César : l’audience s’effrite, l’ambiance se maintient

Posté par MpM, le 2 mars 2009

Antoine de CaunesLa 34e cérémonie des César diffusée en clair sur Canal + entre 21 h et 23 h a accusé une petite baisse de forme avec seulement 2,18 millions de téléspectateurs au rendez-vous (11,4% du total) contre 2,4 millions (11,9%) en 2008 et 2,3 millions (12%) en 2007. Le record d'audience de la Cérémonie demeure les 3,3 millions de téléspectateurs réunis en 2005 par le présentateur de l'époque, Gad Elmaleh.

Au mieux de la soirée (vers 23 h 10), Antoine de Caunes est tout de même parvenu à attirer 3,4 millions de personnes, juste avant la révélation des lauréats dans les catégories les plus prestigieuses, meilleur film, meilleur réalisateur et meilleurs acteurs. Certains spectateurs regardant la télé sur le réseau non hertzien (notamment free et numéricable) ont toutefois eu la mauvaise surprise d'être coupés avant la fin : en raison du retard pris par la cérémonie, le cryptage s'est automatiquement mis en route vers 23 h 30, heure à laquelle devait commencer le film programmé par Canal +...

On retiendra de cette soirée la tentative louable d'apporter un peu de légèreté à la litanie des prix avec une mention spéciale pour les fausses publicités mettant notamment en scène Carole Bouquet et Pilodent, un produit pour appareil dentaire, et Valérie Lemercier et Matranche, un jambon sulfureux... Moins réussis, voire complètement ratés, le reportage bébête sur la culture bio des César et surtout l'intervention de Julie Ferrier (singeant une actrice prête à tout pour réussir) lors de la remise du César du court métrage, prouvant une nouvelle fois le peu de respect accordé à cette catégorie pourtant prédominante du cinéma français (d'après Unifrance, la vente des courts métrages français à l'étranger aurait représenté au moins 300 000 euros en 2007, soit plus du double de 2006).

Côté personnalités, en plus de la présence glamour de Sean Penn et de Dustin Hoffman, on a remarqué la venue "inattendue" de Dany Boon qui a plutôt bien rattrapé son mouvement de mauvaise humeur de début février tandis que c'est une très touchante Julie Depardieu, tout de noir vêtue, qui a remis le César du second rôle masculin en rendant hommage à Guillaume Depardieu : "Ce qui m'anime, moi, ce soir, c'est l'âme de mon frère qui nous regarde peut-être." Enfin, plutôt insolite, l'apparition d'Arnaud Desplechin venu chercher le César du second rôle à la place de son acteur , qui a bafouillé un assez cocasse : "Je ne suis pas Jean-Paul Roussillon, je suis le réalisateur".

Une piste pour relancer l'intérêt du public l'an prochain ? Peut-être moins de blabla corporatiste et politiquement correct, au profit de propos intelligibles sur le cinéma, mais aussi plus d'extraits et de rencontres, voire de show, pour gommer l'aspect figé d'une cérémonie qui a de plus en plus l'air d'être exactement la même chaque année.

Le dilemme des récompenses posthumes

Posté par vincy, le 25 janvier 2009

ledger_williams_oscarsHeath Ledger dans la catégorie second rôle masculin aux Oscars, Guillaume Depardieu en lice pour le César du meilleur acteur... deux comédiens "cultes" cités de manière posthume. Ce n'est pas une première.

Peter Finch avait été récompensé par un Oscar du meilleur acteur en 1977. Sa veuve était venue chercher la statuette. De nombreux artistes - le scénariste Sidney Howard, le chef opérateur Conrad Hall, le musicien Bernard Herrmann - ont reçu des nominations posthumes aux Oscars. Edward G. Robinson et Audrey Hepburn ont même été primés par un Oscar humanitaire quelques mois après leur décès. Le cas le plus connu est évidemment James Dean, décédé en 1955 et cité aux Oscars de 1956 et 1957.

