Bilan 2008 : les exportations du cinéma français, record en trompe l’oeil

Posté par vincy, le 17 janvier 2009

vin diesel babylon a.d.Cela faisait quinze ans que le cinéma français n'avait pas été aussi populaire à l'étranger. Le chiffre définitif sera connu en mai, sachant que des entrées en Amérique du Sud et en Asie ne sont pas encore comptabilisées. Cependant, avec 78 millions de spectateurs hors de France, c'est presque autant que le nombre de spectateurs en France pour des films français (82 millions). C'est surtout une belle hausse de 16% comparée à l'an dernier, même si ce genre de chiffres n'a pas beaucoup de signification tant les films sortent en décalé. Par exemple, Entre les murs commence tout juste sa carrière aux USA et Mesrine ou Largo Winch ne sont pas encore sortis hors territoires européens francophones. A l'inverse, les "hits" à l'export sont sortis sur tous les territoires, et, donc, ont fait le plein.

On constate de toute façon une bonne santé du cinéma produit en France, pas forcément en langue ou de culture française. De 38 millions d'entrées en 2000, aujourd'hui le résultat est plus que doublé. Le record précédent était de 76 millions de spectateurs, en 2005, grâce au succès de La marche de l'Empereur, notamment en Amérique du Nord, avec une version complètement remaniée pour la sortie internationale. En 2005, surtout, les films français avaient séduit davantage à l'étranger que dans leur propre pays.

Cette année, l'industrie peut remercier les productions "hollywoodiennes" anglophones, produites par l'ex génération montante, autrefois associée, Besson et Kassovitz. En ce sens, ceux qui ont "digéré" les méthodes des studios américains, ont réussi leur pari, assouvi leurs ambitions, et trusté les meilleures places.

Kassovitz est médaille d'or et fera taire ceux qui ont méprisé Babylon A.D. Le film a attiré 10 millions d'entrées dans le monde. Cela ne suffit pas à le rendre rentable, mais cela conforte l'idée, qu'un blockbuster, même français, a un fort potentiel mondial.

Langman, médaillé d'argent, peut aussi ricaner face aux critiques sur son Astérix aux Jeux Olympiques. La franchise a fait largement mieux en dehors de nos frontières. Avec 9,1 millions d'entrées, principalement en Europe et au Québec, le héros gaulois reste une solide star dans les salles, même avec une production décevante. Faut-il une surenchère dans les budgets pour arriver à de telles fins?

Luc Besson suit avec deux de ses productions anglo-saxonnes. Taken, avec Liam Neeson, a conquis 8,8 millions d'otages et Le Transporteur 3 a véhiculé 7,3 millions de spectateurs vers les salles. Des quatre films les plus vus, ce dernier est celui qui peut encore grimper dans le box office, n'ayant pas encore achevé sa carrière internationale.

A l'inverse, des films comme Persépolis (1,3 millions) et Caramel (1,2 millions) ont prolongé leus beaux scores de 2007, confirmant l'intérêt pour des films d'auteur, généreux, cosmopolites. La graine et le mulet a ainsi charmé 720 000 spectateurs dans le monde et continue de remplir ses quelques salles à New York et Los Angeles. Entre les murs, pas encore complètement déployé, a été cherché 625 000 spectateurs. La plus belle surprise devrait être Il y a longtemps que je t'aime, bénéficiant de très jolies fréquentations au Royaume Uni et aux Etats-Unis, avec déjà 1 million d'amoureux dans le monde. Pas mal pour un premier film réalisé par un écrivain. On peut aussi trouver notable les 4,2 millions de curieux qui ont découvert en version originale sous titrée ou version locale folklorique Bienvenue chez les Ch'tis. Rien qu'en Allemagne, ils ont déjà été un million, et ce n'est finit. Pourtant, le nombre d'entrées en Allemagne, mais aussi en Russie, est en diminution.

Cependant, l'Europe reste le plus gros marché avec 60% des entrées. Mais, les Etats-Unis reste le pays le plus important, avec 17,8 millions d'entrées, principalement grâce à Besson et Kassovitz. Les films d'auteur qui ont le mieux fonctionné son Persépolis, il y a longtemps que je t'aime, et ces dernières semaines Conte de Noël (200 000 spectateurs au total dans le monde à date).

