Vesoul 2020 : Mariam au palmarès, Wet Season et Jinpa dans les salles

Posté par kristofy, le 19 février 2020

Le 26ème Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul, qui s'est tenu du 11 au 18 février, a pu compter sur ses fidèles et nouveaux spectateurs pour une nouvelle fois faire salles pleines (32200 spectateurs au total) pour plus de 80 films en provenance de 24 pays ! C'est plein succès pour la rétrospective sur le cinéma du Tibet avec en particulier l'ensemble des films des réalisateurs Pema Tseden et ceux de Sonthar Gyal (malheureusement absents à cause des difficultés à voyager depuis la Chine depuis le coronavirus), l'hommage à l'actrice Ronit Elkabetz, et la thématique "Liberté, Egalité, Créativité".

Wet Season de Anthony Chen et Jinpa de Pema Tseden sont à voir en salles dès ce mercredi 19 février :

Pema Tseden est le chef de file du cinéma du Tibet, il impose la langue Tibétaine dans ses films et même dans ses génériques. C'est le seul a avoir remporté deux fois un Cyclo d'or à Vesoul pour Tharlo et Jinpa. Ses films sont souvent découverts au Festival de Venise (Tharlo, Jinpa, et le suivant Balloon centré sur un couple déjà marié et une autre romance contrariée devrait connaître encore plus de succès). En attendant le dernier né, Balloon, et peut-être The sacred arrow d'avant (un tournoi de tir à l'arc où le meilleur archer d'un village est amoureux de la soeur du champion du village rival...), Jinpa sort aujourd'hui dans les salles françaises. On y découvre le chauffeur d'un camion sur une route déserte qui prend en stop un homme mystérieux qui dans un prochain village à l'intention de retrouver quelqu'un pour le tuer et se venger... Le cinéaste poursuit son expérimentation de très longs plans fixes. Rappelons que la production de Jinpa a été soutenue par Wong Kar-wai. Tendu et fascinant, le film est aussi beau qu'exigeant. C'est bien l'étrangeté du cinéma de Tsden qui lui donne une poésie alors qu'a priori nous sommes plongés dans un western absurde et radical...

De son côté, Anthony Chen avait été découvert au Festival de Cannes où son premier film Ilo Ilo de Singapour. Il avait remporté la Caméra d'or. Le voici plusieurs années plus tard qui accouche de son second film Wet Season (à lire ici) : une femme professeur dans un collège qui ne parvient pas à tomber enceinte doit faire face à un éloignement de son mari et à un élève qui s'imagine la séduire...

La compétition du FICA de Vesoul :

Les films en compétition montraient certes une parité homme/femme réalisatrice mais surtout la moitié d'entre eux étaient des premiers films : c'est justement ces nouveaux talents qui ont été récompensés par les différents jurys ! Mis à part le vétéran Prasanna Vithanage du Sri Lanka avec Children of the Sun (d'ailleurs curieusement oublié du palmarès), la plupart des films étaient des premières œuvres. Malgré la jeunesse de ces cinéastes, ces films ont, pour la plupart, raconter des histoires complexes de famille, centrées plutôt sur une génération bien plus âgée avec, comme personnage central, des mères (Hava, Maryam, Ayesha, Mariam) ou des grands-parents (Just like that, A Bedsore).

Un film cependant se distingue, avec un sujet plus moderne, l'escalade du harcèlement d'un écolier après la divulgation d'une vidéo accusatrice John Denver Trending. Il a d'ailleurs séduit le jury de la Critique et surtout le Prix du Public. Le jury des lycéens a préféré primer le film qui a eu le plus d'impact avec une réflexion sur la violence du terrorisme Saturday Afternoon, récompensé aussi par le jury NETPAC. Chacun des 9 films en compétition semblaient traversés par une même problématique : des gens qui se heurtent à des traditions du passé qu'il est de plus en plus difficile voir impossible à supporter (en particulier pour les femmes ou pour des personnes isolées).

Cyclo d'or pour Sharipa Urazbayeva, réalisatrice de Mariam

Le grand jury était présidé par Jay Jeon (directeur du Festival International du Film de Busan), avec Yuliya Kim (directrice du Festival International du Film d’Almaty, et productrice), Joji Alonso (productrice) et Ariel Schweitzer (critique) a créée la surprise pour la plus haute récompense le Cyclo d'or pour le film Mariam de la réalisatrice Sharipa Urazbayeva du Kazakhstan, en saluant ce "portrait poignant d’une femme en lutte pour la survie de sa famille dans une société traditionnelle".

Dans l'histoire des palmarès du FICA de Vesoul, seul un film du Kazakhstan avait reçu le Cyclo d'or. C'était en 2009 avec Un cadeau pour Staline de Roustem Abdrachev (il y avait eu en 2012 l'organisation d'un Regard sur le cinéma du Kazakh avec une vingtaine de films rares et la venue du réalisateur Ermek Chinarbev). C'est aussi rare que la récompense soit décernée à une réalisatrice, qui signe ici son premier film.

