Roger Dumas (1932-2016), de L’Homme de Rio à Capitaine Flam en passant par Johnny et Gabin

Posté par vincy, le 3 juillet 2016

Difficile de faire plus "variété" que Roger Dumas, éternel second-rôle du cinéma français, saltimbanque assumé, troubadour méconnu et finalement artiste intégral. Né le 9 mai 1932 au fin fond de l'Ardèche, département sans train, il est décédé à Paris à l'âge de 84 ans samedi 2 juillet.

Difficile de résumer sa carrière prolifique. Au théâtre, il a été sur les planches durant 60 ans, interprétant du Sam Shepard, le Monte Cristo d'Alexandre Dumas, du Harold Pinter, du Samuel Benchetrit (empochant un Molière au passage), et même "Hysteria" mise en scène par John Malkovich, et écrivant même une pièce en 2010," A propos de Martin". Sa dernière apparition fut dans L'Etudiante et Monsieur Henri il y a quatre ans.

Au cinéma, après quelques figurations, notamment dans un Arsène Lupin, chez Hossein et chez Cayatte, il se fait remarquer dans Rue des prairies, en 1959, aux côtés de Jean Gabin. Les années 1960 lui seront profitables. Avec son bagout de chansonnier, sa sensibilité perceptible et son physique passe-partout, on le retrouve dans le délirant Pouic-Pouic, avec Louis De Funès et Jacqueline Maillan, en copain de régiment de Belmondo dans L'homme de Rio (avec la réplique finale fabuleuse, "Quelle aventure!"), dans quelques Chabrol mineurs (Le tigre aime la chair fraiche et Le tigre se parfume à la dynamite), le culte Caroline chérie.

Acteur éclectique

Il reste dans la comédie dans les années 1970 avec Tendre poulet de Philippe de Broca (Girardot, Noiret), en inspecteur sérieux mais drôle. Retrouve Bébel dans Le Marginal de Jacques Deray. Se glisse dans le casting prestigieux de Fort Saganne d'Alain Corneau (Depardieu, Deneuve, Marceau). Reviens à la comédie avec Edouard Molinaro, Claude Zidi, retourne chez De Broca (Chouans!) et chez Chabrol (Masques). Bizarrement, c'est à la fin des années 1980 que Dumas change de registre avec Enki Bilal (Bunker Palace Hotel, Tykho Moon), Olivier Assayas (Une nouvelle vie, Les destinées sentimentales), Roger Hanin (Soleil), Claude Berri (Ensemble, c'est tout), Yasmina Benguigui (Inch'Allah dimanche), Samuel Benchetrit (J'ai toujours rêvé d'être un gangster), Rémi Bezançon (le grand père dans Le premier jour du reste de ta vie), Radu Mihaileanu (Le concert) ou encore Safy Nebbou (L'autre Dumas). Le grand public l'aura surtout vu en Maître Valoche dans le deuxième opus des Visiteurs.

Il n'appartenait à aucune église, aucune chapelle. Solide, il a donné la réplique à toutes les stars françaises à travers les époques, de Sophia Loren à Jean-Louis Trintignant, de Huppert à Tautou en passant par Béart ou Mélanie Laurent. Cet homme réputé sympathique  et gentil, discret et éclectique, aimait jouer. Pour le petit écran, il a été invité dans différentes séries ("Un village français", "Les cinq dernières minutes", "Navarro", "Commissaire Moulin", "Vénus et Apollon",...) et  joué dans Les Misérables et Le Comte de Monte-Cristo de Josée Dayan, qui l'a régulièrement enrôlé dans ses téléfilms.

Parolier prolifique


Il avait également joué régulièrement à la télévision, notamment dans des séries ("Les Cinq dernières minutes", "Navarro", "Julie Lescaut", "Un village français") ou des téléfilms de Josée Dayan ("Les Misérables", "Le Clan des Lanzac").

Mais c'est peut-être sa carrière de paroliers qu'il faut souligner. Il a écrit des chansons pour Dani, Richard Anthony, Patachou, Carlos, Marie Laforêt, mais surtout Johnny Hallyday ("Deux amis pour un amour"), Sylvie Vartan ("Comme un garçon" entre autres) et Chantal Goya. Oui, c'est à ce grand monsieur de la scène, ce comédien capable d'être généreux, inquiétant, empathique, que l'on doit des dizaines de chansons pour enfant. Et surtout c'est à cause de lui qu'on connaît tous ces paroles...

Bilan 2010 – Polanski en tête des films exportés

Posté par vincy, le 24 janvier 2011

Malgré de très belles performances, le cinéma français (qui inclue les coproductions internationales entrées totales dans ce bilan) qui représentent 15% des ) est en recul sur les marchés internationaux. On pourrait se réjouir, malgré tout, que les films "made in France" aient attiré 57,2 millions d'entrées dans le monde (67, 2 millions l'an dernier) et rapporté plus de 330 millions d'euros (20 millions d'euros en moins par rapport à 2009). Cela signifie que près de 130 millions de spectateurs ont vu un film français cette année. Pas si mal, mais encore une fois, la baisse (-17,9% pour les entrées, -6% pour les recettes) est inquiétante. D'autant qu'il y avait quelques poids lourds (Polanski, Besson), des films cités dans différents palmarès locaux, des adaptations de best-sellers internationaux...