On peut aussi voir les choses différemment. Avec 353 productions hexagonales sorties à l'étranger, et seulement onze ayant dépassé le million d'entrées, la contraction de la fréquentation autour de quelques films semble la tendance lourde, uelque soit le marché, et les producteurs.

Tchao Claude Berri (1934-2009)

Posté par vincy, le 12 janvier 2009

claude berriProducteur, réalisateur et collectionneur, Claude Berri était une figure centrale du cinéma français, et plus généralement du rayonnement culturel du pays. Son second accident vasculaire cérébral - le premier date de 2006 - lui aura été fatal. Son décès a été officialisé ce lundi 12 janvier. Il s'éclipse après sa plus belle année : le record des Ch'tis et le César du meilleur film (La graine et le mulet).

Comme producteur, à travers sa filiale Renn, cédée à Pathé il y a quelques années, on lui doit des films aussi variés que Tess, L'Africain, L'ours, La petite voleuse, L'amant, La reine Margot, Didier, Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, Les sentiments, La graine et le mulet, Bienvenue chez les Ch'tis...

Réalisateur de 20 films depuis Le vieil homme et l'enfant en 1967, il avait réalisé des oeuvres personnelles comme Le cinéma de papa, Je vous aime et Tchao Pantin. Il s'attaque aux grandes adaptations liitéraires avec le diptyque pagnolesque, Jean de Florette (7,2 millions d'entrées) et Manon des Sources avant de réaliser Uranus, Germinal, Lucie Aubrac. En 1999, il revient à la comédie de moeurs avec La débandade. Avec L'un reste, l'autre part en 2005, il renoue avec le succès critique. Surtout, Ensemble c'est tout, en 2007, lui permet de faire son plus gros succès public depuis Germinal.

Déjà, il était assisté par François Dupeyron sur le plateau. Claude Berri tournait Trésor, avec Alain Chabat et Mathilde Seigner. le tournage continuera avec Dupeyron.

Berri était aussi l'auteur d'Autoportrait, une autobiographie parue chez Leo Sheer en 2003. Marié à l'écrivain Nathalie Rheims, père de trois enfants (dont le producteur de Mesrine, Thomas Langmann), il était président d'honneur de la Cinémathèque française après l'avoir dirigée de 2003 à 2007. Il avait réussi à concrétiser sa passion : ouvrir un espace d'art contemporain, où il exposait, depuis mars, sa collection, afin de faire découvrir de nouveaux artistes.

Gomorra, grand gagnant des European Film Awards

Posté par vincy, le 7 décembre 2008

statue.gifEn recevant le Prix du meilleur film européen le 6 décembre à Copenhague, Gomorra, adaptation du best-seller de Roberto Saviano, Grand Prix du jury à Cannes et représentant l'Italie pour l'Oscar du meilleur film en langue étrangère, conjure un absence de onze ans dans ce palmarès, depuis La vita è bella en 1997. Le film de Garrone obtient cinq prix, dont celui du meilleur acteur partagé avec un autre film italien primé à Cannes, Il Divo : le comédien Toni Servillo jouant dans les deux. Deux autres prix son à distingués. Hunger, découverte de l'année, qui confirme ainsi sa Caméra d'or cannoise. Et Kristin Scott-Thomas en meilleure comédienne dans le film français Il y a longtemps que je t'aime. L'actrice pourrait obtenir une nomination à l'Oscar pour ce film, mais surtout part favorite pour les César, face à Deneuve, Testud, Baye et Moreau (Yolande).

Meilleur film : GOMORRA (Italie)
Meilleur réalisateur : Matteo Garrone (Gomorra, Italie)
Meilleur acteur : Toni Servillo (Gomorra et Il Divo, Italie)
Meilleure actrice : Kristin Scott Thomas (Il y a lontemps que je t'aime, France)
Meilleur scénario : Maurizio Braucci, Ugo Chiti, Gianni di Gregorio, Matteo Garrone, Massimo Gaudioso & Roberto Saviano (Gomorra, Italie)
Meilleure photo : Marco Onorato (Gomorra, Italie)
Prix d'excellence : Magdalena Biedrzycka (costumière de Katyn, Pologne)
Meilleur compositeur : Max Richter (Valse avec Bashir, Israël)
Découverte de l'année : Hunger, de Steve McQueen (Royaume Uni)
Prix FIPRESCI de la critique européen : La graine et le mulet (France)
Prix Arte du meilleur documentaire : René, de Helena Trestikova
Prix UIP du meilleur court métrage : Frankie, de Darren Thornton

