20 ans après la mort de Serge Daney, hommage à la Cinémathèque

Posté par vincy, le 10 juin 2012

Il y a 20 ans, le 12 juin 1992, le SIDA emportait le critique de films et théoricien de l'image Serge Daney. Il avait 48 ans et 8 jours. Il laisse une oeuvre considérable de textes sur le cinéma (principalement publiés chez P.O.L.), mais aussi sur la télévision, la politique, l'urbanisme et le tennis. Les Sentimental Bourreau en avait d'ailleurs fait une pièce jubilatoire, L'exercice a été profitable monsieur, clamant ses écrits en jouant à a raquette.

A la fois observateur, conteur, voyageur, analyste et commentateur, Daney a laissé une "façon d'écrire" sur le cinéma, qu'on peut encore retrouver chez certaines plumes de la presse qui l'ont côtoyé. Jamais snob (il considérait que le cinéma avait deux jambes, l'une populaire, l'autre sophistiquée), il ne méprisait aucun genre. Daney essayait de faire comprendre ce que l'on voyait, dépeçait les émotions pour savoir si elles n'étaient que sensations. Il voulait qu'on ouvre les yeux, et jouait les allumettes, quitte à mettre le feu, pour faire tenir nos paupières. "Le cinéma n'est pas une technique d'exposition des images, c'est un art de montrer. Et montrer est un geste, un geste qui oblige à voir, à regarder" écrivait-il.

Fondateur de la revue Visages du cinéma en 1962, critique aux Cahiers du cinéma en 1964, quand les "anciens" passent derrière la caméra, rédacteur en chef des Cahiers du cinéma aux côtés de Toubiana dès 1973, critique (puis éditorialiste) à Libération en 1981, animateur de Microfilms sur France Culture (1985-1990), il écrit dans Trafic, revue trimestrielle créée par son éditeur, P.O.L., durant la dernière année de sa vie.

Son premier texte, à 18 ans, concerne Rio Bravo d'Howard Hawks. Dès lors, il n'aura que le cinéma comme unique horizon. Pour lui, le cinéma est le reflet de notre propre vie. Il nous parle à chacun d'entre nous, nous raconte notre histoire. Toujours sur la route, en Asie, en Afrique, il écrivait sans cesse. Voir, encore et toujours.

Pour les 20 ans célébrant sa disparition, la Cinémathèque organise un cycle , "Serge Daney, 20 ans après" du 20 juin au 5 août. Vous pourrez y découvrir (ou pas) des films sur lesquels il a écrit. Carax, Fellini, Preminger, Bunuel, Kurosawa, Mizogushi, Garrel, Truffaut, Dreyer, Oliveira, Ford, Rohmer, Pialat, Resnais, Welles, Rossellini, Bresson, Renoir, Ruiz, Hawks, Tati, Hitchcock, Straub, Chaplin, Becker forment ainsi un beau panthéon. Un documentaire de Claire Denis avec Serge Daney ainsi que deux documentaires dont il est l'objet seront projetés. Une journée d'étude est organisée le 22 juin, en présence de Melvil Poupaud, qui rendait hommage à son ami dans son autobiographie semi-fictive, Quel en Mon noM?.

A la bibliothèque et en librairie, vous pourrez trouver La rampe (Cahier critique 1970-1982), les deux volumes du Ciné journal (1981-1986), Le salaire du zappeur, L'exercice a été profitable Monsieur, Devant la recrudescence des vols de sacs à main, L'amateur de tennis, Persévérance (entretien avec Serge Toubiana), Les Maison cinéma et le monde (en trois volumes). Une véritable leçon d'écriture sur le cinéma, mais surtout un goût pour la liberté et une écriture sans frontières. Sans formatage.

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Tout le programme sur le site de la Cinémathèque

La Semaine de la Critique enrôle le critique et historien Charles Tesson

Posté par vincy, le 28 avril 2011

Charles Tesson prendra pour trois ans la délégation générale de la Semaine de la Critique. Il a été élu pour succéder à Jean-Christophe Berjon, en poste depuis 2004.

La section parallèle la plus excitante du Festival de Cannes célèbre cette année ses 50 ans, avec en cadeau surprise la venue de Spike Jonze pour l'avant-première mondiale de Mourir auprès de toi, co-réalisé avec Simon Cahn. Ce court-métrage d'animation sera présenté les 14 et 15 mai sur la Croisette : c'est le récit d'une drôle de romance entre un squelette échappé de Macbeth et la Mina Harker de Dracula.

