Vesoul 2015 : coup de projecteur sur le cinéma du Laos

Posté par MpM, le 15 février 2015

coup de feu dans la plaine des jarresL'une des grandes spécialités du Festival de Vesoul est de proposer régulièrement des rétrospectives sur des cinématographies rares et méconnues. Cette année, c'est ainsi le Laos qui est à l'honneur avec la sélection de cinq films représentatifs de la période 1975-2015.

En effet, on ignore presque tout de la production cinématographique avant la prise de pouvoir du Pathet Lao (mouvement communiste) au milieu des années 70. Il semblerait que seuls deux documentaires aient été tournés avant les années 50 et que plusieurs fictions aient été produites entre 1960 et 1975, mais seule une liste de quinze titres (dont aucun n'est aujourd'hui visible) subsiste.

En 1983, après s'être concentré sur les films documentaires, le département cinématographique du gouvernement communiste décide de produire sa première fiction. Ce sera Le son des coups de feu dans la plaine des jarres de Somchit Phonsena, une reconstitution romancée de l'évasion du peloton patriotique laotien encerclé dans la plaine des jarres. Malgré son caractère de film de propagande, il sera rapidement censuré et disparaîtra pendant 31 ans des écrans, avant de réapparaître en avant-première mondiale au FICA de Vesoul 2015.

En 1988, le département cinéma s'essaie à une autre fiction, Le lotus rouge de Som Ock Southiponh, une romance révolutionnaire en noir et blanc qui dépeint avec précision la vie au Laos dans les années 70, et qui a elle-aussi les honneurs d'une projection vézulienne.

Il faudra ensuite attendre la fin des années 90 pour que reprenne une production cinématographique laotienne, très largement dévouée au régime. En 2008, Bonjour Juang Prabang, le premier long métrage produit avec des fonds privés, voit le jour. Il s'agit d'une comédie romantique à petit budget qui rencontre un succès important auprès du public laotien.

Suivront A l'horizon d'Anisay Keola, premier polar de l'histoire du pays, et Chanthaly, premier film fantastique (c'était jusque-là interdit) par ailleurs réalisé par une femme, Mattie Do. Tous trois figurent dans la programmation du FICA 2015.

Malgré la faiblesse des infrastructures (2 cinémas, 9 écrans), la censure locale qui contrôle les œuvres à tous les stades de création ou encore le manque de moyens humains comme financiers, on perçoit ainsi une vraie reprise du cinéma laotien qui devrait désormais proposer plusieurs productions par an. Avec, qui sait, un film laotien pour la première fois en compétition dans un festival international en 2016 ? Ce ne serait pas la première fois que le FICA ouvrirait la voie.

Vesoul 2015 : premières révélations sur la 21e édition

Posté par MpM, le 9 juin 2014

Jean-Marc et Martine ThérouannePour ceux qui en doutaient, un Festival de cinéma se prépare au moins un an en avance. Martine et Jean-Marc Thérouanne, les organisateurs du Festival international des Cinémas d'Asie de Vesoul (FICA), n'étaient donc pas venus au dernier Festival de Cannes dans l'idée de se reposer après le succès de leur 20e édition, mais bien pour travailler d'arrache-pied à la suivante qui se tiendra du 10 au 17 février 2015.

Au programme, des films bien sûr, mais surtout des réunions et des rencontres afin de garder un contact étroit avec le microcosme toujours plus important du cinéma asiatique. L'idée n'est pas tant de découvrir les longs métrages qui seront les pépites de la compétition 2015 ("C'est trop tôt", souligne Martine Thérouanne, qui mise plutôt sur le Festival de Pusan en octobre) que de tisser et renforcer les liens indispensables qui permettent aux organisateurs de faire venir chaque année à Vesoul les plus grandes stars du cinéma asiatique.

"Par exemple, nous avons participé à la journée franco-chinoise organisée par le CNC. Nous aurons en 2015 un focus sur le cinéma chinois donc c'était extrêmement important d'être là", explique Jean-Marc Thérouanne. " Nous avons rencontré un certain nombre de réalisateurs chinois comme Liu Hao [Addicted to love, Cyclo d'or à Vesoul en 2011] et Liu Bingjian [Les larmes de Madame Wang, prix du Jury Netpac à Vesoul en 2003]."

Par ailleurs, les organisateurs ont également rencontré le cinéaste Jia Zhang-Ke à plusieurs reprises durant la quinzaine cannoise et ont pu lui proposer d'être le président du jury de la prochaine édition. "Il nous a donné son accord de principe, mais tout dépendra de sa disponibilité à ce moment de l'année", précise Martine Thérouanne. Bien sûr, pour un organisateur de Festival plus que pour quiconque, rien n'est jamais certain tant que les invités ne sont pas là en chair et en os, mais c'est en tout cas une excellente nouvelle pour lancer le 21e FICA.