Prix d'honneur : Dame Judi Dench

Prix pour la contribution européenne au cinéma mondial : Le Dogme danois - Søren Kragh-Jacobsen, Kristian Levring, Lars von Trier, and Thomas Vinterberg

Prix du public 2008 : Harry Potter et l'ordre du Phoenix, de David Yates (Royaume Uni)

Les « Oscars » européens se préparent

Posté par vincy, le 5 octobre 2008

Les "European Film Awards" ont toujours du mal à s'imposer, jamais cités dans les dossiers de presse, rarement mentionnés sur les affiches, valorisés ad minima dans les articles de presse. Si l'échec populaire et médiatique est patent, il faut au moins reconnaître que, cinématographiquement, l'audace est de mise. Ils viennent de révéler les quatre films en course pour le prix de la meilleure première oeuvre et, reconnaissons, qu'il y a une volonté de primer des cinémas singuliers : Hunger, de Steve McQueen (Royaume Uni), Premières neiges, de Aida Begic (Bosnie Herzégovine), Tulpan, de Sergey Dvortsevoy (Kazakhstan), tous trois primés à Cannes, mais aussi Tatil Kitabi, de Seyfi Teoman (Turquie).

Pour les nominations dans les autres catégories, la France a présenté Bienvenue chez les Ch'tis, Un conte de noël, Entre les murs et La graine et le mulet. On note que de nombreux films "cannois" sont dans le "pipeline" comme Moscow, Belgium, Delta, Gomorra, Il Divo, Home, O'Horten, Le silence de Lorna, Valse avec Bashir, Trois singes, Wolke 9...
Parmi les grands cinéastes en lice pour la nomination au prix du meilleur réalisateur, on note la présence de Nikita Mikhalkov, Mike Leigh, Andrzej Wajda, Sergei Bodrov.

On sait déjà que Dame Judi Dench, oscarisée, jamesbondisée, shakespearisée, sera honorée d'un prix spécial pour l'ensemble de sa carrière. De même les fondateurs du Dogme danois, créé en 1995, lancé sur les écrans en 1998 avec Festen et Les Idiots, seront récompensés d'un prix pour leur contribution au cinéma mondial. Thomas Vinterberg, Lars Von Trier, Kristian Levring et Soren Kragh-Jacobsen seront, à coup sûr, les vedettes de cette 21e cérémonie, qui aura lieu cette année, le 6 décembre, à Copenhague.

Oscars : le G7 français

Posté par vincy, le 28 juillet 2008

Chaque année, une commission doit choisir le film qui représentera la France dans la course aux Oscars. Plusieurs fois, nous nous lamentons contre le choix parfois trop artistique, parfois complètement saugrenu. Les Oscars étant avant tout une compétition marketing. Cette année, en avançant sa date de sortie, Entre les murs, Palme d'or, acquis récemment par Sony Classics, a toutes les chances d'être sélectionné. Il y a peu de concurrents parmi les films sortis entre le 1er octobre 2007 et le 30 septembre 2008, hormis le césarisé La graîne et le mulet.

La commission réunira : Pierre Chevalier, Président de la commission d’avances sur recettes, Thierry Frémaux, délégué général du festival de Cannes, membres de droit de la commission et des personnalités désignées par la Ministre Christine Albanel : Alain Terzian, Président de l’Académie des Césars, Jeanne Moreau, Jean-Jacques Annaud, Costa-Gavras et Régis Wargnier.

Thierry Frémeaux est donc le seul quadra de cette commission. Quid de la rupture et du sang frais tant recherchés par le Président de la République?

Un bel hiver pour Pathé

Posté par vincy, le 28 février 2008

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Pathé distribution peut pousser un gros Cocorico. La Graine et le mulet a récolté 4 César. Into the Wild a franchi le cap du million d'entrées. Astérix aux Jeux Olympiques, même s'il déçoit avec un mauvais bouche à oreilles et une position de leader déjà contestée au bout de trois semaines, se permet d'être le film français le plus populaire depuis deux ans, dépassant La Môme et Camping. Ces cinq dernières années, seuls Les Bronzés 3 (2006), Les Choristes (2004) et Taxi 3 (2003) ont été plus populaires.

Résultat, Pathé se classe leader des distributeurs depuis le 1er janvier 2008, avec 4 films en salles (dont 2 nouveautés). La société de la rue François 1er affiche une part de marché nationale de 28% au 19 février, soit trois fois plus que Paramount Pictures France, bon deuxième.