Seul rayon de lumière : les films en langue française représentent pour la première fois en dix ans plus de la moitié des entrées (soit 55,2%).

Des marchés dynamiques et des contre-performances

Les films français ont particulièrement été séduisant en Italie (+142%), aux USA pour les films en français (+36%) - même si dans ces deux pays on est loin des niveaux d'antan - en Russie (+42%), en Espagne (+30%), au Royaume Uni (+79%), aux Pays-Bas (+51%) et au Japon (+25%). Gros bémol en Allemagne (-30%) et en Chine (-43%). Aux USA, la chute des films français, toutes langues confondues, est de 45%, ce qui est imputé à l'énorme succès de Taken en 2009.

Géographiquement, l'Europe occidentale reste la locomotive de l'exportation des films français avec 38,9% des entrées, devant l'Amérique du Nord (27,5%), l'Asie (15%), l'Europe Centrale et Orientale (8,1%), l'Amérique Latine (6,3%), l'Océanie (2,2%) et l'Afrique (2%). Côté pays, les USA demeure toujours le marché leader avec 13,07 millions d'entrées, devant l'Italie, l'Espagne, l'Allemagne, le Japon, la Russie, le Royaume Uni, la Chine et la Belgique.

Polanski, Besson, Perrin affichent de bons chiffres partout dans le monde

3 leaders incontestables ont dominé les entrées en salles à l'international. The Ghost-Writer (6,57 millions d'entrées dans 27 pays), Luc Besson (6,56 millions d'entrées pour From Paris With Love et 3,19 millions d'entrées pour Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec) et le documentaire Océans (6,52 millions d'entrées dans seulement 14 territoires).

Loin derrière, on peut souligner les succès de certains films très différents : Le concert (1,8 million), Solomon Kane (1,7 million), Le Petit Nicolas (1,2 million et un total sur deux ans de 2 millions), le documentaire Bébés (1,1 million), Arthur et la vengeance de Malthazard, Un prophète (qui a fait autant en France que dans le monde avec 1,1 million de spectateurs internationaux sur deux ans), L'immortel, Le Hérisson, L'Arnacoeur (750 000 entrées dans le monde), Micmacs à tire-larigot, Des hommes et des Dieux (600 000 entrées dans le monde).

Elle s'appelait Sarah bat un record aux Pays-Bas

On remarque aussi la belle continuité du Ruban Blanc (917 000 entrées, soit 1,46 million de spectateurs en dehors de la France depuis sa Palme d'or). Et surtout la belle performance d'Elle s'appelait Sarah avec 487 000 entrées sur 3 territoires, dont 425 000 fans rien qu'aux Pays-Bas, soit un record historique puisque le film a battu le premier Astérix et Amélie Poulain. Au pays des tulipes, Tatiana de Rosnay, auteure du livre homonyme, est l'écrivain étrangère la plus vendue en librairie.

On peut aussi se féliciter des 420 000 entrées pour Gainsbourg (vie héroïque), des 282 000 entrées pour Copie conforme et du bon débit de la carrière internationale de Potiche avec déjà 320 000 entrées dans 6 pays.

Créer un star-système pérenne et persévérer dans la diversification de l'offre

Le cinéma français est le cinéma européen qui s'exporte le mieux, devant le cinéma espagnol, si l'on excepte le cinéma britannique, souvent aidé par les studios américains. Mais pour conserver sa place, il doit persévérer dans cet équilibre entre productions internationales en langue anglaise et films d'auteurs destinés aux grands festivals. Il est intéressant de voir que la littérature est devenue un vecteur de succès : un best-seller (L'élégance du Hérisson, Elle s'appelait Sarah, Le petit Nicolas) transforme souvent l'essai au cinéma.

Alors qu'Unifrance, l'organisme chargé de la promotion du cinéma français dans le monde, va changer de Président, les enjeux et défis ne manquent pas dans un monde cinéphile en mutation : le cinéma français doit moins dépendre des gros marchés occidentaux et continuer d'offrir un panel varié alliant du thriller à l'animation en passant par la comédie romantique, tout en continuant à miser sur ses vedettes internationales ou son patrimoine universel.

Sortie québécoise reportée pour Le concert

Posté par vincy, le 8 juillet 2010

Mercredi 30 juin, le quotidien la Presse annonçait "Dommage, pas de Concert..." ! Le Concert, film de Radu Mihaileanu, prix du public au Festival Cinemania de Montréal en novembre dernier, devait sortir le 2 juillet au Québec.

Mais les Films Séville, le distributeur local, a été contraint de le retirer des écrans, et de reporter la sortie au mois d'août. En effet, une clause contractuelle oblige les Films Séville à sortir le film après le distributeur nord-américain, en l'occurrence The Weinstein Company.