Charles Tesson est critique et historien de cinéma. Il enseigne à l'Université l'histoire et l'esthétique du 7e art. De 1998 à 2003, il fut rédacteur en chef des Cahiers du cinéma, dont il était l'un des piliers depuis 1979. Il a aussi écrit de nombreux essais : Hong Kong cinéma (avec Olivier Assayas), Satyajit Ray, Luis Buñuel, Photogénie de la série B, Théâtre et cinéma, Akira Kurosawa, Abbas Kiarostami : Textes, entretiens, filmographie complète (avec Laurent Roth, Jean-Michel Frodon et Alain Bergala), tous publiés aux éditions des Cahiers du cinéma. Il a préfacé un livre sur Carl Dreyer, collaboré à un autre sur Allan Dwan, dirigé un autre sur Straub et Huillet. On lui doit aussi, chez Larousse, Les grands réalisateurs, co-écrit avec Jean A. Gili, Daniel Sauvaget et Christian Viviani.

Les Archives d’Eric Rohmer remises à l’Imec

Posté par vincy, le 13 janvier 2011

"Conformément à la volonté du cinéaste, les archives d'Éric Rohmer ont rejoint les collections de l'Imec", a annoncé aujourd'hui l'institut Mémoires de l'édition contemporain. Tout juste un an après sa mort.

Créé en 1988, l'institut rassemble les fonds d'archives et d'études consacrés aux principales maisons d'édition, aux revues et aux différents acteurs de la vie du livre et de la création.

L'établissement situé à Caen en Normandie a reçu aujourd'hui "plus de 140 boîtes de documentaires et près de 20 000 pièces d'archives qui viennent éclairer la généalogie du cinéma rohmérien, et révèlent notamment l'importance de son activité littéraire dès les années 1940".

Il ne reste plus qu'à traiter les archives et classer le fonds.  «Ce fonds d’une exceptionnelle richesse permet de retracer l’ensemble de la carrière cinématographique et critique » indique le communiqué. Il comprend notamment une importante quantité d'écrits (récits, nouvelles, romans, théâtre, correspondance d’Eric Rohmer avec, notamment, François Truffaut, Jean Cocteau, Jean-Luc Godard ou André Bazin) mais surtout des témoignages «de ses talents de metteur en scène, de photographe, de dessinateur, de concepteur de costumes et de décors, de compositeur de chansons et de musiques.»

L’Imec fait aussi savoir qu’Antoine de Baecque, qui vient de sortir le documentaire sur Truffaut et Godard Deux de la vague,  et Noël Herpe travaillent à une biographie d’Eric Rohmer pour l'éditeur Grasset.

Les Cahiers chez Phaidon

Posté par vincy, le 14 octobre 2008

L'éditeur international de beaux livres va mettre la main sur Les Cahiers du cinéma. C'est la proposition retenue par le groupe Le Monde afin de finaliser la cession des éditions de l'Etoile, qui possèdent le mensuel de cinéma. On savait depuis une semaine que la solution interne - l'équipe des Cahiers - avait été refusée (voir actualités précédentes). Il restait cinq candidats dont Les Inrocks, l'ancien directeur de Première, et deux sociétés de productions.

En choisissant Phaidon (5 millions d'euros de C.A. en France), Le Monde place les Cahiers dans un groupe mondial, qui a des bureaux à Paris, New York, Londres, Berlin, Milan et Tokyo. Très ancré dans le design et les publications pratiques, l'éditeur va pouvoir se renforcer dans le cinéma et ainsi concurrencer vivement son compétiteur, Taschen.

Des remous dans la presse cinéma…

Posté par vincy, le 16 septembre 2008

Il va y avoir des turbulences dans la presse cinéma grand public. Tandis que le web est envahi de sites web et de blogs sur le 7e Art, la presse magazine spécialisée dans le cinéma connaît de fortes secousses.