A cela s'ajoute la sortie tonitruante de Bienvenue chez les Ch'tis. 64 salles dans trois départements ont suffit à le placer dans les cinq films les plus vus du pays. Et lors de sa première journée, dans 780 salles, le film de Boon a réalisé le deuxième meilleur démarrage national. De quoi installer Pathé en haut du podium. La place sera vite convoitée et le "line-up" des sorties du premier semestre nous fait dire que sa position reste fragile.

Des titres usurpateurs

Posté par vincy, le 23 février 2008

Drôle de presse. Aux lendemains des César, Le Monde titre "Les Césars se démarquent du box office en récompensant La graine et le mulet". Ah? Pourtant le film de Kechiche a séduit 660 000 spectateurs, après avoir trouvé dès sa sortie un large public. C'est deux fois plus que Le scaphandre et le papillon... Selon le classement du Film Français, le film est même l'un des vingt films français les plus vus depuis un an. Pas franchement un fiasco public ni même une oeuvre confidentielle... C'est l'impression qui compte...
Le Parisien, qui avait plébiscité La Môme dans son édition de la veille, a essayé d'être beau joueur. "La graine et le mulet a créé la surprise en obtenant quatre récompenses." Ah? prix Louis-Delluc, plusieurs fois récompensé aux Etoiles d'or, aux prix Lumières, et même au Festival de Venise, on ne peut pas dire qu'il partait en outsider. Tous les professionnels, y compris les journalistes, savaient qu'il était même le favori, et de loin, dans la catégorie meilleur film. Aucune surprise donc, sauf à ne pas comprendre comment les professionnels de la profession votent depuis trente trois ans... Libération, pour une fois assez juste dans son commentaire comme dans la critique de la soirée confirme "la tendance auteuriste des votants aux césars." Parce que Dahan, Schnabel, Téchiné, Miller, Satrapi ce ne sont pas des auteurs? tsss tsss, les médias aiment cultiver les préjugés mais aussi les postulats.

Les César de la dissension

Posté par vincy, le 22 février 2008

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Passage obligé dans tous les pays, les professionnels votent pour élire les meilleurs d'entre eux. La graine et le mulet, Prix Louis-Delluc, meilleur film selon les journalistes français, primé à Venise, semble favori. Même les exploitants en ont fait leur chouchou. Comme pour les Etoiles d'or, il a récolté quatre titres (les mêmes : film, réalisateur, scénario, espoir féminin). De même Persépolis semble être, pour les exploitants aussi, le meilleur premier film français. 236 responsables de salles ont pris part au vote.

Soit à peine plus que les 200 cinémas indépendants qui s'apprêtent à suspendre leur séance de ce vendredi soir, au moment de la soirée des César. Rideau et écran noir. Cette manifestation vise à exprimer le mal être et les inquiétudes d'une filière de plus en plus fragile et dont la politique publique semble friable. En jeu : la baisse fort probable des crédits alloués par les Directions Régionales des Affaires Culturelles. Laurent Delmas (France Inter) ne disait pas autre chose lors de la soirée des Etoiles d'or. "Certaines mesures récentes risquent de mettre en péril les actions décentralisées" que mènent les festivals. Un festival ce n'est pas seulement un caprice cinéphilique d'un maire, mais avant tout une action culturelle, intégrant le jeune public, les populations défavorisées, mélangeant l'éducation à la culture. Rendre vulnérable ces festivals (nombreux sont ceux qui doivent réduire la voilure cette année), c'est aussi un danger pour le patrimoine cinéphilique. Ces baisses de crédits contredisent la politique du Président de la République dans les deux cas - la pédagogie et le patrimoine . Le patrimoine, et les valeurs de la France, sont un slogan répété en permanence. L'éducation culturelle est au coeur de son programme électoral (qui proposait même d'intégrer le ministère de la Culture à celui de l'Education nationale) ; une mission a d'ailleurs été assignée à Eric Gross pour faire des propositions en ce sens.

Ce travail d'éducation à l'image est essentiel à une époque où tout est images. Cette diffusion "désintéressée financièrement" est indispensable pour que le 7e Art ne soit pas monopolisé par les multiplexes. Des petites salles encerclées par des grosses usines à pop corn, des festivals locaux qui perdent leur soutien budgétaire. Là encore les plus précaires trinquent.