Export du cinéma français en 2016: une année à oublier

Posté par vincy, le 21 novembre 2017

Mauvais cru que 2016 pour l'exportation du cinéma français: 26,8 millions d'entrées pour les films en langue française (- 41,3%) sur un total de 40,7 millions d'entrées pour les films français ou majoritairement français (-63,5%). Le pré-bilan sorti en janvier (lire notre article) se confirme une fois les chiffres consolidés.

Le grand plongeon. 2016 a été la première année où il y a eu moins de 50 millions d'entrées depuis 2000, largement en dessous du très mauvais chiffre de 2013 (50,8 millions d'entrées). Les recettes vont à l'avenant avec une chute de 58,7% pour un montant total de 257,5 millions d'euros.

Le cinéma français tombe ainsi à 1,96% en entrées et 2,12% en recettes de part de marché dans le monde, France comprise. Une misère. D'autant que 2016 a été une année record en nombre de sorties: 2243 sorties, dont 607 films inédits à l'international dans 73 territoires, auxquelles s'ajoutent 772 continuations.

Cette dépression provient d'un facteur essentiel: le manque de locomotive anglophone (type Taken). Ainsi, le leader de l'année 2016 est le même que celui de 2015, Le Petit Prince avec 3,1 millions d'entrées (contre 15 millions l'année précédente). Le film a ainsi cumulé 18,2 millions d'entrées à l'international depuis sa sortie, ce qui le fait entrer dans le club très sélect des films produits par la France et ayant dépassé les 20 millions de spectateurs dans le monde (incluant la France). Il se classe ainsi 8e des plus gros succès français à l'international depuis 2000. Dans ce Top 20 dominé par EuropaCorp (4 des 5 premiers, 10 des 20 premiers), Le Petit Prince est le deuxième film d'animation (avec Arthur et les Minimoys) à s'inviter dans la cour des grands.

Il n'y a finalement que 6 films (contre 10 en 2015) qui ont dépassé en cumul le million d'entrées cette année. Car plus précisément, outre Le petit Prince, un seul film a réussi à franchir le cap du million de spectateurs pendant l'année 2016 (Oppression, film en langue anglaise). Les autres ont franchi la barre du million sur deux exercices: Le goût des merveilles, Les nouvelles aventures d'Aladdin, Mustang et Belle et Sébastien, l'aventure continue.

Parmi les autres succès, on note ceux d'Un homme à la hauteur, qui fait mieux à l'étranger qu'en France, Les saisons, Chocolat, L'étudiante et Monsieur Henri, et Elle, qui dépassent tous les 600000 entrées internationales. D'autres, comme Les innocentes, Mon roi et Frantz deviennent millionnaires en spectateurs grâce à l'international.

Globalement 63,1% des sorties ont attiré moins de 10000 spectateurs. Et en fait seul 11,5% des titres ont dépassé les 100000 entrées. Une claque d'autant plus énorme que c'est la première fois depuis 10 ans qu'aucun film français ne passe la barre des 5 millions d'entrées.

Pour les coproductions internationales, cela va un peu mieux grâce aux beaux scores de Love & Frienship, The Lobster, Ballerina, Youth et Moi, Daniel Blake.

Enfin, côté régions, l'Europe occidentale reste le marché le plus attractif avec 46,1% des entrées internationales malgré les très beaux efforts d'Unifrance pour aller chercher d'autres publics. Les films français séduisent d'abord l'Italie, puis l'Allemagne, la Belgique et le Luxembourg (où le cinéma français affiche une part de marché de 12,4%) et l'Espagne.

L'Amérique du nord (15,3%), l'Europe centrale et orientale (11,8%), l'Amérique latine (12,5%) et l'Asie (10,2%) suivent. C'est inquiétant de voir que l'Asie ne soit pas plus haut alors que la Chine (1,5M d'entrées, soit 0,1% de part de marché dans le pays) et le Japon (1,2M d'entrées soit 0,7% de part de marché dans le pays) sont respectivement les 2e et 3e marchés cinématographiques dans le monde. C'est encore plus embêtant de constater le retard de l'Afrique (1,8%) en l'absence de circuits de distribution solides alors qu'avec la Francophonie, l'exportation pourrait être simple. Dans le même élan, on continue de se désoler de voir dans un marché mature comme le marché québécois que malgré 75 films français sortis au Québec, la part de marché est seulement de 3% avec 600000 spectateurs.

Reste que dans 13 pays, le cinéma français dépasse le million de spectateurs et dans 8 il parvient à amasser plus de 10 millions d'euros de recettes. C'est toujours le marché Etats-Unis/Canada anglophone qui ramène le plus d'entrées (13,7%) et le plus de recettes (16,9%).