Les César ne sont pas en reste. Jean Gabin fut césarisé d'honneur en 1987, après sa mort. De même Gérard Philipe en 1990, en guise d'hommage. Serge Gainsbourg fut primé en 1996 pour la musique d'Elisa, et Geoffrey Unsworth ne pu jamais recevoir son César pour la photo de Tess en 1980.

Le dilemme est double : la récompense est-elle un hommage déguisé et donc fausse-t-elle l'intention du collège électoral? Qui peut s'approprier dignement un tel prix? Si, par exemple, Cassel, archi-favori, perd contre Guillaume Depardieu, n'y verra-t-on pas un subterfuge?

Pour Heath Ledger, il semble que les producteurs ont déjà tout prévu. L'ex-compagne de l'acteur, l'actrice Michelle Williams, et leur fille, Matilda, pourraient monter sur scène s'il gagne l'Oscar. Pour Michelle Williams, la victoire serait d'autant plus amère, qu'elle figurait parmi les favorites dans la catégorie actrice pour sa performance dans Wendy and Lucy. Elle n'a finalement pas été nommée.

On voit mal Christopher Nolan, le réalisateur du film pour lequel il est cité, Batman The Dark Knight, aller chercher l'Oscar. Lui a été clairement snobbé par l'Académie, alors que nombreux sont ceux qui considèrent ce Batman comme l'un des meilleurs films de l'année.

D'autres solutions s'offent aux producteurs : les parents de l'acteur, Christian Bale ou le producteur du film.

Aux César, si Guillaume Depardieu l'emporte sur Vincent Cassel, le clan Depardieu devrait faire l'affaire. Le père, la mère, la soeur. Mais la tradition française, qui déteste tant l'émotion pré-fabriquée, est de convier sur scène, en cas d'absence, le réalisateur, Pierre Schöller, ou le producteur du film (Géraldine Michelot). Le problème se posera surtout s'il ne gagne pas : comment ne pas faire doublon en cas de victoire, ne pas le passer sous silence en cas de défaite? La grande classe serait que Carax, Salvadori et Rivette viennent juste parler de lui...

Que ce soit le 22 février aux Oscars ou le 27 février aux César, cette année, les soirées glamour seront hantées par des fantômes.

14e Cérémonie des Lumières : le cinéma francophone sous les projecteurs

Posté par MpM, le 20 janvier 2009

Jeanne Balibar et Laurent CantetHollywood a ses Golden Globes, Paris a ses Lumières. Pour entamer la saison des récompenses cinématographiques 2009, les journalistes étrangers en poste dans la capitale remettaient lundi 19 janvier les 14e Prix Lumières du cinéma francophone. Sous la présidence de l’actrice Jeanne Balibar (ci-contre avec Laurent Cantet), ravissante et pleine d’humour, la cérémonie s’est déroulée dans une ambiance particulièrement décontractée en présence d’un parterre de stars. Emmanuelle Devos, Bruno Todeschini,  Sophie Guillemin, Elodie Bouchez ou encore Jonathan Zaccaï ont ainsi défilé sur scène pour remettre les fameuses "panthères d’or" qui, d’après Vincent Cassel, ressembleraient plutôt à des jaguars...  De son côté, la journaliste Estelle Martin (TV5 Monde) a fait face avec amusement et naturel aux inévitables contretemps, des  élèves d’Entre les murs qui ne voulaient plus quitter le buffet du cocktail aux photographes qui n’en finissaient plus de shooter Anna Mouglalis ou Nora Arnezeder.  Qui a dit que ce genre de cérémonie est forcément ennuyeuse et guindée ?!

SéraphinePour ce qui est des récompenses en elles-mêmes, peu de surprises. Laurent Cantet a logiquement reçu le Prix du meilleur film (ainsi que celui du Public mondial TV5Monde) pour Entre les murs, Yolande Moreau (ici avec Bruno Todeschini) a été sacrée meilleure actrice pour Séraphine de Martin Provost et Vincent Cassel (ci-dessous avec Emmanuelle Devos) meilleur acteur pour le diptyque Mesrine par Jean-François Richet. On retrouvera probablement les mêmes noms aux Etoiles d’or (les prix de la presse française) le 9 février prochain (ils sont tous les trois dans la liste des finalistes) et dans les nominations aux César qui seront annoncées à la fin du mois.