Du coup, La Presse a sorti le grand jeu patriotique (rappelons que l'auteur de ces lignes est aussi canadien). Marc-André Lussier a signé un édito, "La goutte de trop", vendredi dernier : "Les Américains sont ici chez eux. Bien malin celui qui parviendra, après bientôt 100 ans de régime féodal, à rétablir un rapport de force quelconque avec un seigneur aussi puissant. Pour rien au monde, il ne céderait son petit point de pourcentage de revenus en respectant le caractère spécifique du Québec et de ses distributeurs, lesquels connaissent pourtant autrement mieux qu'eux ce marché. Qu'un distributeur américain impose ses règles pour un film produit aux États-Unis, cela va de soi. Mais quand ce même distributeur impose chez nous sa loi avec arrogance pour des films étrangers – particulièrement les films français –, il ajoute l'insulte à l'injure. C'est la goutte de trop."

Il ajoute que cette affaire "met en relief la marge de manoeuvre désormais quasi inexistante dont disposent les distributeurs d'ici, même avec les productions étrangères (autres qu'américaines, il va sans dire). Voilà qui explique, entre autres choses, les délais inacceptables de «livraison» des films français et internationaux en nos terres."

Le Canada n'est en effet qu'un territoire nord-américain d'un point de vue cinématographique. Toronto est un marché comme Chicago, Calgary comme Seattle. Le box office US est en fait un Box Office nord-américain.

Aux Etats-Unis et dans le Canada anglophone, Le concert sortira le 23 juillet.

Les films français que nous pourrions voir à Cannes

Posté par vincy, le 18 janvier 2009

l'elegance du herisson josiane balaskoJanvier, c'est la dernière line droite. Berlin, première levée du grand chelemn des festivals, a annoncé la couleur en recrutant Costa-Gavras, Ozon, Chabrol, Breillat, Lioret et surtout Tavernier, dont la sortie était en suspens depuis neuf mois... Cannes, toutes sélections confondues, a quand même de nombreuses cartes en main pour séduire les festivaliers.

Il semble que Jeunet ne pourra montrer qu'un teaser ou un extrait de son MicMacs à tire-larigot, qui devrait être prêt au début de l'été. Mais, cette déception sera compensée par d'immenses possibilités. Côté animation, Sylvain Chomet (Les triplettes de Belleville) devrait pouvoir présenter L'illusioniste (d'après une histoire de Jacques Tati). Et pour les documentaires, on voit mal Cannes passer à côté de Home, réalisé par Yann Arthus-Bertrand et produit par Luc Besson.

Parmi les habitués de Cannes, Robert Guédiguian (L'armée du crime), Alain Resnais (Les herbes folles), Christophe Honoré (Non, ma fille), Xavier Gianoli (Je voudrais te dire), Patrice Chéreau (Persécution), Lucas Belvaux (Rapt!) et Tsai Ming-Liang (Visages, tourné à Paris) font évidemment figures de favoris. Mais, parmi eux, quelques uns, recalés ou préférant ne pas trop être exposés à la dureté de la critique cannoise, feront le choix vénitien.

La jeune génération, déjà repérée à Cannes, désirant sans doute un peu de promotion pourra compter sur Julie Lopes-Curval (La cuisine) et Mia Hansen-Love (Le père de mes enfants). On peut aussi imaginer que Olivier Ducastel /Jacques Martineau (plus habitués à Berlin), avec L'arbre et la forêt, ou Fanny Ardant, avec son premier film, Cendres et sang, intéressent les programmateurs.

Audiard, Van Dormael, Mihaileanu et un hérisson...

Pourtant, les marches pourraient être montées par d'autres.... Jacques Audiard, par exemple, sans doute l'un des meilleurs cinéastes français depuis quinze ans, aurait toutes ses chances avec Un prophète. Jaco Van Dormael semble inévitable. Même si le réalisateur est belge, la production est essentiellement française. Le film, Mr. Nobody, sera prêt à temps, douze ans après Le huitième jour. Un choix passionnant serait Le concert, de Radu Mihaileanu (Va, vis et deviens), avec Mélanie Laurent. Enfin, le match des Coco Chanel, normalement prévu en avril dans les salles françaises, pourrait êre décalé si Coco avant Chanel, d'Anne Fontaine, avec Audrey Tautou, se retrouvait dans une des sélections officielles. Nul ne doute qu'au marché, on observera avec attention le box office de celui-ci et de celui de Jan Kounen, Coco Chanel et Igor Stravinsky, avec Anna Mouglalis.

Ultime possibilité, mais non des moindres : un premier film, produit par Anne-Dominique Toussaint (Caramel), en lice pour le poste de la présidence d'Unifrance. Ce premier film de Mona Achache est l'adaptation littéraire de L'élégance du hérisson, best-seller européen (en France, plus de un million trois cent mille exemplaires se sont vendus, alors que l'édition poche n'est pas encore parue), avec Josiane Balasko, qui vise le César 2010, Garance Le Guillermic et Togo Igawa. le film ne doit sortir qu'en octobre, et pourtant, la productrice a surpris tou le monde en disant qu'elle pensait pouvoir proposer une version à Thierry Frémaux au début du printemps. Assurément, ce serait le plus beau coup français du Festival.