L'éditeur Roularta annonce son intention de faire disparaître ses deux titres, Studio Magazine et Ciné Live, pour en créer un nouveau, in extenso. Les deux mensuels, très différents dans leur ligne éditoriale mais aussi dans leur histoire (Studio a été créé par les fondateurs de Première, Ciné Live s'est construit avec un cédérom en bonus), ont un tirage à peu près similaire, soit un peu plus de 90 000 exemplaires. Depuis le Festival de Cannes, Roularta envoyait des signes alarmants concernant sa branche cinéma, préférant donner à son hebdomadaire L'Express l'exclusivité du site internet couvrant le festival. Studio, comme Ciné Live, ont surtout souffert de ne pas avoir su s'adapter à l'ère numérique.

Du côté des Cahiers du cinéma, à vendre (voir article du 10 avril 2008), deux offres s'affrontent. D'une part, les rédacteurs des Cahiers et leurs amis, associés à l'éditeur P.O.L. ; d'autre part le magazine Les Inrockuptibles, qui, en revanche, supprimerait des emplois. Cela ne peut avoir de sens que pour une régie publicitaire et la commercialisation des abonnements. La logique économique ne peut cependant pas se substituer à une logique humaine. Socialement, leur proposition est inacceptable et éditorialement inintéressante. Hélas, le groupe Le Monde risque de n'y voir que son intérêt financier... C'est regrettable, quand une reprise peut se faire en interne, avec des partenaires solides, conservant ainsi son indépendance et sa motivation.

Quant à Première, ses ventes vont mal. Sur une année, sa diffusion s'est écroulée. Entre juillet 2007 et juin 2008, le magazine publié par Hachette a perdu 9 000 abonnés (ils ne sont plus que 60 700) et la diffusion est passée pour la première fois en dessous des 30 000 exemplaires. Désormais Première ne tire qu'à 127 000 exemplaires, contre 183 000 il y a un an.

Les « Cahiers » sont à vendre

Posté par vincy, le 10 avril 2008

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La presse écrite spécialisée dans le cinéma est toujours dans la tourmente. Première en sursis, Ciné Live qui a rejoint Studio au sein de Roularta... Entre Internet, les gratuits des salles de cinéma et le robinet à images sur la télé, le cinoche n'est plus affaire de chapelles et de fidèles. Dernier épisode en date : dans le cadre de sa restructuration, le groupe Le Monde (par ailleur propriétaire de Télérama) a décidé de vendre les éditions de l'étoile, qui possèdent les mythiques Cahiers du cinéma. Ironiquement la récente couverture du mensuel titrait en rouge "Etat d'alerte".

Selon les chiffres les plus récents de l'OJD, Les Cahiers tirent à 42 000 exemplaires. Seulement 25 600 sont diffusés mensuellement, c'est à dire achetés, en France et à l'étranger. Plus de la moitié de cette diffusion est due aux abonnements. Seulement 7 000 exemplaires sont achetés en kiosque en France!

Première reste leader avec 174 100 exemplaires vendus en France et à l'étranger, contre 94 200 pour Studio Magazine, 93 200 pour Cine Live, 43 900 pour Les années Laser et 24 800 pour Mad Movies. A l'étranger, Première est le seul mensuel de cinéma à dépasser les 8 000 exemplaires quand Les Cahiers, Studio et Cine Live sont tous autour de 4 000/ 5 000 exemplaires. Ce remarquable score dans le monde a conduit logiquement les dirigeants des Cahiers à se traduire en anglais sur le web... L'autre force des Cahiers ce sont ses 13 200 abonnés quand Les années Laser n'en ont que 11 800 et Cine Live 20 400. Première reste malgré tout le magazine le plus envoyé par la poste avec 68 300 adresses dans son fichier.

Reste que le mensuel qualifié d'élitiste va devoir trouver un modèle économique hors du groupe Le Monde, qui pouvait lui assurer une certaine pérennité. Pour le moment, aucun de ces magazines n'est parvenu à s'installer confortablement sur un autre support que le papier : ni la télé, ni le web. Surtout, le cinéma est devenu une rubrique incontournable pour tous les magazines. On aurait d'ailleurs pu rajouter Telerama (groupe Le Monde) avec ses 519 200 abonnés et ses 103 300 exemplaires vendus en kiosque tous les mercredi. Ou encore Les Inrockuptibles et ses 21 900 abonnés (soit la moitié de sa diffusion!).

C'est dans ce contexte tendu où le lecteur cinéphile se fait volage que Le Monde a décidé de se séparer de cette belle marque, sans doute pas assez rentable ni essentielle à son développement.