Bilan 2016: Grosse fatigue du cinéma français à l’export

Posté par vincy, le 15 janvier 2017

Ce fut une très belle année pour la fréquentation des salles en France. A l'inverse, 2016 a été désastreuse pour le cinéma français dans le monde. Seulement 34 millions de spectateurs sont venus voir des films français à l'étranger (soit 230 millions d'euros de recettes, et donc une chute de 62% des revenus). On est très loin des 111 millions d'entrées à l'international en 2015 ou des 120 millions en 2014, deux années où le nombre d'entrées à l'étranger était supérieur à celui des spectateurs en France pour des films français.

Le phénomène est global, touchant tous les genres et tous les pays. Du jamais vu depuis plus de dix ans. En effet, c'est la première fois que l'on passe sous le cap des 50 millions d'entrées depuis 2007.

Il faut dire que 2016 a souffert de l'absence d'une comédie porteuse comme Intouchables ou de productions anglophones d'Europacorp comme Taken ou Le Transporteur (2017 devrait ainsi être largement meilleure grâce à Valérian de Luc Besson). Mais ceci n'explique pas tout.

Car en 2016, les films en langue française n'ont séduit que 22 millions de spectateurs dans le monde: c'est une chute de 52% par rapport à 2015. Par voie de conséquence, Unifrance, qui publie les chiffres, constate que "Les 5 plus grands succès français de l’année 2016 ne représentent que 28,3% des entrées globales du cinéma français dans les salles étrangères, contre 70,5% en 2015. Autre conséquence notable, les films en langue française réalisent 22 millions d’entrées en 2016, soit près de 64% des entrées totales sur la période, une proportion record depuis plus de 15 ans, bien supérieure à la moyenne de 43,6% constatée sur les 10 dernières années."

On s'interroge cependant: sans Le Petit Prince, déjà un beau carton en 2015, qu'est-ce-que ça aurait été? "Après une année 2015 exceptionnelle à plus de 15 millions d’entrées, [il] continue de rayonner hors de nos frontières pour sa 2e année d’exploitation. Avec plus de 3 millions de spectateurs supplémentaires rassemblés sur une quarantaine de territoires, il devient le plus grand succès de l’année 2016 pour une production franc?aise et le film d’animation le plus vu à l’international."

Derrière Le Petit Prince et ses 92M€ de recettes cumulées, on retrouve un modeste succès d'EuropaCorp, Oppression de Farren Blackburn (1,8 million d'entrées, dont près de la moitié en Amérique du nord), puis Le goût des merveilles d'Éric Besnard (900000, essentiellement en Allemagne où il fait deux fois mieux qu'en France), Les nouvelles aventures d'Aladin d'Arthur Benzaquen (800000, dont les trois quarts en Chine), Un homme à la hauteur de Laurent Tirard (700000, qui a bien fonctionné en Pologne et en Russie), Les saisons de Jacques Perrin et Jacques Cluzaud (700000 grâce au Japon), Mustang de Deniz Gamze Ergüven (700000), L'étudiante et Monsieur Henri d'Ivan Calbérac (600000), Chocolat de Roschdy Zem (600000) et Elle de Paul Verhoeven (500000), qui n'a largement pas terminé sa carrière internationale. Médecin de campagne, 11e, approche des 500000 entrées et des films comme Les innocentes et L'avenir ont dépassé les 400000 entrées. En revanche, de Radin! avec Dany Boon aux Visiteurs 3 en passant par L'odyssée et Cézanne et moi, les flops ont été nombreux, ne réalisant pas les scores attendus dans des marchés captifs (Belgique et Suisse pour les comédies, Royaume Uni et USA pour les biopics).

Unifrance constate aussi le retour du leadership de l'Europe occidentale comme marché principal, repassant devant l'Amérique du nord, de très loin. Aux Etats-Unis et au Canada anglophone (-61%), seuls Elle et Les innocentes ont dépassé le million de dollars de recettes. Mais ce territoire reste le plus important pour l'export français.
L'Asie s'affiche aussi en baisse, notamment en Chine où le recul est de 93%! Les Saisons a été le film le plus vu au Japon, 2e marché de la zone, avec 421 000 entrées.
En Espagne, ça chute de 46%, en Allemagne (où la fréquentation globale est en fort recul), de 30%, en Italie (2e marché après les USA, sauvé grâce au Petit Prince), de 15% et en Belgique et Luxembourg de 13%, pour ne prendre que les cinq plus gros marchés.
Au Québec on enregistre 676 000 entrées pour le cinéma français (11% de parts de marché), grâce notamment aux 86 000 entrées du Petit Prince, mais aussi aux très jolis scores de Demain et de La Vache, qui viennent compléter le podium.