, de Série noire et d'Hôtel des Amériques reste une référence, avec son mélange de virilité et de vulnérabilité, explorant toutes les ombres de sa personnalité tourmentée. Certains acteurs nommés au César cette année en sont les héritiers directs comme Pierre Deladonchamps, Nicolas Duvauchelle, Pierre Niney, Gaspard Ulliel, Melvil Poupaud, Vincent Cassel... Il a imposé au cinéma l'image d'un homme beau, sincère et fragile.

La La Land a séduit 108000 spectateurs en France pour son premier jour d'exploitation. Pourquoi lui? Sans doute les 7 Golden Globes et ses 14 nominations aux Oscars ont contribué au buzz phénoménal autour de cette comédie romantique, romantique et musicale. 114000 français se sont précipités pour voir Emma Stone et Ryan Gosling danser dans les étoiles. Mais ce n'est pas la seule raison. Ressusciter Jacques Demy est une chose. Enthousiasmer la critique en est une autre. En ces temps anxiogènes, où les nouvelles du monde participent à un pessimisme inquiétant, cela fait du bien de voir un film mélancolique et joyeux (ce n'est pas incompatible), en technicolor. On réhabilite Hollywood et on réenchante les spectateurs. Idéal pour se réchauffer en plein hiver et s'évader le temps d'une séance.

Thierry Frémaux est partout. Pourquoi lui? L'homme le plus influent du cinéma français (trois de ses films cannois sont en lice pour le César du meilleur film, 6 films sur les 7 de la catégorie meilleur film étranger étaient en compétition) sort un livre et un documentaire. Sélection officielle (Grasset) dévoile les coulisses d'un Festival de Cannes sur une année. Mais c'est son documentaire passionnant sur les premiers films du cinéma, ceux des frères Lumière, qui retiennent notre attention, tant il s'agit d'une véritable découverte cinématographique et d'une belle leçon de cinéma. Dommage qu'il ne soit pas mieux distribué, en attendant une diffusion télé qui le rendra accessible au plus grand nombre. En tout cas, Thierry Frémaux révèle un talent de pédagogue et de conteur qui sied bien à son rôle de passeur.

George Clooney sera l'invité d'honneur des César. Pourquoi lui? On peut toujours continuer de critiquer le bazar des César, le tropisme hollywoodien (pour l'audience, vraiment?) des récents César d'honneur (en fonction de l'agenda des stars). On n'en rajoutera pas. Au pire, on se dit que l'Académie n'aime pas les grands cinéastes, même ceux sélectionnés à Cannes, au mieux on se console cette année avec la présence du quinquagénaire le plus sexy d'Hollywood. What else après tout? Clooney, producteur oscarisé, réalisateur comblé, acteur idéalisé, est aussi un citoyen engagé, le parfait modèle de la personnalité anti-Trump, se souciant du Darfour et des réfugiés, de l'environnement et de la précarité. C'est une star, à presque à l'ancienne. Clooney sera récompensé pour avoir rempli les salles françaises et pour avoir fait rêver des spectateurs et spectatrices dans les magazines people.

Isabelle Huppert est au top. Pourquoi elle? Tout a été dit: son audace, son perfectionnisme, sa facilité à passer de la comédie décalée à la pire tragédie, du théâtre au cinéma. L'actrice réputée cérébrale, adepte de rôles sadomasochistes, a tourné aux Etats-Unis, en Europe, en Asie, avec les plus grands cinéastes ou les plus aventureux. Elle, L'avenir ou Souvenir ont davantage séduit la critique que le public, comme souvent avec la Reine Isabelle. Contrairement à Clooney, elle est plus "réputée" que "populaire". Contrairement à Deneuve, elle n'a pas été tête d'affiche de nombreux films millionnaires (8 en 40 ans) et son plus gros succès récent, elle le partage avec 7 autres femmes, où elle chantait sa mélancolie dans un film assez joyeux. Huppert est hype. Elle sera aux Oscars grâce à Elle, sélectionné par Frémaux à Cannes. Elle sera aussi aux César, pas loin de Clooney. Elle pourra aussi se souvenir de Dewaere, son partenaire dans Les Valseuses, il y a 43 ans.

Pourquoi eux? Parce que chacun à leur manière, ils prolongent cette magie indéfinissable du cinéma, par de là la mort. Frémaux évoquent les Lumière comme des "sorciers de l'image". Le cinéma est en effet une sorcellerie irrésistible.

Audrey Tautou : du remake US des Valseuses à son troisième Salvadori

Posté par vincy, le 18 octobre 2016

On n'arrête plus Audrey Tautou. L'actrice, qui se paye le luxe de ne pas avoir d'attaché de presse ni d'agent, est à l'affiche d'Eternité et de L'Odyssée. En janvier, elle sera au générique de Ouvert la nuit, le nouveau film d'Edouard Baer. Mais avant cela, en novembre, l'actrice tournera son troisième film avec Pierre Salvadori, Remise de peine. Produit par Les Films Pelléas, le long métrage mettra en vedette Adèle Haenel en jeune inspecteur de police, veuve d'un flic parfait. A l'occasion d'une enquête banale, elle découvre que son feu mari était un ripou et un menteur. Outre Tautou et Haenel, Salvadori a choisi un sacré trio de mâles: Vincent Elbaz, Damien Bonnard (Rester vertical) et Pio Marmaï.