Et ce n'est pas la seule. En effet, les organisateurs travaillent également à une rétrospective sur le cinéma du Laos, dans le cadre de la section "Francophonies d'Asie". "Nous avons mandaté Bastian Meiresonne [l'un des spécialistes de cinéma asiatique qui travaille pour le FICA] pour aller voir sur place ce qui existe physiquement dans les archives et dans quel état c'est. Nous aimerions notamment montrer Le lotus rouge de Som-Ok Southiphone un film mythique de 1988 remarqué dans de nombreux festivals internationaux", précise Jean-Marc Thérouanne.

Enfin, l'intitulé de la section thématique du prochain FICA est également connue. Il s'agira de "Tenir en haleine". Avis aux amateurs de cinéma de genre, mais pas seulement, puisque les organisateurs ont prévu de montrer plus largement des films "avec une intrigue extrêmement forte". On n'est donc pas au bout de nos émotions, quelles qu'elles soient ! Mais ça, avec la manifestation vésulienne, on en a pris l'habitude.

Musée Guimet : focus sur le cinéma thaïlandais contemporain

Posté par MpM, le 31 janvier 2009

Au fil du MékongAvec son nouveau cycle "Au fil du Mékong", l’auditorium du Musée des arts asiatiques propose jusque fin juin une programmation éclectique s’intéressant à trois pays bordés par le célèbre fleuve : la Birmanie, le Laos et le Thaïlande. Si les deux premiers seront uniquement abordés sous l’angle des "rites et croyances des peuples et minorités ethniques" (les nagas birmans, le peuple karenni, le bouddhisme et les bouddhas d’or, les rites laotiens…) par le biais d’une quinzaine de documentaires, le dernier bénéficiera à la fois de cette facette thématique (les esprits, les Akhas, la fête des eaux…) et d’une exploration plus fictionnelle offrant un véritable panorama du cinéma thaïlandais contemporain.

Cette cinématographie, qui s’impose depuis une dizaine d’années comme l’une des plus originales et novatrices du monde, existe quasiment depuis l’invention des frères Lumière. Elle a connu un premier âge d’or dans les années 30 et un véritable renouveau à la fin des années 70. Mais la concurrence conjointe des films hollywoodiens et de l’essor de la télévision a réduit de manière drastique la production locale après 1981. La Thaïlande est ainsi passée de 150 films locaux par an en 1978 à seulement une dizaine au milieu des années 90.

La nouvelle vague actuelle a été initiée par trois réalisateurs de publicité (Nonzee Nimibutr, Pen-ek Ratanaruang et Wisit Sasanatieng) qui, en 1997, décident de reprendre la Blissfully yourscinématographie locale en mains en proposant une qualité artistique susceptible de séduire aussi bien les investisseurs que le public. Cela donne 2499 antapan krong muang (écrit par Wisit Sasanatieng et réalisé par Nonzee Nimibutr) et Fun Bar Karaoke (de Pen-ek Ratanaruang, Prix spécial du jury au Festival des 3 continents de Nantes), qui sont d'énormes succès au box-office thaïlandais.

Un cinéma en vogue depuis huit ans

Mais très vite, l’engouement gagne les grands festivals internationaux. En 2001, le western stylisé Les larmes du tigre noir de Wisit Sasanatieng est le premier film thaïlandais sélectionné au Festival de Cannes. Suivent Monrak transistor (Quinzaine des réalisateurs 2002) et Ploy de Pen-ek Ratanaruang (Quinzaine des réalisateurs 2007) ainsi que deux autres de ses œuvres qui reçoivent les honneurs de Venise et Berlin : Last life in the universe, présenté à la Mostra en 2003 et Vagues invisibles, en lice pour l’Ours d’or en 2006. Enfin, autre grand réalisateur révélé et porté aux nues par le Festival de Cannes, Apichatpong Weerasethakul y reçoit le prix du meilleur film de la section Un certain regard pour Blissfully yours en 2002 et le prix du jury pour Tropical malady en 2004, avant d’être l’un des jurés de la compétition officielle en 2008.

Citizen DogA noter que tous ces films figurent parmi ceux projetés à Guimet d’ici la fin du mois de juin, ce qui en dit long sur la qualité de la programmation. Ce "Regard sur le cinéma thaïlandais contemporain" offre en effet un panorama passionnant des films et des auteurs qui comptent et ont compté en Thaïlande depuis la fin des années 90, ne faisant l’impasse ni sur le courant léger et ultra-loufoque où s’inscrit par exemple la délirante comédie musicale Citizen dog, ni sur la cinématographie plus exigeante et déconcertante représentée par les longs-métrages oniriques et mystérieux d’Apichatpong Weerasethakul. L’occasion de (re)découvrir, en une douzaine de films, toute la richesse et l’inventivité de ce cinéma thaïlandais que l’on ne se lasse pas de voir venir à nous.
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Du 2 février au 24 juin 2009
Séances à 12h15 les lundis, mercredis ou vendredis selon les semaines
Programme complet et informations sur le site de l’Auditorium Guimet