Ce Cyclo d'or pour Mariam est d'autant plus beau qu'il s'agit à priori de la production la plus fragile : l'actrice principale est non-professionnelle et joue en quelque sorte son propre rôle avec ses vrais enfants à l'image, le tournage a duré seulement 5 jours. Une femme se retrouve seule avec ses quatre enfants dans un village isolé avec des conditions de vie rudes, sans électricité ni eau courante : son mari ayant disparu, on lui a retiré le bétail qui était son gagne-pain, plus aucune ressource. Elle ne peut  prétendre à aucun versement d'allocation tant que le corps de son mari n'est pas retrouvé pour le certifier décédé. La seule solution a un prix et elle est illégale : avec certaines complicités, on peut reconnaître le corps d'un autre homme à la morgue pour débloquer le versement d'une allocation...

Mariam avait été repéré au Festival de Busan et sélectionné aussi à celui de Locarno. Il a maintenant triomphé à Vesoul :

Le Palmarès du FICA de Vesoul 2020 :

Cyclo d'Or : MARIAM de Sharipa Urazbayeva (Kazakhstan)

Grand prix du jury international : JUST LIKE THAT de Kislay (Inde)
Prix du jury international ex-aequo : JOHN DENVER TRENDING d’Arden Rod B. Condez (Philippines) & A BEDSORE de Shim Hye-jung (Corée) Prix NETPAC (Network for the promotion of asian cinema): SATURDAY AFTERNOON de Mostofa Sarwar Farooki (Bangladesh)

Prix de la critique : JOHN DENVER TRENDING d’Arden Rod B. Condez (Philippines)

Prix INALCO : A BEDSORE de Shim Hye-jung (Corée)
Coup de cœur INALCO : JUST LIKE THAT de Kislay (Inde)

Prix du public : JOHN DENVER TRENDING d’Arden Rod B. Condez (Philippines)

Prix du jury lycéen : SATURDAY AFTERNOON de Mostofa Sarwar Farooki (Bangladesh)

Prix du public du film documentaire : WE MUST CLOWN de Dima Al-Joundi (Liban)
Prix du jury jeune : A PUNK DAYDREAM de Jimmy Hendrickx & Kristian Van der Heyden (Belgique)
Prix des exploitants : A DARK DARK MAN d’Adilkhan Yerzhanov (Kazakhstan)

Vesoul 2019: Pema Tseden reçoit un 2ème Cyclo d’Or avec « Jinpa »

Posté par kristofy, le 13 février 2019

Le 25ème Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul, a soufflé les bougies de cet anniversaire symbolique avec la surprise de la révélation de son palmarès : le Cyclo d'Or a été attribué au film Jinpa du réalisateur Pema Tseden. Durant l'histoire du FICA de Vesoul c'est en fait la première fois qu'un cinéaste reçoit pour la seconde fois la plus haute récompense : Pema Tseden avait déjà reçu un Cyclo d'Or en 2016 pour son film Tharlo, sorti  en salles en janvier 2018.

Pema Tseden est n réalisateur originaire du Tibet, et Tharlo tout comme Jinpa, avait été découverts lors du festival de Venise. Leur point commun est d'ailleurs l'utilisation de certains très longs plans fixes. Ici le chauffeur d'un camion sur une route déserte prend en stop un homme mystérieux qui dans un prochain village à l'intention de retrouver quelqu'un pour le tuer et se venger... La production de Jinpa a été soutenue par Wong Kar-wai. Outre le Cyclo d'Or Jinpa reçoit aussi le Prix de la Critique, et un coup de coeur du jury Inalco.

Comme chaque année les films sélectionnés en compétition représentent des premiers ou seconds films, des œuvres en première européenne pour la plupart, parfois en provenance de cinéphilies rarement distribués en salles en France.

Pour cette année 2019, on croisait Rona Azim's mother de Jamshid Mahmoudi qui était le film candidat de l'Afghanistan à l'Oscar du meilleur film étranger (Grand prix du jury et Prix Inalco), His lost name premier film de la réalisatrice japonaise Hirose Nanako (assistante depuis plusieurs années de Kore-eda Hirokazu, palme d'or à Cannes 2018), African violet de la réalisatrice iranienne Mona Zandi Haghighi dont le premier film avait été primé à Vesoul en 2007...

Le Palmarès du Fica de Vesoul 2019 :

Cyclo d'Or : JINPA de Pema Tseden (Chine)
Grand prix du jury international : RONA AZIM’S MOTHER de Jamshid Mahmoudi (Afghanistan)
Prix du jury international : SUB-ZERO WIND de Kim Yu-ri (Corée du Sud)

Prix NETPAC (Network for the promotion of asian cinema): A FAMILY TOUR de Ying Liang (Hong Kong, Taïwan, Singapour, Malaisie)
Prix de la critique : JINPA de Pema Tseden (Chine)
Prix INALCO : RONA AZIM’S MOTHER de Jamshid Mahmoudi (Afghanistan)
Coup de cœur INALCO : JINPA de Pema Tseden (Chine)
Prix du public du film de fiction ex-aequo : AFRICAN VIOLET de Mona Zandi Haghighi (Iran) et WAITING FOR SUNSET de Carlo Enciso Catu (Philippines)
Prix du jury lycéen : AFRICAN VIOLET de Mona Zandi Haghighi (Iran)
Prix du public du film documentaire : CHINE DU SUD : UNE ROUTE POUR XIAO JIANG de Jean-Michel Corillion (Chine, France)
Prix du jury jeune : OF FATHERS AND SONS de Talal Derki (Syrie)
Prix des exploitants : SIBEL de Çagla Zencirci et Guillaume Giovanetti (Turquie)