Plus surprenant, Audrey Tautou sera de la troupe du nouveau film que John Turturro vient de terminer. Going Places a ceci de particulier qu'il s'agit d'une sorte de remake des Valseuses. Turturro a écrit une histoire similaire à partir des du scénario de Bertrand Blier mais aussi de The Big Lebowski des frères Coen. Dans cette version, Turtutto aurait eu l'autorisation des Coen pour incarner un certain Jesus Quintana, fan de bowling avec un fort accent puerto-ricain (coucou The Duke), soit le type qu'il incarnait dans The Big Lebowski. Outre Tautou qui reprendrait le rôle de Miou-Miou, on retrouve Turturro, Susan Sarandon, en ex-taularde tout juste sortie de prison, Sonia Braga (Aquarius), Bonny Cannavale (Ant-Man, Vinyl) et Gloria Reuben (Mr Robot).

Festival Lyon en Lumière 2010?: Les Valseuses par Blier himself

Posté par Morgane, le 6 octobre 2010

Mardi 5 octobre. Après l’ouverture lundi soir à la Halle Tony Garnier en présence de Stanley Donen et de beaucoup d’autres sous les images et les chansons de Chantons sous la pluie, le festival s’est étendu aux nombreuses salles obscures de Lyon et de ses alentours, et bat déjà son plein.

La preuve avec une salle pleine à craquer (étaient aussi présents Marjane Satrapi, Vincent Paronnaud, Danièle Thomson, Melvil Poupaud et Vincent Perez) pour la projection des Valseuses (dans la rubrique "Déjà classiques?!").

Pour l’occasion, le film était présenté par Gustave Kervern et Benoît Delépine ainsi que Bertrand Blier lui-même. Ce dernier rappelle que le film est à l’origine un livre qu’il a écrit. Le livre se vendant très bien, beaucoup de producteurs se sont donc proposés pour l’adapter au cinéma et il a choisi Paul Claudon qui lui a laissé beaucoup de liberté. "J’ai eu la chance de choisir le bon producteur car il peut soit vous couper les pattes, soit vous donner des ailes". On peut être certain que pour Les Valseuses, Paul Claudon lui a donné des ailes... Il avoue juste?: "y’a qu’un truc sur lequel je me suis fait baisé, c’est les pantalons pattes d’eph’".

À l’issue d’une projection très applaudie, Bertrand Blier est revenu pour débattre avec le public... Florilège :

- Comment avez-vous fait pour tourner la scène avec Brigitte Fossey??

- Elle a bu beaucoup de bière pour faire gonfler ses nibards... et surtout, elle avait du culot.

- Pourquoi ce film??

- C’est tout d’abord un livre qui m’a pris un an. Il ressemblait beaucoup à un scenario alors j’en ai fait un film. En ce qui concerne l’idée, elle m’est venue d’une mauvaise humeur... Pour le film, ce qui a été le plus dur, c’était de trouver les bons acteurs car tout ou presque repose sur eux.

- Le film ne se termine pas comme le livre...

- J’ai tourné la fin du livre. Ils sont dans la voiture dont ils ont cisaillé la roue et celle-ci se détache alors ils se balancent dans le ravin. Une fois le film monté, un producteur américain l’a vu, a adoré et a dit?: "mais il ne faut pas qu’ils meurent à la fin. Ils sont trop sympathiques pour mourir". J’ai répondu?: "ok, on coupe".

- Aviez-vous déjà des acteurs en tête lors de l’écriture??

- Non, je n’ai écrit pour personne. Éventuellement j’imaginais un grand et un petit. J’ai trouvé le grand (Gérard Depardieu) très vite mais pas le petit. J’avais vu Patrick Dewaere mais lui avait dit que ça n’allait pas car il avait un peu la même carrure que Gérard. Mais Patrick a insisté et m’a dit?: "ok, je vais te le jouer comme un petit et me mettrai toujours derrière l’épaule de Gérard". Et c’est ce qu’il a fait.»

- Pourquoi le titre Les Valseuses ?

- J’avais plein de titres en tête pour le livre mais Les Valseuses je trouvais que c’était une façon élégante de parler des couilles. Mais ça a joué des tours lors de la sortie du film car des vieilles dames venaient pensant voir un film de danses viennoises.

- Comment le film a-t-il été accueilli lors de sa sortie??

- Le film a été superbement accueilli. Le Figaro demandait même son interdiction?! En réalité, il n’a pas vraiment eu besoin de la critique, il est sorti et a très bien marché tout de suite.

- Utilisez-vous le rire pour dépasser des peurs (ici la sexualité, la mort et la maladie dans Le bruit des glaçons etc.)??

- Oui, je pense que c’est le propre de toute personne qui écrit. Le rire permet de décontracter l’atmosphère. On rigole très bien dans des situations dramatiques, les deux pouvant se mélanger, mais c’est très dur à faire.

- Pensez-vous vraiment qu’on pourrait refaire ce même film aujourd’hui, les pattes d’eph en moins??

- Oui. Non seulement on pourrait mais c’est une nécessité. Il y aurait certainement plus de public aussi. Et puis, ça ferait du bien à tout le monde...

Crédit photo : Morgane Postaire