Vincent Cassel et Emmanuelle DevosPeut-être plus inattendu, c’est François Dupeyron (ci-dessous avec Elodie Bouchez) qui obtient le titre de meilleur réalisateur pour Aide-toi, le ciel t’aidera,(devant Laurent Cantet, Arnaud Desplechin, Martin Provost et Jean-François Richet) et Samuel Benchetrit (J’ai toujours rêvé d’être un gangster) celui de meilleur scénariste. Les Lumières des meilleurs espoirs sont quant à eux allés à Nora Arnezeder (Faubourg 36 de Christophe Barratier), qui bat la grande favorite Léa Seydoux (La Belle Personne de Christophe Honoré), et à Mohamed Bouchaïb (Mascarades de Lyes Salem). Enfin, les frères Dardenne remportent le prix du Meilleur film francophone (hors de France) pour Le silence de Lorna (face à Faro, la reine des eaux de Salif Traoré, Rumba de Dominique Abel, Fiona Gordon, Bruno Romy, Home d’Ursula Meïer et Johnny Mad Dog de Jean-Stéphane Sauvaire ), la "classe la plus célèbre de France" bénéficie d’une François Dupeyronnomination spéciale pour Entre les murs et Agnès Godard (directrice de la photographie de Claire Denis, Catherine Corsini, Noémie Lvovsky….) est distinguée par le Prix spécial de la Commission supérieure technique de l’image et du son pour l’ensemble de son œuvre.

La soirée a également été l’occasion de regarder vers le passé, avec des hommages à deux grands disparus du cinéma français, Claude Berri et Guillaume Depardieu, et vers l’avenir, avec la projection de deux courts métrages : On the train de Barnabas Toth et Toi que j’eusse aimée d’Emmanuel Broussouloux.

 Crédit photo : Régis d'Audeville.

Guillaume Depardieu, la fin d’une promesse fragile

Posté par vincy, le 13 octobre 2008

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Guillaume Depardieu est né en 1971. Le fils de Gérard et Elizabeth aura oscillé entre la chance et la poisse du hasard. Une vie où public et privé sont étroitement mêlés, vacillant une première fois en 1995 suite à un accident de moto qui, huit ans plus tard, le conduira à amputer une partie de sa jambe. Elle basculera définitivement ce 13 octobre 2008, suite à une pneumonie foudroyante attrapée sur un tournage.

César du meilleur espoir (Les apprentis) après deux tentatives malchanceuses, le comédien, lauréat du prix Jean Gabin en 1996, avait tout donné pour sortir de l'ombre de son père envahissant. C'est pourtant à ses côtés dans Tous les matins du monde, qu'il se fait un prénom. En interprétant Marin Marais jeune devant la caméra d'Alain Corneau, il fait un temps oublier les faits divers liés à son nom pour s'imposer comme le véritable acteur de talent qu'il sait être. Par la suite, il trouve ses rôles les plus populaires à la télévision avec Josée Dayan (Le comte de Monte Christo, Milady, Les rois maudits...) mais ce sont Pierre Salvadori, Léos Carax ou encore Jacques Rivette qui l'ont entraîné dans un cinéma d'auteur exigeant où sa nature attachante, tantôt dramatique (Ne touchez pas la hache), tantôt légère (Comme elle respire) trouve toute son ampleur.

Récemment, il était à l'affiche de Versailles, présenté au dernier festival de Cannes, où il apparut amaigri, flottant dans des vêtements trop larges, mi-agressif, mi-désespéré, comme partageant la souffrance de son personnage de SDF torturé et fragile se faisant violence pour aider un jeune enfant. On l'a vu également dans Stella, projeté à Venise, où il incarne une fois encore un homme paumé n'attendant plus grand chose de la vie. Animal blessé, homme fragile, il s'était confié dans un livre d'entretien avec Marc-Olivier Fogiel. Tout donner. Mais quoi recevoir ? Le destin le pulvérise.